jeudi 4 août 2005 - par nico

Bush veut que l’on enseigne l’intelligent design

L’intelligent design (ID) se traduit en français par dessein intelligent. Cette thèse tente grossièrement de lire l’ancien testament comme un livre relatant l’histoire de la Terre et des espèces vivantes. La Terre aurait 6000 ans, et aurait été créée délibérément par un Agent intelligent. Il faut entendre : créée par Dieu ou des extra-terrestres.

Le créationisme a été retiré des manuels scolaires depuis 1987 aux Etats-Unis. Mais certains états, comme le Kansas, restent désireux de ne présenter le darwinisme que comme une théorie alternative. Alternative à l’ID. Comme le relate The Wichita Eagle Georges W. Bush a fait part lundi de son désir de voir darwinisme et intelligent design présentés en parallèle en cours de science.

Mais ça n’est pas seulement une nouvelle idée personnelle et farfelue de Bush : la ministre néerlandaise de l’éducation Maria van der Hoeven, avait déjà cette année proposé de confronter l’évolutionisme à l’ID. Le Monde avait relayé cette information. Cela permettrait selon elle de rapprocher des personnes « qui ont des difficultés avec la théorie de l’évolution ».

J’ai moi-même des « difficultés » avec les violences dont a été victime l’humanité, dois-je pour autant réclamer à ce que l’on enseigne à l’école Walt Disney en lieu et place des cours d’Histoire ? Je suis certain que mon avis sur la question transparait dans ce billet, mais je ne souhaite pas juger du droit de l’ID d’être ou non une théorie sur les origines de la vie. Je l’estime cependant très inaboutie, et il serait impertinent de la présenter comme une science. C’est également la position des National Academy of Sciences et American Association for the Advancement of Science qui refusent son inclusion dans les programmes scolaires.

Avec Raël et Dan Brown, le monde replonge dans une ambiance d’ésotérisme facheux. Je suis excité par la remise en questions des théories scientifiques, mais je crois fondamentalement en la Science et ses méthodes de révision. Au mieux, on doit parler de l’ID comme d’une recherche en cours, qui doit être rigoureusement mise à l’épreuve, et non comme d’une théorie digne d’être enseignée.

Le très complet wiki anglais sur l’intelligent design.



7 réactions


  •  Joël (---.---.86.233) 14 août 2005 17:22

    Cet article m’a intéressé, je ferais juste une petite restriction sur Raël et Dan Brown. Je ne suis pas un fan de l’écrivain mais je n’aime pas l’idée qu’on le mette dans le même sac qu’un gourou créateur d’une secte dangereuse.


  • nico (---.---.123.27) 15 août 2005 16:54

    Merci de votre commentaire. Vous avez raison, Raël n’est pas Dan Brown. Cependant, ils vivent tous les deux du besoin que les gens ont de croire. A leur manière, tous deux refont l’histoire. C’est exactement ce que je reproche.


  • DEALBATA (---.---.166.140) 8 septembre 2006 08:38

    Le problème avec votre point de vue, c’est qu’il est en apparence juste alors qu’il cache en fait une insidieuse et sournoise expression de la partialité. Quand la science dénonce (ou ceux qui la défendent) cette forme de possibilité d’imposture au travers le point de vue de l’ID, c’est qu’elle réagit d’une manière consciente ou inconsciente à l’intrusion dans son précarré d’éléments jugés subversifs et pouvant ainsi remettre en cause ses propres fondements. La science moderne ayant comme socle idéologique la matière, refuse qu’une autre interprétation de la genèse de l’existence (ayant un fondement métaphysique) puisse être mis en concurrence avec la sienne. C’est en fait une hypocrisie puisque elle reconnaît la preuve (donc la « vérité ») qu’à partir des données de son propre système idéologique : La matière (l’univers) et les système de preuves qui lui sont associés. En effet, et c’est facile, à quoi bon apprendre à des élèves qu’il peut exister un autre point de vue sur la création de l’univers alors que ce point de vue n’a aucune base scientifique dans le sens où il n’est pas prouvable ou falsifiable selon les principes érigés par la doctrine scientifique. Le point de vue de la science est donc hégémonique et hypocrite : La science prétend ne pas s’occuper des problèmes de religions (c’est pour elle un problème d’individu alors qu’il n’y a pas si longtemps c’était la base de toute collectivité) alors qu’elle interdit en même temps toute tentative d’explication en dehors de ses propres dogmes (et c’est donc implicitement qu’elle reconnaît que toute connaissance ne peut pas être collective en dehors de son propre système idéologique). Bien sûr, il y a beaucoup de charlatans qui sur des bases ésotériques frelatés profitent de la misère intellectuelle du monde mais il y a un danger beaucoup plus grave c’est celui que la science moderne a développé au cours des siècles et qui consiste à faire « croire » à l’humanité que la connaissance ne peut et ne doit être apprise qu’à travers le prisme de l’illusion matérielle.


    • nico 8 septembre 2006 11:28

      Vous avez raison, je suis partial sur ma définition du concept « science » et donc sur le caractère vérifiable d’une théorie scientifique. De la même façon que je suis partial sur les définitions des concepts « chien », « allumette »... Donc, plus que partial je suis fidèle aux définition des concepts.

      Vous vous trompez cependant en pensant que la science traite de connaissance. Je vais donc plus encore étayer votre thèse : la science ne traite pas de connaissance. Les scientifiques ont vécu des désillusions fortes durant le 20ième siècle. Un peu abusivement on pourrait parler des théorèmes d’incomplétude de Gödel pour illustrer le fait que les scientifiques depuis peu sont conscients que certaines vérités ne sont pas sensibles. Les scientifiques honnêtes admettent qu’ils ne parlent pas de *connaissances*, mais de *croyances fortes*. Dans un système axiomatique arithmétique classique (e.g. Peano) je sais que 2+2=4. Je suis capable de l’inférer de façon exhaustive en quelques lignes. Mais les mathématiques sont complexes, et certains théorèmes sont plus difficiles à appréhender, et il est parfois vain d’en donner une démonstration complète, étape par étape. Le dernier exemple parfait est celui de la démonstration de la conjecture de Poincaré. Perelman n’a pas donné toutes les étapes de sa démonstration, beaucoup de raccourcis ont été pris, l’intuition y est maitresse. La communauté a tenté de lui offrir la médaille Fields sur la base d’une *croyance forte* de la rigueur de la démonstration et par là même de la validité du théorème. On croit fortement en sa validité, jusqu’à ce que quelqu’un vienne à trouver un biais.

      Donc, vous avez raison, un fondement métaphysique de la genèse ne peut être méprisé. Mais la méthaphysique n’est pas une science. Là est toute la différence. L’ID n’est pas non plus une théorie scientifique, et c’est tromper un élève que de le lui faire croire. Aborder l’ID comme un exercice de pensée méthaphysique, par exemple dans un cours de philosophie, est peut-être utile pour forger un processus de réflexion différent de celui qu’impose la science par sa définition propre. La présenter comme une science est un mensonge pur. Je ne suis pas au fait des théories scientifiques actuelles à ce sujet, mais je crois fortement que la seule qui tienne un peu la route pour le moment est celle qui fut proposée par Darwin.

      Merci de votre commentaire.


  • DEALBATA (---.---.166.140) 11 septembre 2006 11:53

    « Vous vous trompez cependant en pensant que la science traite de connaissance. Je vais donc plus encore étayer votre thèse : la science ne traite pas de connaissance. Les scientifiques ont vécu des désillusions fortes durant le 20ième siècle. Un peu abusivement on pourrait parler des théorèmes d’incomplétude de Gödel pour illustrer le fait que les scientifiques depuis peu sont conscients que certaines vérités ne sont pas sensibles. Les scientifiques honnêtes admettent qu’ils ne parlent pas de *connaissances*, mais de *croyances fortes*. Dans un système axiomatique arithmétique classique (e.g. Peano) je sais que 2+2=4. Je suis capable de l’inférer de façon exhaustive en quelques lignes. Mais les mathématiques sont complexes, et certains théorèmes sont plus difficiles à appréhender, et il est parfois vain d’en donner une démonstration complète, étape par étape. Le dernier exemple parfait est celui de la démonstration de la conjecture de Poincaré. Perelman n’a pas donné toutes les étapes de sa démonstration, beaucoup de raccourcis ont été pris, l’intuition y est maitresse. La communauté a tenté de lui offrir la médaille Fields sur la base d’une *croyance forte* de la rigueur de la démonstration et par là même de la validité du théorème. On croit fortement en sa validité, jusqu’à ce que quelqu’un vienne à trouver un biais. »

    Bien sûr, puisqu’elle est dans tous les manuels scolaires ! Elle ne s’occupe en réalité que de la connaissance médiate et le réel lui est irrémédiablement voilé (Cf. B.D’ESPAGNAT) Les scientifiques utilisent abusivement le verbe croire (je parlerais volontiers de scientifiques qui idolâtrent la matière) et c’est là très révélateur d’un manque profond que finalement la science procure, une sensation de projet inachevé, une vision tronquée, plus de questions que de réponses, c’est à se demander si tout ce chemin parcouru par la science moderne n’a pas été vain et que l’accès à la véritable connaissance n’a pas été perdue au fils des siècles. Alors, bien sûr, elle amuse et impressionne la galerie avec ses « découvertes » et ses constructions matériels et essai de cacher en parallèle la véritable question qui la taraude depuis le début : Pourquoi ? La gigantesque claque qu’elle s’est prise le siècle dernier lui a remis les points sur les I en tout cas pour certains scientifiques mais cela n’a apparemment pas suffit, elle s’obstine à pédaler sur son petit vélo d’appartement alors qu’il serait grand temps de descendre pour faire le constat, certes amer, que depuis son début elle n’a guère avancée sur l’essentiel (j’assimile le substantiel à la matière).

    « Mais la méthaphysique n’est pas une science. » :

    Hélas, dans son acception moderne, oui. Mais elle a été remplacée lentement au fil du temps par la science moderne qui c’est réduite à la portion congrue du domaine du sensible en s’enfermant ainsi dans son propre système qui est l’univers dans lequel elle croit s’auto-définir. Et en extrapolant par analogie le théorème d’incomplétude de Gödel, on pourrait dire que tout système n’induit pas en lui-même sa propre définition, elle est ailleurs ... La métaphysique est à proprement parler La Science dans le sens où elle est la connaissance par elle-même et que toute connaissance réelle (non médiate, non mesurable) ne peut être effectuée que par identification avec celle-ci (entre le sujet et l’objet de sa connaissance).

    « L’ID n’est pas non plus une théorie scientifique, et c’est tromper un élève que de le lui faire croire. »

    Pour l’instant et dans le paradigme actuel, je suis d’accord.

    « Aborder l’ID comme un exercice de pensée méthaphysique, par exemple dans un cours de philosophie, est peut-être utile pour forger un processus de réflexion différent de celui qu’impose la science par sa définition propre. »

    La Métaphysique n’est pas non plus une philosophie, car il existe plusieurs philosophies qui sont en fait des systèmes de pensée développées au cours des ages par les hommes. Mais elles ont toutes le défaut de tourner en vase clos alors que la métaphysique, même si son expression peut être différente suivant les peuples, est d’origine unique par définition. Mais là, il faut admettre intellectuellement, que son origine n’est pas humaine, dans le sens émanant d’une pensée, mais qu’elle est expression d’une intuition qui se trouve au-delà de l’humain et donc de l’existence. C’est d’ailleurs une tare de l’esprit scientifique moderne que de réduire la connaissance qu’au domaine du sensible et du mesurable qui par là même s’autolimite dans ses propres perspectives.

    « La présenter comme une science est un mensonge pur. Je ne suis pas au fait des théories scientifiques actuelles à ce sujet, mais je crois fortement que la seule qui tienne un peu la route pour le moment est celle qui fut proposée par Darwin. »

    Dans le sens scientifique actuel, oui, mais attention, ce qu’à proposé Darwin n’est qu’une théorie qui peut-être remise en question d’un jour à l’autre et c’est bien là la faiblesse de la science moderne qui ne satisfait jamais l’homme complètement dans sa quête de connaissance. (C’est d’ailleurs contradictoire de dire que cette connaissance est incomplète et d’interdire qu’on puisse remettre en question le cadre de sa propre définition !) Présenter la science moderne comme le seul outil de connaissance est aussi un mensonge, pour être juste, il faudrait la présenter pour ce qu’elle est : Un outil approximatif de représentation empirique de l’existence (une « croyance forte » comme vous écrivez et qui est à mon avis une croyance faible au sens métaphysique) et donner en parallèle le point de vue métaphysique pour que les élèves puissent se demander si elle répond réellement aux questions et aux besoins les plus profonds de l’humanité. Mais si ceux-ci s’apercevaient peut-être que la science moderne n’est qu’accessoire et que la vérité est ailleurs, le monde moderne et sa science imploserait n’ayant finalement pas de raison d’être ...


    • Daniel Milan (---.---.168.4) 11 septembre 2006 11:55

      Bush cherche toujours ses neurones !


  • DEALBATA (---.---.166.140) 13 septembre 2006 15:31

    Méfiance ...la volonté de Bush de vouloir apprendre à l’école l’I.D. n’est qu’une parodie, un faux semblant lui permettant d’avancer masqué en justifiant que son inspiration peut venir du ciel légitimant ainsi tous ses actes. Le véritable Dieu qu’il honore et qu’il adore est le billet vert (c’est d’ailleurs inscrit en toutes lettres sur celui-ci : « In God we trust », tout un symbole !) véritable vecteur d’illusion planétaire qui permet au « Grand Satan » de diriger le monde en plongeant les mentalités dans une obscurité Intellectuelle profonde. La science moderne y participe tout autant avec sa volonté hégémonique d’instituer la connaissance collective avec les limites de l’existence qu’elle s’est donnée elle-même. Peu d’espoir donc à attendre de l’un et de l’autre, l’illusion sera de plus en plus subtil et le piège sera d’autant plus grand pour ses pauvres humains dupés par leur mental et étourdis par le grand numéro de prestidigitation que le monde moderne nous joue tous les jours. Le fruit défendu est à la fin de sa chute, il n’y a plus qu’à attendre qu’il s’écrase ...


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