mercredi 23 juin 2010 - par Mohamed Belaali

« Dans un stade c’est un moment de communion, il n’y a plus de classes sociales » !

« Le sport est une réponse à la crise, c’est parce qu’il y a des problèmes qu’il faut mobiliser le pays vers l’organisation de grands événements. Qu’est-ce qu’il y a de plus fort que le sport, et à l’intérieur du sport qu’est-ce qu’il y a de plus fort que le football » ? s’exclamait Nicolas Sarkozy. « Dans un stade c’est un moment de communion, il n’y a plus de classes sociales » déclarait Roselyne Bachelot (1). Le sport et plus particulièrement le football, voilà les remèdes miracles de la bourgeoisie et de ses serviteurs contre la crise du capitalisme. Ils permettent de surcroît d’abolir les classes et la lutte des classes  ! Belle manière pour anesthésier la population et faire passer ainsi, sans trop de difficultés, des « réformes » douloureuses et réaliser des bénéfices fabuleux. Sauf que le football, tel qu’il est organisé aujourd’hui, est l’expression, le miroir d’une société capitaliste malade avec ses tares et sa brutalité : compétition à outrance, haine de l’autre, corruption, tricheries, racisme, chauvinisme, machisme, dopage, violence etc. etc.

En plus de la propagande quotidienne habituelle, faits divers, météo, burqa, sécurité, etc. l’annonce de l’Euro 2016 et la coupe du monde de football constitue une véritable aubaine pour les riches en ces temps de rigueur et d’austérité. Les luttes sociales deviennent difficiles à mener durant le Mondial. Ils savent que le foot fascine et tétanise les pauvres. Il leur procure, à l’instar d’une drogue dure, des moments de plaisir en oubliant un instant leur triste sort. Le foot les fait sortir massivement dans la rue crier la victoire de leur équipe : « on a gagné !...on a gagné ! ». Dans ce sens il leur sert d’exutoire aux multiples privations et frustrations. En les soulageant, le football les détourne en même temps de leurs vrais problèmes. « L’affaire Anelka » ne fait que prolonger, différemment, cette ambiance.

Les grands médias, jour et nuit, vont se charger de gaver le peuple d’images, de débats, d’interview et de commentaires liés au foot. Dans les foyers, les cafés, les restaurants, dans certains établissements scolaires, les stades, sur les places publiques... des écrans de télévision, petits et grands, transmettent en direct tous les matchs de la coupe du monde. Concerts, tournois, jeux, films, expositions et autres animations sont également prévus pour célébrer cet événement sportif qui se répète inlassablement tous les quatre ans. Tout est prêt pour que les pauvres « vibrent » ensemble et oublient les luttes sociales. Pendant ce temps là, les grandes multinationales, elles, gèrent et comptent tranquillement leurs milliards de dollars gagnés grâce à cette hystérie collective que représente la coupe du monde de football. Profitant, lui aussi, de cette anesthésie générale, le président de la République Nicolas Sarkozy annonce solennellement le 16 juin 2010 en pleine coupe du monde la destruction de ce qui reste encore du système de retraite par répartition.

« Panem et circenses », voilà ce que les empereurs de la Rome antique offraient au peuple afin qu’il ne songe plus à sa misère.

Mais aujourd’hui ni les jeux ni le pain ne sont gratuits et les joueurs ne sont plus des gladiateurs. Le sport, comme la plupart des activités, est une vulgaire marchandise qui se vend et s’achète. Le sport, dans le cadre du capitalisme, est d’abord un marché, et un marché fabuleux. La dernière coupe du monde organisée en Allemagne en 2006 a enregistré plus de 26 milliards de téléspectateurs en audience cumulée à travers le monde. La liste des sponsors est interminable. Le chiffre d’affaire (ensemble des ventes) de la Fédération internationale de football (FIFA), l’une des organisations les plus corrompues au monde(2), a progressé de 60 % entre 2006 et 2010 (3). Les fabricants et les vendeurs de téléviseurs se frottent les mains. Sur seulement deux mois (mai/juin), leurs ventes peuvent atteindre les 200 000 postes. Les équipementiers sportifs comme Adidas, Nike et Puma s’arrachent à coup de millions de dollars des contrats avec les équipes nationales pour qu’elles portent leurs couleurs. Ils espèrent ainsi doper leurs ventes, en berne en 2009, de ballons, chaussures et autres maillots de foot. Les chaînes de télévision achètent à prix d’or les droits de diffuser les matchs afin d’ augmenter leur audience et vendre ainsi leurs spots publicitaires de trente secondes le plus cher possible.

Les corps des sportifs ne sont que des machines à sous. Les compétitions sont poussées à l’extrême afin que le spectacle soit rentable. Car seule la victoire, par tous les moyens, compte. Le dopage généralisé, dans ces conditions, devient indispensable. Le sport, paradoxalement, constitue ainsi la négation des qualités physiques des sportifs !

La bourgeoisie est donc gagnante sur les deux tableaux : endormir le peuple et faire des bénéfices.

Dans le cadre d’un capitalisme mondialisé, le sport en général et le football en particulier ne peuvent que servir la classe dominante qui les utilise comme un marché planétaire pour ses marchandises. Le football dans cette optique n’est, pour elle, qu’un instrument efficace pour faire des bénéfices. A cette fin, elle mobilise d’une manière hystérique tout son appareil idéologique et médiatique. La classe dirigeante exploite et exacerbe à l’extrême les passions et les comportements les plus grégaires et dressent les individus et les nations les uns contre les autres, les détournant ainsi des vrais responsables de leurs malheurs c’est à dire le capitalisme et la classe sociale qui le porte, la bourgeoisie.

Mohamed Belaali

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  1. http://www.france-info.com

  1. Voir, entre autres, « Carton rouge, les dessous troublants de la FIFA » d’Andrew Jennings, Presses De La Cité.

  2. Les Echos.fr



7 réactions


  • iris 23 juin 2010 10:40

    BOYOCTT DU FOOT A LA TELE -et des sports a tarif trop élévé -f1-tennis etc...
    aller soutenir les joueurs amateurs locaux
    des sous pour la culture et l’éducation


  • Traroth Traroth 23 juin 2010 11:16

    Ce qui m’épate, c’est qu’on réussit à faire croire aux gens qu’une futilité comme le foot est quelque chose d’important.
    Ce matin, j’ai entendu Bachelot dire « plus rien ne sera jamais comme avant ». Ça m’a fait l’effet d’un écho : la dernière fois que j’ai entendu quelqu’un dire ça, c’est après la coupe du monde de 1998. Et clairement, tout est exactement comme avant !

    Pendant ce temps-là, le gouvernement rogne nos retraites, la crise continue à tous nous ruiner, la fuite de pétrole dans le golfe du Mexique menace de devenir la pire catastrophe écologique de l’Histoire, les Palestiniens continuent à mourir à petit feu à Gaza. Mais comme les médias sont obnubilés par une bande de gamins dont le métier (!) surpayé est de taper dans un ballon, toutes ces choses dont l’impact sur nos vies risque de ne pas être négligeable, sont complètement occultées !

    Réveillez-vous, bon sang !


  • clostra 23 juin 2010 11:18

    Comme disait Churchill « no sport » car de plus c’est très mauvais pour la santé surtout à haute dose. Un exemple à ne pas suivre donc.


  • Lisa SION 2 Lisa SION 2 23 juin 2010 12:02

    Bonjour,

    Vous êtes le premier dont je lis l’article sur ce sujet, la coupe du monde ( est pleine ).

    " La dernière coupe du monde organisée en Allemagne en 2006 a enregistré plus de 26 milliards de téléspectateurs en audience cumulée à travers le monde. " d’où le rictus de JPP, Jean Pierre Pernaut, quand il tend au public pendant son jt, des tong aux couleurs des bleus...

    Michelin devrait en prendre de la graine et faire des pneus de 4x4 avec des crampons à son effigie.


  • zelectron zelectron 23 juin 2010 20:02

    L’équivalent du budget du foot remplit plus que correctement le trou des retraites ou celui de la sécu ou des recherches contre le cancer, le sida, les maladies diverses et variées dont notre humanité est accablée .... L’indécence de ces sommes vertigineuses me fait honte pour eux (les footeux) y compris un certain public qui y contribue directement ou indirectement.


  • ddacoudre ddacoudre 23 juin 2010 23:48

    bonjour Mohamed

    je partage pleinement ton analyse, et un seul footballeur a étéé dans ton sens c’est manuel Petit
    pour ma part j’ai donné mon point de vue dans un article
    http://www.agoravox.fr/ecrire/?exec=articles&id_article=77167
    cordialement.


  • bonsens 24 juin 2010 11:01

    Mohammed , d’accord avec vous .
    Traroth , d’accord avec vous , sauf sur un point (mais il est d’importance ) . Le sport professionnel - notamment le foot-est en effet quelque chose de peu important dans l’absolu . Il le devient toutefois pr l’importance des sommes drainées , sommes qui manquent alors pour satisfaire les besoins socialement plus utiles .
    Sur la partie « sponsoring » de ces ressources , il est anormal que GdF Suez , par exemple , revendique en ce moment une augmentation du tarif du gaz , qui frappera tous les consommateurs de ce bien de base , tout en donnant quelques millions de plus au systéme FIFA FFF pour nous passer un peu plus de publicité décervelant à la télévision , alimenter quelques gaspillages supplémentaires , et compléter le revenu de quelques crétins en culottes courtes (Sans les contrats de pub , Thierry Henry le tricheur gagne déja 666 000 euros PAR MOIS , Ribéry 465 000 PAR MOIS , tous à l’avenant ) . Si on le leur demandait , la grande majorité des consommmateurs préférerait une modération des prix du gaz .... Et les sommes en jeu ne sont pas négligeables ... Le consommateur , ici quasi captif, est véritablement racketté dans ce cas .
    Personnellement , je préférerais sauter un repas plutot que de manger chez Quick , devant la photo de ce « modéle pour les jeunes » qu’est Anelka . Cela ne passerait pas .
    PS au derniéres nouvelles , GdF Suez ainsi que Quick ont retiré leurs publicités devant le scandale . IL faut donc continuer à exprimer notre indignation , à battre le fer pendant qu’il est chaud , pour obtenie au moins ce résultat . Carrefour maintient encore son sponsoring . C’est mainteant lui qui doit le retirer . Si nousne le faisons pas , aprés un phase de profil bas , ( pendant laquelle les grasses prébendes continuent à étre versées , mais plus discrétement ) , tout va recommencer...

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