vendredi 21 septembre 2007 - par Emile Mourey

Et si c’était la maison de Vercingétorix ?

La maison de Vercingétorix ? Jacques Pradel au micro d’Europe 1, jeudi 13 septembre : « Nombreux articles de presse ! Evénement d’actualité ! Nous sommes là pour en parler. » Que le lecteur d’Agoravox ne se fasse pas d’illusions ! Il ne s’agit pas de parler du bien-fondé de la localisation de Gergovie à partir d’une relecture du texte de César, ni de répondre aux articles que Gasty et moi avons publiés sur Le Crest. Il s’agit de mettre en exergue les découvertes que les archéologues ont faites dans la plaine, une véritable métropole selon eux, « une découverte fracassante qui va changer notre regard sur les Gaulois ».


Heureusement, nous sommes encore dans un pays où le débat démocratique peut avoir lieu. Merci à Agoravox de bien vouloir publier ma contre-argumentation.

Vincent Guichard est directeur général du Centre européen d’archéologie du mont Beuvray. Après avoir rappelé que les archéologues font de l’Histoire avant tout, il rend un hommage appuyé mais ambigu, et même légèrement ironique, à Napoléon III et à ses officiers qui ont mis l’archéologie française sur ses rails ; mais il enchaîne aussitôt sur l’université qui, depuis un siècle, a pris le relais des sociétés savantes. L’archéologie est devenue officielle, donc sérieuse, et les archéologues sont de véritables chercheurs payés par nos impôts. Pour ceux qui ne l’auraient pas encore compris, cela signifie que l’histoire et l’archéologie gauloises sont devenues des domaines réservés à une élite de spécialistes dont nous ne faisons pas partie.

Matthieu Poux est professeur d’archéologie romaine et gallo-romaine à l’université de Lyon. Le plus important chantier de fouilles, en France, est celui qu’il dirige, ici, en Auvergne. Il confirme que sa métropole arverne serait constituée de trois villes. Au centre, le plateau de Corent serait un sanctuaire religieux où avaient lieu des banquets funèbres. C’est un peu ce que j’ai écrit dans les années 80 en en faisant un site sacré où les Arvernes brûlaient leurs morts. Gondole en serait le port, ce dont je doute, étonné que je suis qu’on n’y ait pas trouvé des vestiges romains, vu que c’est là que j’y ai installé un des grands camps de César, avec son imposant fossé et talus "construits non par les Gaulois mais par les légionnaires". Enfin, troisième lieu, considéré désormais comme beaucoup moins intéressant - gloria transit -, le plateau de Merdogne, baptisé Gergovie par Napoléon III, non habité à l’époque de la Gaule indépendante, à vocation uniquement militaire. Il s’agit là d’une erreur considérable car Merdogne n’est qu’un avant-poste de la véritable Gergovie que je situe au Crest. Voilà donc le modèle que nos jeunes archéologues nous proposent après avoir longuement tergiversé pour savoir si la capitale qu’ils s’imaginent s’était déplacée d’un lieu à un autre suivant l’époque. Mais ils ne se rendent pas compte que si cet endroit leur livre autant de documents, et souvent des objets précieux, c’est parce qu’il se trouve au pied de la véritable Gergovie, sur l’éperon du Crest.

Il ne reste plus à notre ami Gasty qu’à mettre à la poubelle ses belles photos de ruines antiques et à la municipalité du Crest d’envoyer à la décharge toutes ces vieilles pierres qui datent d’avant la guerre des Gaules ! D’après nos archéologues, les Arvernes ne construisaient qu’en terre et en bois. La recherche archéologique ne peut donc mettre au jour que des trous de pieux en attendant que l’imagerie de synthèse nous restitue les anciennes maisons dont certaines à colombages. Encore heureux qu’on ait abandonné l’interprétation que certains faisaient du texte de Strabon, à savoir des huttes de forme ronde. Quant au témoignage de César, on n’en parle plus ! Pour Vincent Guichard, son témoignage est trop laconique (quelle erreur ! Voyez mon article "Gergovie : des textes irréfutables"). Il a pris, ajoute-t-il, une "pâtée magnifique" au pied du plateau "imprenable" de Merdogne et il est parti très vite pour ne pas subir une défaite plus cuisante.

Car aujourd’hui, on connaîtrait les Gaulois beaucoup plus par l’archéologie que par les textes historiques. Pas de centres-villes monumentaux comme en Grèce ou à Rome, ou s’il y en avait, seulement en bois. Jusqu’au IIe siècle avant J.-C., la Gaule aurait été paysanne, population tranquille d’éleveurs et d’agriculteurs, bref une civilisation - je cite - de type "rousseauiste". Oubliés les combats entre nobles gaulois qui chaque année ensanglantaient la campagne, dixit César ! Puis, - je cite encore - comme une traînée de poudre à partir du IIe siècle, des villes seraient apparues, mais suivant un modèle tout à fait original et différent de ce qui existe ailleurs, villes à caractère de sanctuaire religieux et politique sans impératif défensif, villes fantômes (je rêve) dont la trace aurait disparu sauf en des endroits comme Corent ou le mont Beuvray. La petite ville récemment découverte sur le mont Lassois serait une tentative urbaine avortée qui n’a pas eu de suite (voilà qui est vite dit pour écarter une découverte qui dérange). Comment peut-on être aveugle à ce point ? L’archéologie française va-t-elle maintenant développer toute son artillerie à la moindre trouvaille de fortune dans l’espoir de découvrir en rase campagne les grandes métropoles disparues de la Gaule ?

Et le palais de Vercingétorix ? Un bel édifice certes, mais en bois, à l’image d’une maison de Normandie ! Nos antiques forteresses sur leurs points hauts, nos vieux villages gaulois pré-moyenâgeux perchés sur leurs hauteurs, nos archéologues ne les voient pas. Aveuglés par ce qui leur semble être la découverte du siècle, ils concluent : « Cette ville de Gergovie, on l’a longtemps cherchée et aujourd’hui on est face à un problème. On n’a pas une ville, on en a trois. »

Que des archéologues professionnels n’arrivent pas à "voir" Gergovie sur la hauteur du Crest, cela restera pour moi la plus grande énigme de l’Histoire.


E. Mourey



18 réactions


  • LE CHAT LE CHAT 21 septembre 2007 13:09

    vivement la machine à remonter le temps qu’on aie la vraie vérité ! star gate en arverne : smiley)

    bien à toi


  • Gasty Gasty 21 septembre 2007 14:09

    @ Bonjour Emile Mourey

    Tenterait-on de dissimuler les erreurs accumulées ??

    Faudra-t-il en rester à « Nos ancêtres les gaulois, habitaient des huttes en bois »

    Sacré « Salvador » ! de quoi rire avec lui.


  • Emile Mourey Emile Mourey 21 septembre 2007 14:26

    @ Le Chat et à Gasty

    Content de vous voir sur ce fil.

    Et encore, je n’ai pas exposé dans cet article tout ce que j’ai sur le coeur : les mensonges des enseignants du Café pédagogique, important site internet consacré, en particulier, aux langues anciennes, lesquels auraient mieux fait de revoir la traduction du texte de César plutôt que d’ironiser à mon sujet. La présentation tendancieuse par Wikipédia de mes arguments. Les attaques perfides ou ironiques du milieu archéologique du mont Beuvray relayées par leur revue « l’Archéologue ». Le refus de débattre et le mépris souverain des partisans des thèses officielles. La passivité des Directions des affaires culturelles. L’inertie de la Sous-direction de l’Archéologie du ministère de la Culture qui n’a eu, ni le courage de me condamner, ni le courage de se poser des questions. L’inintelligence et le manque de culture des médias... et j’en passe.

    Car l’erreur de localisation de nos deux anciennes capitales, Gergovie et Bibracte, est certainement le plus grand scandale archéologique de tous les temps. Et ce scandale se double d’un autre scandale, un scandale politique qui prouve, jusqu’à nouvel ordre, qu’un ou une ministre de la Culture, cela ne sert à rien, sauf à regarder les trains passer jusqu’à ce qu’ils déraillent.


    • Emile Mourey Emile Mourey 21 septembre 2007 16:39

      @ Le Chat et à Gasty

      Et puisque le président Sarkozy s’occupe de tout, qu’attend-il donc pour remettre de l’ordre dans ce ministère. Je n’ai rien contre le site gaulois du mont Beuvray, bien au contraire, rien contre le musée archéologique celtique européen. Je ne doute pas de la bonne foi et des louables intentions du président Mitterrand quand il a décidé de mettre en valeur ce site. Ce que je constate, c’est qu’on s’est servi de lui dans le but avoué de promouvoir la profession d’archéologue, ce qui aurait pu déboucher par l’octroi d’un statut de fonctionnaires. Ce que je condamne, c’est la Sous-direction de l’Archéologie qui a fait le choix de préserver son projet aux dépens de la recherche de la vérité. Ce que je condamne est le Collège de France, ce denier vestige du pouvoir monarchique, qui n’a de comptes à rendre à personne et qui donne à son titulaire de la chaire des Antiquités Nationales, non seulement le droit mais l’obligation et le privilège de dire et d’écrire « la recherche en train de se faire » et cela, d’une façon monarchique, sans aucun débat et sans qu’il soit possible d’apporter la contradiction.


  • Antenor Antenor 21 septembre 2007 17:56

    Si j’ai bien compris la thèse officielle, l’armée romaine a simplement fait face à une manif’ de paysans en colère. Ceci explique pourquoi la statue de José BOVE trône au sommet d’Alesia.

    http://www.memo.fr/dossier.asp?ID=261


    • Emile Mourey Emile Mourey 21 septembre 2007 19:01

      bonjour Antenor

      La thèse officielle est aberrante sur le plan du raisonnement tactique. Quand Vincent Guichard dit dans son interview que le plateau de Merdogne était imprenable, il juge d’après sa face est relativement accidentée. En fait, ce plateau était une très mauvaise position défensive car beaucoup trop facile d’accès sur ses autres faces. En revanche, contourner la position du Crest, cela consistait à l’aborder par derrière en s’engageant sur le plateau étroit de La Serre, espace étroit relativement facile à interdire. C’était d’ailleurs un souci de Vercingétorix quand il a porté des troupes « à l’autre bout de l’oppidum ».

      Enfin, autre aberration de raisonnement tactique : imaginer que les Gaulois aient occupé en force ce plateau de Merdogne et que César ait commis l’imprudence incroyable d’installer un petit camp romain à son pied, à la merci d’un assaut gaulois déboulant du sommet. Complètement absurde !


    • Emile Mourey Emile Mourey 22 septembre 2007 09:28

      @ Demian West

      Merci de votre commentaire. Je prends votre accusation d’anarchisme à mon égard comme un compliment, dans le sens originel du mot d’anti-conformisme. Je comprends parfaitement qu’en tant qu’artiste, vous vous conduisiez en chevalier servant du ministère chargé de la Culture, comme cela s’est souvent fait dans le passé, mais, en ce qui me concerne, c’est autre chose qui me motive.


    • La Taverne des Poètes 22 septembre 2007 09:51

      L’Averne des poètes, Vercingétorix, était aussi assez anarchiste...

       smiley


    • Antenor Antenor 22 septembre 2007 10:50

      Ce qui dérange le plus dans les articles d’Emile Mourey, c’est qu’il y a une vraie prise de risque intellectuelle, chose à laquelle on est pas vraiment habitué.

      @ Emile

      Vous identifiez Gergovie à la légendaire Gorgone, cependant le suffixe « via » ne laisse-t-il pas penser que l’oppidum n’est pas la Gorgone elle-même mais qu’il est sur sa route (la Via Regordane ?) ?


    • Emile Mourey Emile Mourey 22 septembre 2007 12:59

      @ Antenor

      En effet, on peut peut-être voir dans Gergovie le mot « via » mais cela ne contredit pas le fait qu’il faille identifier Le Crest à la ville de Gergovie dont parle César ni que Gergovie ait été l’image de la Gorgone (Gorgona d’où Gergovia, d’où Gorgobina = la petite Gergovie ou la petite Gorgone). La Gorgone, image du péché opposé à la vertu dans la mythologie des Arvernes (voir le vase « arverne » de Vix), mais aussi image de l’affreuse Méduse pour les Grecs d’Athènes.

      Autre exemple : la localité que César et Cicéron nomment, l’un Admagetobriga et l’autre Magetobriga. Il s’agit d’un phénomène qu’on trouve plusieurs fois dans la carte de Peutinger et que j’explique ainsi, à savoir que les habitants avaient l’habitude de dire qu’ils allaient vers (ad) le grand pont (magne + briga), ce qui a donné le nom à la localité qui s’est fixée à proximité.


    • La mouche du coche La mouche du coche 22 septembre 2007 13:45

      « on ne verra jamais dans un grand restaurant un amateur faire la cuisine du chef »

      Demian, je t’avais conseillé d’aller voir le film « ratatouille ». Tu y aurais vu que ce que tu viens de dire est faux. smiley


    • La mouche du coche La mouche du coche 22 septembre 2007 13:55

      Oui, il y a un problème, smiley mais personne ne sait comment le résoudre, alors on tâtonne. smiley


    • Gasty Gasty 23 septembre 2007 09:27

      En tout cas, ce n’est pas avec DW qu’on avancera. Dès le premier jour de sa classe préparatoire, il fut définitivement figés à la vue du premier livre de lecture et tétanisé devant celui à colorier.Depuis il est accroché à ses diplômes mondiaux, barricadé dans une bibliothèque poussiéreuse, les rideaux tirés vers son monde intérieur.

      On ne change pas un monde DW !


    • Antenor Antenor 28 septembre 2007 12:15

      @ Emile

      Dans le numéro de Septembre de la revue Archéologia Bruno Chaume, qui dirige les recherches à Vix, dit que l’architecture du « Palais » rappelle celle d’une église paléo-chrétienne et qu’ils n’ont été certains de sa date de construction qu’après datation au carbone 14.

      Ce « Palais de la Dame de Vix » étant le seul édifice vraiment important du site, il semble cumuler les fonctions de palais et de temple. Cela me fait penser aux citadelles grecques de l’âge du bronze dont le bâtiment principal cumulait également les fonctions de logement du Roi-prêtre et du Dieu. En fait ce Mont-Lassois avec sa bourgade fortifiée et ses tumulus fait penser à une petite Mycènes décalée dans l’espace et le temps. Après tout, Celtos fils de de la Néréïde Galatée est le cousin d’Achille fils de la Néréïde Thétis.


  • Droopy 24 septembre 2007 13:30

    Ca fait un bout de temps que je lis vos articles.

    Euh ... une question ....

    C’est pour nous faire rigoler que vous écrivez tout celà ?

    Du genre : Vercingetorix s’était réfugié en haut de la tour Effel, c’est pour celà que César a pu l’attraper !

    Ou encore : l’oppidum des responsables du massacre de Varus est en Alsace parce que les germains mangeaient du chou, donc aiment la choucroute et qu’il y a de la choucroute en Alsace !!!

    Pffffff


  • mirefleurs 11 janvier 2008 00:07

    Gergovie au Crest ? C’est l’idée la plus inepte et la plus absurde que, de toute ma vie, je n’ai lu au sujet des Arvernes.

    Mais n’importe quel auvergnat cultivé et suffisament intelligent pour rire de ces gentilles hypothèses vous dirait que TOUTES les hauteurs du Val d’Allier étaient occupées par les Arvernes au premier siècle av JC.

    Dommage que tous nos lecteurs ne puissent pas suivre la toponymie... Pour ceux qui ne connaissent pas le pays, laissez-moi vous renseigner. Le Crest est un village bâti sur un suc (on dit comme ça en auvernhat, ça veut dire une petite hauteur, une butte si vous voulez) à l’extrémité d’un petit plateau de basse altitude qu’entourent d’autres plateau bien plus élevé. Le point fut toutefois utile d’un point de vue militaire, dans le passé, puisque situé à cheval sur deux gorges de passage et fut un lieu de guet, vraissemblablement depuis que les hommes peuplent la région. Cependant, il n’est en rien comparable (ni d’un point de vue militaire, ni d’un point de vue social) aux grandes hauteurs de Merdogne-Gergovie, de Chanturgue, de Corent ou du Puy Saint Romain, par exemple. Qu’on se dispute au sujet du lieu de la bataille... c’est déjà assez peu intelligent. Qu’un homme cultivé qui maîtrise le patois à la perfection nous demande de considérer que Gergovie pourrait être Chanturgue en argumentant plausiblement son opinion, en s’appuyant sur des noms de lieus précis, des découvertes troublantes, on fait la moue car on pense qu’il se trompe mais on respecte. Mais quand un apprenti observateur terrassé par ses croyances irrationnelles nous balance que le Gergovia de Caesar c’est le Crest... Alors là... On tombe par terre, en se tenant le ventre, la larmichette à l’oeil.

    Gergovie au Crest ? HAHAHA ! Pourquoi pas au Puy de Crouel tant que vous êtes !

    Si tel avait été le cas, J Caesar, tout affabulateur qu’il était, n’aurait pu écrire ce qu’il a écrit sur Gergovie que sous l’emprise de l’héroïne. Voyons cher Monsieur, relisez la Guerre des Gaules. Allez, admettons que Caesar fut un énoooorme menteur. Réfléchissez bien, d’un point de vue purement militaire, même si c’est dur pour vous, essayez. Caesar aurait démonté ce misérable suc en moins d’une journée avec moins de mille fantassins ! Pensez avant d’écrire n’importe quoi... Le Crest, forteresse imprenable ???!!! Mais vous divaguez. 

    Soignez, de grâce, plus sérieux et assez sage pour arrêter d’écrire. 

    Quoique.. Vous nous faites bien rire !

    Sébastien Taranys 


    • mirefleurs 11 janvier 2008 00:14

      Mon commentaire reste malgré les apparences très "constructif" dans ce qu’il vous aidera peut-être à être épargné par la foudre de la très gentille et néanmoins dangeureuse ignorance.


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