vendredi 29 novembre 2019 - par Jacques-Robert SIMON

Courte description du collectivisme inégalitaire

L'individualisme tend à privilégier les droits, les intérêts et la valeur de l'individu et prône l'autonomie de chacun. Le collectivisme, tout au contraire, considère un pouvoir comme légitime seulement s’il émane d’une large majorité d’une population. 

 La division du travail est une caractéristique essentielle des sociétés humaines, c’est elle qui a permis de vaincre les immenses difficultés qu’elles ont rencontrées pour survivre en milieu hostile. Les tribus purent satisfaire leurs besoins d’une façon plus efficace lorsqu’elles assignèrent à chacun des membres un rôle déterminé, en coordonnant leur travail et en échangeant les biens fabriqués. Ce qui advint 8 000 ans av. J-C. Un climat plus sec a entraîné la raréfaction du gibier. Une sédentarisation des populations se produisit alors dans une région où les pluies permettaient des cultures, en particulier au Kurdistan et dans l’Irak actuels. Il s’ensuivit l’apparition des activités agricoles, l’élevage et certaines formes de commerce, toutes ces activités nécessitant une spécialisation des tâches : 

 « Il fallait mettre de côté une partie de la récolte pour semer à la saison suivante et s'assurer que personne ne mange les réserves... Il a donc fallu imposer un droit de propriété sur la récolte, au beau milieu de la nature. Là où, précédemment, tout le monde avait le droit de cueillir. »

 Quelques millénaires plus tard, en 1773, Frédéric Japy, met au point un système de fabrication horlogère par des machines développées grâce à une division des tâches. L’utilisation de la machine-outil lui permet d’embaucher des ouvriers non qualifiés, des femmes, des vieillards et de commencer une production en série.

 Même si l’habillage par les mots semble démontrer l’inverse, la division du travail et le libre échange qu’il implique concourent à un collectivisme naturel sans avoir la nécessité d’une idéologie contraignante, autoritaire ou dictatoriale : c’est l’ensemble du peuple qui participe au collectivisme souvent sans en être conscient. La division du travail induit tout aussi naturellement l’émergence de responsables, de chefs, de dirigeants. Chaque tâche doit être en effet organisée en optimisant le temps qui lui est consacré pour que la productivité soit élevée, les coûts bas et que tous, y compris les salariés, puissent en bénéficier. Il faut également faire émerger des coordonnateurs pour que le produit final puisse réunir harmonieusement tous les travaux parcellaires. Ce collectivisme naturel a cependant quelques inconvénients.

 En 1776, Adam Smith publie ‘La richesse des nations’ qui pose les bases théoriques de l’économie actuelle. Il va organiser en idées et concepts le phénomène naturel du collectivisme induit par la division du travail. Si la division du travail permet un accroissement de l’habileté des ouvriers et si elle favorise l’utilisation de machines, le caractère parcellaire du travail fait que l’ouvrier, selon Adam Smith, « devient en général aussi stupide et aussi ignorant qu’il soit possible à une créature humaine de le devenir. »

 Les choses cependant ne se passèrent pas ainsi, la généralisation de l’école obligatoire permit aux démunis d’avoir les armes pour comprendre le monde dans lequel ils vivaient, mais pas pour le changer. Un exode rural s’amorça dès 1850 au profit de la révolution industrielle. L’agriculture s’empare peu à peu du machinisme et devient plus productiviste. Les producteurs de denrée deviennent des producteurs de biens en accentuant considérablement la division du travail et la structure pyramidale de la hiérarchie concomitante.

 L’extension au monde des mêmes processus de production permettra bien plus tard d’obtenir des biens à encore moindre coût en mettant à l’ouvrage les populations des pays émergents plutôt que les travailleurs unis dans un tissu national. L'économie française est ainsi devenue une économie de services : en 2015, le secteur tertiaire occupait 77 % de la population active, tandis que le secteur primaire (agriculture, pêche...) n'en représentait plus que 3 %, et le secteur secondaire (essentiellement l’industrie) 20 %. Le secteur tertiaire (commerce, administration, transports, activités financières et immobilières, services aux entreprises et services aux particuliers, éducation, santé, action sociale, information-communication) est également prédominant au niveau mondial où il représente plus de 60 % du total des activités. Cette tertiarisation s’accompagne là encore d’une intensification de la division du travail. À titre d’exemple, au médecin généraliste ancestral omniscient a succédé d’innombrables spécialités : allergologie, andrologie, anesthésiologie, cardiologie, dermatologie, endocrinologie, gastro-entérologie, gériatrie, gynécologie, hématologie, hépatologie, immunologie, infectiologie… Dans le même esprit, Le code du travail qui faisait 1892 pages en 1990 (éditions Dalloz), en fait 3492 en 2013. Une large fraction de la société se sent apte à diriger et à conseiller les autres, ces autres ne se trouvent cependant plus dans le tissu national.

 Le sacré se définit comme ce qui lie les personnes favorisées avec les plus démunis, c’est ce qui surpasse l’état de fortune. Une classe dirigeante se préoccupe surtout de diriger, le sacré n’est qu’un des moyens parmi d’autres pour elle. Les dirigés sans le sacré voient disparaître ce qui constituait pour eux un espoir de fraternité, d’égalité. Les délocalisations font disparaître tous les sacrés, en particulier ceux liés à la Nation, la République, la culture… Dans des pays nantis revenus de tout, la momification de toute action se produit, les conséquences sont devenues trop prévisibles pour qu’on entreprenne quoi que ce soit, la mécanisation des comportements, les lourdeurs invraisemblables apportées par des précautions érigées en principes paralysent le système. Les sociétés vieillies, bougonnes et bardées de références deviennent stériles ayant plus de dirigeants que de dirigés. 

 Pour se procurer des produits qu’ils ne produisent plus, les pays occidentaux n’ont pas d’autre solution que de proposer des investissements et un savoir-faire financier. Le collectivisme atteint son point culminant : les plus riches dirigent, les autres veulent devenir riches. Les finances permettent de se procurer les talents, les ingénieurs, les logisticiens dont ils ont besoin, en plus des ouvriers et des employés, pratique plus traditionnelle. Les innovations ne sont plus centrées sur la Chimie, la Physique ou même la Biologie, ce sont les techniques d’ingénierie financière et la capacité à les mettre en œuvre avec des investisseurs qui permettent de faire émerger des entreprises qui dominent tout. Ce chemin serait (peut-être) praticable s’il se créait un Terrien sans plus d’attaches locales mais avec des devoirs planétaires. Dans l’immédiat toutefois, la désagrégation des Nations qualifiées de démocratiques conduit à un communautarisme rétrograde digne des pires périodes de l’Histoire. Le collectivisme financier mondial s’accompagne de structures hiérarchisées locales liées à une religion, une culture, une ethnie défendant leurs intérêts propres.

 Il est souvent prétendu que les populations nanties deviennent individualistes ; c’est faux et de toute façon impossible dans des sociétés qui se débarrassent de toute forme d’artisanat, de toute forme de libre arbitre personnel. Par contre, elles deviennent égoïstes avec une tendance névrotique à privilégier leur propre satisfaction aux dépens d’autrui.

 Le collectivisme est toujours inégalitaire même s’il prétend l’inverse, qu’il soit rouge, brun ou habillé de libéralisme. Le collectivisme ne tend pas non plus vers la Liberté et encore moins vers la Fraternité. La coexistence apaisée d’individus uniques, qui constitue l’essentiel de l’individualisme, ne passe pas par un formatage législatif ou mental pour fabriquer des semblables, le respect des différences suffit.

JPEG



13 réactions


  • Clark Kent Séraphin Lampion 29 novembre 2019 15:26

    Décidément, aujourd’hui, sur ce site, les mots ont une fâcheuse tendance à se faire détourner !

    Le « collectivisme » concerne la mise en commun des outils de procuctio et non pas les biens de consommation.


    • Jacques-Robert SIMON Jacques-Robert SIMON 29 novembre 2019 18:45

      @Séraphin Lampion
      Le collectivisme est une idéologie et une forme d’organisation sociale dont la légitimité du pouvoir décisionnel et exécutif se trouve dans la collectivité, l’ensemble de la population. C’est aussi un concept de psychologie sociale, mettant en avant le groupe prioritairement à l’individu.


    • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 30 novembre 2019 22:43

      @CLOJAC

      Et ne pas oublier en Mélanésie les partages avec les polynésiens sur certaines îles sur de longues distances temporelles .Les polynésiens sont des agriculteurs avant d’être marins .lol pas si simple.


    • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 30 novembre 2019 23:37

      @CLOJAC

      Ce qui m’a toujours fasciné c’est que les plus grands navigateurs de tous les temps soient d’abord des planteurs , des paysans ...même si ces mots ne peuvent rendre compte de ce qui a été.


    • julius 1ER 2 décembre 2019 08:39

      Le « collectivisme » concerne la mise en commun des outils de procuctio et non pas les biens de consommation.

      @Séraphin Lampion

      Je pense que le terme « collectivisme » n’est pas adapté au cas de figure que tu décris.... ce serait plutôt le terme de « socialisation » des moyens de production .. !!!
      le collectivisme est surtout un concept idéologique en opposition à l’individualisme le premier fait référence au groupe qui doit prédominer dans les choix politiques et économiques d’ailleurs le « collectivisme a surtout été associé au choix économiques faits par les bolchéviques pendant la période de l’ex URSS... sovkhose, kolkose le second terme étant plus proche de nos »Coopératives" dans sa mise en oeuvre !!


  • Laulau Laulau 29 novembre 2019 16:26

    Quelqu’un a-t-il une canne blanche ? C’est pour le pauvre aveugle qui a écrit cet article.


  • pallas 29 novembre 2019 17:37
    Jacques-Robert SIMON

    Digne de la Génération qui est la votre La fameuse Mai 68, la lâcheté.

     smiley

    Vous faites fiertés de vos parents, la Génération « Collabo ».

    Salut


    • Julot_Fr 30 novembre 2019 15:55

      @Raymond75

      La guerre, la colonisation, esclavagisme sont le fait des « elites » tandis que la collaboration, la complaisance sont effectivement le fait des boomer francais.. la generation qui encule les autres


    • Jacques-Robert SIMON Jacques-Robert SIMON 1er décembre 2019 08:17

      @pallas
      Merci de votre analyse.


    • julius 1ER 2 décembre 2019 08:43

      la collaboration, la complaisance sont effectivement le fait des boomer francais.. la generation qui encule les autres

      @Julot_Fr

      tu peux expliciter cette phrase, j ’ai peur de ne pas comprendre !!!!


    • Julot_Fr 3 décembre 2019 15:09

      @Raymond75

      Cest un simple constat, votre generation encule tous les autres, ou est le probleme d accepter les faits ?
      La generation suivante vie avec votre merde, le seul debat est comment les autre generations auraient fait a votre place, pour vous rassurer, je vous dirais « pas mieux ».. le probleme etant que maintenant que vous vous rendez compte de ce que vous avez fait, vous continuez votre merde (votant collabobo pour le cheque en fin de mois).


  • Julot_Fr 30 novembre 2019 10:25

    Les notions de collectivisme et induvidualisme ont etees suplrimees du dictionnaire dans une optique de manipulation de la pensee, voir travaille d Edouard Griffin. L individualisme etait le concept selon lequel les droits de l etat n outrepassent pas celui du citoyen tandis que le collectivisme donne tous les droits a l etat si une majorite de citoyens sont d accord.. ca ouvre la voie au vol de propriete et la redistribution par l etat (taxe.. socialisme..)


Réagir