mardi 10 août 2021 - par Sylvain Rakotoarison

Patrick Bouchitey, l’ami des animaux

« J’ai toujours bossé en artisan. Au départ, l’idée est née à l’occasion de parties de rigolades entre potes, où l’on détournait les voix des acteurs en regardant les films sans le son. Comme j’adorais les images animalières, je me suis mis à donner la parole aux animaux en improvisant chez moi. » (Patrick Bouchitey, le 24 décembre 2005).

L’acteur (et réalisateur) Patrick Bouchitey fête son 75e anniversaire ce mercredi 11 août 2021. Moi, j’aime bien Patrick Bouchitey, c’est une réflexion un peu commune mais très française, et lui, il est un acteur français comme je les apprécie. Ils ne sont pas des stars, ils font juste leur métier et les spectateurs les savourent ainsi.

Bon, c’est vrai que j’ai eu une rencontre inopinée. J’étais avec une jeune collègue américaine (mais moins jeune que moi !) pour un séminaire à Antibes au mois de juin. Plutôt sympa. On ne peut pas toujours refuser de lier travail et conditions de travail sympathiques. Chaleur, plage mais aussi une grande efficacité dans la connaissance d’un sujet avec toutes les sommités internationales du sujet réunies dans un palais des congrès.

À la fin de la semaine du harassant travail (la plage n’était pas l’activité principale, je précise), retour à Paris par avion. Aéroport de Nice. Celui qu’on voit au loin, dans la Méditerranée. Petit avion, je suppose une cinquantaine de passagers. Le souvenir est déjà diffus, une vingtaine d’années. Petite salle d’embarquement. Carrée. Des chaises le long des quatre murs. Quelques sièges au milieu. J’étais avec ma collègue d’un côté et là, en face, à l’autre mur, j’ai aperçu un homme seul, plutôt bien habillé, dont le visage ne m’était pas inconnu. Il attendait aussi sagement que nous le départ. Il avait un ou deux bagages en cabine. Silencieusement.

Soudain, à grand renfort de musique, des animaux sont venus l’entourer, enlacer ses sacs, grimper dans son dos, jusque dans ses cheveux, et tous parlaient, rigolaient, faisaient la leçon. C’était très bruyant. J’avais l’impression d’être dans une basse-cour. Quand le haut-parleur s’est mis à crépiter, il s’est levé, et toutes les bestioles sont rentrées dans le chapeau du magicien. J’avais compris que j’avais croisé Patrick Bouchitey, plus connu par sa voix que par son visage, mais les deux étaient inséparables. M’étaient en tout cas familier.

Une dizaine d’années auparavant, Patrick Bouchitey avait eu effectivement l’excellente idée de rendre les animaux encore plus vivants que nature dans les documentaires animaliers, en les faisant parler (la série a été diffusée initialement sur Canal Plus à partir du 20 avril 1990). Un énorme succès très mérité, non seulement de notoriété mais aussi commercial (vente de VHS, de DVD, audience sur les sites Internet, etc.).

J’ai eu beaucoup de mal à expliquer à ma collègue américaine quel était exactement le métier de l’enchanteur qui avait jonglé avec tous ces animaux en face de nous (ma collègue était une amoureuse de chats). Alors, si j’avais su piétiner la décennie suivante, je lui aurais montré, tranquillement assis dans cette salle d’embarquement, ces vidéos-ci.





(Pour la petite histoire, la fin du voyage a laissé un arrière-goût d’insolite anxieux, l’avion a survolé Paris en tournant en rond une dizaine de fois et des camions de pompiers avec gyrophares allumés nous attendaient sur la piste.)

La télévision, Patrick Bouchitey la connaît assez bien pour avoir tourné quelques téléfilms intéressants (comme "Vents de colère" de Michael Raeburn), des œuvres historiques (de Josée Dayan, notamment "Le Comte de Monte-Cristo" et "Les Rois maudits") et en apparaissant dans un épisode de quelques séries assez suivies (par exemple : "Capitaine Marleau", "Profilage", "Nos chers voisins", "Scène de ménages", "Section de recherche", Kaamelott", "Camping Paradis", "Madame le Juge", "Les cinq dernières minutes", etc.).


Côté cinéma, Patrick Bouchitey a joué dans une cinquantaine de films, parfois dans les premiers rôles et parfois dans des films dits "cultes". Il sera encore à l’affiche cette année dans "Les Cinq Diables" de Léa Mysius, film dont le tournage a été un peu bousculé par la crise sanitaire.

Patrick Bouchitey s’est révélé comme un acteur majeur aux côtés de l’inimitable Patrick Dewaere dans "La meilleure façon de marcher", premier long-métrage de Claude Miller (sorti le 3 mars 1976). Patrick Dewaere et Patrick Bouchitey sont deux moniteurs de colonie de vacances, le second aussi le fils du directeur, Claude Piéplu. L’un opprime l’autre, sur fond de tendances faussement homosexuelles.

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On peut le voir aussi dans "Le plein de super" d’Alain Cavalier (sorti le 7 avril 1976), avec notamment Nathalie Baye et Étienne Chicot (un acteur que j’ai appris à apprécier, mort il y a juste trois ans) et, un peu plus tard, dans "La vie est un long fleuve tranquille" d’Étienne Chatiliez (sorti le 3 février 1988) où il jouait le rôle mémorable du curé (avec sa chanson "Jésus revient").

Patrick Bouchitey a continué avec Étienne Chatiliez dans des rôles plutôt mineurs dans "Tatie Danielle" (sorti le 4 avril 1990), "Le bonheur est dans le pré" (sorti le 6 décembre 1995), "Tanguy" (sorti le 21 novembre 2001) et "L’Oncle Charles" (sorti le 21 mars 2012) où il est le voisin d’Alexandra Lamy.

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On peut le voir aussi dans "Que les gros salaires lèvent le doigt !" de Denys Granier-Deferre (sorti le 3 novembre 1982) avec Michel Piccoli, Jean Poiret, Daniel Auteuil, Marie Laforêt, Florence Pernel, etc. ; dans "Mortelle randonnée" de Claude Miller (sorti le 9 mars 1983) avec Michel Serrault, Isabelle Adjani, Stéphane Audran, Guy Marchand, Macha Méril et Sami Frey ; dans "La tête en friche" de Jean Becker (sorti le 2 juin 2010) avec Gisèle Casadesus, Gérard Depardieu, Maurane, Claire Maurier, François-Xavier Demaison et Jean-François Stévenin.

Patrick Bouchitey a réalisé un film inspiré de nouvelles de Charles Bukowski, "Lune froide", coproduit par Luc Besson (sorti le 22 mai 1991), où il a joué aux côtés de Jean-François Stévenin (mort récemment, le 27 juillet dernier), l’un des deux principaux rôles, ceux de marginaux désabusés de la vie. Un film noir et blanc à l’atmosphère très spéciale (honorant la musique de Jimi Hendrix), où jouaient aussi Jean-Pierre Bisson, Roland Blanche, Jean-Pierre Castaldi et Jackie Berroyer.

L’autre film réalisé par Patrick Bouchitey, également coproduit par Luc Besson, c’est "L’imposture" (sorti le 25 mai 2005), où il a également le premier rôle, celui d’un écrivain raté (ou plutôt inexistant) qui rencontre son manuscrit tant espéré… écrit par une de ses étudiantes (jouée par Isabelle Renauld). Un film où l’on rencontre, entre autres, Jackie Berroyer, Étienne Chicot, Michel Field et Paula Jacques.

L’autre jour, j’ai appris que tous les animaux de la forêt, des steppes, de tous les documentaires de la BBC et même les pangolins chinois allaient souhaiter un bon anniversaire à cet acteur très sensible et très humoristique qui a contribué au génie français.


Aussi sur le blog.


Sylvain Rakotoarison (08 août 2021)
http://www.rakotoarison.eu



Pour aller plus loin :
Patrick Bouchitey.
Philippe Léotard.
Romain Goupil.
Isabelle Carré.
Claude Piéplu.
Michael Lonsdale.
Jean-Pierre Bacri.
Gérard Jugnot.
Alain Delon.
Alfred Hitchcock.
Brigitte Bardot.
Charlie Chaplin.

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4 réactions


  • Fergus Fergus 10 août 2021 11:36

    Bonjour, Sylvain

    Merci pour cet hommage à Patrick Bouchitey.

    Excellent acteur, comme le montrent ses prestations dans les films que vous avez cités, sa marginalité professionnelle l’a sans doute privé d’une plus grande carrière. 

    J’ai moi aussi beaucoup apprécié « La vie privée des animaux ».


  • troletbuse troletbuse 10 août 2021 14:39

    C’est donc l’ami des cobayes, donc des waxxinés  smiley


    • Aimable 10 août 2021 22:05

      @troletbuse
      Si vous deviez aller a l’hopital , je suppose que vous exigeriez des non vaccinés comme soignants et vous refuseriez mordicus les vaccinés , j’aime les gens qui restent droits dans leurs bottes .


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