jeudi 2 juin 2005 - par nico

De l’humanisme pour être dynamique

Dominique de Villepin souhaite lever les obstacles sur le marché de l’emploi avec « pragmatisme, audace et imagination, dans un esprit de dialogue social ». C’est bien, car ce dont il est certain c’est que la France et l’Europe manquent cruellement d’audace. Pour Alfred Sauvy, il y aurait un lien naturel avec le vieillissement de l’Europe. En quatrième de couverture de « Vieillesse des nations », on lit : « Le malthusiansime, le refus de la vie qui entraine une atrophie de l’esprit créatif et une gestion passive des conséquences du passé, inspirée par une vision statique de la réalité économique. D’où la défense des avantages acquis, la crainte de l’immigration, l’impossibilité d’équilibrer les systèmes de retraite, la persistance d’un chômage élevé et des recettes simplistes comme le partage du travail et des revenus. ». En France, il ne faut plus se voiler les yeux, nous en sommes là. L’atrophie de l’esprit créatif, la vision statique de la réalité économique, c’est nous, c’est la France. Si on suit l’implication de la citation, il est donc tout naturel de constater une crainte de l’immigration, un problème des retraites, le chômage. La meilleure méthode pour lutter contre ces maux impliqués est bien de s’attaquer à la cause : il faut encourager l’esprit créatif et cesser notre immobilisme économique, deux notions étroitement liées.

D’abord, je souhaiterais faire entendre une véritable requête humaniste. La crise de l’emploi français n’est pas simplement économique. Plus de 10 % de chômage en France. Je suppose qu’en fouillant bien, on arrive facilement à en soustraire le quart en rendant les emplois attractifs. Oui, je suis en train de dire que parmi les chômeurs, certains le sont parce qu’ils ne veulent pas travailler dans ces conditions. Mais laissons de côté les propos de la droite radicale, et plutôt que de les considérer comme les poids de la nation, trouvons leur une place dans une société qui ne considère pas le travail comme une fatalité. Beaucoup de jeunes diplômés Bac+3,4,5, préfèrent l’inactivité sociale en attendant de trouver LE travail plutôt que de commencer à travailler, à exister socialement. Dans le modèle suédois dont on va de plus en plus entendre parler pour sa réussite sociale, un salarié sur trois change de travail chaque année. Pourquoi les français seraient plus enclins à la passivité et au manque de dynamisme ? Je répondrai à ça par d’autres questions frappantes. Où est la fierté du travailleur ? Où est la fierté pour le résultat de son travail ? Est-ce qu’un poinçonneur de tôle de chez Renaud est fier de la voiture à laquelle il a contribué ? De plus en plus, l’ouvrier est « désimpliqué » de son travail. En quoi est-il intéressant, motivant, agréable ? L’artisanat français est en déclin, et la motivation au travail avec lui. Existe-t-il une alternaive au taylorisme ? Si oui, il est urgent de la mettre en place.

En ce qui concerne la peur de l’ouvrier étranger, pourquoi ne pas travailler avec lui, plutôt que contre lui ? Une Europe forte et solidaire sera une Europe complémentaire. Le fait est que parmi les nouveaux arrivants dans l’Europe des 25, la plupart n’en sont qu’à une phase de réveil d’après communisme. Mais ils peuvent assumer des tâches dans l’effort commun. En France, notre rôle est de développer des emplois hautement qualifiés, un véritable savoir-faire, que ce soit dans l’industrie, ou les services. Il s’agira certainement de miser sur la technologie et l’innovation. Associons nous aux autres pays européens, en construisant des compétences complémentaires et non concurrencielles, pour former une coalition de force.

Une chose qui me fait rager, c’est l’intérêt pour les langues étrangères en France. Comment voulez-vous faire adopter une Europe politique et multilingue aux français, alors que la Révolution Française l’a privée de la richesse de son paysage linguistique. Et cela, par la force : combien de petits Catalans français ont été punis pour avoir parlé la langue de leurs parents sur les bancs de l’école de la République ? A combien de petits Basques ou Alsatiens la République a-t-elle privé de l’occasion idéale de construire des mécanismes mentaux de multilinguisme ? Que l’on ne se plaigne pas des mauvaises performances des français en langues étrangères, et par là-même de son manque d’ouverture. Pour une personne qui parle un bon anglais et qui a des notions solides d’italien, polonais, allemand, qui peuvent être maitrisées en quelques mois, est-ce que la perspective d’aller travailler à l’étranger ne serait pas une excitation plutôt qu’une peur ? L’A380 a été conçu par les européens et devrait être au service des européens. Derrière cette phrase choc je demande qu’on leur permettent de voyager, et de se comprendre entre eux avant de leur demander de vivre ensemble. La télévision pourrait être un bon média. Mais en France on ne sait pas l’utiliser. arte se veut une chaine franco-allemande, j’aimerais bien savoir ce qu’elle a d’allemande. Un élève du collège qui apprend cette langue ne peut même pas s’exercer l’oreille sur des journaux d’information qui ne laissent entendre qu’un doublage français. Nous avons la chance d’avoir des cinémas qui projettent des films en VO assez régulièrement (contrairement à l’Italie ou l’Espagne par exemple). Mais qui va dans ces salles ? Pourquoi le service publique audiovisuel (au moins) ne diffuse-t-il pas les programmes dans leur langue originale quelques fois ? Cas extrême, il y a quelque temps, était passé sur une chaine hertzienne le film « Ma femme est une actrice », qui prend place en partie à Londres et dont les scènes ont été tournées en anglais, apparaissant sous-titrées au cinéma. Transposées à la télévision, ces scènes se sont retrouvées doublées, et mal.

Pour résumer, je prône la création d’intelligence. Avant de réformer l’économie, il faut réformer l’éducation pour créer ensuite du travail d’experts motivant, développer la maitrise des langues pour entretenir les relations de paix et de concorde à la manière d’Erasme. Mais voilà ! Sauvy prédisait que « les mesures salutaires sont trop difficiles à admettre et qu’on préférerait la pente indolore et lentement destructrice du chômage » (voir la lime). La réforme de l’éducation n’est pas un choix facile, puisque à la fois ses préconditions et ses conséquences consiste en une radicale révolution de moeurs sociaux. Peut-être, après tout, avons-nous plus que jamais besoin de ce pragmatisme et cette audace que Villepin ambitionne. Mais nécessairement l’audace passera par un rajeunissement de la France. Une autre direction sociale que Sauvy aurait donc réclamée haut et fort serait donc un coup de pouce à une politique nataliste. En fait, ce que tout le monde s’accorde à espérer : créer du mouvement.



3 réactions


  • nico 17 juin 2005 11:48

    En guise d’auto-commentaire, un pointeur intéressant sur l’enseignement des langues et la politique économique. C’est dans le figaro du 16 juin.


    • Sophie Vasseur (---.---.237.50) 18 avril 2006 13:48

      Bonjour,

      Nous sommes en 2006 et je pense qu’il est grand tant que l’être humain ouvre les yeux et ouvre un peu plus son coeur.

      Nous avons un coeur pour aimer et un cerveau pour penser. C’est la différence que nous avons avec les animaux, nous avons cette faculté de discerner le bien du mal.

      Dans la nature seuls les plus forts subsistent, c’est la dure loi de la vie. Nous en théorie nous pouvons agir pour protéger les plus faibles. Mais qu’en est il en réalité, on se sert uniquement des animaux pour notre confort, on les torture, on joue et on rit de les voir mourir, et plus c’est long plus c’est bon.

      On les élève pour les manger. Donc tellement on en tue que l’on les élève en batterie et on les transporte n’importe comment. C’est pas grave, ce ne sont que des animaux rien d’important leurs conditions. Il ne semble que sans faire de sentimentalisme, il est temps de prendre conscience que nous ne sommes pas les maîtres de monde. Ce monde plein de futilité, plein d’égoisme et d’égocentrisme. C’est curieux un homme qui joue, abuse et maltraite un animal c’est normal, par contre un animal qui se retourne sur un homme il faut l’exterminer. L’homme paiera très cher tout ces abus, dans tout les domaines. Il est très important de respecter la vie, mais pas que la vie des hommes. Le jour où nous cesserons de vivre sans toutes ces vieilles traditions et sans ces religions si meurtrières, l’homme grandira et sera meilleur.

      Laissez dons ces pauvres taureaux en paix, ce ne sont pas vos jouets, de grace, grandissez mesdames et messieurs. Vous devez pouvoir vous divertir autrement, les vieilles traditions ne sont pas les meilleures.

      Le rêve fait vivre.

      Bonne réception. Sophie


  • krokodilo (---.---.253.46) 19 juillet 2006 23:56

    « Pour une personne qui parle un bon anglais et qui a des notions solides d’italien, polonais, allemand, qui peuvent être maitrisées en quelques mois, » Moi aussi j’aime bien la science-fiction, je pense même qu’avec une puce de traduction greffée sur le cerveau, il est possible de les maîtriser en quelques heures !

    Par ailleurs, quand je regarde un film étranger, j’aime bien apprécier les dialogues, pas seulement les images. Quel intérêt peut avoir un film de Woody Allen si on pige qu’un quart (en étant généreux) d’un anglais ardu ? Quant à un film de Youssef Chahine ou un en chinois, japonais, polonais, etc, je tombe à zéro de compréhension. Quel intérêt alors ? Est-on condamnés à vie à étudier les 6000 langues du monde ? Le multilinguisme c’est bien dans l’absolu, mais ce n’est possible que pour une infime minorité, dans une infime minorité de langues. Et comme solution en Europe, c’est du pipeau.


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