lundi 7 mars 2016 - par Automates Intelligents (JP Baquiast)

A l’aube d’une possible « révolution » en physique des particules ?

Lors de la « découverte » du boson de Higgs au LHC (grand collisionneur à protons) du Cern l'année dernière, beaucoup de physiciens avaient manifesté une légère déception. Ce boson confirmait bien, dans l'ensemble, le modèle dit standard des particules élémentaires, mais il n'apportait pas de perspectives inattendues.

Jean-Paul Baquiast 06/03/2016
 

Tout cela pour ça, avaient dit les physiciens en rappelant le coût et le trésor d'innovations technologiques qu'avait représenté la mise au point du LHC. Leur espoir avait été que la remise du LHC en service au maximum de ses capacités actuelles révèle des anomalies dans les observations, inexplicables par d'autres hypothèses, notamment des erreurs dans les procédures observationnelles.

Or le redémarrage du LHC en juin 2015 avec une énergie de 13 téraélectronvolts, jamais obtenue jusqu'ici, avait très vite fait apparaître un signal identique détectés simultanément dans les deux détecteurs ATLAS et CMS. Ce résultat, après un examen critique de plusieurs mois, paraissait si intrigant que le 15 décembre, le Cern organisait une conférence pour en discuter les conséquences possibles sur la théorie. Le sujet sera aussi examiné aux Rencontres de Monriond dans les Alpes qui se tiennent en mars 2016.



Nous n'entrerons pas ici dans les détails de l'observation. Renvoyons le lecteur aux deux articles citésci-dessous. Disons qu'à une énergie proche de 750 gigaélectronvolts, les collisions entre protons qui produisent des paires de particules de photons avait fait apparaître, dans les deux détecteurs, un excès de paires de photons. Ceci pourrait être un indice de la présence d’une nouvelle particule. L'excès dans le signal à deux photons aux alentours de 750 gigaélectronvolts ne semble pas en effet compatible avec les signaux prévus par le modèle standard.

Une possible "révolution"

Cependant, ce signal pourrait n'être qu'une fluctuation statistique, une accumulation de signaux due uniquement au hasard. Pour s'en assurer, les physiciens doivent réunir plus de données, ce à quoi tous les expérimentateurs travaillent désormais. Le LHC reprendra les collisions proton-proton en avril 2016. Les données accumulées en trois mois suffiront probablement pour conclure : le signal disparaîtra s'il s'agit d'une fluctuation statistique ou sera renforcé s'il est bien réel.

De leur côté, les théoriciens présentent de nouvelles hypothèses qui pour le profane apparaitront peu explicites ni exaltantes, mais qui pourront conduire à de profonds changement en physique fondamentale. Le cas le plus simple serait un deuxième boson de Higgs. Mais n'obtiendrait-on pas des pistes menant à préciser la nature de la matière noire, voire l'existence d'espaces à plus de trois dimensions ?



Comme quoi le LHC aurait bien mérité le coût de l'investissement, comme le grand nombre des équipes internationales qui y travaillent. Tout ceci est rappelons-le à l'honneur de l'Europe.

* Voir Newscientist https://www.newscientist.com/article/2078975-bigger-than-the-higgs-bigger-even-than-gravitational-waves/

* Voir aussi Pour la science http://www.pourlascience.fr/ewb_pages/a/actu-une-nouvelle-particule-au-dela-du-modele-standard-peut-etre-detectee-au-lhc-36307.php

 



7 réactions


  • christophe nicolas christophe nicolas 7 mars 2016 12:47

    Le problème du LHC est qu’il n’a pas trop de contradicteurs, il a le monopole... il fait son observation tout seul. Vous remarquerez qu’il y a plein de choses plus intéressantes à découvrir dans un domaine observable bien plus proche de nos réalités quotidiennes comme les récentes :

     
     
    Il faut être honnête, ces inventions défient les théories actuelles et les explications données sont absolument insuffisantes mais les observations dépassent largement celles du Cern en importance pratiques et je rajouterai personnellement, en importance théorique et en possibilité d’études.

    Il faudrait basculer les budgets, rogner 50% du Cern en fermant des détecteurs et les attribuer à de nouveaux projets bien plus intéressants pour les chercheurs. Ça vaut pour ITER bon pour la ferraille.



    • Alren Alren 7 mars 2016 18:19

      @christophe nicolas

      Si l’on n’avait pas construit le LHC, on se demanderait toujours, du moins les physiciens théoriciens, ce qu’on aurait pu apprendre en l’ayant fabriqué !

      Beaucoup d’entre eux espéraient sans doute, d’ailleurs, en secret que les découvertes permettraient de remettre en cause radicalement le Théorie standard, laquelle semble aujourd’hui à l’arrêt.

      L’humanité pourrait-elle se passer du LHC pour sa vie quotidienne ? La réponse est oui, évidemment. Mais à l’échelle de la planète, ce n’est pas une dépense si luxueuse que ça quand on la compare à celle des armements et des guerres que ladite humanité finance sans broncher, plutôt que d’éradiquer le faim ou assurer l’approvisionnement en eau potable par exemple.

      Bien d’autres coûteuses dépenses pour la science sont beaucoup moins utiles que celles du LHC.

      En premier lieu, on aurait pu ainsi se passer d’investir des milliards d’euros ou de dollars au choix dans la Station spatiale internationale ! Aucune découverte n’est ressortie de ce projet qui n’avait d’autre but, il est vrai, que 1) afficher aux yeux du monde la supériorité maintenue de l’industrie spatiale US sur toutes les autres et 2) pomper les finances européennes afin que l’argent manque en particulier pour le réseau Galiléo qui aurait surclassé le GPS. Grâce au zèle servile des Allemands, la deuxième partie du plan a été réussie : Galiléo ne fonctionne toujours pas.

      Au contraire, évidemment, la première partie du plan secret a été un échec complet après le fiasco prévisible de la navette spatiale. Ce sont les Russes qui tirent les marrons du feu.

      Il est peu probable que le projet ITER aboutisse à produire de l’électricité par fusion nucléaire. Mais au moins il permettra peut-être de découvrir des lois sur le plasma qui pourraient mieux éclairer, à l’image des résultats du LHC l’insaisissable essence de la matière.


    • Rmanal 8 mars 2016 09:28

      @christophe nicolas
      Il est stupide de vouloir opposer des axes de recherche différent, alors que l’histoire de la science nous montre que c’est bien le fait d’avoir eu plusieurs axes en parallèle qui a permis de faire avancer globalement les découvertes, chaque branche apportant fortuitement à une autre branche des réponses.
      Vous tombez dans le piège de le bienpensance actuelle où la recherche est dirigée par un petit groupe de personne qui pense savoir quel sera la bonne direction.


  • Ruut Ruut 8 mars 2016 08:37

    En gros c’est quoi la révolution ?
    Car pour le moment le Boson tout le monde en parle mais personne ne peut l’expliquer ni le reproduire a la demande.


    • Rmanal 8 mars 2016 09:30

      @Ruut
      La révolution est décrite dans l’article : une incohérence avec le modèle standard qui pourrait donc le faire évoluer (il date de 30 ans).
      Quant au boson de Higgs, la théorie standard l’explique très bien, mais il faut avoir fait des études pour la comprendre.


    • Ruut Ruut 9 mars 2016 09:50

      @Rmanal
      La science ce n’est pas la théorie.
      La science explique et se prouve via l’expérience.

      Le simple fait que vous mettiez en avant une théorie et non une expérience (voire plusieurs ayant produit le même résultat) démontre que le sujet est tout sauf prouvé scientifiquement.


    • Rmanal 9 mars 2016 10:20

      @Ruut
      Vous utilisez une terminologie qui montre que vous n’avez pas du pratiqué beaucoup la « science ».
      Une théorie n’est jamais prouvé. Elle reste vrai et reconnu tant que l’expérience ne la met pas en défaut. Et c’est ce qui se passe ici : le modèle standard a été confirmé, une fois de plus, par les essais du LHC et la détection probable du Boson de Higgs, et d’un autre côté la découverte d’une nouvelle particule pourrait remettre en cause ce modèle standard.
      Lorsque l’on dit remettre en cause cela ne veut pas dire le jeter à la poubelle, puisque jusqu’alors il n’a jamais été mis en défaut par les centaines d’expériences déjà menées. Mais si cela se confirme il faudra le modifier pour rester consistant avec le passé et y introduire cette nouvelle particule.
      En science, on appelle bien cela une révolution étant donné le laps de temps depuis lequel ce modèle prédit tout.


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