mercredi 4 mars 2020 - par Alain Alain

Combattre le Rassemblement National : inutile parce que perdu d’avance

Beaucoup de mes voisins, quelques-uns de mes copains et même certains membres de ma famille se sont progressivement mis à voter Marine Le Pen. Pour avoir beaucoup discuté avec eux, il est inutile d’essayer de combattre leurs idées.
D'ailleurs ils n'en ont pas beaucoup.

Un exemple.
Le 15 septembre 2019 se tenait l’université d’été du Rassemblement National à Fréjus ; une équipe de France TV interviewe les militants à l’extérieur, de mémoire mais on doit pouvoir retrouver la vidéo pour plus de précision :
« - Monsieur, à votre avis quelle est la première mesure à prendre ?
 - Euh, les cantines !
 - ???
 - Les cantines, le hallal … »
Et il a expliqué qu’il fallait un seul menu dans les cantines scolaires et que s’il y avait du cochon ceux qui n’en mangeait pas n’avaient qu’à s’abstenir de déjeuner.

Le lundi 30 décembre 2019, je lis sur Agoravox l'article "Le voile... trente ans... et après".
De très nombreuses réactions décrivent le danger que représenteraient les personnes d'origine maghrébine, même celles qui sont françaises, même nées en France, même depuis plusieurs générations.
Alors je poste une réaction : "je suis pied noir, rapatrié ; en Algérie comme en France j'ai longtemps vécu entouré de ces voisins ; ils ne sont pas ce qu'on prétend."
Voici la réponse reçue :
31 décembre 2019, 22:18
@Alain Alain
" Attends juste qu’ils prennent le pouvoir...
Par contre je sais pas ou tu espères poser ta valise ce coup-ci...
Pas chez moi en tout cas, tu prendras un bon coup de pied au cul...lol... "
Essayez de débattre avec ça !

Inutile à cause de la croyance aveugle, quasi-certitude, des électeurs du RN, en la capacité de ce parti à terrasser les trois fléaux (selon eux), qui les mobilisent : l'immigration, surtout maghrébine, l'insécurité, (" en partie à cause des arabes "), et, les politiciens tous pourris qui les affament et se gavent sur leur dos.

Une croyance aveugle pour deux raisons.
A leur avis : " les autres, on les a déjà tous essayés sans succès (ce qui est partiellement vrai d'ailleurs)  ; désormais, dans tous les pays les autres peuples se tournent aussi vers ce genre de partis. " (Orbán, Salvini, Bolsonaro, Trump, Poutine, Erdoğan, etc.)

Alors ?

La seule chose qui pourra les dissuader : l'échec lamentable de la politique du RN, une fois mise en œuvre, ou, la vraie réussite d'une politique alternative.
Aucun discours, aucunes statistiques, aucune référence historique, aucun argument économique, juridique, philosophique, idéologique ne les font changer d'avis. Même quand ils les écoutent !

Inutile de perdre du temps à essayer de les convaincre surtout qu'avec 23 % des voix sur moins de 50 % d'exprimés, sans alliés pour former une majorité, ce n'est pas de sitôt qu'ils seront au pouvoir.
Sauf si, dans le cas d’un nouveau duel Le Pen/Macron, le nombre de ceux qui n’arrivent pas à voter Macron quoi qu’il arrive augmente de trop l’abstention et le vote blanc. Ce qu’Emmanuel Macron s’applique à provoquer en confondant l’autorité, compétence et charisme, avec l’autoritarisme, chez lui mélange d’autocratie, d’intimidation et d’obstination obtuse. Autoritarisme brutal et arrogant révélateur d’absence de vision, de politique à courte vue et de faiblesse.

« C’est le propre de l’homme de se tromper ; seul l’insensé persiste dans son erreur. »
Ciceron.

En attendant, agissons pour nous défendre contre toutes les catastrophes en cours et annoncées aux côté de tous ceux qui se mobilisent déjà.
Agissons ! Dans la rue, dans son quartier, sa ville, son usine, partout et n'importe où.
Agissez pour ne plus subir !
(Bravo les gilets jaunes même si la démarche était imparfaite, bravo les manifs contre la réforme des retraites.)

Pour finir, quelques citations qui décrivent les électeurs du Rassemblement National, tirées d’études parues récemment réalisées par divers experts :

(LES ORIGINES DU POPULISME. Enquête sur un schisme politique et social.
Ed. Seuil, 2019.
Yann ALGAN - Doyen de l'École d'affaires publiques, professeur d’économie à Sciences Po.
Elizabeth BEASLEY - Économiste, chercheuse à l'Observatoire du bien-être au CEPREMAP, ancienne directrice de J-PAL Europe.
Daniel COHEN - Directeur du département d'économie de l'École normale supérieure, professeur à l'École d'économie de Paris. Directeur du CEVIPOF(CNRS).


Martial FOUCAULT - Professeur des universités en science politique à sciences Po.
CEPREMAP : Centre pour la recherche économique et ses applications.
J-PAL Europe : laboratoire de recherche sur la pauvreté spécialisé dans l'évaluation des politiques sociales.
CEVIPOF : Centre de recherches politiques de Sciences Po.
CNRS : Centre national de la recherche scientifique.)

 « La question de l'immigration n'est pas strictement économique au sens, par exemple, d'une rivalité possible entre les immigrés et les autochtones sur certains emplois. Elle se double d'une dimension culturelle, notamment vis-à-vis des autres nationalités et religions (en particulier la religion musulmane). Évoquant les enjeux liés à l'immigration, les électeurs de le Pen parlent aussi d'autre chose : de leur rapport difficile à autrui, y compris dans le cercle familial, davantage que de questions économiques. Les attitudes à l'égard des immigrés sont ainsi très corrélées à la confiance interpersonnelle. (…)
Les électeurs de Le Pen se méfient des (très) pauvres, considérés comme des assistés quand il ne s'agit pas d'immigrés, à l'image de leur rapport à autrui en général. Ils ne croient pas en la redistribution, faute de confiance en autrui, même si d'un point de vue objectif ils en seraient les principaux bénéficiaires. (…)
(Les électeurs de Le Pen) Ils sont nationalistes fondamentalement sceptiques vis-à-vis de l'intégration européenne et de l'ouverture internationale. (…)
Les électeurs de Le Pen ont le même profil (malgré la hausse des voix en sa faveur) : ils disposent de niveaux de revenu et de diplôme beaucoup plus bas que la moyenne. (…)
Le graphique suivant (figure 9) (à voir dans le livre) confirme que Le Pen est bien la candidate de la France malheureuse et Macron de la France satisfaite. Parmi les personnes les plus insatisfaites, un tiers ont voté pour Le Pen au premier tour. »

(CAPITAL ET IDÉOLOGIE
Thomas PIKETTY
Ed.Seuil, 2019.
Directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales, professeur à l'École d'économie de Paris.)

 (Election présidentielle 2017, premier tour) Enfin, le bloc nativiste-égalitaire a regroupé 26 % des voix autour de la candidature de Marine Le Pen au nom du Front national (21 %) et du candidat de la droite nationaliste et souverainiste Dupont-Aignan (5 %) qui s'est rallié à la première lors du second tour. Cet électorat est plus favorable à la redistribution riches-pauvres que la moyenne (61 % contre 51 %), mais il se caractérise surtout par sa très violente hostilité aux immigrés (91 % pensent qu'ils sont trop nombreux en France). Cet électorat est massivement moins diplômé que les trois autres (le pourcentage de diplômés du supérieur y est plus de deux fois plus faible), et ses revenus sont également les plus faibles des quatre quarts. En revanche, il dispose de patrimoines un peu plus élevés que ceux de l'électorat Mélenchon/Hamon (mais beaucoup plus faibles que ceux des électeurs Macron et Fillon).

Avant les élections.
Non, mais ! On est en démocratie, quand même !
Les girouettes politiques ont pris le pouvoir. Pauvre France !



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