mardi 8 avril 2014 - par Frédéric Degroote

Il Gardellino : Des bougies et des concertos pour Carl Philipp Emanuel Bach

Le 300è anniversaire de la naissance de Carl Philipp Emanuel Bach (1714-1788) n’aura échappé à personne et quelques réalisations déjà parues ont pu être accueillies de belle façon tant la qualité était au rendez-vous. J’aimerais m’entretenir avec vous d’un disque de l’ensemble Il Gardellino, tout juste sorti chez le label ACCENT et pour lequel vous connaissez mon affection. Il se constitue en la somme de trois concertos : un pour flûte, un autre pour violoncelle et enfin le dernier pour hautbois.

Lorsque l’on parlait du « grand Bach » au milieu de 18è siècle, c’est de Carl Philipp Emanuel dont il s’agissait car il faisait preuve d’originalité. En effet, Carl Philipp Emanuel est extrêmement innovant autant en ce qui concerne l’harmonie que la conduite mélodique et ses contemporains admiraient la richesse des sentiments que reflétait sa musique. La publication de sonEssai sur la vraie manière de jouer des instruments à clavier (1753) contribua pour beaucoup à sa notoriété. C’est l’un des traités musicaux majeurs du 18è siècle.

Carl Philipp Emanuel a écrit plus de 50 concertos instrumentaux au cours de sa vie. Le concerto pour flûte en ré majeur Wq 13 (H.482/1) est le plus ancien des concertos pour flûte. Jusqu’en 2001 il n’était connu que par son titre figurant dans le catalogue d’un marchand berlinois. Depuis, deux copies furent mises à jour et il est ainsi possible de l’exécuter. D’une transparence classique, il est d’un équilibre et d’une limpidité loin du Sturm und Drang (« Tempête et passion ») que l’on rencontre fréquemment dans ses opus. 

Quant aux trois concertos pour violoncelle, ils furent écrits entre 1750 et 1753. Ce sont les plus oeuvres les plus anciennes du genre en Allemagne et le concerto présenté ici, celui en la mineur Wq 170 (H.432), date de 1750. Il est conservé dans deux autres versions authentiques : pour flûte et pour clavecin. Ici le premier mouvement est un modèle de Sturm und Drang magnifiquement emmené par Emmanuel Balssa.

Pour finir, le concerto pour hautbois en si bémol majeur Wq 164 (H.466) date de 1765 et est, dieu merci, le moins enregistré des deux existants pour le même instrument, ce qui permet de le goûter enfin dans une réalisation de qualité. Le style est plus galant et plus lyrique que dans les deux précédentes oeuvres. Membre fondateur de l’ensemble il y a 26 ans tout comme le flûtiste Jan De Winne, le hautboïste Marcel Ponseele conduit la ligne mélodique toujours aussi intelligemment au fil des années, avec un ensemble à l’écoute des moindres inflexions et le son chaleureux qui est sa marque de fabrique. Je vous propose en extrait le premier mouvement « Allegretto » de ce concerto.

Sans excès ni rigorisme, ce voyage stylistique dans les concertos de Carl Philipp Emanuel est une réussite. Parfaite anthologie pour mettre en valeur ce 300è anniversaire, avec des pages pas forcément surreprésentées dans la discographie et une équipe de robustes solistes bien connus de ceux qui suivent Il Gardellino, c’est l’occasion d’entendre une nouvelle fois l’alchimie entre ces musiciens passionnés depuis un quart de siècle et l’inventivité sans cesse caractéristique du deuxième fils de Jean-Sébastien Bach.

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Carl Philipp Emanuel Bach (1714-1788)
Concerto pour hautbois solo, cordes et basse continue en si bémol majeur, Wq 164 (H.466)

I. Allegretto

Marcel Ponseele, hautbois
Il Gardellino

2014 ACCENT

http://youtu.be/zzzRg_UOefs



9 réactions


  • claude-michel claude-michel 8 avril 2014 12:22
    Alexis Weissenberg pianiste dans Bach...un régal... !
    J S Bach : Partitas 1,2,3,5,6 (EMI - Toshiba)
    J S Bach : Variations Goldberg (1967) (EMI France)
    J S Bach : Variations Goldberg (1982) (EMI)
    J S Bach : Partitas 1 - 6 ; « french Ouverture », « Italian Concerto » (EMI)
    J S Bach : Partitas 4 & 6 ; « Italian Concerto »

    • Fergus Fergus 8 avril 2014 16:23

      Bonjour, Claude-Michel.

      Pour les Variations Goldberg, c’est au piano la version historique de Glenn Gould qui a ma préférence. Néanmoins, je reste (comme pour les sonates de Scarlatti) un inconditionnel du clavecin, avec une préférence pour Pierre Hantaï et Scott Ross.


    • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 8 avril 2014 16:58

      Des exercices ... smiley
      Sacré Bach ...


    • claude-michel claude-michel 8 avril 2014 17:24

      Bonjour Fergus...Glenn Gould un type à part dans le piano..qui réinterprète les oeuvres classiques...J’avoue que je suis pour également...mais le clavecin (hélas) ne peut donner la gamme d’interprétation d’un piano...

      1. Lily Laskine..étant (était) l’exception à la règle...avec un clavecin... !

    • Fergus Fergus 9 avril 2014 08:57

      Bonjour, Claude-Michel.

      Je n’ai jamais entendu Lily Laskine au clavecin. Cette très grande harpiste est en revanche restée dans les mémoires pour ses interprétations des grands concertos tels celui de Boieldieu, mais surtout le concerto pour flûte et harpe de Mozart avec son complice Jean-Pierre Rampal. 


  • Fergus Fergus 8 avril 2014 16:17

    Bonjour, Frédéric.

    A écouter sans modération. Pour les œuvres de Carl Philip Emmanuel, le plus doué des fils du grand JC Bach avec Jean Chrétien, mais aussi pour la qualité des instrumentistes de l’excellente formation Il Gardellino qui, comme son nom ne l’indique pas, est belge.


  • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 8 avril 2014 17:03

    Merci à l’auteur pour tous ses articles .
    Que ça dure .


  • Antoine 8 avril 2014 23:12

    Famille bénie que celle des Bach ! CPE est celui de l’évolution qui a su ne pas s’engluer dans la musique galante mais hélas, contrairement à son père, à la production inégale parfois jusqu’à l’ennui sans pour autant oublier ses œuvres dignes de sa lignée comme par exemple le Psaume 150 ou le double concerto pour piano et clavecin Wq47 et bien d’autres. Entre parenthèses, aux 18ème et 19ème, Jean-Chrétien était plus encensé que CPE...


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