La brouette blindée... et autres histoires lyonnaises
Lyon n'est pas qu'une ville lumière. C'est aussi une cité qui abonde d'histoires extraordinaires, dont celle d'une brouette blindée qui fut testée par les militaires au fort de Sainte-Foy.
La ville de Lyon (de même que l'ensemble du Lyonnais) est un véritable trésor pour les amateurs d'histoires insolites. Il suffit de se plonger quelques instants dans ses archives pour en percevoir toute la richesse.
Comme vous l'aurez deviné, j'habite à Lyon et j'adore ma ville. J'aime la parcourir et m'attarder sur ses différents visages qui jamais ne me lassent.
La brouette blindée... Mais, qu'est-ce que c'est ?
Un jour, alors que je feuilletais d'anciens documents par pure curiosité, mon attention se porta sur un éventail de faits singuliers que j'y relevais. Je m'empressais d'en faire des photocopies pour en conserver une trace.
- Référence le Progrès de Lyon
- Photocopie de l’article du Progrès de Lyon paru le 1er novembre 1873, et relatant l’anecdote sur la brouette blindée.
Captivé par ces découvertes, je continuais mes recherches durant les semaines qui suivirent.
C'est ainsi que j'ai lu dans le journal « Le Progrès de Lyon » en date du 1er novembre 1873 (oui, vous avez bien lu 1873) qu'une brouette blindée avait été testée par les militaires du Fort de Sainte-Foy (à Sainte-Foy-les-Lyon).
Cela pourrait paraître une farce, et pourtant, il n'en est rien. Des militaires ont vraiment conçu cette « arme de guerre » censée apporter la victoire à nos troupes lors des combats sur les champs de bataille.
Voici le texte de cet entrefilet que je vous reproduis in extenso.
« Il y a deux ou trois jours, sur les glacis du fort de Sainte-Foy, on a fait l'expérience d'une brouette blindée qui n'a eu qu'un piètre succès.
La brouette est garnie à droite et à gauche d'une épaisse plaque de tôle percée de trous et destinée à mettre le soldat à l'abri et à lui permettre de tirer en toute sécurité.
Le soldat s'élance en poussant la brouette, puis, arrivé au point dangereux, il s'arrête et se blottit derrière les blindages d'où il fait feu sur l'ennemi.
Le but est d'arriver au point en question sans être tué.
Les soldats nous ont paru accueillir cette invention avec peu d'enthousiasme ; quelques-uns même la qualifiaient d'une manière peu respectueuse. » (Source : le Progrès de Lyon – 1er novembre 1873).
Raconter ce fait insolite sous forme humoristique.
À la lecture de cet article, vous comprendrez aisément qu'en tant qu'écrivain mon imagination en fut aiguisée.
Je m'emparais d'un cahier pour relater ce que je venais de découvrir, mais sous une forme attrayante. En prenant soin de restituer l'événement dans le contexte de l'époque. À partir de ces quelques paragraphes, je relatais le tableau tel que je me le représentais, le nourrissant de dialogues, de la description des lieux et de l'esprit militaire de l'époque (car la France se remettait à peine d'une défaite militaire).
Le tout rédigé sur un ton rocambolesque pour cadrer avec celui qui émanait de l'article du Progrès de Lyon.
Ce fut un grand moment de plaisir pour moi de décrire ces manoeuvres militaires sous un jour humoristique pour traduire en écrit toute la saveur que j'avais ressentie à la lecture de cet entrefilet.
De la brouette blindée au paysan penaud : la création d'un livre sur les histoires du Lyonnais.
L'appétit désormais ouvert, je continuais dans ma lancée en rédigeant de la même façon d'autres faits insolites de Lyon et des alentours.
Je consignais ensuite toutes ces histoires dans un recueil « Les Belles histoires du Lyonnais des temps jolis ».
Beaucoup de ces faits se sont déroulés à Lyon même, quelques autres dans les communes proches et mettent en scène des personnages de la campagne environnante.
En parallèle à l'écriture, il me paraissait important d'informer le lecteur que je n'avais pas tout inventé et que ces histoires reposaient sur des bases réelles. L'écriture, le style de narration et la mise en scène de l'histoire étaient de mon fait, mais pas l'anecdote sur laquelle se fondait mon récit.
Voilà pourquoi figure à la fin de chacun de ces chapitres la reproduction du document d'archives qui en inspira l'histoire. De cette façon, le lecteur peut voir exactement la partie réelle de l'événement et la partie imaginaire de ma construction littéraire. Je tenais vraiment à ce qu'on puisse distinguer les deux aspects.
La brouette blindée : un véhicule en avance sur son temps ?
Si l'on y songe d'un point de vue extérieur, l'idée d'une brouette blindée n'était pas si bête que cela. Quelques dizaines d'années plus tard apparurent sur les champs de bataille des véhicules eux aussi blindés : les tanks et les chars d'assaut.
Certes, il existait une différence de taille. Ces véhicules étaient motorisés (le soldat n'avait donc pas besoin de le pousser) et disposaient de « chenilles » pour avancer sur tous les terrains. D'autres parts, il caparaçonnait totalement le soldat. Toutefois, le concept d'une sorte de véhicule à roues qu'on avancerait sur les champs de bataille et qui permettrait au soldat de tirer sur les troupes adversaires sous la protection d'un blindage était assez novateur. En ce sens, les Français étaient plutôt en avance sur leur temps.
Il est à reconnaître cependant que la façon dont cette brouette blindée était construite ne convenait ni au terrain (parfois boueux, caillouteux, parsemés de creux et de bosses..) ni à la protection (rien sur le devant pour protéger le soldat pousseur des balles ennemies).
L'occasion d'écrire une belle histoire.
Quoi qu'il en soit, cela m'a donné l'occasion d'écrire une histoire totalement loufoque qui m'a égayé durant toute sa rédaction. C'était vraiment fabuleux d'imaginer toutes ces manoeuvres pour tester une brouette blindée.
J'éprouvais le même plaisir en écrivant les autres histoires de mon recueil, comme celles intitulées « un paysan penaud » ou « un parapluie voyageur ». Toutes deux ont fait pétiller mon regard au fil de leur narration.