mercredi 24 février 2010 - par Theothea.com

« David & Edward » confrontent Michel Aumont & Michel Duchaussoy

Est-ce que le secret d’une relation durable ne réside pas en une pointe de torture ? ». C’est ainsi que David, en ultime réplique à la pièce de Lionel Goldstein, interroge Edward, devenu, un an après leur rencontre initiale près d’une tombe à Manhattan, ce compagnon indispensable au souvenir partagé de leur bien aimée disparue.

En effet, l’un était le mari de Florence, l’autre l’éternel amoureux de Flo, tous deux étaient sous l’emprise du charme de l’épouse et de la muse respective.

Etait-ce la même femme ? Etait-elle autre avec chacun des deux ? C’est ce cheminement du coeur et de l’entendement que les deux septuagénaires vont parcourir de l’enterrement au premier anniversaire, du cimetière à leurs retrouvailles.

David et Edward pourraient être, en quelque sorte, les deux versants de la mémoire qui tente de recomposer la contingence, nécessairement multiple, de l’être absent.

L’un ignorait tout de l’existence du second, l’autre, a contrario, souffrait de s’être fait ravir celle qui aurait pu faire son bonheur.

En phase ultime de sa vie, Flo émit le souhait de ne faire qu’une avec Florence et par conséquent demandait, à brûle pourpoint, à Edward de se faire connaître auprès de David.

Cruelle démarche tout autant que réconfortante pour les deux hommes, tentés l’un et l’autre par toutes les facettes du ressentiment exacerbé.

Au risque de se perdre dans la susceptibilité ou l’irritabilité du partenaire dévolu, l’un et l’autre manipulés par les forces d’une âme féminine plus persuasive que jamais, voilà que, sur le retour d’âge avancé, les deux Michel, ex condisciples du Conservatoire et de La Comédie Française sur la longue durée, pris, ainsi, à leur propre jeu du rôle de composition, se trouvent projetés en face à face, pour la première fois de leur carrière.

Ce défi méritait d’être lancé, relevé et emporté magistralement par David (Michel Aumont) et Edward (Michel Duchaussoy), qui, d’emblée par intuition, surent que leurs personnages ne pouvaient, en aucun cas, être interchangeables.

En outre, réunissant ces deux pointures françaises au Théâtre de l’Oeuvre, Marcel Bluwal effectue un coup de maître que la distanciation new-yorkaise, en toile de fond, rend implicitement, de portée universelle.

Cette pointe de torture, que chacun des deux saura apprivoiser selon son caractère va, effectivement, s’avérer le garant sinon de l’Amitié, tout au moins celui du souvenir vivace de l’Amour que leur joute oratoire infinie pourra, désormais, entretenir ad vitam aeternam.

illustration © Catherine Bluwal 

DAVID & EDWARD - *** Theothea.com - de Lionel Goldstein - mise en scène : Marcel Bluwal - avec Michel Aumont & Michel Duchaussoy - Théâtre de l’Oeuvre

 




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