Au Réveillon, ne vous payez pas leurs têtes !
Conséquences induites par la loi sécurité.
Attention lors de vos réveillons.
Mes semblables ont pris la curieuse habitude de photographier leurs plats de fête, une envie de faire partager, sans doute un geste plein d’humanité et de solidarité pour les plus démunis, qui peuvent ainsi se régaler par procuration. Nous ne sommes plus à une abjection près et même si cette pratique me reste sur l’estomac, il m’appartient d’éclairer vos lanternes à son propos.
À Noël comme à la Saint-Sylvestre la volaille est célébrée sous toutes ses formes. Il vous appartient cependant cette année de vous montrer modeste quant au choix de la bête. La dinde risque de vous rester sur les bras si vous respectez scrupuleusement le nombre d’élus à votre table. Les restrictions sanitaires ont coupé la cène en deux, pas plus de six sinon la police s’invite elle aussi. Ceci risque de vous mettre du plomb dans l’aile, ce qui n’est jamais fameux pour la digestion.
Ne soyez donc pas les marrons de la farce, le dindon fera l’affaire tout comme le chapon ou un bon poulet de Bresse. Faites donc un choix raisonnable et n’oubliez pas que pour satisfaire le bon ministre de l’intérieur, il vous est tout à fait déconseillé d’associer canard et poulet. Cette mesure ne fait d’ailleurs pas l’objet d’une levée de boucliers de nos amis toqués, c’est un mariage contre nature.
Votre initiative culinaire ne subira pas les recommandations du gouvernement qui pour cette première année de restriction sur les réveillons, ne songe pas encore à préciser par le menu, ce qui doit se trouver dans notre assiette. Ceci viendra assez tôt, pour l’heure l’imagination du mitron est encore de mise. La prudence s’imposera dans un tout autre domaine.
C’est au moment de dresser le plat, de le servir sur la table que tout risque de basculer si vous n’y prenez pas garde. Tout d’abord, assurez-vous que vous avez déclaré en Préfecture cette petite réunion amicale ou familiale. Tout rassemblement au-delà de deux suppose une déclaration officielle, à l’exception notoire des plans à trois chers à Marlène Schiappa.
Si vous avez effectué cette démarche, vous n’êtes pourtant pas sortis d’affaire. L’amende certes ne viendra pas se cacher dans le ventre de la bête sacrifiée sur l’autel de la convivialité, mais elle peut surgir inopinément si l’un de vos invités ou vous-même se met en tête d’immortaliser la scène. Les appareils photographiques surgissent désormais à toutes les sauces, c’est bien du reste ce qui préoccupe le gouvernement.
Il vous appartient de fixer les règles du jeu avant que de passer à l’action. Si le cuisinier utilise un hachoir ou bien un couteau de cuisine, il est préférable pour lui qu’il ne soit pas pris en flagrant délice. La brigade antiterrorisme pourrait surgir dans l’instant et gâcher votre réunion amicale. Il est désormais des objets à ne sortir qu’en présence d’un avocat qui a toute sa place sur votre table.
D’autre part, pour ceux qui conservent l’usage de laisser la tête de la volaille, tout cliché sera flouté car dans le cas contraire, vous vous exposerez aux pires conséquences. Non seulement le convive photographe se verra confisquer son appareil mais qui plus est, en tant qu’organisateur, vous devrez rendre des comptes à la justice pour ce nouveau délit.
Je devine que toutes ces explications risquent de créer des tensions dans votre petite fête. Les prises de bec ne sont pas à exclure. Ne vous mettez donc pas martel en tête, évitez la volaille c’est plus sûr d’autant que la grippe aviaire attend sournoisement son heure pour prendre le relais de la Covid 19.
Un tout dernier conseil, pour rester dans l’air du temps, évitez absolument la bûche de Noël et les marrons. La première est désormais répertoriée dans la liste des objets contondants pouvant servir d’arme par destination et les seconds qu’ils soient glacés ou non, sont vus d’un très mauvais œil au ministère de l’Intérieur. Bonnes fêtes à tous.
Culinairement vôtre.