Des accusations sans fondement
Est-il permis céans de rester dubitatif quand un homme déclare sous serment que les vilaines accusations dont ce haut dignitaire de la nation est la malheureuse cible sont sans fondement alors même que le fond de la polémique porte sur des violences sexuelles et physiques ? La main sur le cœur, l'homme jure son grand Dieu de bonté et d'amour, qu'il est blanc comme neige dans ce dossier aux terribles relents nauséeux.
L'expression incriminée, pour malheureuse tout autant que maladroite qu'elle soit, atteste à l'évidence que notre homme se fait fort de ne pas tourner le dos à ses responsabilités et qu'il entend lui aussi éclaircir cette nébuleuse affaire. Pour lui, son audition devant cette officielle commission ad-hoc, est en quelque sorte une sortie du tunnel médiatique dans lequel des esprits pervers entendaient l'enfermer.
Il convient, si on lui accorde crédit, de se pénétrer de sa bonne foi. Il ne savait rien puisque les voix du seigneur et de ses représentants sur terre sont, comme chacun le sait, parfaitement impénétrables. Comme on lui souffle en haut lieu, face à une humiliation, il est conseillé de tendre l'autre joue certes mais jamais l'autre fesse.
La co-présidente de cette grosse commission n'est pas dupe puisqu'elle s'engage à réécouter attentivement la bande son de l'audition pour y chercher la petite bête, détecter le mensonge par omission ou par inadvertance pour y mettre le petit doigt et y engouffrer une procédure de parjure afin de mettre à l'index ce personnage. De tels propos me font dresser l'oreille et pas que, d'autant que nous sommes encore en Raie Publique, système politique qui exclut le pardon par la seule confession ou l'acte de contrition.
Mais à quelle absence de fondement fait référence ce béarnais bon teint qui escompte bien nous berner ? Pour qui gouverne en maniant le sabre et le goupillon, l'important est de ne pas se couper durant son audition pour ne pas apporter de l'eau bénite à ses détracteurs. Dieu fera le reste en le lavant de tout soupçon. Brandissant alors fièrement le goupillon, il pourra redresser la tête et poursuivre son œuvre de moralisation de la politique nationale.
Sans fondement quand on est centriste convaincu est cependant une posture qui interroge et met en doute la position et les convictions de ce missionnaire de la morale publique. Il y a un trou béant dans son argumentaire, l'absence d’empathie pour les malheureuses victimes. Si l'habit ne fait pas le moine, ce mépris fait le jocrisse de la pire espèce.
Bien-sûr, comme aimerait à le lui glisser dans l'oreille son cher ami et compagnon de route, le député du camembert et de la baguette de pain, il convient de se montrer coulant avec la mie et impitoyable avec les opposants, ces trous du cul misérables et sans âme qui espèrent vous mettre dans le pétrin. Croûte que croûte, ne pas se départir de la ligne, suivre son chemin sans déroger à sa posture initiale.
Dieu reconnaîtra-t-il les siens et devra-t-il convaincre les jeunes victimes d'alors que le martyr est le plus sûr chemin pour gagner son paradis quitte à devoir faire un petit crochet par les portes de l'enfer ? On peut s'interroger sur cette vieille tradition du supplice dans l'église apostolique qui n'a jamais cessé de faire des émules, surtout dans le camp des bourreaux.
Toujours est-il que dans cette affaire dont je ne suis pas compétent pour démêler le vrai du faux, je n'ai qu'une certitude : l'évocation du Fondement est plus qu'une maladresse, une faute et au-delà, une véritable insulte à ces pauvres gamins qui découvrirent à leurs dépens l'interprétation la plus détestable de la parole christique : « Aimez-vous les uns, les autres ! ». J'en reste sur le cul, qui au demeurant, depuis belle lurette, n'est plus béni.