mercredi 23 novembre 2005 - par Bernard Lallement

Sartre : l’avenir de la philosophie

La philosophie a-t-elle un avenir dans notre monde affilié à la technique ? La réponse fut posée à Sartre, en 1966, à l’occasion d’un numéro (30) de L’Arc qui lui était consacré. Réponse du philosophe :

« Dans une société technocratique il n’y a plus de place pour la philosophie, à moins qu’elle ne se transforme elle-même en technique. Voyez ce qui se passe aux Etats-Unis : la philosophie a été remplacée par les sciences humaines. Ce qui subsiste sous son nom, c’est une sorte de rêverie vague, de réflexion très générale, qui ne ressemble en rien à l’interrogation philosophique.

Il y a, d’ailleurs, un signe très net de cette évolution : la philosophie tend à devenir l’apanage des universitaires. Certes, les philosophes, chez nous, ont toujours été des professeurs. Mais autrefois, on s’efforçait d’amener les élèves à prendre conscience des problèmes, en leur laissant le soin de les résoudre eux-mêmes. Aujourd’hui, on les tranquillise. Le philosophe technicien sait, et dit qu’il sait. La vérité est là, immédiate, coupée de ses déterminations extérieures. Ou plus précisément : elle se donne d’emblée au présent comme si, entre le moment présent et le moment passé, il y avait une véritable coupure. Une coupure que l’on n’explique pas, mais que l’on constate. »

Avis à nos imposteurs philosophiques et autres penseurs de l’éphémère.

Photo : (c) Jean Marquis



2 réactions


  • freak0 (---.---.57.76) 23 novembre 2005 21:10

    Les débuts de l’enseignement philosophique ne sont qu’une étude de l’histoire de la philosophie. Descarte pensait cela, il faut en interpréter ceci ... j’ai passé mes cours de philo à regarder dehors à travers la fenêtre. La philo enseignée à l’heure actuelle dans les lycées n’est pas la pour amener l’élève à réfléchir lui même mais à enregistrer ce qu’un philosophe a penser, peu importe si l’idée est comprise.


  • Alexandre Santos Alexandre Santos 23 novembre 2005 22:54

    “Dans une société technocratique il n’y a plus de place pour la philosophie, à moins qu’elle ne se transforme elle-même en technique”

    Je dirais plutôt que dans une société technocratique, tout ceux qui ont la prétention d’être pris au sérieux doivent enrober leurs idées d’une couche pseudo-technique/scientifique. Ceci peut être vrai pour la philo, pour les religions (voir la scientologie) ou toutes sortes d’activités sociales (musique, littérature, etc).

    Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de place pour la philo. Il est impossible d’empêcher quelqu’un de se poser des questions existentielles.

    Mais si on veut avoir une chaire universitaire, ou être cité dans les médias, ce petit enrobage pseudo-scientifique est très utile.

    Pour ce qui est de la prétendue crise de la philo, je me demande bien en quoi elle consiste...


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