vendredi 16 août 2013 - par Dan

Le cas Marion Bartoli : chronique d’une sortie annoncée

Le matin 15 aout 2013, à la surprise générale, Marion Bartoli abandonne le tennis en pleine gloire un mois et demi après sa magnifique victoire à Wimbledon. Pouvons nous réellement l'interpréter ? Marion est un cas complexe, elle a toujours été un peu "en dehors" du milieu fédéral, évoluant en structure fermée auprès de son père et entraineur.

Certainement épuisée elle écoute son corps qui a beaucoup donné. Elle a mal partout.Elle est "en vrac" à ne pas douter. Alors, une défaite au premier tour avoir avoir toucher le Graal et patatra ! On peut considérer comme un petit miracle cette belle victoire de Wimbledon alors que personne ne l'attendait il faut s'en rappeler. Elle cumulait les défaites depuis longtemps, et puis il y a eu ce parcours si inattendu. L'essentiel est qu'elle a fait une très belle finale en jouant à fond et à la perfection. Elle sait mieux que personne qu'elle ne refera plus un truc pareil, un peu comme Noah à l'époque, lui aussi personnage complexe, atypique, qui savait que c'était un miracle de gagner Rolland Garros en 1983.

Des sorties de scènes inattendues il y en eut un certain nombre,y compris de champions éphémères, de cas plus ou moins similaires, moins médiatiques. Se souviens-t-on -en tennis masculin- d'Andréas Gomez l'Equatorien, qui après sa victoire inattendue à RG ne mettait plus une balle dans le court ? Ou bien de l'Argentin Gaudio ? qui ne gagna plus un match après sa victoire surprenante à RG lui aussi. Ou de Petre Korda qui arrêta peu après sa finale gagnée en Australie, puis contrôlé positif.

Alors, la pression ? la gloire qui phagocyte les esprits ? Dans le cas du tennis féminin, il faudrait rajouter une dimension particulière : la psychologie de "la gagne". Elles n'ont pas la "grinta" qui fait partie de façon inhérente des hormones mâles. Qui se souvient de l'arrêt de sa carrière d'une Jennifer Capriati (une première fois à 17 ans avant de reprendre une seconde carrière réussie) tombée dans la drogue ?

Pensons aux deux Belges, Clijsters et Hénin stoppant leurs carrières en pleines gloire. Clijsters voulait un enfant avant tout. Hénin -victime d'une mononucléose- ne s'était jamais vraiment remise de son divorce d'un homme tant aimé lequel conditionnait -sans même le savoir- son équilibre sportif. Elles ont tenté un come-back, en vain. Dans ces deux cas -bien que différents- ce sont des fins de carrière pour des raisons essentiellement de psychologie féminine, car pourtant jeunes et au sommet.

Souvenons nous de Martina Hingis, dépressive qui fit ses adieux ayant à peine vingt ans puis qui tenta,en vain elle aussi, un come back. Elle avait été si abattue, en larmes sur le court, parce que vilipendée par le public tel aux jeux du cirque, en finale à RG, lequel soutenait Steffi Graff sans vergogne contre elle "la petite belle au bois dormant" si douée.

Par jalousie ? par stupidité ? On ne sait au juste. Il y a parfois dans le public quelque chose de malsain qui peut meurtrir une femme, alors qu'un homme est naturellement armé pour la bagarre à tous les niveaux. Pour en revenir au cas Bartoli, il faut se rappeler la sortie odieuse de ce commentateur de la BBC lors de la finale, qui balança qu'elle avait gagné effectivement mais qu'elle n'était pas un "canon de beauté" comparée à Sharapova... Sur le coup, elle a répondu avec de l'à propos. Mais ce genre de pic avec un retentissement médiatique à dû la toucher au plus profond dans sa chair sans que l'on puisse l'évaluer sur le coup. On peut penser que cela n'est rien, mais il en est restée certainement comme une morsure injuste et stupide. Comme si après un magnifique tableau, on avait bêtement gribouillé le bas de la toile du maître.

Chez la femme, le sport n'est pas une seconde nature, cela n'est pas viscéral comme chez l'homme (tien ! la théorie du genre, le genre qui n'existerait pas...). Cela passe après l'Amour, les Enfants. On ne s'en rend pas compte dans la compétition en entendant les cris qu'elles poussent pendant les échanges, pour exister elles aussi dans un domaine qui sied aux hormones masculines, je veux dire la gagne, la lutte, l'agressivité, etc... L'être humain est fragile et c'est rassurant, sinon il devient inhumain, il en vient à faire la guerre et tuer son prochain, celui qui n'a pas les mêmes idées ou la même religion ou pour le pouvoir de certains qui les poussent. Seuls les hommes sont capables de ça...

Elle fait ses adieux en pleine gloire, comme Pète Sampras après sa dernière victoire, son dernier match à Flushing Meadow, ce type qui a géré sa carrière avec intelligence. Il savait que cette victoire serait la dernière, après les ennuis que son corps lui procurait à la fin de son parcours. On pourrait se remémorer le cas de Borg, s'arrêtant en pleine gloire à 26 ans, mais qui n'en pouvait plus de penser tennis et qui était distrait par les femmes et la drogue ; lui si "clean" pourtant dans son mode vie sportif, vivant comme un ascète.

On ne connaîtra jamais les raisons intimes de tous ces grands qui ont remplis notre imaginaire. Ce sont des considérations parfois physiques ou sportives mais aussi des problèmes psychologiques enfouis au fond d'eux mêmes. La décision de Bartoli peut surprendre mais elle était sans doute sous jacente dans son esprit depuis longtemps : toujours se surpasser dans la douleur physique.

Bravo à elle et à sa carrière aboutie. Et il vaut mieux qu'elle ait cette lucidité qui l'empêchera de finir au fond du classement, après avoir connu un tel sommet en 2013.



9 réactions


  • subliminette subliminette 16 août 2013 11:09

    Elle a bien raison, Marion. Si ses entraînement la font tant souffrir, il faut arrêter. Ce serait stupide de se bousiller les corps alors qu’elle n’a pas 30 ans et toute une vie devant elle.

    Rien ne vaut ce sacrifice .


    • Fergus Fergus 17 août 2013 09:04

      Bonjour, Subliminette.

      Je n’ai pas du tout la même lecture de la sortie de Bartoli. Dans un article à paraître aujourd’hui (je viens d’en être informé par AgoraVox), je relève d’énormes con,tradictions entre ce départ précipité et les propos tenus par la Française dans les jours, et même les heures, qui ont précédé. A aucun moment, il n’était question d’arrêt de carrière, mais au contraire de nombreux projets, ce qu’a confirmé son entourage fédéral !


  • oj 16 août 2013 11:21

    respect pour ces gens qui consacrent une bonne partie de leur jeunesse a exercer à fond une pratique pour atteindre l’excellence.

    un peu inhumain selon moi...surtout dans ces domaines ou c’est une bonne partie un choix exterieur.

    Un peu inutile aussi, mais c’est un point de vue très personnel, l’humanité avance ainsi , de manière un peu inhumaine, en sélectionnant ceux qui ont des capacités a se surpasser.


  • LE CHAT LE CHAT 16 août 2013 11:54

    Partir après avoir décroché Wimbledon , au sommet de ce qu’elle pouvait espérer , c’est bien !
    ça évite le match de trop !


  • ZEN ZEN 16 août 2013 12:37

    A ce stade, le sport n’est pas une vie...
    Elle sort de ce qui ressemble parfois à un enfer
    Je pense qu’elle l’a compris


  • Abou Antoun Abou Antoun 16 août 2013 14:10

    Marion a un truc en plus, elle est très intelligente.


    • Fergus Fergus 17 août 2013 09:06

      Bonjour, Abou Antoun.

      Et un désagréable petit truc en moins : la solidarité avec ses compatriotes, Bartoli étant une exilée fiscale qui fait un doigt d’honneur à ses compatriotes dans la difficulté.


  • chmoll chmoll 16 août 2013 16:57

    je souffre pour elle ,oh mon djieu que c affreux affreux !! pour la ramasseuse de balles
    avec qui on nous a fait chier toute la journée d’hier


  • hunter hunter 17 août 2013 09:24

    Bon dans l’absolu, on s’en fout non ?

    Mais bon quand même, un peu de respect, car elle sent qu’elle ne peut plus assurer, donc elle arrête, là où d’autres se seraient injectés tout un tas de substances pas nettes dans le circuit, pour continuer !

    Peut-être qu’ainsi on parlera un peu plus de la délicieuse Alizée Cornet ?

    H/


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