Escapade en escarpins ...
Petite fabulette au pied levé

Le preux chevalier avec une chaussure noire.
Il a fallu qu'un « torche-c.. » publie des clichés pour que la médiasphère s'emballe une fois encore avec une histoire que chacun reprend au pied levé. Le débat du moment était déjà à hauteur de caniveau, pourquoi ne pas pousser jusqu'aux latrines ? Nous pourrions prendre au pied de la lettre les miasmes de notre époque résolument moderne mais cela ne serait pas digne. Préférons la fable pour aborder cette jolie farce.
Un preux chevalier qui exerçait le pouvoir suprême donc, fort mécontent de partager son vaste château avec une commère acariâtre et rejetée par ses gentils sujets, se prit d'envie d'aller chercher l'amour sous d'autres cieux. Que ceux qui n'ont jamais fauté évitent de lui jeter la pierre ! Nul ne peut prétendre détenir la vérité en cet étrange domaine des sentiments …
Notre homme, normal malgré ses titres et les obligations dues à sa charge, avait le désir de rejoindre discrètement la nouvelle élue de son cœur. Mais comment échapper à la surveillance permanente des chasseurs d'immondices ? L'affaire n'était pas simple et il lui fallait faire preuve, pour une fois, d'un peu d'imagination.
Le chevalier à la gentille mine décida d'enfourcher un fier destrier afin de sortir aux premières heures de la nuit. En ce bel équipage, il devait surtout se soucier de n'être point vu ou tout au moins de n'être point reconnu. Il s'équipa d'un heaume qui ne laissa rien voir de son visage et revêtit une tenue ordinaire, sombre et discrète. Il se pensait ainsi à l'abri des voyeurs.
Hélas, il est bien illusoire d'espérer un peu de tranquillité quand on est si noble chevalier ! Il était accompagné d'un page, détail troublant pour ceux qui sont toujours à la recherche de la petite bête. Pire encore, il avait gardé ses escarpins princiers ; ce détail d'importance trahit justement celui qui était en quête de chaussure à son pied ! La sagacité des méchants est redoutable, l'homme qui s'imaginait avoir des ailes à ses souliers, traînait en réalité des chaînes et un boulet !
Ainsi, dès le lendemain, les manants furent-ils avertis de l'escapade de leur seigneur. Si beaucoup trouvèrent l'information parfaitement déplacée, plus nombreux hélas, furent ceux qui se précipitèrent sur la gazette maudite. On ne peut échapper à la règle qui prétend que le tas de fumier attire tous les charognards du secteur. O prince infortuné qui voyait son trône vaciller alors qu'il était déjà fort bancal !
Pire encore, il se trouva d'autres châtelains fort peu patelins pour dénoncer l'outrage, tirer à boulets rouges sur celui qui aurait dû faire don de son corps uniquement à son royaume. Jolis hypocrites qui profitent de la moindre miette pour dénigrer et salir alors qu'ils sont sans doute eux-même si peu exempts de reproches.
Oublions bien vite cette histoire ; elle ne mérite pas de faire couler autant de salive substance qui, par sa fréquentation, devient trop souvent infâme bave de crapauds. Il faut laisser une place à la vie privée tout en admettant qu'à vouloir faire du pouvoir républicain, une représentation de la monarchie d'antan, les Princes et les Barons se font prendre à leur propre jeu.
Quant à notre preux chevalier, qu'il garde à l'esprit les déboires de son ami Dumas, grand chausseur du royaume et prosateur émérite. J'ose espérer que les bijoux sont restés cette fois au cou de la reine et que la belle courtisane n'a point reçu de cadeaux princiers pour le fruit de ses faveurs. Mais ce serait alors une autre histoire …
La seule morale qu'il faille retenir de cette fable qui en manque quelque peu, est que lorsqu'on se trouve sous les feux des médias, il serait prudent désormais de disposer de chaussures réservées aux usages intimes. Si les tapis rouges supposent des escarpins de qualité, taillés sur mesure, à l'élégance raffinée, la cavalcade nocturne, en revanche, impose des brodequins anonymes, de simples et bons gros godillots qui ne peuvent trahir les origines princières.
Cordonnièrement vôtre