vendredi 25 octobre 2019 - par Fergus

Boronali ou le triomphe de l’ânerie dans la peinture

À Paris, sur la butte Montmartre, vivait au début du siècle dernier un certain Lolo. Doté d’une nature avenante malgré un caractère parfois rétif, Lolo fréquentait de nombreux artistes et hommes de lettres dans ce temple de la créativité qu’était alors la célèbre Butte aux moulins. Un jour, Lolo s’est mis à peindre, encouragé par quelques-uns de ses amis. Lolo n’a réalisé qu’un seul tableau. Mais quel tableau ! Incontestable vedette du Salon des Indépendants de 1910, cette œuvre a laissé une trace indélébile dans l’histoire de l’Art…

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Et le soleil s’endormit sur l’Adriatique

On ne saurait évoquer la mémoire de Lolo sans parler du Lapin Agile, le célèbre cabaret montmartrois concurrent du non moins réputé Chat Noir, tous deux très prisés par de nombreux artistes. Situé à l’angle des rues des Saules et Saint-Vincent, le cabaret doit son nom à l’un de ses habitués, le talentueux caricaturiste André Gill qui, en 1875, en dessina l’enseigne – un lapin bondissant hors d’une casserole – en s’inspirant du fameux « lapin sauté » qui réjouissait les papilles des clients et avait fait la réputation du lieu. L’enseigne du Lapin à Gill est encore visible au musée de Montmartre.

En 1903, le cabaret, devenu le Lapin Agile par altération du nom, est acheté par Aristide Bruant, cet auteur-compositeur-interprète en vogue qui a mis en chansons les quartiers de Paris et popularisé Nini Peau d’chien. Le chansonnier confie la gérance du cabaret à Frédéric Gérard. Chanteur lui-même et musicien – il joue de la guitare et du violoncelle –, celui que l’on appelle familièrement « Le père Frédé » fait en quelques mois du cabaret le rendez-vous préféré de « la bohème ». Autrement dit, de tous ces artistes, plus ou moins fauchés, qui se soutiennent et s’entraident en attendant de connaître la gloire. Ces inconnus s’appellent Apollinaire, Braque, Caran d’Ache, Carco, Derain, Dorgelès, Dullin, Jacob, Mac Orlan, Modigliani, Picasso, Utrillo, et d’autres encore. Sans oublier Lolo !

Lolo, mais aussi le critique d’art André Warnod et le dessinateur Jules Depaquit, futur fondateur (en 1920) de la Commune libre de Montmartre. C’est à ces deux-là que le jeune écrivain Roland Dorgelès, peu ouvert aux audaces de la peinture du moment – il n’apprécie guère le « fauvisme », ni le « futurisme » – propose de monter un canular, excédé qu’il est par l’injuste notoriété faite, selon lui, à des artistes médiocres au détriment des vrais possesseurs de talent. L’objectif de ce canular, auquel se joignent quelques autres farceurs : démontrer que le premier venu peut exposer au Salon des Indépendants et se faire un nom, soutenu par des critiques imbéciles ou des marchands ignares. Encore faut-il trouver un barbouilleur anonyme et sans talent dans ce Montmartre de la Belle Époque. Réflexion faite, la réalisation de l’œuvre sera confiée à un béotien dénommé Lolo.

Lolo, roi du pinceau !

Quelques jours plus tard, le 8 mars 1910, Dorgelès se retrouve dans la cour du Lapin Agile avec quelques amis. Une toile vierge a été positionnée sur une chaise faisant office de chevalet. Quatre pots de peinture ont été disposés au sol : du bleu, du vert, du jaune et du rouge. Chose inhabituelle, un huissier de justice, Me Paul-Henri Briomme, a été mandaté pour assister à la création du tableau et pouvoir en témoigner par la suite. Lolo est alors amené sur place par le Père Frédé, et le travail commence. Une demi-heure plus tard, le tableau est achevé. Les compères, satisfaits du résultat, félicitent chaleureusement l’artiste et baptisent cette œuvre colorée « Et le soleil s’endormit sur l’Adriatique ». La toile peinte, une photo immortalise l’événement. Outre Lolo, figurent masqués sur le cliché le critique d’art Jean Aubry, la chanteuse Coccinelle*, Roland Dorgelès, le caricaturiste Charles Genty, le peintre Pierre Girieud et André Warmod. À droite du cliché, le Père Frédé tend une friandise à Lolo. À gauche se tient un jeune garçon : le futur compositeur Georges Auric, complice du canular.

Lorsque s’ouvre, le 26 mars 1910, le Salon des Indépendants, la toile figure dans la salle 22 d’une exposition qui compte nombre d’œuvres signées par des artistes reconnus comme Alexander Archipenko, Maurice Denis, Amedeo Modigliani, Paul Sérusier, Marie Vassilieff ou Maurice de Vlaminck. Le catalogue indique que le tableau exécuté par Lolo est la création d’un certain « Joachim Raphaël Boronali, peintre né à Gênes ». Les amateurs d’art se pressent dans les allées et ne manquent pas d’être interpellés par l’inspiration de l’artiste italien. D’autant plus que, le 1er avril, l’on peut lire, dans le magazine satirique et grivois Fantasio, ce Manifeste de l’Excessivisme, également signé Boronali : « Holà ! grands peintres excessifs, mes frères, holà, pinceaux sublimes et rénovateurs, brisons les ancestrales palettes et posons les grands principes de la peinture de demain. Sa formule est l’Excessivisme. L’excès en tout est un défaut, a dit un âne. Tout au contraire, nous proclamons que l’excès en tout est une force, la seule force… Ravageons les musées absurdes. Piétinons les routines infâmes. Vivent l’écarlate, la pourpre, les gemmes coruscantes, tous ces tons qui tourbillonnent et se superposent, reflet véritable du sublime prisme solaire : Vive l’Excès ! Tout notre sang à flots pour recolorer les aurores malades. Réchauffons l’art dans l’étreinte de nos bras fumants ! »

Peu après ce nouveau coup d’éclat, Dorgelès se rend dans les locaux du journal Le Matin. Et c’est avec délectation que la direction de ce quotidien publie dès le lendemain un article dans lequel la supercherie est dévoilée, constat d’huissier à l’appui. L’affaire fait naturellement grand bruit dans les milieux artistiques. Et cela d’autant plus que la personnalité du véritable peintre est révélée : il se nomme en réalité Lolo et n’est autre que… l’âne du Père Frédé ! Un âne auquel les trois compères avaient fixé un pinceau à la queue, avant de le tremper alternativement dans les différents pots de couleur. Lolo, motivé par quelques carottes, des feuilles de tabac dont il raffolait, et les caresses d’encouragement des iconoclastes plaisantins, avait fait le reste en marquant sa satisfaction à grands coups de queue sur la toile.

L’opinion est divisée en deux camps : d’un côté, ceux que cette « farce de rapin** » scandalise et qui vitupèrent les imposteurs ; de l’autre, ceux que cette mystification réjouit et qui s’en délectent ostensiblement. En quelques jours, rebaptisée par la presse «  Coucher de soleil sur l’Adriatique  », la toile devient la vedette du Salon des Indépendants, celle qu’il faut avoir vue, celle dont parle le Tout-Paris intellectuel, ici en débats passionnés sur le marché de l’Art, là dans des successions d’éclats de rire moqueurs. Quant à Dorgelès, auteur apocryphe du Manifeste de l’Excessivisme, il observe tout cela avec un ravissement non dissimulé.

Le tableau est finalement vendu aux enchères. Il est acheté 20 louis d’or par un artiste-collectionneur dénommé André Maillos, soit 400 francs de l’époque. Une somme aussitôt remise par Dorgelès à l’Orphelinat des Arts pour financer son œuvre de charité. En 1953, le tableau est cédé à un riche collectionneur, Paul Bédu. À la mort de ce dernier en 1990, l’ensemble de sa collection est légué à la ville de Milly-la-Forêt (Essonne). Le Coucher de soleil sur l’Adriatique, toujours la propriété de cette commune, figure depuis l’an 2000 dans les collections permanentes de l’Espace culturel Paul Bédu (entrée gratuite). Parmi les 200 œuvres exposées, le fameux Boronali y côtoie notamment celles de Marie Laurencin et Jean Cocteau ainsi que des lithographies et sérigraphies de Niki de Saint Phalle.

D’Al-Biruni à Aliboron

Cette anecdote cocasse est, de nos jours, encore souvent évoquée dès qu’il est question de définir ce qu’est une œuvre d’art, ou bien encore de dénoncer les abus du marché. Depuis 1910, les supercheries et les provocations susceptibles d’alimenter ces vastes et vieux débats se sont pourtant multipliées. Parmi les plus célèbres de ces provocations, la fameuse « Fontaine » de Marcel Duchamp qui n’est rien d’autre qu’un banal urinoir renversé ! Un Duchamp d’ailleurs récidiviste si l’on en juge par sa Joconde portant moustache et barbichette sur un tableau dénommé (en lettres à épeler) « L.H.O.O.Q. »  !

Les années passant, les mystifications et les provocations en tous genres se sont même tellement banalisées que l’on aurait pu croire difficile de renouveler le genre depuis que Piero Manzoni, un peintre italien en mal de notoriété, a décidé en 1961 d’exposer des boîtes de ses propres excréments pour atteindre une renommée internationale qui le fuyait. C’était compter sans Shigeko Kubota, cette « artiste » qui, la brosse fichée dans son intimité, a inventé en 1965 les « Vagina Paintings***  » (photo). Il s’agissait là, dit-on, d’une réponse à Yves Klein – déjà célèbre pour ses « monochromes de peintre en bâtiment » – qui, quelques années plus tôt, avait mis en pratique les concepts d’« anthropométrie picturale » et de « peinture menstruelle » ! Et que dire de Tim Patch, alias Pricasso, qui peint depuis des années avec son pénis (vidéo) ?

Ces « peintres » ont fait école en suscitant des vocations ici et là, notamment dans la provocation religieuse et sociale. Ce choix a plutôt bien réussi à Alfred Courmes qui bénéficie d’une belle notoriété depuis qu’il a peint en 1984 « L’armée protège la liberté la liberté du travail », une toile montrant, entre autres pieds de nez, la petite fille de la publicité du Chocolat Meunier explorant de sa main droite les dessous du pagne du Christ en croix ! Autre provocateur, Giuseppe Veneziano dont la « Madone du IIIe Reich » (2010) montre une Vierge tenant un Hitler en uniforme nazi en lieu et place de l’enfant-Jésus ! Mais on est très loin, avec ces provocations picturales, de la cote extravagante des plasticiens Anish Kapoor et Jeff Koons dont les « œuvres » très contestées – par exemple l’immonde Dirty Corner, alias le « Vagin de la Reine » – doivent beaucoup moins à de géniales inspirations artistiques qu’à de solides plans marketing et à la complicité d’intellectuels décadents et de milliardaires avides de spéculation.

Dorgelès et ses amis ont été des précurseurs emblématiques avec le Coucher de soleil sur l’Adriatique de Lolo. Et si la notoriété de ce tableau n’est plus à faire, le grand public connaît moins en revanche l’origine du nom Aliboron dont Boronali constitue un plaisant anagramme qui a échappé à la sagacité de tous les critiques de l’époque. Certes, tous les écoliers ont, un jour ou l’autre, entendu parler d’un âne ainsi nommé en étudiant les fables de La Fontaine, et notamment celle intitulée « Les voleurs et l’âne  ». Mais il est probable que le fabuliste n’a pas lui-même inventé ce nom : sans doute pré-existait-il dans les discussions versaillaises où des courtisans très imbus d’eux-mêmes se plaisaient à brocarder les intellectuels « mahométains ». Parmi ces… têtes de turc figurait un certain Al-Biruni, l’un des plus brillant esprits de la Perse médiévale. Mathématicien, physicien, astronome, philosophe, Al-Biruni avait produit des ouvrages de très grande qualité qui ont longtemps fait référence avec ceux du grand Omar Khayyam. Des ouvrages à l’évidence beaucoup trop hermétiques pour ces aristocrates infatués qui, par dérision teintée de racisme, ont fait d’Al-Biruni un… âne savant. La corruption du nom a fait le reste.

Cela fait belle lurette qu’il n’y a plus d’âne dans la cour du Lapin Agile, et les peintres de la place du Tertre n’ont désormais plus qu’un très lointain rapport avec leurs prestigieux aînés. Et pour cause : s’ils ont toujours, comme leurs prédécesseurs, le verbe haut et la palette en main, la majorité de leur production est exécutée, à des milliers de kilomètres de là, par des anonymes dans des ateliers... chinois. Qu’à cela ne tienne, à la pointe du matin, lorsque les touristes ne sont pas encore descendus de leurs cars, il fait toujours aussi bon flâner rue des Saules ou sous les frondaisons printanières de l’allée des Brouillards. Avec, dans les yeux les décors de Maurice Utrillo, et dans la tête la voix nostalgique de Cora Vaucaire :

« Les escaliers de la butte sont durs aux miséreux,

Les ailes des moulins protègent les amoureux… »

* « Coccinelle » est le nom de scène de Suzanne Turtach, la future femme du Consul de Suède Raoul Nordling.

** Le mot rapin est tombé en désuétude. Il désignait autrefois un peintre raté, un barbouilleur sans talent.

*** L’expression « Vagina Painting » est en réalité ambiguë car elle désigne aussi bien une peinture qui représente un sexe féminin qu’une peinture réalisée avec un pinceau dans le vagin ! Il arrive que l’on parle également de « Pussy Painting ».

Note : Cet article est une reprise, largement modifiée et complétée, d’un texte de février 2009

Autres articles consacrés à la peinture :

Courbet et « Le retour de la conférence »

Sofonisba Anguissola : « La partie d’échecs »

Élisabeth Vigée-Lebrun : un hommage mérité !

Quand Van Meegeren peignait des Vermeer

Injustement oubliée : Lavinia Fontana

Audubon : ornithologue de talent, peintre de génie

Mademoiselle Capet (Gabrielle Capet)

Catharina van Hemessen, la pionnière oubliée

Adelaïde (Adélaïde Labille-Guiard)

Sofonisba (Sofonisba Anguissola)

Artemisia (Artemisia Gentileschi)

Autre article sur Montmartre :

Montmartre : bienvenue au 12 rue Cortot

 

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Dorgelès, ses amis et le peintre Lolo
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Le Père Frédé et Lolo
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Le Lapin Agile par Maurice Utrillo


31 réactions


  • Séraphin Lampion Séraphin Lampion 25 octobre 2019 08:51

    Bonjour Fergus.

    Pourquoi n’avez-vous pas évoqué l’épilogue tragique de cette aventure artistique ? Il parait qu’après le décès du père Frédé, son âne Lolo a été placé en pension en Normandie. Il fut retrouvé mort noyé dans un étang. Les gens de l’époque et les gendarmes locaux ont pensé que l’animal s’était suicidé.


    • Fergus Fergus 25 octobre 2019 09:03

      Bonjour, Séraphin Lampion

      Effectivement, Lolo est mort à Saint-Cyr-sur-Morin (77), noyé dans le Petit Morin, à deux pas de la propriété des Armenats où s’était retiré le Père Frédé.
      On a effectivement dit que Lolo s’étais « suicidé » par nostalgie de Montmartre.
      Mais une autre version a couru : Lolo, émoustillé par la présence d’une ânesse sur l’autre rive, aurait tenté la traversée et en serait mort.
      Pauvre Lolo ! smiley


    • pemile pemile 25 octobre 2019 09:48

      @Fergus "Effectivement, Lolo est mort à Saint-Cyr-sur-Morin (77), noyé dans le Petit Morin, à deux pas de la propriété des Armenats où s’était retiré le Père Frédé."

      Et à deux pas de l’auberge de l’Oeuf dur, tenu par Julien Callé et Frédé, où la joyeuse bande des Ovoduriens simulaient une attaque du train amenant les artistes montmartrois venant de Paris pour les ouikènes.


    • Fergus Fergus 25 octobre 2019 09:51

      Bonjour, pemile

      Oui, vous avez raison de rappeler l’existence de ce cabaret qui a été un prolongement campagnard de Montmartre et un lieu de rencontre lui aussi très prisé des joyeux lurons de la bohême. 


  • troletbuse troletbuse 25 octobre 2019 10:30

    @Fergus

    Le canular est bien connu. Mais l’article aurait été plus intéressant si vous nous aviez montré le tableau que vous avez peint de la même façon qu’Aliboron.

    On aurait ainsi pu comparer qui était le plus âne des deux.

    Sans rancune  smiley


    • Fergus Fergus 25 octobre 2019 13:00

      Bonjour, troletbuse

      Etant dépourvu d’appendice caudal, il me serait bien difficile d’imiter la technique de Lolo.
      Quant à reprendre à mon compte celle de Tim Patch alias Pricasso, très peu pour moi.
      Désolé !


    • troletbuse troletbuse 25 octobre 2019 13:16

      @Fergus
      Que de mauvaise foi Fergus. Je ne vous ai pas parlé d’appendice caudal  smiley


    • Fergus Fergus 25 octobre 2019 15:37

      @ troletbuse

      Je n’ai pas votre talent : pour peindre mon avatar, je n’ai utilisé que des brosses et des pinceaux très classiques, achetés pour la plupart chez Rougier & Plé


    • Fergus Fergus 25 octobre 2019 15:50

      @ exol

      « votre avatar est une croute innommable »

      Et c’est sans doute pourquoi ce tableau, présenté au ministère des Postes japonais dans le cadre d’un concours en vue de sortir un timbre sur le thème de l’Homme, n’a pas gagné. Sniff ! smiley

      Pour ce qui est de la musique, par chance pour mes compatriotes, je ne compose pas ! smiley


    • troletbuse troletbuse 25 octobre 2019 16:45

      @Fergus
      Il est exact qu’on peut également utiliser le mot « queue » ou « pinceau »  smiley


    • troletbuse troletbuse 25 octobre 2019 17:00

      @Fergus
      Pour la brosse, on peut dire aussi : « Se faire brosser »  smiley


  • ZenZoe ZenZoe 25 octobre 2019 10:43

    Je dois dire que le tableau de Lolo ne déparerait pas dans mon salon, il me plaît bien, et j’aime bien les ânes aussi !.Oeuvre d’art ? Pourquoi pas, l’âne ayant exprimé ainsi son plaisir d’être caressé et entouré (ça devait lui changer des coups de pied pauvre bête), or dans l’art il est question d’expression de soi non ?

    Sériseument, définir une oeuvre d’art est ardu, les spécialistes de la question s’arrachent les cheveux depuis des lustres, et l’arrivée de nouvelles technologies complique tout. L’appréciation était déja assez dure avec les goûts personnels des uns et des autres, les modes d’une époque donnée, la maîtrise du medium et la force d’expression de l’artiste !

    Alors peut-être son universalité, à travers le temps et les cultures ? Tout le monde je crois s’est mis d’accord sur les peintures de Lascaux ou la Vénus de Lespugue, ça doit vouloir dire quelque chose.


    • Séraphin Lampion Séraphin Lampion 25 octobre 2019 11:50

      @ZenZoe

      Oui, mais la queue de Lolo était manipulée par les rigolos qui choisissaient aussi les couleurs. Attribuer cette « oeuvre » à Lolo est aussi aberrant que d’attribuer l’existence de votre ordinateur aux robots qui l’ont fabriqué !


    • Fergus Fergus 25 octobre 2019 13:03

      Bonjour, ZenZoe

      « peut-être son universalité, à travers le temps et les cultures ? »

      Bonne observation. Le temps est très souvent un excellent tamis pour séparer l’authentique du frelaté.


    • Fergus Fergus 25 octobre 2019 13:13

      @ Séraphin Lampion

      « la queue de Lolo était manipulée par les rigolos »

      Ce n’est pas ce qu’a dit l’huissier (dont la prestation coûta 18 francs 40 centimes) :

      « L’âne fut ensuite amené et tourné devant la toile, et M... maintenant le pinceau à la queue de l’animal, le laissa par ses mouvements barbouiller la toile en tous sens, prenant seulement le soin de changer la couleur du pinceau et de le consolider. »

      En réalité, seul le fond avait été préalablement été recouvert d’aplats de couleur par lesdits farceurs. Faute de mention contraire de Me Briomme, le reste semble bien avoir été l’oeuvre de Lolo ! smiley


  • Surya Surya 25 octobre 2019 11:37

    « les peintres de la place du Tertre n’ont désormais plus qu’un très lointain rapport avec leurs prestigieux aînés. Et pour cause : s’ils ont toujours, comme leurs prédécesseurs, le verbe haut et la palette en main, la majorité de leur production est exécutée, à des milliers de kilomètres de là, par des anonymes dans des ateliers... chinois. »


    Je trouve votre jugement des peintres de la place du Tertre très dur. Lorsque nous venons à Paris, nous allons souvent à Montmartre car nous adorons ce quartier, malgré les changements regrettables qu’il a subis (mais au moins il n’y a toujours pas de McDo, c’est déjà ça, et le Starbucks n’est pas trop visible et plutôt bien intégré dans son environnement). Nous y allons pour flâner, et papoter avec les peintres de la place du Tertre. Le plus long qu’on est restés à discuter avec un peintre, je crois que c’était deux heures !

    Certains nous ont en effet confirmé qu’il y a des productions chinoises qui se baladent sur le marché montmartrois, mais que ce n’est pas fait avec leur accord, l’un d’eux nous a même dit qu’il avait été copié et ne pouvait rien toucher financièrement en contrepartie. Je trouve ça dégueulasse de leur faire ça, mais pour certains, business is business, le reste ils s’en fichent.

    Un autre nous a raconté que très peu de peintres vivent encore à Montmartre même, comme autrefois, parce que les prix des logements, même des chambres, leur est devenu inaccessible, que certains vivent même à l’hotel et doivent vendre au moins un truc chaque jour pour s’assurer d’avoir un toit au dessus de leur tête le soir. D’autres s’en sortent mieux, voire bien, heureusement. Certains peintres sont là depuis très longtemps et ont énormément de choses à raconter car ils connaissent le quartier et son histoire comme leur poche.


    Sinon, votre article est vraiment intéressant, et très agréable à lire. Merci  smiley


    • Fergus Fergus 25 octobre 2019 13:15

      @ Raymond75

      C’est vrai pour la plupart d’entre eux, mais pas tous. C’est d’ailleurs pourquoi les rares vrais peintres demandent en vain depuis des années que les copies venues d’Asie soient estampillées au dos « Made in China »


    • Fergus Fergus 25 octobre 2019 13:36

      Bonjour, Surya

      Je ne sais pas si j’ai été « dur ». Mais le fait est que les choses ont bien changé sur la place du Tertre. L’un de mes amis peintres, un croate, a lui-même fait partie de ces artistes de Montmartre qui vendaient leur production sur la célèbre place. Lorsqu’il en est parti il y a plus d’un quart de siècle, le virage commercial s’appuyant sur des copies rapidement exécutées par des petites mains avec finition sur la place du Tertre par les vrais « artistes » était déjà pris.

      Ce n’est qu’au tournant du siècle qu’a commencé à se poser le problème des toiles peintes en Chine par des copistes qui, le plus souvent recopient à la chaîne sur commande  des cartes postales de sujets comme le Sacré-Coeur, la Tour Eiffel ou la place des Vosges, le tout mis en forme dans le « style montmartrois ».

      Le plus amusant aux yeux des « artistes » de la place du Tertre, c’est de vendre cher à des Chinois des tableaux achetés pour une bouchée de pain à des copistes eux-mêmes chinois de la région de Shenzen !

      En fait, il reste de vrais artistes sur la place du Tertre, mais si peu !

      Merci à vous pour votre appréciation du texte !


    • Surya Surya 25 octobre 2019 13:50

      @Fergus

      Alors on a eu la chance de parler avec des vrais de vrais, parce que celui qui nous a dit qu’il avait été copié, la tête qu’il faisait en disant ça, je peux vous dire qu’il faisait pas semblant.

      Passez une bonne journée  smiley


    • ZenZoe ZenZoe 25 octobre 2019 14:11

      @Fergus
      Le plus amusant aux yeux des « artistes » de la place du Tertre, c’est de vendre cher à des Chinois des tableaux achetés pour une bouchée de pain à des copistes eux-mêmes chinois de la région de Shenzen !

      Oui, ça me fait bien marrer et c’est la même chose pour beaucoup de produits qu’ils achètent d’ailleurs, des foulards et tours eiffels rue de Rivoli à des sacs et chaussures haut de gamme bd Haussmann... Ca m’étonne même qu’ils ne le sachent pas !

      Ceux qui doivent bien se marrer aussi ce sont les petites mains en Chine peignant à longueur de journée des cartes postales (j’ai vu plusieurs reportages à ce sujet) qui seront fourguées à leurs élites comme authentiques oeuvres françaises. La revanche des pauvres en quelque sorte, et ça me plaît bien smiley


    • Fergus Fergus 25 octobre 2019 15:33

      Bonjour, ZenZoe

      « La revanche des pauvres en quelque sorte, et ça me plaît bien » 

      Moi aussi. Et cela d’autant plus que, de manière générale, ce sont des Chinois friqués qui sont les gogos de cette marchandisation de produits « Made in China » recyclés dans des sacs griffés d’enseignes parisiennes.

      Cela dit, la France continue de faire rêver beaucoup de Chinois, y compris dans les milieux populaires. A cet égard, je vous conseille le très dérangeant film Fleur amères, encore sur les écrans. 


  • Captain Marlo Fifi Brind_acier 25 octobre 2019 11:39

    La suite de la vidéo sur la CIA et la culture pendant la guerre froide, c’est cette vidéo : « L’imposture de l’art contemporain. »


  • jymb 25 octobre 2019 13:20

    Les amis, ne me dites pas que vous ne connaissez pas Prickasso ?

    La queue a des prolongements insoupçonnés 

    https://www.youtube.com/watch?v=PDxFGXJiTPk


    • Fergus Fergus 25 octobre 2019 13:40

      Bonjour, jymb

      Merci pour cette édifiante vidéo qui complète celle que j’ai mise en lien dans l’article.
      Comme dirait Tim Patch « Autant en emporte le gland ! » 


    • troletbuse troletbuse 25 octobre 2019 22:09

      @Fergus
      Vous avez vu Fergus, pas besoin d’un appendice caudal  smiley
      J’espère que vous avez regardé plus loin : la deuxième vidéo est nulle mais ensuite cela chaîne sur nos femmes guitaristes exceptionnelles dont de françaises comme Tina, un régal


  • gruni gruni 26 octobre 2019 08:14

    Bonjour Fergus

    Juste une question. C’est quoi l’art ?

    Question subsidiaire. A quoi reconnaît-on un artiste ?

    L’article est excellent.


    • Fergus Fergus 26 octobre 2019 09:02

      Bonjour, gruni

      Merci !

      « C’est quoi l’art ? »

      Une question à laquelle il n’a jamais été répondu de manière claire et définitive tant les réponses apportées par les intellectuels ont été, et sont encore, différentes et parfois contradictoires.

      En ce qui me concerne, je dis simplement que la définition de l’art est avant tout une question personnelle liée à la sensibilité de chacun.


      « A quoi reconnaît-on un artiste ? »

      Pour moi un « artiste » n’est pas un individu qui s’autoproclame comme tel  et il n’en manque pas ! —, mais toute personne dont l’oeuvre est capable de toucher la sensibilité d’un public.


    • JC_Lavau JC_Lavau 26 octobre 2019 09:12

      @gruni. L’art ? Ensemble de techniques pour s’emparer des émotions d’autrui et les mener par le bout du nez.


    • Fergus Fergus 26 octobre 2019 09:58

      Bonjour, JC_Lavau

      Désolé, mais c’est réducteur et même caricatural.
      A toutes les époques, des hommes ont en effet éprouvé le besoin de représenter le monde dans lequel ils vivaient : paysages emblématiques ou sacrés, animaux, humains.
      Et depuis l’antiquité, les hommes appartenant aux classes dominantes ou aisées ont entrepris de décorer leurs habitats avec des mosaïques, des peintures ou des sculptures. De ces périodes datent les artisans et les commandes à des artistes. 

      De fait, l’enrichissement des classes aisées a généré la marchandisation des oeuvres. Mais sans faire totalement disparaître le besoin de création initial et sincère. Il y a toujours personnes qui dessinent, peignent, sculptent sans se soucier de faire carrière dans l’Art.

      Quant aux artistes cotés, ils ne sont pas tous  loin s’en faut des gens prêts à tout pour le fric.


    • gruni gruni 26 octobre 2019 11:02

      @Fergus

      Merci pour tes réponses Fergus, il est vrai comme tu l’écris que la perception de l’art est très personnelle. Il y a aussi des artistes sur un terrain de foot, Pelé ou Platini. Et même sur ago, Lavau est un artiste inimitable dans son genre, pourtant la concurrence est redoutable sur ce site.


    • Fergus Fergus 26 octobre 2019 11:05

      @ gruni

      « Lavau est un artiste inimitable dans son genre, pourtant la concurrence est redoutable sur ce site »
       smiley


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