jeudi 4 janvier 2007 - par Yann Riché

2006 une des plus chaudes années & Kokopelli condamnée

Deux news du jour sont à mettre dans le débat sur l’environnement et sur la présidentielle.

La première news concerne le réchauffement climatique. 2006 s’avère être la sixième année la plus chaude enregistrée depuis (compte rendu du monde.fr). Ainsi l’impression de réchauffement se confirme, d’autant plus que les autres années les plus chaudes sont 1998, 2005, 2002, 2003 et 2004.

Pour la France il s’agit de la deuxième année la plus chaude et en Australie on vit la pire sécheresse depuis que les mesures existent, quand au Canada 66 km² de glace se séparent du continent.

Statistiquement cela définit non plus une anomalie mais une nouvelle tendance. Ces données sont donc alarmantes surtout quand les Etats Unis freinent encore au niveau fédéral pour ne pas adopter le protocole de Kyoto et que la Chine et l’Inde (2,4 milliards des habitants sur 6,5 millards) veulent comme nous consommer (soit environ un milliard d’habitant pour les pays "développés" USA - Canada - UE). Ce qui devrait en toute logique tripler notre consommation et pollution.

Ainsi Chirac a mis le doigt où il fallait pour désigner les enjeux de la présidentielle en expliquant que la révolution "écologique" est aussi une révolution technologique, et donc industrielle. En effet, si nous voulons agir vite, nous devons basculer dans les nouvelles énergies. Pour cela, il faut se donner des objectifs clairs qui ne sont accessibles que par un diagnostic de la situation française (acteurs du marché, fiscalité, consumérisme, etc.).

En fait nous savons tous que nous devrons changer de voiture (les bio-carburants, il fallait les faire il y a cinq ou dix ans, maintenant c’est un peu tard) pour passer à des voitures à énergie renouvelable. Mais les constructeurs français semblent sérieusement à la traîne, voilà une inquiétude bien réelle.

Nous savons tous que nous devrons changer nos modes de consommation par l’utilisation de plus en plus fréquente des transports en commun par exemple, mais aussi par des modes de distribution qui devront évoluer.

Mais nous savons aussi qu’être à la pointe sur ces marchés est une opportunité pour le futur et pour nos industries. En effet si la recherche et le développement combinés à l’usage permettent d’établir des prix de marché d’électricité propre en dessous du marché actuel, alors les industries trouveront un argument pour rester ou pour se développer en France et en Europe.

Nicolas Hulot face à cette dernière nouvelle se sentira certainement renforcé dans sa décision d’y aller (je prends le pari qu’il y va - j’ai un risque d’une chance sur deux). Souhaitons qu’il y aille pour que le débat monte un peu.

Nicolas Hulot défend la biodiversité, ce qui m’amène au second sujet de ma lecture du Monde. On y apprend que Kokopelli, une association qui entretient un commerce de graines potagères et florales issues de cultures traditionnelles dans le but de maintenir et de développer la diversité alimentaire, a été condamnée ce jour par le tribunal de la Cour d’appel de Nîmes pour commercialisation de semences de variétés non autorisées à 17 130 euros d’amende.

La loi est la loi, certes, pourtant deux questions de base se posent :
1- pourquoi doit-on déclarer des semences de variétés existantes ?
2- pourquoi n’y a-t-il pas un catalogue de variétés anciennes ou traditionnelles ?

Pour la première question on peut supposer que certaines plantes ne sont pas forcément comestibles (le chanvre, par exemple ?) mais en feuilletant rapidement le catalogue, j’ai trouvé des noms très spéciaux (le Small Sugar qui ressemble à un potiron, des piments de tous les continents dont le Slim Jim, des tomates rondes longues grosses et petites dont la Seattle best of all la Uralskij Mnogoplodnij, des choux, des tournesols et des orties...) mais pas de choses illicites à première vue. En fait le sujet semble plus politique et polémique entre le GNIS, Groupement national interprofessionnel des semences qui s’occupe du catalogue des semences et qui a donc intérêt à faire respecter son pré carré et Kokopelli qui, à juste titre, défend une certaine liberté.

Pour la deuxième question, l’article du Monde est en ce sens élogieux puisque pour les semences dites de conservation, une directive européenne existe, mais cette dernière n’a toujours pas été transposée en droit français... Et pour parachever la défense volontaire ou non de Kokopelli, un encart nous informe que l’utilisation du purin d’orties n’est plus hors la loi depuis qu’un amendement a été voté in extremis à l’Assemblée nationale.

Voilà donc notre paradoxe résumé ici, beaucoup de volontarisme dans les mots et positionnements mais dès qu’il faut appliquer les règles, transformer les mots en actes, cela ce complique. Peut-être est-ce dû au tempérament français qui ne peut appliquer les lois que sous la menace de sanctions européennes, ce qui permet à chacun de se dédouaner en cas de problème et d’avoir toujours sous la main un bon bouc émissaire, Bruxelles.

A lire aussi :
un article précédent : "L’écologie au coeur des présidentielles"
l’article d’Olivier Frigout "Kokopelli : l’association poursuivie en Justice pour concurrence déloyale".



10 réactions


  • jcm (---.---.39.69) 4 janvier 2007 13:56

    Article au demeurant intéressant mais qui souffre d’un manque assez criant de documentation, notamment sur le point :« pourquoi doit on déclarer des semences de variétés existantes ? ».

    Il s’agit en fait de garantir un niveau de qualité, ce qui est assez légitime si les semences sont destinées à la seule production.

    Pour régler la question il suffirait peut-être de mettre en oeuvre deux labels.

    L’un pour les graines portées au catalogue du GNIS serait « Semences certifiées pour la production », l’autre serait « Semences sans garantie de productivité », ce qui pourrait intégrer des semences reconnues comme anciennes ou fruits de nouveaux croisements, et cela sans que le second label corresponde à une interdiction pour des agriculteurs de les utiliser pour la production.

    Ainsi nous trouverions sur nos étals des fruits et légumes beaucoup plus variés, des goûts plus variés également, des formes, des couleurs...

    Tous les jardiniers du monde, tous les gourmets aussi, devraient se battre pour que cette condamnation de Kokopelli soit levée : à vos blogs, téléphones... remuez ciel et terre !

    Enfin vous écrivez : « ...beaucoup de volontarisme dans les mots... » et là...

    Quelle gentillesse d’appeler « volontarisme » cette continuelle tromperie qui consiste à dire ceci alors que l’on est bien décidé à faire le contraire !!!

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  • caramico (---.---.211.139) 4 janvier 2007 15:56

    merci de m’avoir fait connaitre Kokopelli.


  • alainmarc (---.---.230.36) 4 janvier 2007 16:58

    Bonjour, Je suis tout a fait d’ accord pour lutter contre des décisions de justice absolument indignes, qui concernent notre alimentation et les choix que l’ on fait. Marre de la « dictature » imposée par les producteurs de semences plus ou moins trafiquées, qui imposent aux cultivateurs de produire des fruits et légumes certe d’ un aspect alléchant mais sans saveur. J’ ai un bout de terrain sur lequel je produis mes légumes d’ été, quelle saveur , rien a voir avec ce que l’ on trouve dans le commerce... Par contre un bémol sur l’ assoc que tu présente, faut pas déconner, 25 graines de tomates 3 euros !!!! Sachant que tu plantes 3 graines pour avoir un plant ça te fait 8 plants (si tu les réussis et c’ est pas évident sans serre chaude) soit le plant à 37 cts d’ euros ( toujours dans le meilleur des cas). Perso, quand je fais une salade de tomates je conserve les graines, et l’ année suivante hop : 3 graines = un pied soit 3 ou 4 kgs de tomates gratos ! Je suis tout a fait d’ accord que des assoc se montent pour promouvoir les cultures bio mais pas 25 graines pour 3 euros merde, t’ as vu le nombre de graines qu’ il y a dans UNE tomate ? de quoi faire une production que tu n’ arrivera pas à écouler. J’ écris ceci comme un avertissement pour les néophytes qui pourraient se laisser tenter, pour ce prix un lot de 50 graines serait raisonnable mais pas 25. Si vous êtes débutants, ne vous jetez pas sur n’importe quoi et, si vous avez envie de produire vos légumes allez donc faire un tour sur le marché le plus près de chez vous aux mois d’ avril et mai, vous y trouverez des plants (bio ou pas au choix) qui vous satisferont. Il n’ empêche que, même si j’ ai des réserves sur l’ assoc je suis prêt à la soutenir contre ce jugement injuste, une pétition existe t’ elle ? où ?

    PS : Une autre piste, soumettre le problème à Chirak, en ce moment il promet tout, vivent les lendemains qui chantent et où l’ on rase gratis. Super Menteur est de retour

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  • ARNO (---.---.26.162) 4 janvier 2007 17:05

    Il me semble avoir entendu que kokopelli allait faire appel devant la cour europeenne pour que la france transcrive la directive sur les varietees anciennes en droit francais.

    le lobbying des grands semenciers industriels va surement se poser la, mais qu’importe, il est fondamental de se battre contre une agriculture produisant une et une seule variete de chaque espece et promouvoir la bio-diversité des especes.

    plus d’especes egal pour le producteur de pouvoir lutter naturellement contre les maladies (si une espece est affectees sur une saison , une autre ne l’est pas forcement)et donc de ne pas vouloir d’ogm. pour le consomateur cela signifie plus de choix et donc plus de saveurs et d’originalité.

    vive kokopelli et sa lutte pour la preservation des varietées anciennes de plantes, fruits et legumes.


  • Berthold (---.---.197.28) 4 janvier 2007 17:53

    Mon grand père Berthold qui lui connaissait l’art du Jardinage aurait sans nul doute rivé leur clou aux trop bien pensants et aux semenciers.

    N’ayant que du béton dans mon univers, je suis malgré tout du côté des Kokopelli de tout coeur


  • alpo47 (---.---.120.71) 4 janvier 2007 21:08

    Hélas, voilà un autre secteur où les lobbies tentent d’imposer LEUR loi... idem pour les OGM. Et nos politiques n’ont pas grand chose à refuser aux multinationales (tiens, on revient facilement aux politiques) ... et le parquet est aux ordres des politiques.

    La boucle est bouclée. Peu importe les dégats pour les générations futures, seul importe le profit immédiat ou à court terme.

    Oui, nous avons tous intérêt, pour nous et nos enfants, à défendre Kokopelli (en plus leurs variétés de tomates sont hallucinantes) , car c’est pour notre avenir qu’ils se battent.


  • dionysos (---.---.232.178) 4 janvier 2007 22:59

    tous ensemble soutenons kokopelli !


  • ossamuelle (---.---.123.140) 6 janvier 2007 23:52

    L’(ultra)libéralisme représente donc bien une FICTION de liberté et de dérèglementation. Il s’agit de DEREGLEMENTER ce qui protège les faibles et de REPRIMER tout ce qui au contraire émane d’eux et le peu de liberté qui leur reste ! L’Etat français ne déroge aucunement à celà, qui protège si bien Montesanto et consorts. Mais je ne crois pas davantage à la bonne Europe contre le méchant Etat français !


  • isabelle (---.---.40.239) 8 janvier 2007 23:28

    La poursuite en justice de kokopelli est encore une aberration. Car en effet, la directive européenne prévoit des aménagements pour ce type de semences qui existent en Italie par exemple, avec inscription à un catalogue particulier. Là encore en France, on favorise la totale dépendance des agriculteurs à l’agro-industrie. C’est aussi aberrant car d’un autre côté, on a un vrai problème en agriculture dû à l’érosion de la diversité génétique agricole. Le petit nombre de variétés (et de races animales) très productives commercialisées ne suffit pas à garder un potentiel génétique suffisant pour assurer l’avenir. Cela est le fondement d’un grand programme international de conservation mené par la FAO. On garde des banques de gènes mais on sait très bien que ce système ne vaut pas la conservation in situ, par l’utilisation effective de ces variétés dites « anciennes » dans les territoires. Or la France qui participe à ces programmes, empêche dans le même temps la conservation in situ, par ce genre d’interdictions.

    Je cherche d’ailleurs des blogs d’agriculteurs qui s’expriment sur ces questions : si vous en connaissez... je suis preneuse.


  • laivamun (---.---.236.227) 17 janvier 2007 23:12

    C’est curieux car il me semble avoir souvent entendu prendre l’année 1950 pour base en disant il n’avait pas fait aussi chaud que depuis ...


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