lundi 12 avril 2021 - par
- Pardon, tous ces non-changements m'ont troublé. Je voulais dire : en quoi consiste donc la nouveauté ?
- On reproche à l'ENA de former des hauts fonctionnaires « hors sol », déconnectés du terrain. Eh bien, la cour centrale sera transformée en potager, et les élèves suivront des cours de jardinage. De même qu'ils assureront eux-mêmes les révisions...
- C'est déjà le cas, non ?
- …les révisions des véhicules de fonction.
- S'agira-t-il de discrimination positive ? Des légumes pour les fils d'agriculteurs, des bagnoles pour les fils d'ouvriers... Un peu cliché, non ? Comme si vous faisiez des cours de jazz pour faire « couleur »... Et les femmes alors ?
- Des cours de puériculture. En outre, les élèves devront coudre eux-mêmes leur tenue. Mais pas de discrimination positive, uniquement des matières supplémentaires favorisant la diversité sociologique et le travail manuel autant qu'intellectuel. Ravalement de façade, maraîchage, toits végétalisés écologiques, panneaux solaires, véhicules, compostage des déchets - tout sera fait par les élèves. On ne pourra plus dire qu'ils n'ont pas les mains dans le cambouis ou la terre de France (pas de terreau d'importation). On les accusait d'être suffisants, ils apprendront l'auto-suffisance !
- Mais ça fait tout de même beaucoup à apprendre, même pour un haut fonctionnaire français, non ?
- C'est un nivellement par le haut, gagnant-gagnant !
- Et ces brillants élèves polyvalents du nouvel Institut du service public (ISP), comment les appellerez-vous ? Isarques, isperticiens, isaïeux, ispeurs, ixperts ?
- Beaucoup pensent qu'il est dommage de supprimer une « marque » si réputée et si connue à l'international. Je vous livre un scoop : ce n'est pas encore officiel, mais nous pensons rebaptiser l'ENA... ENA ! École nouvelle de l'administration.
- Et donc, les énarques...
- Deviendront des e-narques ! Modernité oblige. Ou des e-narquois, on y réfléchit.
- Mais... mêmes murs, mêmes profs, même nom ou presque, vous plagiez un peu le Guépard "Il faut que tout change pour que rien ne change", non ?
- Permettez ! Un tronc commun avec d'autres écoles de fonctionnaires, mobilité, diversité. Il s'agira d'une réforme de fond qui s'attaquera au Paris-Strasbourg, à la centralisation, à l'auto-reproduction des élites. Tout est sur la table : création d'ENA de province, stages obligatoires en sous-préfecture...
- Les élèves des lycées parisiens en stage à Jaichassé-dans-la-Garrigue... Vous ne craignez pas une révolte ? Des Gilets jaunes en costard-cravate ?
- Ce ne sont pas des révolutionnaires, eux, au moins...
- Et la nomination dans les grands corps ? Seront-ils toujours à la botte ?
- Un peu facile, non ? Mais je vous accorde qu'ils s'agit d'un délicat problème structurel.
- Finalement, le président Macron, après avoir multiplié les vaccins, multiplie les écoles de l'administration. Ne prépare-t-il pas là sa campagne électorale en plagiant les miracles de Jésus, personnage qui, pour être célèbre, n'est pas vraiment laïque ?
- Maintenant que vous le dites, comme Lui, il prêche dans le désert : l'UE qui ne veut pas nous soutenir au Mali, force panafricaine fantomatique, armée européenne introuvable, programmes militaires franco-allemand évanescents, déchirements européens sur les vaccins, personne ne l'écoute. Mais je ne suis que le porteur de Sa parole, Son apôtre. Les simples mortels jugeront son action dans les siècles des siècles.
Et l’ENA devint l’ENA !
- M. l'Attaché au sous-porte-parole, enfin un autre sujet que la Covid : la suppression de l'ENA !
- Je parlerai plutôt de transformation, de mutation, d'ouverture à la modernité, de...
- Oui - en somme, le président reste fidèle à son principe : « en même temps » ?
- Voilà ! Nous garderons les qualités et réformerons les rigidités.
- De nouveaux locaux, alors ?
- Non. Les murs sont solides, chargés d'histoire, ils ont vu passer nombre de grands serviteurs de l'État - nous les gardons !
- L'encadrement alors, les profs ?
- Non plus. Ce sont souvent de fortes personnalités, des gens brillants, dévoués à la chose publique : nous les gardons, bien sûr.
- Les élèves alors ?
- Les élèves changent chaque année ! Hi ! Hi !
- Pardon, tous ces non-changements m'ont troublé. Je voulais dire : en quoi consiste donc la nouveauté ?
- On reproche à l'ENA de former des hauts fonctionnaires « hors sol », déconnectés du terrain. Eh bien, la cour centrale sera transformée en potager, et les élèves suivront des cours de jardinage. De même qu'ils assureront eux-mêmes les révisions...
- C'est déjà le cas, non ?
- …les révisions des véhicules de fonction.
- S'agira-t-il de discrimination positive ? Des légumes pour les fils d'agriculteurs, des bagnoles pour les fils d'ouvriers... Un peu cliché, non ? Comme si vous faisiez des cours de jazz pour faire « couleur »... Et les femmes alors ?
- Des cours de puériculture. En outre, les élèves devront coudre eux-mêmes leur tenue. Mais pas de discrimination positive, uniquement des matières supplémentaires favorisant la diversité sociologique et le travail manuel autant qu'intellectuel. Ravalement de façade, maraîchage, toits végétalisés écologiques, panneaux solaires, véhicules, compostage des déchets - tout sera fait par les élèves. On ne pourra plus dire qu'ils n'ont pas les mains dans le cambouis ou la terre de France (pas de terreau d'importation). On les accusait d'être suffisants, ils apprendront l'auto-suffisance !
- Mais ça fait tout de même beaucoup à apprendre, même pour un haut fonctionnaire français, non ?
- C'est un nivellement par le haut, gagnant-gagnant !
- Et ces brillants élèves polyvalents du nouvel Institut du service public (ISP), comment les appellerez-vous ? Isarques, isperticiens, isaïeux, ispeurs, ixperts ?
- Beaucoup pensent qu'il est dommage de supprimer une « marque » si réputée et si connue à l'international. Je vous livre un scoop : ce n'est pas encore officiel, mais nous pensons rebaptiser l'ENA... ENA ! École nouvelle de l'administration.
- Et donc, les énarques...
- Deviendront des e-narques ! Modernité oblige. Ou des e-narquois, on y réfléchit.
- Mais... mêmes murs, mêmes profs, même nom ou presque, vous plagiez un peu le Guépard "Il faut que tout change pour que rien ne change", non ?
- Permettez ! Un tronc commun avec d'autres écoles de fonctionnaires, mobilité, diversité. Il s'agira d'une réforme de fond qui s'attaquera au Paris-Strasbourg, à la centralisation, à l'auto-reproduction des élites. Tout est sur la table : création d'ENA de province, stages obligatoires en sous-préfecture...
- Les élèves des lycées parisiens en stage à Jaichassé-dans-la-Garrigue... Vous ne craignez pas une révolte ? Des Gilets jaunes en costard-cravate ?
- Ce ne sont pas des révolutionnaires, eux, au moins...
- Et la nomination dans les grands corps ? Seront-ils toujours à la botte ?
- Un peu facile, non ? Mais je vous accorde qu'ils s'agit d'un délicat problème structurel.
- Finalement, le président Macron, après avoir multiplié les vaccins, multiplie les écoles de l'administration. Ne prépare-t-il pas là sa campagne électorale en plagiant les miracles de Jésus, personnage qui, pour être célèbre, n'est pas vraiment laïque ?
- Maintenant que vous le dites, comme Lui, il prêche dans le désert : l'UE qui ne veut pas nous soutenir au Mali, force panafricaine fantomatique, armée européenne introuvable, programmes militaires franco-allemand évanescents, déchirements européens sur les vaccins, personne ne l'écoute. Mais je ne suis que le porteur de Sa parole, Son apôtre. Les simples mortels jugeront son action dans les siècles des siècles.