Sous les crampons, la plage

Comment faire des éclats ?

L'actualité du football est suffisamment dramatique pour chercher dans ce marigot nauséeux quelques motifs de sourire tout en se gaussant quelque peu de cet univers impitoyable. Fort heureusement, il se passe toujours quelque chose pour inspirer le persifleur sans devoir remuer la fange que charrie un merveilleux sport qui ne mérite pas d'être ainsi défiguré par de prétendus supporters ou pire encore par des acteurs de si peu de nuance.

Mais revenons à ce gazon, curieusement placé sur un bras ancestral de la LOIRE, du temps où la dame Liger divaguait sur son Val. Pour mémoire, la belle histoire de Jeanne et Colin évoque cette époque lointaine qui ignorait alors les curieux rebonds de la balle ronde.

Il était donc une fois un terrain placé dans un quartier périphérique qui avait l'inconvénient d'être ceint d'une piste d'athlétisme. Les joueurs, isolés au milieu de cette morne plaine voulurent se rapprocher de leurs rares spectateurs. Une première incongruité effaça la piste pour rapprocher le terrain de la tribune d'Honneur afin de permettre aux locataires des loges de mieux voir le spectacle entre deux coupes.

Puis, d'autres travaux succédèrent au premier pour décentrer totalement un terrain, cette fois entièrement recouverts de gazon. Ce glissement ne fut pas sans conséquence puisque du côté des équipes d'entretien, le sentiment de vivre l'effet de la marée dans ce glissement des lignes créa un profond malaise qui après bien des années, trouva sa matérialisation.

La météo ayant mis le curseur sur pluvieux, la pelouse hybride fut saturée de cette eau qui manquait il y a peu. Pour permettre de la fouler avec des crampons sans faire d'escalope, du sable fut répandu sans modération, en mémoire du passé ligérien de l'endroit. Hélas, un plaisantin, un impondérable ou bien un malencontreux concours de circonstances accompagna ce sable d'une myriade de petits morceaux de verre.

Les mauvais esprits dont je ne manque pas d'être pensèrent que c'était là la dernière facétie des dirigeants pour permettre enfin à leur équipe de faire des éclats dans ce championnat National dans lequel elle est engluée dans le ventre mou. Que nenni, ils entendaient simplement jouer la transparence sur les finances du club.

Désormais, il convient de sortir de ce guêpier par le haut en se lançant dans une chasse au trésor. Les orpailleurs ont depuis belle lurette disparu de nos rives, c'est donc vers une autre spécialité qu'il fallut se tourner. C'est là le génie de ce sport que de tirer toujours la quintessence d'une situation scabreuse.

Du sable et des éclats de verre, il n'y avait pas mieux pour mettre le pied à l'étrier à une communication relativement défaillante et saisir la balle au bond pour faire un joli coup médiatique tout en mettant en lumière le tissu industriel local. Le nettoyage de la pelouse fut confié à la société Duralex afin que soient fabriqués de magnifiques verres à deux pieds pour enrichir la boutique du club.

On ne peut que se féliciter d'une telle idée qui illustrera parfaitement l’ingéniosité de ces dirigeants tout en mettant en valeur un fleuron de l'industrie locale. Le verre à deux pieds symbolisera durablement le club qui a choisi la guêpe pour symbole en référence au miracle de Saint Aignan en 451. Cette belle initiative effacera à n'en point douter le bourdon des supporters qui se désespèrent de ne pas revoir leur cher club remonter en division 2.

Je me pique le nez quant à moi en buvant dans un des prototypes de ce curieux verre. Il me fut donné pour effectuer quelques essais avant lancement de la production car je fus à l’origine de cette idée saugrenue. Quant au slogan qui accompagnera le lot de trois verres, j'en suis aussi le créateur : « Ayez bonne descente pour nous permettre de remonter en D2 »