vendredi 9 septembre 2016 - par Frédéric Degroote

« Il était une fois… » : quand le merveilleux est conté en musique

Après le récital-spectacle « Au pays où se fait la guerre » dans lequel le Palazzetto Bru Zane avait fait appel à Isabelle Druet, le Centre de musique romantique française propose cette rentrée chez Alpha Classics le programme « Il était une fois… ». Imaginé par Alexandre Dratwicki qui réalise non sans talent les arrangements pour cordes et piano, ce nouvel enregistrement nous fait voyager à travers un des sujets de prédilection des compositeurs romantiques : le conte. Sa popularisation commence en France grâce à Charles Perrault sous le règne de Louis XIV et son succès va grandissant en raison notamment de la féérie qui sous-tend le genre littéraire. Le public français est friand de ces histoires mêlant réel et surnaturel et il ne faut pas longtemps avant que ces récits ne prennent vie sur les scènes d’opéras. Ce disque en montre un témoignage éloquent.

Pour défendre l'histoire imaginaire d'une princesse ingénue découvrant peu à peu l'amour, on retrouve le Quatuor Giardini qui accompagnait déjà Isabelle Druet. Les couleurs que tire le quatuor de leurs archets sont délicatement somptueuses et enchantent dès les premières secondes de l'extrait de La Belle au bois dormant du compositeur Charles Silver (1868-1949). Le quatuor est un allié de choix dans ce voyage féerique, que ce soit dans les quelques pièces instrumentales ou dans l'accompagnement intelligent tantôt vif et guilleret tantôt ouaté et enveloppant. Plus généralement, cette première piste pose la question du nombre de chefs-d’œuvre qu’il reste à découvrir et ceux que le Palazzetto Bru Zane compte mettre plus en avant. En effet, si le programme est jalonné de noms connus comme Jacques Offenbach (1819-1880) et Gioachino Rossini (1792-1868), ceux de Frédéric Toulmouche (1850-1909), de Laurent de Rillé (1828-1915) ou de Gaston Serpette (1846-1904) tiennent de la découverte. On sera même heureux d’entendre un extrait élégiaque de l’opéra-comique Cendrillon de la célèbre cantatrice Pauline Viardot (1821-1910).

Du côté des voix, on est ravi dès les premières notes du soprano cristallin de Jodie Devos qui grandit au fil des projets, se muant tantôt en princesse solitaire au bord de la crise de nerfs tantôt en fée marraine bienveillante. Une diction éclatante termine de nous convaincre, qualité d’ailleurs partagée avec sa comparse mezzo-soprano Caroline Meng. Celle-ci se joue aussi des registres et délivre une aisance tant en sœur malicieuse qu'en prince désemparé, tel qu’était répandu l’usage de la voix de mezzo dans des rôles travestis. On appréciera la juste complémentarité formée par les deux voix dans le duo Toi qui m'es apparue du Cendrillon de Jules Massenet (1842-1912) ainsi que dans celui de Nicolas Isouard (1775-1818) Ah quel plaisir ! Ah quel beau jour ! où les deux interprètes se dévoilent dans un torrent joyeux de vocalises sans que la technique ne vienne compromettre la caractérisation de leurs personnages. 


Véritable friandise musicale à consommer sans modération, ce programme met en lumière un pan inconnu du répertoire romantique grâce aux bons soins prodigués par le PBZ. Voici un projet exemplaire, bien pensé, où les pages inconnues se disputent à d’autres célèbres dans une interprétation qui ne pouvait espérer meilleur plaidoyer. 

Maxime Melnik

 


Il était une fois…

Jodie Devos, soprano
Caroline Meng, mezzo-soprano


Quatuor Giardini


2016 Alpha Classics/Outhere Music (Alpha 244)


Ce disque peut être acheté ICI

 



1 réactions


  • Antoine 11 septembre 2016 15:14

    Les votes et le nombre de commentaires sur cet article démontrent une fois de plus le niveau musical du français moyen en général et de ceux qui fréquentent ce site en particulier. Dans ce domaine, dès que l’on sort de la banalité pour sourdingue, nada...


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