samedi 29 octobre 2005 - par Theothea.com

« Sapho chante Ferré » à la Maison de la poésie

Avec son Ferré flamenco, Sapho trouve à la fois son frère de combat en même temps que la juste mesure de son talent au service de la langue française dans la force des mots lancés, tels des déflagrations.

Dans le halo des lumières de Lisa Racine, la grande dame en robe noire griffée Alain Blanchot projette sa fougue avec la maîtrise d’une professionnelle aguerrie, tout en restant à l’écoute d’une énergie rebelle que les plaintes de la guitare de Vicente Alamaraz renvoient en échos aux percussions vigilantes d’Alyss.

En quatre-vingt dix minutes et trois parties thématiques, se succèdent le Ferré des poètes, celui de l’Espagne, pour laisser place in fine aux grands classiques du maestro, conclus par la double version d’ "Avec le temps", dont une en dialecte marocain.

"Est-ce ainsi que les hommes vivent ?", "l’affiche rouge", "Comme à Ostende", Léo le chanteur révolté à la voix rauque ressurgit dans une présence tellurique que l’acoustique feutrée de la salle Pierre Seghers apprivoise au diapason de la féminité orientale sécrétée par une Sapho en osmose avec la vivacité des poètes, Aragon, Verlaine, Rimbaud, Baudelaire, ou des compositeurs tels Jean-Roger Caussimon...

Pour sa deuxième représentation d’une série d’un mois programmée à la Maison de la poésie, l’artiste, se débattant quelque peu avec des cordons de tout acabit, là le cable emmêlé du micro, ou ici les brides maintenant sur les épaules sa tenue de soirée, saura effacer à chaque fois la contrainte scénique avec la sensualité énergique du geste sûr : "Je serai dresseuse de micros dans une autre vie", plaisante-t-elle ainsi d’un cercle de lasso, telle une cow-girl agile.

A cet instant de sa carrière, l’œuvre de Léo Ferré deviendrait-elle l’opportunité pour la chanteuse d’afficher la maturité d’un talent que, certes, tous lui reconnaissaient auparavant, mais que désormais elle aura su inscrire en un hommage au patrimoine culturel francophone ?

Photo : Jean-Claude Moireau

SAPHO CHANTE FERRÉ *** de & par Sapho, accompagnée de Vicente Almaraz (guitare flamenca) & Alyss (percussions) - Théâtre Molière / Maison de la poésie -




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