mercredi 7 septembre 2005 - par Argoul

Ecrire blog

« Ecrire blog » signifierait-il se laisser aller à la facilité de l’époque issue des média, des BD et du ciné ? Serait-ce l’image plutôt que la parole argumentée ? L’émotion brute gérée uniquement comme un scoop ? La seule photo (à peine) commentée ? Ou le simple carnet « au fil de l’eau », déroulant la pensée comme elle vient, sans distance ni ouverture ? Jusqu’ici, ma conception de « l’écriture blog » n’était pas celle-là.

Le web apparaît comme un outil supplémentaire de communication et d’échanges. Un véritable "lieu" virtuel où proposer ses propres expériences et réflexions pour que les autres réagissent, créent des liens, fassent "avancer" les choses. Il ne s’agit pas de recréer la télé documentaire. Ni d’exposer son pauvre petit moi au voyeurisme ambiant. Ni de faire propagande en alignant les slogans ou en vomissant gratuitement le voisin. Le blog est une écriture comme une autre. Mais une forme particulière d’écriture.

Reste en effet que la lecture s’effectue sur écran. Et là, il est vrai, nous devons réfléchir à ce qui convient le mieux pour le confort de l’oeil et pour le goût irrésistible de chacun à en voir "le plus possible", sans trop s’attarder. Il faut "accrocher" comme dans la presse, captiver comme dans la littérature, nourrir l’esprit comme dans les essais...

Le blog est un carnet d’exploration - de voyage, de lecture, de réflexion sur un sujet expérimenté personnellement. Il a ceci de particulier qu’il est issu de la vie même. C’est ce qui fait sa sève. Il s’enracine dans le quotidien, le vécu, le "vrai" en un sens (un vrai particulier mais qui peut accéder, par la magie des mots, à l’universel des hommes - c’est ce que disait Rousseau). Il se doit donc d’être rédigé à chaud. Mais l’intérêt de l’expérience est de "faire réfléchir".

La "réflexion" est l’aller et retour : comme le rayon lumineux, la pensée est dans la vie et en dehors, elle est partie du mouvement et "réfléchit" sur le mouvement. D’où la seconde démarche : après la rédaction à chaud, approfondir les points qui tiennent à coeur (ou qui surgissent à la réflexion du groupe), prendre de la distance, instiller de la pensée construite dans ce ressenti immédiat. Ce n’est souvent que confirmer l’intuition, formaliser en mots alignés une idée vague qui vous est venue, collecter les faits et les expériences des autres hommes rencontrés en voyage pour se regarder autrement.

On ne revient jamais d’une plongée dans l’étrange ("l’étranger") exactement comme on y est parti. La France, par exemple, apparaît pour ce qu’elle est dans le monde, sous le regard de 99% des habitants de la planète ; notre "moi" apparaît bien humble, bien égoïste, bien naïf, au regard des civilisations d’ailleurs. Nos "problèmes" apparaissent bien petits, bien relatifs - même si cela choque l’orgueil de notre ego bien des fois. D’où ce besoin de distance, de réflexion sur les choses. L’écriture blog, c’est le spontané - certes - mais on ne construit rien de durable sur le seul "spontané" - l’échec patent de "l’éducation 68" (pour faire bref) en témoigne. Nul ne crée bien sans posséder les techniques requises, n’invente rien sans avoir préalablement appris. Il n’y a pas de mauvais outils - que de mauvais ouvriers. Pardon de rappeler ces évidences du bon sens mais je crains qu’en Occident, la magnificence de "la technique" ne fasse oublier à bien des gens que ce sont des HUMAINS qui la mènent et que "la technique" ne suffit en rien à agir humainement. "Science sans conscience..."

Tout le monde n’est pas fait pour cette écriture plutôt exigeante. Après tout, "Le Petit Prince" est écrit simplement mais a de la profondeur. Nombreux sont ceux qui veulent seulement jouir, "ici et maintenant", sans se "prendre la tête" à lire une pensée construite et à se remuer les neurones. Ils regarderont les photos, grappilleront un mot ici ou là. Ils iront voir ailleurs pour trouver l’image qu’ils veulent se voir renvoyée en miroir sans - surtout - se remettre en cause (ça les met mal à l’aise). Tant pis, on ne peut plaire à tout le Monde. Et tous n’ont pas le talent de l’auteur du "Petit Prince".

Mais l’on peut essayer une autre "écriture blog", en tâtonnant, en testant.

Il s’agit de reprendre ce qui fait le succès de la presse Springer comme de la collection « Découverte » chez Gallimard. La lecture sur écran demande phrases brèves, thèmes chocs et aérations imagées. Donc des illustrations (de 1 à 6), rédiger des textes courts (½ à 1 page), centrer chaque note sur un seul thème.

Après tout, un blog n’est pas "gravé dans le marbre" mais demeure une trace éphémère qui doit inciter aux liens, à l’avancée - toujours - de la pensée, même embryonnaire... Parfois, il suffit de si peu de choses.



3 réactions


  • proxy (---.---.62.197) 8 septembre 2005 16:06

  • Didier (---.---.115.69) 8 septembre 2005 22:10

    Nul doute que les lecteurs et sans doute plus encore les contributeurs d’AgoraVox partageront votre point de vue - enfin je l’espère.

    Il y a quand même un aspect des choses que vous ne traitez pas et qui de mon point de vue a son importance. L’outil, les capacités de l’outil, conditionne(nt) aussi « l’oeuvre ». S’il s’agit de considérer les blogs comme un autre moyen de communication, un moyen supplémentaire, c’est je crois un peu court. Ce que je veux dire c’est qu’il me semble que le blog doit pouvoir ouvrir des champs encore inexplorés dans le domaine de la création et de la diffusion d’informations. Son utilisation première, si j’en juge par les quelques mois de mon expérience personnelle a été celle du carnet personnel, du miroir. Passons sur cet aspect des choses, compulsif. Mais qu’allons nous construire avec cet outil ? Si c’est pour faire la même chose mais avec un nouvel outil, bof !


  • simo (---.---.109.76) 1er février 2007 16:00

    moi simohamed mon email ci [email protected] et jaime le hiphp


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