vendredi 30 juillet 2010 - par Sauvons le Grand Ecran

Attention, chef d’oeuvre en péril !

A l’heure où l’Etat se préoccupe très justement de faire classer la Halle Freyssinet dans le 13ème arrondissement de Paris, qui se soucie du sort de la salle de spectacle dite « Grand Ecran » en bordure de la place d’Italie, réalisée en 1991-92 par l’architecte japonais de renommée mondiale Kenzo Tange, et menacée de destruction ?

Cet abandon est d’autant plus surprenant que cette salle et l’immeuble du même nom dans lequel elle se situe sont la seule réalisation de Kenzo Tange à Paris - auteur d’une seule autre construction en France, à Nice - et que le Grand Ecran est considéré à juste titre comme une des plus belles salles de France et d’Europe qu’ait produite l’architecture contemporaine.

Autre élément de surprise : alors que rive droite de la capitale on s’emploie depuis des décennies à transformer des espaces industriels et commerciaux en haut-lieux de l’art et de la culture (ex : les Abattoirs de La Villette avec la Cité des Sciences et de la Musique, les Ateliers des Pompes Funèbres dont on a fait le « 104 » de la rue d’Aubervilliers, les Ateliers Berthier qui programment des spectacles de l’Odéon), la Ville de Paris est complice de l’opération inverse rive gauche, à savoir la destruction de ce fleuron du patrimoine pour y réaliser à la place des magasins de meubles et de vêtements.

La Ville de Paris cautionne cette opération en dépit et en violation des engagements qu’elle avait elle-même imposés à l’origine à ses partenaires privés pour l’exploitation du Grand Ecran*.

Cette décision est d’autant plus inacceptable que le complexe audiovisuel, outre ses qualités esthétiques, présente sur le plan technique des caractères tout à fait exceptionnels : le plus grand écran de Paris, une acoustique remarquable, une totale polyvalence permettant tous types de manifestations et de spectacles (cinéma bien sûr, mais aussi théâtre, concerts et, moyennant adaptation, opéra) ; et que la fermeture en janvier 2006 de ce pôle d’attraction majeur du sud-est francilien qui avait su conquérir le public et les professionnels intervient alors même que les progrès de la technologie permettent l’essort des retransmissions en direct de grands évènements culturels et sportifs, pour lesquelles cette salle - décidément en avance sur son temps - a été également conçue**.

Fort heureusement - mais hélas pour un temps forcément limité - ce projet est bloqué grâce aux recours contentieux de l’association Sauvons le Grand Ecran.

Espérons qu’un sursaut de l’opinion, de certains élus, et - qui sait ? - de l’administration, voire du gouvernement, permettra de sauver ce chef d’oeuvre en péril.

(Information, pétition et projet sur le site : http://sauvonslegrandecran.org)

Cahier des charges

** "Le retour en grâce des salles uniques ?"


Voir aussi :


6 réactions


  • Lorenzo extremeño 30 juillet 2010 10:03

    Oui il faut sauver cette salle,oú j’ai été voir tant de films dans des conditions de confort
    et de projection exceptionnelles.
    Je vais signer votre pétition.

    Cordialement


  • Fergus Fergus 30 juillet 2010 10:06

    Bonjour.

    Sauver le Grand Ecran est un objectif louable (encore que cette salle ait surtout brillé par la programmation de blockbusters souvent sans le moindre intêret cinématographique), mais la priorité à Paris, comme dans de nombreuses villes de province, me semble plutôt être de sauver les salles indépendantes d’Art et d’Essai sans lesquelles la logique du profit imposera définitivement sa dictature à la création et au cinéma d’auteur. La vraie bataille est là !


    • Surya Surya 30 juillet 2010 20:21

      Bonsoir Fergus et bonsoir à l’auteur,

      Sans le moindre intérêt, pas toujours. Titanic diffusé sur le Grand Ecran, c’était vraiment quelque chose ! Super production à très gros budget certes, mais un sacré film, magnifiquement tourné, avec des images à couper le souffle, hyper documenté au niveau historique et précis jusque dans le moindre petit détail... Ce sont des salles comme celle là qu’il faut pour ce genre de films. Je n’ai pas seulement vu Titanic, j’ai vu Titanic au Grand Ecran, ce qui change aussi quelque chose.
      Et pourtant d’habitude, je ne suis pas fan des gros complexes cinématographiques, je n’aime pas les usines ugc par exemple, et n’ai aucun plaisir à m’y rendre (je n’y vais jamais de toute façon...) je suis plutôt une nostalgique des cinémas de quartier de mon enfance avec le balcon, les ouvreuses qui passaient avec le panier de friandise... mais il faut reconnaître qu’on y voit les films dans des conditions exceptionnelles, au niveau du son, de l’image, et au niveau du confort également. Je ne dirais pas que c’est le plus beau cinéma de Paris, au niveau esthétique, puisque je préfère le Grand Rex, mais il est en effet magnifique et fermer un tel cinéma pour le remplacer par des magasins ! Quelle idée ! C’est sûr qu’on manque terriblement de magasins, à Paris, ça devient urgent d’en rajouter...


    • Sauvons le Grand Ecran Sauvons le Grand Ecran 31 juillet 2010 13:34

      Réponse à Fergus :

      Même si on trouve à redire à la programmation du Grand Ecran, dont on peut se demander si elle n’était pas destinée à décourager les spectateurs : suppression de la version française pour les dessins animés ou films familiaux à grand spectacle programmés en périodes de fêtes (entraînant les familles avec enfants vers le concurrent d’en face qui programmait le même films en VF, d’où la fuite de milliers de spectateurs…), suppression des avant-premières qui avaient fait la renommée de la salle, suppression des films asiatiques qui rencontraient un grand succès dans les deux petites salles, situées à deux pas du quartier chinois, suppression du spectacle-laser qui attirait les foules, suppression des films sur Paris destinés aux touristes (également partie intégrante d’un cahier des charges décidément très peu respecté), on ne peut pas dire que la programmation du Grand Ecran ait toujours été nulle. En témoignent ses interminables files d’attente, notamment pour le film Titanic.

      Bien sûr le succès d’une salle tient à sa programmation, mais malgré son indéniable inadaptation au caractère polyvalent du complexe, force est de constater que le Grand Ecran Italie (classé par Quid.fr comme un des cinémas les plus fréquentés du monde, et qui figurait en 2004 au 13ème rang des 90 salles parisiennes), se maintenait dans le peloton de tête des meilleures fréquentations de la capitale (d’après les chiffres comparatifs, les performances du Gaumont Grand Ecran en 2004 dépassent celles des MK2 Nation et Bibliothèque et, avec deux fois moins de séances, égalent celles du Gaumont Opéra). Voir « Le Grand Ecran Italie en chiffres ».

      Inutile donc de jeter le bébé avec l’eau du bain, et rien n’empêchait cette salle exceptionnelle de bénéficier du classement « Art & Essai » pour la programmation des petites salles (comme ce fut le cas pour le MK2 Quai de Seine), ce que prévoyait un candidat à la reprise, inexplicablement éconduit.


    • Fergus Fergus 1er août 2010 09:05

      Bonjour, Surya.

      Je ne nie pas la qualité de certains films projetés au Grand Ecran. C’est pourquoi j’ai écrit « souvent sans intérêt cinématographique ». De plus l’intérêt cinématographique (qualité de l’image, de la réalisation, du scénario, des dialogues) est parfois antinomique avec l’intérêt du spectateur autour d’une histoire captivante. Le plus bel exemple étant en général fourni pas les films d’action à grand spectacle.

      @ L’auteur.

      Vous aurez noté que j’ai parlé d’« objectif louable » pour bien montrer que la défense du Grand Ecran me semble justifiée. Cela dit, je maintiens ma position concernant les priorités qui me semblent les plus urgentes et les plus utiles. Quant aux classement de petites salles en Art et Essai, je connais le principe, ayant été administrateur d’un cinéma classé Art et Essai maiçs également Recherche en province, confronté à des projets d’intégration dans un multiplex. L’existant a montré que trop souvent les salles annexes sont, dans le circuit commercial, affectées elles aussi en priorité aux films commerciaux pour cause de présence écrasante des blockbusters dans les grandes salles. Résultat : les films d’auteur ou les fils étrangers ne bénéficiant pas de couverture publicitaire, faute de moyens, sont relégués à des plages horaires marginales.

      Bonne journée.


    • Surya Surya 1er août 2010 19:24

       Bonjour Fergus,

      C’est vrai, j’ai zappé le mot « souvent », mais je saute sur la moindre occasion de (continuer à, après toutes ces années,) défendre Titanic... smiley  smiley


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