mercredi 28 août 2013 - par Emile Mourey

Léonard de Vinci, cet illustre inconnu...

Dressant le portrait de Léonard de Vinci, Giorgio Vasari dit de lui : « qu’il se forma dans son esprit une doctrine si hérétique qu’il ne dépendait plus d’aucune religion, tenant peut-être davantage à être philosophe que chrétien ».
 
Que voulait dire Vasari dans ce "peut-être" ? On a beau fouiller dans les notes que Léonard a consignées dans ses carnets ainsi que dans les ouvrages spécialisés, on ne trouve rien de précis sur cette doctrine "hérétique".
 
Comment peut-on laisser croire au public que tout a été dit sur l'homme alors qu'on n'a pas la réponse à cette question fondamentale ?
 

Qui était Vasari ?

Né en 1511, huit ans avant la mort de Léonard de Vinci (1452-1519), il appartient à la génération suivante qui s'inscrit également dans le souvenir de Raphaël (1484-1520) et encore plus dans celui de Michel-Ange (1475-1564). Ceci pour dire qu'on ne peut pas rêver de témoin plus fiable, d'autant plus qu'il faisait partie du même milieu, étant lui-même, architecte, peintre, écrivain et humaniste.

Nous sommes en pleine période de la Renaissance. Dans son portrait de Laurent le Magnifique, Vasari nous dit en peinture ce qu'il est plus prudent de pas mettre par écrit. Les symboles dont il a entouré le prince sont une critique féroce de la pensée de son temps. Sur le monument de l’histoire humaine, la tête du philosophe est en état de décomposition avancée. Le serviteur bavard du temple, dont la tête a pris la place du sang de Dieu dans le ciboire, s’est enfoncé le goupillon dans la gorge. Quant à la muse de cette tragi-comédie humaine, son instrument de musique lui est entrée dans son orbite creuse. De son nez, la morve coule tandis que la tête du chien ricane dans l’accoudoir du fauteuil.
 
Moins d'un siècle après Léonard, la belle Veronica Franco tenait salon à Venise. Son mari était médecin. Pour la postérité, elle est restée l’exemple le plus noble de la courtisane vénitienne. Sa maison à Sancta Maria Formosa était fréquentée par des musiciens, des peintres et des nobles. Des soirées musicales, des débats de philosophie et des lectures de poésies en faisaient un lieu vivant et recherché. http://www.veniceguide.net/cortigianefr.htm
Léonard de Vinci tenait lui aussi table ouverte. Il n'est pas besoin de faire un grand effort d'imagination pour comprendre qu'on y discutait de choses sérieuses entre gens cultivés. On comprend dès lors pourquoi le maître a écrit dans ses carnets que Salai se tenait très mal à table, évidemment par rapport à ses invités. Imaginer que dans ce milieu bien éduqué, il y ait eu entre le dit maître et l'enfant adopté qui lui servait de valet une relation coupable, comme certains auteurs modernes l'ont écrit, est une totale absurdité.

La sexualité de Léonard, c'est son tableau de la "Leda". Léonard de Vinci était tout sauf pudibond, ses grosses plaisanteries de corps de garde le prouvent. Ses carnets montrent qu’entre les choses de l’esprit et sa libido, il avait établi une nette séparation. Sauf à de rares moments où il a été obligé de compter ses dépenses, il avait les moyens financiers qui lui permettaient de tenir son rang dans ce domaine comme dans d’autres. Comme d'autres personnages importants de son époque, Léonard de Vinci fréquentait les maisons closes... non pas les bouges mais les établissements de luxe. Un de ses dessins pour le projet d’entrée d'un tel établissement en est la preuve. C’est ici qu’il venait – dans la discrétion – quand la pression était trop forte... non pas qu’il y ait été poussé par un vil goût de luxure mais uniquement, comme il le dit dans ses carnets,"pour se libérer d’un fardeau qui pesait sur son esprit". Le modèle qui a posé pour la Léda dans plusieurs de ses tableaux parmi les plus célèbres, où croyez-vous qu'il soit allé le chercher ? Oui, la Léda pleine de sensualité que nous admirons dans les plus beaux tableaux du peintre était une prostituée, le col du cygne en est la preuve évidente. Les conseils qu'il donnait à ses élèves d'aller chercher leurs modèles dans ces maisons en est une autre.

Transition : par contraste, l'épouse de son ami Francesco del Giocondo - la Joconde - qui participait peu ou prou aux conversations, a dû représenter pour Léonard un idéal de pureté... l'idéal de la femme, de l'épouse, et l'exemple d'une mère sans reproche.

L'esprit de Léonard ? Il est dans "la Madone de Laroque". Comme le font remarquer les propriétaires du tableau en examinant le cliché pris en infra-rouge, la Vierge ébauche un sourire. Rappelant que, selon le professeur D. Arasse, les portraits féminins n'ont commencé à sourire qu'à partir de la Joconde, il s'ensuivrait que la Madone de Laroque pourrait être le premier portrait de Vierge souriant. J'ajouterais "de mère souriante". Il ne fait pas de doute, selon moi, que Léonard lui superpose l'image et le mystère de la maternité, plus précisement de l'amour maternel lequel, en effet, ne s'exprime pas dans les vierges en majesté.

La Vierge est dans une pièce qui s’ouvre sur un paysage mi-réel mi-symbolique par une grande fenêtre/ouverture voûtée. Cette ouverture voûtée n’est fermée par rien... ou bien par une paroi de verre... Entre la chambre noire, écrit Léonard dans ses notes, et ce paysage derrière lequel règne l’infini, se trouve comme une paroi de verre. Si l’homme n’ouvre pas son œil, il ne voit rien, mais s’il l’ouvre, c’est un mouvement de l’âme qui lui fait franchir la paroi de verre.
Le tableau est composé suivant trois plans successifs. La Vierge est assise sur un siège caquetoire dont on voit une anse ajourée et le haut du dossier. Elle tient sur ses genoux l'enfant Jésus et Jean-Baptiste. C'est le premier plan. On est à l'intérieur de la chambre noire. Au-delà de la paroi de verre, deuxième plan, on voit, à gauche, le tombeau des Juges de la ville de Jérusalem, à droite, des oliviers. Le troisième plan nous montre les rives, le lac de Tibériade, puis les montagnes qui s’élèvent jusqu’à Gamala. La trouée du ciel constitue, si l’on peut dire, le fond du tableau.
 
La perspective picturale se double d’une perspective dans le temps avec changement de lieu. Premier lieu et premier temps : l'enfance du Christ dans les évangiles. Deuxième lieu et deuxième temps : les derniers instants qu'il a soufferts dans le jardin des oliviers et sa mise au tombeau à Jérusalem. Troisième lieu et troisième temps : sa résurrection sur les rives du lac de Tibériade, son ascension jusqu'à la montagne de Gamala et sa transfiguration dans le ciel.
Détail important : ce n'est pas le Christ qui se profile dans la lumière de l'infini mais un arbre penché. Dans la logique de Léonard, cet arbre doit probablement symboliser le renouveau éternel de la nature et de la vie. Il transcende le message évangélique. Il l'élargit au mystère de l'existant, de l'être, de la nature et du monde. Léonard nous mène ainsi depuis le mystère de la naissance jusqu'à une renaissance ou une fin cosmique (?) dans la lumière d'un infini que seule la peinture peut évoquer. Ce mystère de la lumière sera d'ailleurs un sujet d'étude et un questionnement qui préoccuperont Léonard beaucoup plus que l'étude des dogmes. Autrement dit, Léonard de Vinci cherchait des explications au mystère du monde au-delà de la révélation chrétienne de son époque.
 
N'est-ce pas là la doctrine hérétique de Léonard dont parle Vasari ? 
 
Tombeau des Juges : lithographie ancienne.
La Madone de Laroque (autorisation de reproduction à demander aux propriétaires)
En ce qui concerne la résurrection que je place à Tibériade, et apparemment, Léonard aussi, voir http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/le-christ-est-il-ressuscite-a-128903
 
E. Mourey, 27 août 2013

 



24 réactions


  • Demian West 28 août 2013 11:04

    Excellent article d’opinion qui exhibe les convictions ou intuitions de l’auteur mêlées de références historiques assez riches. 


    Pour autant, l’auteur, qui a reçu une formation militaire, s’y prend avec l’histoire avec des manières de hussard qui voudrait enfoncer les lignes adverses bien plantées en terre.

    Ainsi, il passe ou il échoue. Et il s’y reprend à reprise, sans jamais rien enfoncer du tout.

    Ce qui me ravit toujours, c’est combien Mourey parle comme s’il y avait été, comme s’il était un témoin direct de ces événements. Et ça participe tellement du rêve, que j’y sens quelque chose d’artistique. Il faudrait plus de rêveurs comme lui, et surtout dans la partie de la soldatesque.

    Après avoir fait mes universités, j’ai bien sûr saisi qu’il s’agissait de formatage à vocation idéologique, et qu’il fallait entamer tout ce bâtiment des idées reçues. Depuis que nous savons aussi que tous les médias officiels mentent à longueur de décennies manipulatrices. 

    Peut-être Mourey est-il un nouveau Picasso qui voulait casser le dessin, car franchement cette Laroque est vraiment mal peinte. Et c’est un peu vexatoire pour le Léonard que je connais bien. 

    Dans tout le corpus des oeuvres de Léonard, il n"est pas une seule oeuvre aussi mal peinte, et donc cette laroque est si singulière et déplacée, qu’elle est forcément signée d’une autre main dans toutes ses lignes et coups de pinceaux malhabiles. La réalité est décevante pour le rêve. Mais tantôt elle est persistante. smiley

    Je précise que je me réjoui que Mourey continue à militer ainsi, car plus il le fait et plus il exprime a contrario la plus haute excellence de Vinci qui n’est pas accessible au commun de l’ordinaire.

    • Emile Mourey Emile Mourey 28 août 2013 12:01

      @Demian West

      Merci pour votre commentaire et pour votre éloge de Léonard de Vinci. Je n’ai pas vu de près le tableau, et de toute façon, même de près, je me garderai bien de porter un jugement sur les coups de pinceau que vous distinguez au vu d’une simple photo.

    • Demian West 28 août 2013 12:57

      Mais qui a parlé de coups de pinceaux perçus sur une photo, dans mon commentaire ? 


      Vous voyez Mourey, vous percevez souvent ce qui n’est pas et ce que vous voulez voir. smiley

    • Emile Mourey Emile Mourey 28 août 2013 13:58

      @ Demian West

      Je pense que vous voulez dire que vous l’avez examiné... lors d’une exposition ? lors d’un examen particulier ? Qu’en disent les autres experts ? Sont-ils unanimes ? Qu’en disent les médias ? Agoravox est un lieu de débat ouvert. Pourquoi nous laisser dans l’ignorance ? C’est le moment et le lieu pour vous exprimer. Vous faites partie du monde de l’Art. Vous y avez donc les relations qu’il faut pour nous donner l’avis des spécialistes. Merci, je compte sur vous, nous comptons sur vous.

    • Demian West 28 août 2013 14:17

      Mais, Cher Mourey, je ne cesse de vous le dire. Il suffit d’un simple regard sur cette oeuvre pour savoir immédiatement qu’elle n’est pas de la main de Vinci. Seul un praticien confirmé sait le reconnaître. 


      Récemment, on a découvert un nouveau Vinci en Pologne, et d’emblée, il était évident qu’il était de la main de Vinci en tous points. Harmonie de la composition, soin du détail, préciosité appliquée et chaleureuse, sûreté sans faille du trait et même dans les petites faiblesses qui signaient plus encore que c’était le vrai maître et réel qui l’avait faite.

      Ici, cette Madone est grossière dans ses traits et sa complexion de visage, que même un jeune Vinci dans l’atelier de Verrochio n’aurait jamais pu se montrer aussi disgracieux. Les bras et mains des enfants sont empâtés et lourds, tout sauf Vinci. 

      L’auteur a eu beau multiplier les emprunts iconiques pour compenser ses faiblesses techniques et artistiques, jamais il n’a pu imiter le style et l’art de Vinci. Ceci met en évidence ce qu’est un vrai Maître, il est celui que d’autres vont copier et ça fait une école. Ce tableau est de l’école de Vinci rien de plus. Et nulle spéculation pourrait lui ajouter une quelconque valeur.

    • Emile Mourey Emile Mourey 28 août 2013 15:41

      @Demian West

      Je ne vois pas qu’il y ait tellement de différences avec le tableau de la vierge à l’enfant de mon article précédent. 

    • Demian West 28 août 2013 15:59

      @ Mourey,


      Tout simplement parce que vous n’êtes pas un artiste praticien et votre regard n’a pas été éprouvé par des décennies d’observation de l’art et de la réalité.

      Ce n’est pas votre faute, c’est qu’il faut pratiquer pour exercer la vue.

      Par exemple, l’attache de l’épaule au cou et à la tête de l’enfant qui prend le sein est si grossière que jamais un Léonard ne s’est perdu en tel reniement de son art. Et le sfumato est très en-deçà du sfumato de Vinci. Dans le tableau mineur, il s’agit d’un enfumage systématique sans aucune nuance vincienne.

      Et j’ajoute que la manière du jeune Vinci était très inspirée par Botticelli, donc toute lumineuse et transparente. Quand le sfumato a été une invention bien ultérieure, donc il ne pourrait s’agir d’une oeuvre de jeunesse de Vinci. Et la maladresse est donc celle d’un artiste qui a imité Vinci, ils étaient certainement plus nombreux que Vinci qui était unique et donc qu’il a laissé peu d’oeuvres.

      En insistant pour « trouver » d"autres Vinci, certains agissent en spéculateurs. Et il est attristant de penser qu’un simple amateur pourrait abonder dans ces techniques un peu forcées de malhonnêteté évidente pour le connaisseur.

    • Emile Mourey Emile Mourey 28 août 2013 17:26

      @ Demian West

      Mon article ne se place pas sur le plan de la peinture, sfumato ou pas sfumato, fondus maladroits ou non, mais sur le message qui y est mis.
      Ce message correspond-t-il à ce qu’on sait de la culture et de la pensée de Léonard ou est-ce celle d’un élève ou d’un imitateur ?
      Si c’est un élève, chapeau ! Parce que cela voudrait dire qu’il surpasse son maître dans l’audace de la pensée ; qu’il a lu les évangiles, qu’il a réfléchi sur eux et qu’il a tellement d’assurance qu’il les interprète autrement. Et en plus, il sait qu’il y a un tombeau des Juges à Jérusalem. 
      Si c’est un imitateur, chapeau ! jusqu’à pousser l’imitation en n’oubliant pas de rappeler dans les coins supérieurs du tableau la fameuse ouverture sur l’infini avec sa paroi de verre dont parle Léonard dans ses carnets intimes ! 

      Eh bien, si vous avez raison, je m’incline devant l’audace et la hauteur de vue de cet imitateur et je regrette profondément que cette hauteur de vue n’ait pas été celle de ce très grand artiste et penseur que, tous deux, nous admirons.

    • Demian West 28 août 2013 18:24

      Franchement, il ne faut pas délivrer à Léonard des pensées ésotériques qu’il n’a jamais laissées en héritage même cryptement écrites. Bien sûr, à cette époque, tous les artistes croyaient en la réincarnation comme le prouve la fresque « l’Ecole d’Athènes » de Raphaël. Par exemple, Vinci se pensait être la réincarnation d’Apelle de Colophon, le plus grand peintre de l’Antiquité. Mais, il s’agissait de jeux d’esprits, et pas des concepts comme nous les pensons aujourd’hui.


      Tout comme au XVIIIème siècle, tout grand personnage faisait faire son portrait qui devait ressembler à un grand homme du passé qu’il admirait. 

      Plus prosaïquement et réalistement, Vinci était dans une société chrétienne qui avait intégré du néo-platonisme par le biais de Marsile Ficin. Donc, on tentait de réintégrer des aspects antiques dans la religion chrétienne pour les blanchir en quelque sorte, tout en enrichissant enfin l’étroite pensée chrétienne. Mais, ça n’a jamais été dans un sens hérétique, au contraire. Vinci était un homme très intégré dans son époque et non pas un marginal, ou un sectateur. Encore moins une sorte d’ésotériste. Il était plutôt tourné vers une sorte de naturalisme chrétien. Comme le prouvent parmi ses plus grandes oeuvres peintes qui manifestent des scènes bibliques dans un naturalisme idéalisé. 

      En fait, il était plus préoccupé de la science occidentale naissante. Donc les symboles ésotériques qu’il aurait pratiqués étaient certainement plus liés aux codes des alchimistes et tout pour amener et imposer une science physique par le biais de communications secrètes, plutôt qu’il voulait communiquer des traditions bibliques cachées et retrouvées.

      D’ailleurs, son seul ésotérisme vraiment connu fut qu’il a pratiqué des autopsies de cadavres contre l’interdit de la religion, et selon la coutume initiée par les scientifiques arabes avant lui.

      Il est toujours décevant de projeter des conceptions de notre époque dans les esprits de personnes qui ont vécu bien avant nous. Aujourd’hui, c’est un peu bobo que d’être ésotériste, à la Renaissance on risquait sa peau. Donc les choses n’étaient pas si aisées. Et le pas beaucoup plus difficile à faire. Et Vinci était un esprit pratique, pas un fou qui s’adonnait à la dernière folie, il devait obtenir la faveur des grands pour parfaire son oeuvre, et donc il est peu probable qu’il aurait pu choisir la clandestinité des idées et universités cachées du monde.

    • Emile Mourey Emile Mourey 28 août 2013 19:41

      @ Demian West

      Je suis assez d’accord avec votre commentaire. C’est Gollum qui a parlé d’ésotérisme et c’est Vasari qui a parlé de « doctrine hérétique ». Moi aussi, je pense qu’il ne faut pas prendre l’expression à la lettre.

    • Demian West 28 août 2013 20:28

      Ce dont Vasari parle, c’est que Léonard fut le premier peintre à libérer l’artiste de la simple illustration des histoires chrétiennes. Il fut le premier à donner au peintre son statut de penseur mais par images. 


      La peinture devenait un des modes de recherches de la pensée, des sciences ou plutôt de l’expérience ou de le notation des expériences, bref la peinture devenait un art libéral comme les mathématiques ou la philosophie.

      Donc l’hérétisme dont parle Vasari est cette transgression que Léonard a représentée.

      Ses peintures et croquis n’étaient plus de simples illustrations de la Bible, selon les exigences des pouvoirs de l’époque, mais elles étaient par la force de sa personnalité explosive d’invention, des laboratoires même de la pensée.

      C’était hérétique à l’époque et même hérétique selon la pensée de Platon, pour lequel, l’art était un simulacre dénué de qualité philosophique.

      Donc ce passage de Vasari n’a rien à voir avec une quelconque théorie cachée qui serait à confirmée par des symboles cryptés dans les oeuvres.

      C’est un peu le filon que Dan Brown, excellent écrivain et éminent historien des arts, a exploité savamment, mais juste pour faire la promotion de sa loge maçonnique et pour agrémenter sa vie par le biais d’une fortune méritée. Car ses livres sont excellents en tous points, si on accepte qu’il s’agit de fiction bien inventée et conçue.

    • Demian West 28 août 2013 20:35

      J’ajoute que je partage assez votre avis concernant Salaï.


      C’est un peu facile de déduire que Léonard aurait eu des relations homosexuelles, quand il n’y a pas le moindre éléments, hormis ce désir pressent d’un lobby homosexuel qui voudrait que les plus grands hommes penchaient de ce côté-là. Les Universitaires ne sont pas dénués de pulsions qui les entraînent à déformer leurs propres conclusions pour qu’elles collent en tous points à la carte qu’ils voudraient faire du monde. 

      Et Léonard était amoureux d’Isabelle d’Este, ce que nul ne conteste, et ce qui jette une contradiction irréductible sur ces fantaisies qu’on prêterait à Vinci, surtout pour plaire à un certain public, comme c’est à la mode aujourd’hui. smiley

    • Emile Mourey Emile Mourey 28 août 2013 21:06

      @ Demian West

      Vous parlez de transgression, moi de transcendance, vous parlez de laboratoire de la pensée, moi d’audace de la pensée ; il me semble que nous disons à peu près la même chose ; également pour Salaï qui, lui aussi, a le droit qu’on respecte sa mémoire.

  • Gollum Gollum 28 août 2013 14:08

    Autrement dit, Léonard de Vinci cherchait des explications au mystère du monde au-delà de la révélation chrétienne de son époque.


    Vous enfoncez un peu des portes ouvertes... Il y a bien longtemps déjà que l’on sait que Léonard de Vinci avait une pensée hétérodoxe et un penchant marqué pour l’ésotérisme.. Paul Vulliaud (c’est déjà vieux..) l’avait bien noté..

  • ffi ffi 28 août 2013 20:56

    L’arbre qui penche côté lumière...
    ne serait-ce pas une allusion à la phrase de l’évangile :
    « L’arbre tombe toujours du coté où il penche »
     ?
    Vers où penche l’arbre ?
    Vers les juges (à gauche !) ou vers la lumière (à droite !) ?
    A droite bien-sûr, vers la lumière !

    Donc, cet arbre qui penche vers la lumière indique simplement la destinée du Christ.
     
    Au moins Léonard de Vinci connaissait-il l’évangile, contrairement à vous...


  • Emile Mourey Emile Mourey 29 août 2013 09:23

    @ Demian West

    De vos commentaires, je retiens principalement votre phrase « Et j’ajoute que la manière du jeune Vinci était très inspirée par Botticelli, donc toute lumineuse et transparente. » Egalement son apprentissage dans l’atelier de Verrocchio où l’on aurait retrouvé ses premières réalisations de jeunesse. Vous parlez aussi d’un « enfumage systématique sans aucune nuance vincienne. » Je pense que vous faites allusion au modelé et aux ombres sur le corps des enfants qui, en effet, peuvent faire illusion auprès des néophytes que nous sommes. Il y a aussi le flou du siège qui ne s’explique pas très bien. 

    Mais est-ce suffisant pour dire que le tableau n’est pas de Léonard ? Vous-même reconnaissez que le maître avait ses « faiblesses » et d’autres ont dit qu’il a fait des essais malheureux ou qu’il a abandonné des projets. Le fait que ce tableau ait été perdu de vue expliquerait qu’il n’ait pas eu l’approbation « picturale » des contemporains de Léonard, mais cela peut être aussi parce que le message qu’on peut y déchiffrer a été mal ou pas compris. Le fait est que les autres tableaux du maître sont beaucoup plus lumineux et moins touffus.

    Il est vrai que la reconnaissance de ce tableau pose un problème car il faudrait admettre que Léonard a aussi peint des oeuvres imparfaites, ou même, des modélos et des essais, et que ce serait une porte ouverte qui risque de poser des tas de problèmes aux experts et à la profession. 

    Qu’en pensez-vous ?


    • Demian West 29 août 2013 09:52

      En fait, pour un praticien ça ne se passe pas comme ça.


      Il y a une signature personnelle dans chaque oeuvre jusqu’au plus petit croquis. 

      Et dès lors qu’une excellence innée a été développée à un certain degré harmonqiue, elle n’est plus intermittente. Je veux dire qu’elle est permanente. D’ailleurs Vinci dessinait toujours un profil avant de se mettre à travailler, comme si ce petit croquis le mettait dans un état auto-hypnotqiue d’excellence. Et effectivement ça marche comme ça.

      C’est comme Lascaux, l’art pictural n’est pas évolutif comme les autres arts, il est pour certains excellent d’emblée. Lascaux était un achèvement de l’art dès son apparition, nul n’a fait mieux. Et pour le jeune Vinci c’était pareil, tout jeune il a dessiné et peint des chefs-d’oeuvre sans avoir rien appris de maîtres. Picasso de même a peint des tableaux classiques achevés vers 16 ans. Les exemples sont nombreux et éloquents. Et c’est un art qui ne produit pas des erreurs ou des bugs. On a la main et on la garde toute la vie. Même quand on ne produit pas pendant des années, on ne la perd pas au contraire. Tout comme un Valéry écrivait encore mieux après une décennie de silence épistolier.

      Ce n’est pas comme jouer du violon, un art qu’il faut exercer tous les jours pour ne pas le perdre.

      Léonard a eu des faiblesses dans les anticipations des effets de ses expériences techniques sur les pigments et supports, mais jamais au point de faire un mauvais dessin préparatoire. Ou de faire une esquisse ou un croquis vulgaire ou grossier. Tout est bon.

      Et comme tout bon artiste, il a certainement déchiré et jeté ce qui ne lui semblait pas assez bon. 

      Il y a tant de points incertains, inharmoniques, malhabiles et approximatifs dans cette oeuvre d’imitateur qu’on n’y sent jamais la main sûre de Vinci.

      Il y a une délicatesse permanente dans tous points des oeuvres de Vinci qui est ici totalement absente, hormis dans les emprunts grossiers faits à ses images. Cette oeuvre est un collage à la manière de Vinci fait par une personne qui n’avait ni son toucher non plus que sa science de l’harmonie qui sait unifier une peinture sous un voile de mystère que seule l’huile peut produire quand on la maîtrise totalement après des décennies de pratique silencieuse et retirée du monde.

      Pour moi, il y a autant de différence entre une oeuvre de Vinci et cette imitation vulgaire, qu’entre une photo numérique actuelle et une photo publiée dans un Paris-Match des années soixante, les pros de la photo me comprendront.

    • Emile Mourey Emile Mourey 29 août 2013 11:42

      @Demian West

      Merci, votre réponse a le mérite d’être claire, à mon avis trop catégorique et trop tranchée. Reste à savoir si la majorité des experts va vous suivre pour ce tableau comme pour d’autres. La responsabilité est grande.

    • Demian West 29 août 2013 11:51

      Ce qui tranche implacablement, c’est quand une oeuvre qu’on voudrait attribuer à un auteur, quand cette oeuvre tranche totalement avec le toucher et le style de cet auteur. Une seule oeuvre différente ne peut faire exception dans le corpus d’oeuvres de cet auteur. En revanche, cette oeuvre manifeste simplement qu’elle n’est pas de sa main.


      Pour trouver des oeuvres cachées de Vinci, je vous suggère de faire une enquête auprès des têtes couronnées et de leurs coffres où elles cachent tantôt des secrets depuis des siècles. Là on pourrait peut-être trouver des oeuvres que certains ont toujours voulu conserver pour leur seul plaisir.

      Aussi, Monsieur Mourey, vous devriez appliquer votre grande connaissance de l’Antiquité pour décrypter des signes évidents dans les oeuvres les plus connues de Vinci, et pour en trouver de nouveaux sens parfois involontairement placés par l’inconscient de l’artiste.

      Tout n’a pas été dit sur Vinci, et il reste beaucoup à défricher. Beaucoup l’ont tenté, sans avoir votre culture. Et souvent, il vaut mieux explorer un champ qui a été trop labouré, plutôt que des régions inconnues qui ne mènent souvent nulle part...

      Je sais que vous comprendrez mes allusions bienveillantes. smiley

  • Demian West 29 août 2013 12:01

    Vous savez, souvent les historiens de l’art ou les experts sont des artistes manqués, et paradoxalement de plus grands amateurs de l’art que les artistes mêmes. Les experst sont souvent plus fanatiques amoureux des arts. Car ils n’en connaissent que la part agréable qui est de les goûter. Les faire est une autre affaire. Car pour être auteur il faut avoir le talent inné, ce qui reste rare même dans notre ère post-mitterrandienne qui a multiplié les « artistes » comme autant de génération spontanée de médiocrité.


    Et, tout comme les philosophes ne comprennent pas grand chose à l’art, les historiens sont experts dans la vie des artistes et dans la connaissance des événements autour des artistes. Mais connaître l’art c’est fréquenter les matériaux et les problématiques liées à la matière et aux gestes souvent entre le réel et l’irréel. 

    Qui a jamais dit ce qu’était l’inspiration et d’où elle venait ? personne. Car l’art est une connaissance immédiate pour celui qui est né avec les organes pour le comprendre.

    Qui a jamais dit ce qu’était le génie ? personne et pour les mêmes raisons.



  • Demian West 29 août 2013 15:59

    Prudence, Emile, vous allez faire épaule aux ragots qui nous disaient fâchés. ;-D


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