samedi 20 octobre 2018 - par C’est Nabum

À en perdre la boule…

Ils ont fait Fort !

Quittant les caves de Monplaisir, nous poursuivions notre remontée de la Vienne pour aller découvrir un petit village à quelque distance de la rivière. Lerné semblait inaccessible, des travaux barraient toutes les voies qui menaient au cœur du bourg. Nous semblions perdus, pas le plus petit commerce, l’école fermée depuis quelques années, ce qui avait été une petite ville active était en passe de s’endormir.

C’était sans compter sur deux présences essentielles. Saint Martin veille sur l’endroit et la Boule de Fort maintient une vie associative essentielle. Avec ces deux vigies, Lerné n’est pas disposé à subir le sort des bourgs voisins. L’union fait la force de l’endroit d’autant plus sûrement que la belle société se nomme La Paix ! Quoi de mieux pour résister becs et ongles à l’inéluctable déclin programmé de nos campagnes ?

La boule de fort est une institution en pays Angevin et dans une bonne partie de la Touraine. Ce jeu qui nécessite patience, adresse, sagesse et sérénité relève d’ailleurs bien plus de la philosophie que de l’agitation corporelle. Qui n’a pas assisté à une partie ne peut appréhender la quiétude qui gouverne curieusement à cette pratique au cœur du pays de Rabelais. C’est sans doute pour rétablir l’équilibre que le bar attend les joueurs au terme des trois heures d’une partie qui s’étire paisiblement.

C’est alors que François retrouve son pays. Les fillettes se vident à grandes lampées, la bernache est de la fête. L’apéritif se prolonge, rétablissant scrupuleusement l’équilibre avec la partie qui a précédé. Le temps n’a pas de prise dans la place, c’est ce qui fait le charme unique de ce jeu ancestral. Pour mieux vous informer de la chose, passez donc d’ailleurs à Lerné, un petit musée vous révélera tout ce que vous devez savoir de la Boule de Fort. Vous n’aurez qu’à pousser le maître (ou le petit) juste à côté, pour pénétrer dans le saint des saint, la piste magnifique, incurvée, paisible, mystérieuse. Le musée se nomme Picroboule, hommage à Rabelais et son pays Picrocole tout autant qu’à la boule de Fort.

C’est donc en ce havre de paix que Laurence la présidente et son équipe ont souhaité convier les Aquadiaux afin d’animer leur soirée annuelle. Lourde responsabilité d’autant plus que l’année précédente, ils avaient invité Gérard Pierron, la référence absolue dans le domaine, interprète de Gaston Couté et défenseur acharné de la tradition et du patois. Nous nous présentions là dans nos petits sabots, inquiets de nous savoir jauger à l’aulne de cette grande pointure.

Tout commence par un banquet. Les gens d’ici veulent avoir le ventre plein pour goûter pleinement aux chansons et aux contes des artistes. Voilà bien sage précaution qui est sans aucun doute préférable à l’habituel concert de fourchettes et de maxillaires qui agrémentent nos prestations. C’est donc en partageant leurs tablées que nous fîmes connaissance de gens tous plus sympathiques, joviaux et curieux les uns que les autres.

Les agapes achevées, l’humeur joyeuse de tous les convives nous permit de monter sur scène sans grande appréhension. La bernache et les quelques vins du pays avaient tôt fait d’abattre notre timidité légendaire. Le spectacle pouvait commencer… et il fut à la hauteur, nous dit-on, des attentes de nos joyeux et joyeuses luronnes de Rabelaisie.

Jacques et Benoît à la musique et aux chants, proposaient alternativement des chants traditionnels de Loire, des compositions du groupe, des classiques de Bretagne tandis que le Bonimenteur mettait en scène des spectateurs dans des farces truculentes qui n’avaient pas à rougir des récits du gars de la Devinière. Ce fut un pur moment de bonheur, deux heures qui passèrent comme dans un rêve.

Gérard Pierron pouvait être tranquille, nous n’avions pas essayé d’emprunter ses pas. Les nôtres avaient pris soin d’explorer une autre forme d’expression. Gaston Couté n’avait pas été convoqué. Ce sont les arrières arrières fillots des personnages du quart livre qui furent les hôtes de la soirée. Ils étaient présents dans la salle avaient noms Mimi, Sylvie Jean Mi, Christine, Laurence, Edgar, Jean, Chantal et d’autres encore. Ils riaient à gorge déployée après avoir bu de même.

Il est des soirées qui ne sont pas prêtes de s’effacer de nos mémoires. Celle-ci restera comme une référence non seulement par l’incroyable accueil qui nous fut réservé mais bien aussi par la nature même de notre prestation. Le groupe flanqué naturellement de son chauffeur de salle, l’incomparable Georges, avait su trouver ce soir-là, le juste équilibre dont il était sans doute à la recherche depuis sa création. Merci à nos amis de La Paix de ce merveilleux cadeau.

Remerciement leur.



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