Chasse à courre : barbarie ou tradition ?

La vénerie est le terme savant qui désigne la chasse à courre. Elle suit un cérémonial du matin jusqu’au soir très codifié, qui assure son cachet traditionnel. A l’aube, les gardes vont récupérer les traces d’animaux, c’est le pied. Ils transmettent les informations récoltées au maître d’équipage qui décide de l’animal qui sera chassé, c’est le rapport. Puis, les chiens partent à la recherche de l’animal, c’est l’attaque, qui est lancée par un air joué à la trompe de chasse. La réussite de la capture de l’animal est conditionnée par l’entente entre les chiens et l’équipage. Pénultième étape, l’hallali désigne la mise à mort de l’animal d’un coup de dague dans le coeur. Enfin, la curée consiste à récompenser les chiens en leur remettant le cadavre de la bête.
Les rituels de cette pratique barbare sont parfaitement illustrés au château de Montpoupon, en Indre-et-Loire, qui abrite un musée du veneur et où sont exposés fièrement au mur dans une salle, les bois d’une centaine de cerfs chassés par l’équipage du château : on ne peut que ressortir effondré de pareil lieu sinistre.
Alors certes, la vénerie est une tradition, une tradition qui attire de plus en plus de français mais est-ce une raison pour maintenir cette pratique dans la légalité ? Le respect de la tradition, c’est l’argument phare des veneurs. Aussi barbare soit-elle, une pratique doit-elle être maintenue au simple motif qu’elle soit traditionnelle ? A titre d’exemple, aux Iles Féroés, au Danemark, les jeunes adultes, pour prouver leur virilité, massacrent chaque année des dauphins Calderon, une espèce qui a la particularité de s’approcher très près des côtes car très proche de l’homme.
Barbare comme pratique ? Certainement pas, c’est juste traditionnel vous rétorqueraient les veneurs, tout du moins si ces derniers disposent d’une certaine logique. Autre argument des veneurs, lors d’une chasse à courre, l’animal a plus de chances de s’en sortir que de succomber, car ses capacités olfactives notamment le mettent sur un pied d’égalité avec l’équipage. Est-ce une raison pour massacrer à coup de dague dans le coeur un animal dans un combat, aussi égalitaire soit-il ?
De plus, sur 13 000 parties de chasse annuelles, "seuls" 3000 bêtes finissent par périr ! C’est tout du moins ce que rétorque la société de vénerie aux militants écologistes réclamant l’interdiction de leur pratique. A la vue de ces données, nous sommes évidemment tous rassurés puisque seulement 3000 animaux assassinés sauvagement sur 13 000, finalement ce n’est pas grand chose, bien entendu.
Je ne voudrais pas faire usage d’argument d’autorité mais l’Allemagne a interdit la chasse à courre depuis bientôt soixante-dix ans, les anglais les ont imités il y a cinq ans et la belgique il y a quinze ans. Qu’attendons-nous pour suivre le sillage de nos voisins ? Zut, j’oubliais, ce n’est pas possible puisque Nicolas Sarkozy préfère nouer des alliances avec le mouvement Chasse Pêche Nature et Traditions que de faire valoir les droits les plus sacrés des animaux en interdisant une pratique des plus barbares, qui fait référence à un mode de vie dépassé. Interdire la vénerie, voila un véritable acte écologiste.
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