jeudi 1er mai 2008 - par clostra

À propos des Parisiens sous l’Occupation

Ils étaient des milliers dans Paris à avoir résisté en servant à l’occupant leurs plus beaux sourires et leurs déambulations nonchalantes. L’imposteur est celui qui, derrière son appareil photo, telle une flambée de poudre de magnésium, ne montre que du feu.

Lui avait à peine 20 ans. Il appartenait au premier réseau de Résistance qui s’organisait à tâtons. Il habitait Paris. La Gestapo occupait tout l’espace. Blessé par balle à la main, il trouve un refuge. Elle lui fait ses pansements et le réconforte, le maître du logis tourne sans fin autour du pâté de maison. Il fait le guet. Le blessé et l’hôtesse risquent tous deux leur peau dans ce Paris occupé. Les médecins doivent, sous peine d’arrestation, déclarer toute blessure par balle. C’est pourquoi il n’a pas cherché de médecin. La traque a commencé. Sous ce pansement où guérit la blessure, la cicatrice sera simple à identifier. Pour peu qu’on le torture, il avouera peut-être qui l’a soigné.

L’hôtesse sortira dans la rue en belle robe, un peu plus enjouée que la veille...

Elles étaient des milliers à se préparer aux faux airs de fête et à parcourir la ville sans éveiller de soupçons. Eux les regardaient, heureux d’être en France et si bien entourés alors qu’elles protégeaient des réunions souterraines et cachaient de nombreux juifs, préparant la Libération de Paris.

Elle qui l’avait soigné partit précipitamment de Paris, trop risqué dès lors. Lui fut arrêté et envoyé en camp de travail. On ne l’a jamais revu. Son beau-père fut envoyé en camp de concentration où il est mort. Paris purgé.

Ils étaient vingt, cent, des milliers dans Paris occupés à servir leurs plus beaux sourires (on pense à Catherine Deneuve dans Le Dernier Métro et son homme juif dans les entrailles du théâtre fréquenté par l’occupant bien décidé à s’amuser en France). Les autres sont partis dans des trains, par milliers. L’imposture est surprenante, réjouissante, joyeuse comme un pied de nez à celui qui n’a vu de la réalité qu’un empire qui se construit.

Tellement belles et heureuses les femmes dans Paris occupées à sauver la France. Tellement belles que leurs sourires dans les rues de Paris se sont épanouis comme des oriflammes. Paris sera libéré !

Dans l’ombre toute une famille, des amis, de très nombreuses relations pour la plupart inconnues, tout un réseau et tout Paris, qu’on se le dise ! Ils étaient des milliers dans Paris à avoir résisté en servant à l’occupant leurs plus beaux sourires, l’oreille rivée à la TSF.

L’imposteur est celui qui, derrière son appareil photo, telle une flambée de poudre de magnésium, ne montre que du feu.

Pourquoi cette insulte à long terme alors que ces jeunes gens ont bientôt 90 ans et plus ? (Quelqu’un a osé dire sur les antennes, à propos de ces photos, que très peu de Parisiens résistaient et que c’était une imposture de dire que Paris avait souffert sous l’Occupation !)

Voici quelle est la mémoire qui m’a été transmise avec celle de l’Hôtel Lutécia et quelques tickets de rationnement encore en vigueur en 1949... Il m’a même été transmis que si on n’y prenait garde tout ceci pouvait se reproduire.

Il est peut-être temps de reprendre des clichés dans certains quartiers de Paris où des sans-papiers vous sourient à la sortie des écoles... et d’apprendre à nos enfants à les commenter.



19 réactions


  • morice morice 1er mai 2008 11:00

     Excellent, excellent....... on salue ce rappel, et on insiste sur cette expo qui n’aurait pas dû être, ou qui n’aurait pas du être présentée de cette façon. 


  • Internaute Internaute 1er mai 2008 11:20

    Pourquoi doit-on subir un tel bourrage de crâne ? Il ne se passe pas une journée sans que la télé nous ressorte le nouveau résistant oublié ou des images retrospectives avec un commentaire plus ou moins truqué. Maintenant c’est AgoraVox qui s’y met.

     

    On en a marre. La paix a été signée en 1945 et nous sommes en 2008. 40% de notre commerce extérieur se fait avec nos amis et cousins allemands. Ces histoires n’intéressent plus personne. Personnellement je suis déjà vieux et pourtant né bien aprés la mort d’Hitler. Que doivent penser les jeunes générations ? Je crains qu’on ne provoque un rejet complet de toute cette période et de ceux qui se vautrent dans ce soit-disant devoir de mémoire, bien orienté par les commissaires politiques de l’UE.


    • ZEN ZEN 1er mai 2008 12:53

      "Personnellement je suis déjà vieux et pourtant né bien aprés la mort d’Hitler. "

       

      OUH !LALA !! Personnellement je suis né en 1940 (arrivé sur un char de Guderian) et je me sens relativement jeune...Je vous conseille la "Jouvence de l’Abbé Souris" ...


    • Internaute Internaute 1er mai 2008 18:45

      Je n’ai pas dit que je me sentais vieux mais que le suis. La vieillesse est une question d’âge, pas de forme physique ni intelectuelle. Si vous trouvez normal qu’on vous oblige à ressasser sans cesse des histoires de la jeunesse de nos parents, tant pis pour vous.

       

      Vu mon grand âge j’ai eu la chance de recevoir des informations sur la guerre de la part de gens proches qui l’ont vécue. Ce n’est absolument pas le cas de 60% de la population actuelle, laquelle n’entend que ce que l’homme qui a vu l’homme qui a vu l’ours veut bien lui raconter. Cela n’a plus aucune valeur.


    • clostra 1er mai 2008 20:19

      Tous les faits précis énoncés sont vérifiables. Cependant certains restent des secrets. Très peu le savent mais Mai 1968 a encore été le théâtre de règlements de comptes datant de cette période.

      Revenons à aujourd’hui. Pourquoi cette période est et reste exemplaire : parce que personne n’a rien vu venir.

      Un contexte de crise économique et un sauveur qui désigne un bouc émissaire.

      Aujourd’hui, le bouc émissaire est le « sans-papier » . On découvre une réalité qui montre que nous n’avons pas réfléchi 2 secondes (pourtant on le dit « Il n’y a que des gens sans espoir pour faire de bons immigrants. ») . Exploités, par de bons français, pour certains, choyés pour d’autres : ils ont un emploi à 90%. Les immigrés réguliers n’ont un emploi qu’à 80%. (Les plus de 50 ans ont un emploi à 38%). 400 000 emplois restent à pourvoir.

      Chechez l’erreur.

      Il est 6h du matin, ils arrivent à 10 et vous menottent et vous brutalisent de fait - vous êtes attendu par votre employeur...On vous place en centre de rétention. Imaginez le stress ! en plus, dans cet état d’affolement et de confusion, on vous demande de préparer votre défense !

      Le stress était du même ordre. Certains juifs avaient été fiers l’aller se faire recenser et parfois même de porter l’étoile jaune. Arrêtés, ils en savaient peut-être encore moins de leur destinée. Tout comme nos « presque » compatriotes, si fiers de se faire enfin connaître, reconnaître. Si fiers de devenir fançais. Quelle trahison ! Certains de nos contemporains risquent leur peau à regagner leur pays. La plupart savent que la mort les attend : de faim, de soif parfois, de maladie. Le déclin de leur famille.

      Le Résistant aujourd’hui est celui qui risque 2 ans de prison à soutenir un sans-papier. Et ceci est inscrit dans nos lois !

      Est-ce vraiment de la sensiblerie ?


  • jako jako 1er mai 2008 11:54

    Je dirais "formidable rappel" un grand merci à l’auteur. "clap clap.... !"


  • brutaltruth brutaltruth 1er mai 2008 13:07

    @internaute : tout cela peut recommencer, et avec des gens comme vous, ça VA recommencer !


  • claude claude 1er mai 2008 15:56

    les guerres n’ont jamais empêché les enfants de jouer et les histoires d’amour de se nouer.

    malgré l’horreur de l’occupation et les exactions de l’occupant, la vie continuait tant bien que mal. et ce n’est pas parce que l’on riait ou on allait au cinéma que l’on était collabo !

     


    • jako jako 1er mai 2008 17:43

      Oui Claude c’est vrai , il y a même des gens qui se sont amusés à faire du théatre dans les pires conditions..... mais en exposant cela sans préparation ne risque t’on pas d’édulcorer la réalité ???? voire re-écrire l’histoire ?


    • Gazi BORAT 1er mai 2008 19:15

      @ Jako

      En ce cas, peut-on exposer des photos de paysages nord américains sans les accompagner de clichés de Guantanamo ?

      gAZi bORAt


    • claude claude 1er mai 2008 20:22

      il faut arrêter de prendre les français pour plus cons qu’ils ne sont !

      les tortures et les arrestations ne se faisaient pas sous les projecteurs ! la résistance ne faisait pas la une des journaux !

      cette exposition est le pendant des horreurs de cette période. et le fait de vouloir continuer à vivre "normalement" était aussi une forme de résistance passive à la société qu’on voulait imposer.

      quand on lit les chroniques et journaux intimes de cette période, beaucoup racontent l’ingéniosité deployée par chacun, pour s’habiller à la mode, célébrer comme il se doit un baptème, une communion ou un mariage...


    • jako jako 1er mai 2008 20:25

      Bonsoir Gazy oui vous avez encor raison pour moi nous avons reculé de 300 ans au moins , donc cette prison en est le resultat je pense , bien à vous

      Jacques


  • foufouille foufouille 1er mai 2008 18:11

    et les flics, bureaucrates ils ont "resiste" peut etre ?

    4a d’occupation avec plein de resistant c’est bizarre. trois jours pour se rendre aussi

    parait que les polonais ont tenu 3 semaines avec des sabres et des chevaux.......


  • pyralene 1er mai 2008 18:57

    VIVE L’OCCUPATION....DES CHIOTTES !


  • zoup 1er mai 2008 21:56

    Cette exposition a un grand mérite : elle montre qu’il peut se passer les pires choses sous des apparences enchantées. Le tollé qu’elle provoque vient justement de ce sentiment-là et force à y réfléchir. Eût-elle été accompagnée de commentaires qu’elle n’aurait sans doute pas eu le même impact. A notre époque, tout le monde sait ce qui se passait de grave sous l’Occupation, a-t-on vraiment besoin de le rappeler lorsqu’on regarde ces images ? Chacun ne se dit-il pas spontanément : -"Les gens se promenaient dans les rues, insouciants, alors que de terribles choses se passaient".
    Pensez-y quand vous vous promènerez, insouciant, dans les rues de Paris.


  • bestof32 bestof32 1er mai 2008 23:02

    Trés bel article.

    Je pense que ce qui dérange le plus nos élites au sujet de cette expo, c’est qu’elle montre d’une façon on ne peut plus claire que, même dans les circonstances les plus sordides, alors que la majorité est en detresse, il y a toujours une partie de la population (petite soit) qui se goberge, profite et jouis de la vie.

    Bien que la situation aujourd’hui n’ait rien de comparable (fort heureusement), le parallèle peut être fait.

    Détournez vos yeux des SDF et autres sans papier et braquez votre objectif sur les palaces, plages privées et autres lieux branchés puis mettez les au chaud et faites une expo dans 50 ans...


  • zadig 2 mai 2008 02:36

    Je suis né en 1943

    mes origines sont aux marches de l’Est

    L’allemagne nous a envahi à trois reprises

    La quatrième envasion à lieu maintenant sur le plan économique ( exemple EADS )

    Résistons.


    • clostra 2 mai 2008 10:54

      Bien sûr on parle maintenant de « guerre économique » : plus frustre, moins visible et finalement meurtrière. L’Allemagne fait partie de l’Europe. Les allemands (« de souche » et immigrés) ont des qualités que n’ont pas les français. (et les défauts de leurs qualités). EADS - pour reprendre et s’approprier une phrase épouvantable - est un détail de l’histoire du capitaliste immoral et tous ces détails ne viennent pas d’Allemagne, loin s’en faut ! On pense à l’acier, à Suez.

      Les idées stigmatisant tout un groupe de personnes pour ce qu’ils sont et non pour ce qu’ils font germent dans plus d’un esprit.

      Si les « canibales » mangeaient le cerveau de leur ennemi c’était pour s’approprier leur force. Si les juifs étaient exterminés, c’était pour s’approprier leurs richesses. Freud et bien d’autres chercheurs n’avaient pourtant pas gardé pour eux leurs découvertes. Les juifs apportaient déjà richesse et rayonnement à leur pays. Si on veut renvoyer les sans-papiers c’est pour s’approprier leur emploi (maintenant le message est clair et vraiment hypocrite ! que ne va-t-on pas trouver encore !)...sous couvert d’un désordre, d’une violence qui nuirait à la France. Or ces gens sont justement très discrets et construisent avec nous ce pays !

      Rappelons-nous cette coutume remarquable des Compagnons de France : n’allaient-ils pas (ne vont-ils pas) acquérir un savoir (savoir-faire, savoir-être, savoir) dans les régions de France. Ils n’arrivent pas en conquérants, encore moins en destructeurs pour tuer la poule aux oeufs d’or, ils partagent, ils apprennent, puis ils créent leurs propres objets.

      Il s’agit plus de stigmatiser un ensemble de personnes en les désignant comme bouc émissaire pour tous les malheurs qui surviennent dans un pays ou une région du monde. Un mode de pensée très prisé par l’homme pour ce qu’elle flatte son égo, « désigne et écarte le mal » jusqu’au jour où c’est lui et son groupe qui en font les frais...Tout ceci sous forme d’asservissement au mieux, d’emprisonnement, de « destruction finale » au pire.

      Nous ne sommes pas au bout de nos peines...et des raccourcis de l’esprit !


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