C'était il y a quelques temps dans une suite d'un Bed and Breakfast, un hôtel situé à proximité de la gare ferroviaire, idéal pour des séjours de courte durée. La propriétaire était très sympa et accueillante. La nuit à 35 euros pour deux, c'est tout. Grande pièce tout confort avec douche, les WC dans le couloir mais très bien entretenus.
Pas de bruit malgré l'emplacement en contrebas de l'autoroute. Le seul souci, les moustiques. Et Paulette.
Elle a dégusté, Paulette. Tout est parti des moustiques. Depuis, on cherche à se mettre d'accord pour oublier tout ça.
Quand elle est sortie de la chambre, elle était enflée de partout. Ce sont les moustiques qui m'ont donné l'idée. Et le pulvérisateur électrique.
Je ne vous raconte pas la suite, j'ai un peu honte.
Toujours est-il que j'ai bien failli bousiller ma carrière de mari tranquille : quand Paulette est sortie de la chambre, enflée comme elle était, elle s'est cognée contre le distributeur de boissons chaudes dans le couloir. Quelqu'un était là, il a tout vu.
Il y a eu un quiproquo. Il est allé à la police. On a voulu salir mon honneur. Fine mouche, Paulette a vite compris ce qu'elle pourrait en tirer. Alors, pour en finir et sauver la face avant de tout oublier, on va s'arranger, avec Paulette.
De toute façon, il ne s'est rien passé. Juste un moment d'égarement que je regrette. Les cris, c'était à cause de son point G. Je voudrais qu'on n'en parle plus très vite. Alors, on va se faire une transaction. Avec une clause de confidentialité : ni Paulette ni moi ne pourront plus jamais évoquer quoi que ce soit de ce qui s'est passé à l'hôtel, ni moi lors des apéros-saucisson, ni Paulette à son club de broderie.
Des amis chasseurs me disent que cela équivaudra à un aveu de culpabilité. Je réponds que non, c'est un gain de temps et d'argent, car je la connais, Paulette, elle va s'accrocher longtemps à mes basques.
Pour combien je vais en avoir ?
C'est classé secret-défense, comme pour la BCE. Disons qu'on va prendre en compte tous les paramètres. J'ai pas envie que nos détails intimes soient sans cesse étalés dans les conversations. Je ne veux pas finir comme DSK.
On a des modalités pratiques à régler : chèque ou virement.
Vous vous demandez si je vais pouvoir payer. Et vous avez raison. Mais je peux vous rassurer : Paulette est l'héritière d'un riche marchand de pipes de bruyère, elle prendra sur la succession. Ça fera d'une pierre deux coups, on disposera du capital plus vite (sans payer d'impôt, donc sans avoir à payer la nationalisation d'Arcelor-Mital avec Laurence Parisot) et on pourra changer de 404. Notre couple pourra prendre un nouvel essor.
Et on se remettra à faire du syndicalisme, maintenant que François Chérèque est parti.
Et ce jour-là, mes camarades, le prolétariat conscient et organisé écrasera sous son sabot d'airain l'hydre perfide de la réaction, pour redonner une nouvelle jeunesse aux revendications légitimes de tous les travailleurs par une action efficace et adaptée aux circonstances des temps présents.