vendredi 13 décembre 2019 - par Thierry SALADIN

Ce dimanche, le mouvement des Gilets jaunes a fêté sa première année. Et après ? (troisième partie)

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 À partir d'une expérience sur le terrain, nous poursuivons notre analyse sur la situation des Gilets jaunes (GJ). Reconnaissons que ce mouvement social, dont le caractère historique ne peut échapper à personne, a bien du mal à se structurer. Né le 17 novembre 2018 en France, alors qu'une augmentation des taxes sur l'essence avait été décidée prétendument pour l'écologie, il lui faut trouver son second souffle. Et c'est à cela que nous allons continuer de nous employer : proposer des pistes de réflexions.

partie 1 de l'article

partie 2 de l'article

 

Dans la partie précédente, nous avons indiqué que s'agissant des revendications, les GJ auraient dû se limiter aux deux suivantes. Et surtout s'y tenir : encore et toujours.

1) Le RIC en toutes matières

2) La suppression de la TVA pour les produits de première nécessité (alimentation de base, eau, gaz et électricité).

Quand bien même nous aurions adopté cette attitude, précisons tout de suite qu'à ce jour, c'est-à-dire douze mois plus tard, nous n'aurions obtenu aucune satisfaction tant sur l'une que sur l'autre de ces deux revendications.

Est-il besoin d'expliquer pourquoi ? Autrement dit de préciser à qui nous avons affaire depuis mai 2017 ?

Mais déjà c'eût été une manière de montrer au monde — oui, au monde entier — la réelle nature du pouvoir « élu démocratiquement » en mai 2017, s'il l'on en croit les éditorialistes des médias dominants.* Le refus d'écouter le peuple s'ajoutant aux violences exécutées sur ordre à l'encontre des manifestants.

— * Il est d'ailleurs intéressant de s'interroger sur le besoin qu'ont très souvent ces « grands journalistes » d'ajouter l'adverbe « démocratiquement » au verbe élire. S'agissant de l'élection de Macron, cela va de soi.

Pourquoi donc agissent-ils ainsi ?

Y aurait-il eu quelque chose de particulier, de spécial, d'extraordinaire, voire de pas très catholique qui serait survenu lors du processus (pré)électoral et dont ils auraient eu connaissance, justifiant ainsi la nécessité de l'ajout de cet adverbe ? —

 

Nous avons dit un peu plus haut « montrer au monde entier » la réelle nature du pouvoir. Certes, mais également au peuple français, lui qui reste encore en retrait par rapport à ce mouvement des GJ, dont nous réaffirmons ici le caractère historique. (voir un peu plus loin)

En agissant ainsi, en faisant preuve de détermination à faire figurer sur nos banderoles et pancartes uniquement les deux exigences citées plus haut, et aussi en en faisant part lors des entretiens avec les médias, nous aurions montré à la fois notre résolution à ne plus nous laisser faire mais également l'élévation de notre conscience politique : cela aurait eu, par voie de conséquence, un impact non négligeable.

Certes, les médias français n'en auraient eu cure.* — lesquels tant privés que publics sont à la botte du pouvoir : qui en France peut encore ignorer cet état de fait ? Mais s'agissant des médias étrangers, cela aurait été une tout autre histoire.

— * Le lecteur sceptique pourra toujours lire entre autres le dernier papier d'Acrimed. —

 

Surtout qu'en instaurant parallèlement une éducation populaire (exclusivement organisée par le mouvement des GJ* et en tous lieux sur le territoire), d'une part, et surtout en le faisant savoir, d'autre part, cela aurait singulièrement impressionné les journalistes un peu partout dans le monde.

— * En effet, on voit mal pourquoi un pouvoir politique, et ce quel qu'il soit, mettrait en place un tel dispositif ? —

 

Maintenant, faisons un peu de fiction :

Morceaux choisis, parmi les gros titres de la presse internationale, et même, pourquoi pas, en page de Une  :

« Le peuple français prend son destin en main ! »,

« Les GJ s'organisent et font comme si Macron n'existait pas ! ». 

« Le peuple français prépare l'avénement d'une démocratie représentative contrôlée ». 

« La France : en route vers une démocratie du XXIe siècle ? »,

voire « L'après-Macron a déjà commencé en France... »

Et ces correspondants étrangers de développer qu'il se passe dans notre pays quelque chose de jamais vu : un peuple cherche à se doter des moyens institutionnels pour que la politique soit désormais vraiment sous son contrôle.

Voilà le genre de titres qui auraient non seulement fait le tour du monde, mais fait rigoler un peu partout sur la planète...

Qui ça ?

Mais les chancelleries, voyons. D'autant qu'il est de notoriété publique que Macron n'a pas vraiment bonne presse à l'étranger. En effet, on ne compte plus ses bourdes, ni d'ailleurs les remises en place, en termes diplomatiques s'entend, à l'attention du bonhomme.

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Imagine-t-on la même chose sur Chirac, Mitterrand, Giscard... ?

En somme, rien de plus logique : Macron méprise les Français ? Eh bien, ils lui rendent la pareille. Un prêté pour un rendu. Oui, à l'adresse de celui qui...

1) estime qu'il n’y a pas de limites,

2) éprouve un sentiment d’omnipotence,

3) fait preuve d'un narcissisme aigu.

En résumé, un véritable camouflet : le peuple l'ignore, et s'organise. Et tout ça en direct et sous l'œil des caméras du monde entier. Un vrai bonheur.

— * N.B. : la sagacité du lecteur lui aura permis de noter que nous avons bien écrit le peuple et non son peuple. —

Il va sans dire qu'un tel comportement des GJ en France aurait donné des idées ici ou là. Nous pensons notament aux pays de l'Amérique latine : Argentine, Bolivie, Chili... mais plus près de nous également à l'Algérie. Entre autres...

Au lieu de cela, non seulement nous ne fîmes pas montre d'une grande originalité, c'est le moins que l'on puisse dire (notamment lors du Grand débat)*, mais nous en sommes un an après (= fin 2019) à suivre les syndicats dans leurs propres manifestations, ce qui est un comble. Ou, pour le dire autrement, c'est le monde à l'envers. Nous développerons ce point dans la prochaine partie.

— * S'agissant du Grand débat, mon propre groupe de GJ a voulu jouer le jeu. Mais aurait-il été le seul en France dans ce cas ?

Oui, des lettres recommandées avec AR ont été adressées à la préfecture du département, avec diverses doléances. (Soupirs). —

C'est dénoncer la supercherie que nous aurions dû faire. Oui, ici et là sur la Place du marché, informer, encore et toujours nos compatriotes. Et nous ne le dirons jamais assez : la dynamique était encore forte. Et favorable.

Au lieu de cela, nous nous laissâmes embarquer dans cette préparation des élections européennes, au cours desquelles, et comme d'habitude, ce fut à qui en rajouterait le plus sur la fameuse « autre Europe » que tel ou tel (sauf un !) se promettait de mettre en place une fois élu... (Essayons de conserver notre calme...)

De la nécessité d'une prise de conscience politique...

Ce qu'il fallait et qu'il faut bien comprendre, c'est que l'enjeu majeur et qu'il convient de préparer illico presto, c'est l'élection présidentielle de 2022.

Parce que détruire, que ce soit un radar, une barrière de péage d'autoroute, un abri bus… voire brûler des poubelles ou des biens privés — fussent-ils la propriété de gens passant pour riches — lors d’une manifestation est le degré zéro de la conscience politique.

Il en va presque de même lorsqu’on se contente de signer (ou de lancer) des pétitions, ou de suivre une manifestation dirigée par les syndicats. Cette dernière affirmation mérite un développement que nous ferons dans la prochaine partie.

Est également du niveau cours élémentaire en politique (= CE1) l'attitude consistant à se considérer à l'abri des mesures macronniennes parce que disposant (encore) de ressources mensuelles personnelles égales ou supérieures à 3500 euros. Il s'agit ici non plus d'une erreur, mais d'une véritable bêtise — les mots sont pesés ici — que d'avoir une telle posture.

Pourquoi ?

Parce qu'inévitablement les conséquences de la politique actuelle — appelons-là par son nom le capitalisme, avec actuellement en scène le petit soldat originaire d'Amiens — concerneront, avec le temps, toujours plus de monde. Et même ceux qui se prétendent riches. (N.B. : bien faire la différence ici entre les gens qui sont à l'aise financièrement, voire riches (disons plus de 7000 euros/mois), et les très riches : les milliardaires). Or ce sont ces derniers qui promeuvent la politique actuelle : à leur seul profit.

Tout ça n'est une question de degré. Tout le monde sera victime du système capitaliste actuel. Tous, sans exceptions, et ce de proche en proche.

Aussi, quand on a une once de réflexion politique, on doit sinon le comprendre du moins admettre que nos problèmes viennent, pour une très grande part, de notre appartenance à l'Union Européenne. Nous devons donc nous fixer comme objectif qu'il y ait au soir du premier tour de l'élection présidentielle de 2022 un candidat qui ait mis dans son programme la sortie immédiate de la France, tant de l'UE que de l'euro et aussi de l'OTAN.*

C'est ce qu'on appelle la triple sortie.

Tout le reste, les élections municipales de 2020 notamment, ne changera rien au sort qui est promis à notre pays et aux Français. Lequel sort est en passe d'être scellé définitivement.

Mais voilà, ce scénario dit de la triple sortie, absolument vital pour notre pays et son peuple ne va pas se réaliser comme ça, d'un coup de baguette magique. Loin s'en faut. En effet, des forces très actives et ô combien puissantes sont à l'œuvre et poussent dans un tout autre sens. Celui qui nous a amenés où nous sommes aujourd'hui.

Il importe donc à chacun, et d'abord à ceux qui l'ont compris d'agir dans ce sens. Et sans attendre. Nous avons encore la chance de pouvoir disposer de l'Internet, et aussi des livres, afin d'illustrer le message à faire passer, en somme faire marcher ce qu'on appelle le bouche à oreille. C'est une forme d'éducation populaire qu'agir ainsi..

En marche donc, sans attendre et tous ensemble, pour qu'il y ait en 2022 une véritable élection présidentielle, avec comme jadis un vrai choix de société !

* Un tel candidat ne peut être un membre de la SARL familiale Le Pen, laquelle est européiste jusqu'à la moelle et depuis toujours. Il en va d'ailleurs de même s'agissant de la troisième génération dans la famille : celle qui monte. C'est d'ailleurs pour cela que ces gens-là, et aussi leurs supplétifs, passent continuellement à la télé. Ils ne gênent pas l'ordre établi. CQFD.

 

(à suivre)



2 réactions


  • Thierry SALADIN Thierry SALADIN 13 décembre 2019 09:11

    Bonjour,

    Merci à tous mes lecteurs et aussi pour vos commentaires.

    Bien à vous.

    Thierry Saladin


  • Gilles Mérivac Gilles Mérivac 14 décembre 2019 07:49

    Vous avez sans doute remarqué l’absence de commentaires. Si vous comparez avec les articles sur la retraite, la différence est éloquente !

    La raison est très simple, les parasites sociaux n’ont rien à grappiller avec le mouvement des gilets jaunes, par contre ils savent très bien jouer les victimes pour obtenir toutes sortes d’avantages sociaux, et ces manifs à l’occasion de la réforme des retraites sont des occasiosn rêvée.

    Ainsi va la vie dans ce pays dans lequel le corporatisme est roi et l’intérêt général complètement ignoré. J’en suis désolé, mais je crois que vous ne ferez pas recette sur ce site.


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