mardi 29 août 2017 - par C’est Nabum

Fin de partie

La reprise se profile.

Nous roulons à l’envers de l’été. Le soleil n’est plus dans les yeux du pilote et de ses passagers. Le ciel s’assombrit tout comme les pensées des voyageurs. C’est le retour après l’insouciance de ces jours trop courts. Déjà la nuit s’invite de bonne heure, c’est la fin des soirées interminables, des apéritifs qui n’en finissent pas, des soirées entre amis. La rentrée pointe le vilain bout de son nez.

Les tenues sont encore légères. Les hommes portent fièrement le short tandis que les femmes font assaut de tenues légères pour montrer tant qu’il est temps encore un bronzage qui les embellit. Mais on devine ici ou là, à d’imperceptibles signes, qu’il y a des regrets dans les yeux, de la déception sans doute et beaucoup de nostalgie.

Au bout de la route, c’est le retour à la case départ, sans gagner vingt mille francs, bien au contraire. Les perspectives s’annoncent douloureuses, les ponctions sur notre niveau de vie se profilent sournoisement. Les vacances sont bien terminées, la suite sera délicate, le petit banquier doit servir ses commanditaires.

La rentrée, quel vilain mot. Pour qu’elle soit effective il faut naturellement rentrer au bercail, ranger les tenues légères, préparer le sac d’école pour les enfants, penser à remettre en service les vêtements de travail. Il convient encore de reprendre le rythme, retrouver les obligations, les contraintes, les impératifs, la course folle pour aller de l’un à l’autre, faire mille et une choses et finir par ne jamais tout faire.

La rentrée c’est plus sûrement la sortie de route, l’impossible quadrature du cercle. Comment tout faire tenir dans un emploi du temps plein comme un œuf ? On se promet de garder une petite bulle d’oxygène, un cinéma, une sortie, un week-end sur une toue cabanée, une escapade amoureuse. Au bout de ce redoutable mois de septembre qui se profile devant vous, vous découvrirez que rien n’aura été possible.

La rentrée c’est ça. Une course permanente, une cascade de papiers à remplir, d’attestations à fournir, d’inscriptions à faire, de rendez-vous à honorer. La rentrée, à elle seule, efface d’un trait de plume les bénéfices des vacances. C’est le début d’un long tunnel qui va vous conduire avant que nous n’ayez le temps de réagir vers la Noël et ses jours si courts. C’est une entrée dans l’obscurité.

En ouvrant votre porte, avant que de ranger vos serviettes de bain, vos sandalettes ou vos chaussures de randonnée, vous découvrirez un monceau de courriers, des factures surtout et ces maudites publicités qui en dépit des demandes n’en finissent pas de s’accumuler inutilement. C’est encore le répondeur qui va dérouler sa lente litanie d’appels infructueux. C’est aussi le coffre à vider avec l’âme en peine.

La rentrée commence par des lessives et du linge qui sèche. C’est la fin des beaux jours et bientôt la ronde du sèche linge. Ce sont les angoisses du dimanche soir, la boule au ventre qui revient, qui vous vrille l’estomac. C’est encore l’agenda qui retrouve ses droits, qui rythme votre existence, la transforme en jeu de piste cadencé.

Sur la route du retour, chacun pense à tout cela, à des échéances qui occupent l’esprit, inquiètent ou bien effraient. C’est l’entrée du petit dernier à la grande école, le passage de l’aîné au lycée, l’obligation de faire quelques économies, la nécessité de faire un régime. C’est une infinité de promesses que l’on se fait et qui resteront lettres mortes.

La rentrée c’est le retour de la morosité, la fin des folies, la victoire du conformisme et la tyrannie de cet emploi du temps qui s’impose à vous. C’est le triomphe des contraintes et chacun le sait dans l’habitacle de la voiture. On se tait, on sait qu’il faudra attendre de longs mois pour retrouver l'exubérance des grandes vacances.

Grisement vôtre.

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Hervé BAUDRY - Le Monde


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