François Guillemot : de l’anarchisme des Bérurier Noir au très conformiste CNRS
C'est toujours croustillant de voir ce que sont devenus les gens trente ans après. Dans la lignée de Philippe Val, passé de l'anarchisme "hippie" à France-inter et le sarkozyme assumé, voici le cas du dénommé François Guillemot, retrouvé en naviguant sur le web :
Ce distingué bobo est un des meilleurs spécialistes actuels du Viet-Nam, ingénieur au CNRS et écrivain reconnu, rien que cela. Un intellectuel parmi tant d'autres, me direz-vous. A un détail près, car dans sa jeunesse, il était moins soucieux de l'état républicain, ses carrières et son ordre public. Démonstration, retour en 1987 :
Oui ! François Guillemot fut le leader du groupe de rock alternatif Bérurier Noir, un courant qui précéda le rap, dans les années 1980. Parmi ses refrains : "la jeunesse emmerde le front national...", "je ne crains plus la loi, je suis fou...", "je hais la France et je hais les lois, en république l'anarchie...." etc. Apologie du refus des lois, de l'ordre, de la violence gratuite et de la glandouille : la mode punk était encore omniprésente à Paris.
Ok ! le rock n'est pas le rap, tout cela n'était pas bien méchant par rapport aux énormités que l'on entend de nos jours. Toutefois, la "boboisation" de "François Béru" laisse songeur. D'après wikipédia, cet ex-jeune rebelle vient d'une bonne famille bourgeoise lettrée. Comme le chanteur Renaud ou encore Philippe Val. Son engagement dans les squats parisiens de l'époque, pour l'aide aux migrants d'alors notamment, n'était qu'une révolte d'adolescent attardé, voire un pied de nez à son milieu social d'origine. Les rebelles musicaux de la période 1968-1990 étaient rarement des prolos. Il chantait la misère et la révolution, tout en vivant du compte bancaire de ses riches parents ; un grand classique !
Bérurier Noir démasqué, c'est un peu une délivrance pour notre génération. Souvenez-vous de vos années lycées, vers 1990, quand il était impossible de critiquer le rock alternatif. Qui écoutait les productions de ces troublions ? D'autres troublions justement, les cancres, les glandeurs, les fils à papa mal dans leur peau. Pas les ouvriers, en particulier ceux qui étudiaient et voulaient s'en sortir par le travail, et non par la drogue et la délinquance. Ces crétins gangrénaient collèges et lycées par leur harcèlement et leur sectarisme.
Profitant des congés estivaux, coincé chez moi par la canicule, je me suis amusé à faire quelques recherches sur le web à partir de mes souvenirs de groupies des Bérus croisés il y a trente ans. L'un bosse à la reprographie de la fac de Jussieu, l'autre est artisan dans la Var... Loin de leurs "idéaux" de jeunesse et de l'anarchisme. D'ailleurs, combien d'entre eux comprenaient vraiment les paroles des chansons ? Combien se contentaient de suivre la meute ? J'ai en mémoire le racisme anti-arabe de "l'artisan" cité plus haut, qui avait seize ans à l'époque. Il n'avait certainement pas conscience de représenter ce que les anarchistes détestaient, et poutant il écoutait leur musique.
C'était le grand tabou du rock alternatif : les allures souvent martiales, parfois les uniformes, les crânes rasés des redskins (sur l'exemple du chanteur des garçons bouchers). Un avatar issu de la culture rebelle anglo-saxonne et son folklore : les punks, les skinheads... Beaucoup de voyous se retrouvaient dans ces sous-cultures juste pour leur violence. Les idées et la réflexion, ce n'était pas leur truc.
François Guillemot est donc passé de marchand de disques pour adolescents boutonneux au fonctionnariat de privilège (le CNRS). Il est l'exemple-type de la logique du gauchisme : les anarchistes de vingt ans sont toujours les libéraux de quarante ! Notre spécialiste du Viet-Nam pourrait mettre ses actes en conformité avec ses généreuses idées en allant vivre sur place pour aider les populations locales. Mais notre Bérurier éclairci n'est pas idiot : il préfère le confort de cette France qu'il détestait tant à la précarité d'un pays du tiers-monde ravagé par ceux qui ont inventé le rock n'roll et diffusé le capitalisme sauvage. Qui commence par Ravachol finit toujours dans le cholestérol en mangeant dans les bons restaurants trente ans plus tard !