« Erich Von Stroheim » Symbolique en jeu pour Emmanuelle Béart au Rond-Point
Voici « Elle, l’Un et l’Autre » dûment en trio, à l’instar d’une Emmanuelle Béart flanquée des « Jules & Jim » valeureux soupirants ou clones du désenchantement partagé à trois selon toutes les combinatoires de duos envisageables, qui pourraient s’adonner aux interrogations tournant sur elles-mêmes de manière infinie... au Rond-Point.
Au sein d’une proposition d’une dizaine de textes théâtraux sélectionnés personnellement par Stanislas Nordey, en perspective d’une création originale laissée au choix d’Emmanuelle, celle-ci s’éprit alors d’« Erich Von Stroheim » en raison de son énigme existentielle ouverte restant non résolue.
La comédienne, ainsi séduite par le concept circulaire du triptyque amoureux induit par son auteur Christophe Pellet, pensait de surcroît que ce flux libidinal atypique forcerait la mise en scène à explorer des zones non encore défrichées par Nordey.
En effet, depuis quelque sept années, Emmanuelle & Stanislas s’efforcent de construire par capillarité complémentaire un partenariat spécifique où celui-ci devenu son mentor dramaturgique, celle-là, en disciple exclusive, lui renvoie une image de parcours en étapes « infranchissables » à vaincre au fur et à mesure avec, en émulation à la clef, une éventuelle apogée… en point de mire !
Cependant pour « Elle », l’Amour ne relève guère de l’épanouissement et de la satisfaction puisque « l’Autre & l’Un » surfant sur les désillusions successives, ses deux partenaires de scène (Thomas Gonzalez & Laurent Sauvage ou Victor De Oliveira) sont constamment en quête de variantes, de dérivatifs, d’alternatives qui pourraient suppléer au déficit d’âme qu’ils subissent plutôt que de le maîtriser.
L’acte sexuel est constamment évoqué, de manière latente et sous-jacente, sous de multiples apparences sans que jamais le moindre passage à l’acte n’affleure la représentation théâtrale scandée au diapason des seuls mots « bruts » de Pellet.
Ainsi, le souhaite Stanislas Nordey vouant un culte sans limite à la force du langage dans toutes ses composantes d’autant plus si transgressives.
Par ailleurs, selon des méthodes ayant géré au summum sa carrière et sa destinée d’acteur culte, toute symbolique s’affiche ici la référence à Erich Von Stroheim représentant à lui seul l’incarnation de la mythomanie, de la mystification et du mensonge tout azimut portée au niveau inégalable de chef d’œuvre.
Alors faudrait-il, à l’instar de cet Artiste de l’Absolu, prendre ses désirs pour des réalités et ainsi se composer une identité flatteuse à ses propres yeux avant que d’en phagocyter autrui ? Voilà effectivement une des pistes parmi d’autres étudiées par les membres du pseudo triangle amoureux avant que de fantasmer un rejeton qui, par son existence, pourrait acquérir le talent de rebattre les cartes de leur contingente destinée humaine.
Quant à Emmanuelle Béart, à la recherche d’un « anonymat » quasi métaphysique pour mieux appréhender son travail de troupe, la comédienne avance ainsi sur la carte du Tendre accompagnée d’autant de cavaliers servants que ceux-ci sont tenus à distance grâce à la magie du texte théâtral et alors qu’en contrepoint formel l’un des comédiens s’essaye à la performance de jouer « nu » de bout en bout du « happening » scénographique ainsi projeté par l’actrice « engagée » s’étant, elle par ailleurs, mise en congé délibérément indéterminé... du Cinéma.
Photos © Jean-Louis Fernandez
ERICH VON STROHEIM - **.. Theothea.com - de Christophe Pellet - mise en scène Stanislas Nordey - avec Emmanuelle Béart, Thomas Gonzalez & Laurent Sauvage (ou Victor de Oliveira) - Théâtre du Rond-Point