vendredi 9 mars 2007 - par Voter à gauche

Féminisme politique, pas mort !

Féministe, Ségolène Royal ? Pas assez, ou pas exactement à leur goût, vous répondront beaucoup de militantes féministes. Plutôt que gloser sur la validité de cet épithète, demandons-nous si ses propositions en matière de droits des femmes, de prise en charge de la petite enfance, et de lutte contre la pauvreté, sont pertinentes et justifiées.

Se dire féministe laisse accroire qu’on part de pétitions de principe, raison pour laquelle l’étiquette est mal vue en politique. De ce point de vue Royal aurait plutôt un avantage, ironiquement, puisque les militantes rappellent volontiers qu’elles ne l’ont jamais vue dans leurs rangs en manifestion. Ingratitude ? Légère suspicion, plus exactement, d’un féminisme français très universaliste qui répugne traditionellement à mettre en avant la maternité. Mais Royal est aussi celle qui a créé le congé de paternité, qu’utilisent deux tiers des pères (l’égalité, c’est mutuel, pas à sens unique).

Quelle est aujourd’hui la situation économique et sociale des femmes en France ? Elle est paradoxale, puisqu’au niveau des droits légaux on compte chaque année des avancées, alors que dans les faits stagnation et régression sont la règle. Stabilité des écarts de salaire, d’un chômage des femmes plus important, stabilité encore dans le faible pourcentage d’élues au Parlement. Persistence également, des violences considérables subies par les femmes en France (50’000 femmes adultes violées chaque année, dont seulement 2% voient leur violeur condamné aux assises).

Puisque les lois n’ont pas réussi à faire reculer les inégalités et les injustices, à quoi bon en proposer de nouvelles, me direz-vous ? Malgré la force symbolique de la loi dans notre pays, il est clair que certains textes restent inefficaces car la volonté politique et les moyens accordés restent insuffisants. Les femmes elles-mêmes semblent ne pas prendre toute la mesure de ces injustices, puisque la HALDE indique que seulement 6% des personnes qui la saisissent invoquent une discrimination sexiste.

Un détour conceptuel par le racisme est nécessaire. Depuis des années des organismes comme le Geld ou le Fasild (aujourd’hui [l’Acse|http://www.lacse.fr/dispatch.do|fr]) utilisent le concept majeur de ’’discrimination systémique’’. Les actes répréhensibles existent, mais c’est plus largement le fonctionnement de la société, de tout un tas [de représentations|http://www.liberation.fr/rebonds/219492.FR.php|fr] et d’institutions, qui fait pencher la balance en défaveur des femmes (inutile de me sortir des contre-exemples, j’en connais autant que vous et la question n’est pas là). Royal est la candidate du PS, Parisot dirige le Medef, mais 2 arbres ne cachent pas une forêt. Les faits, rappelés récemment par [Dominique Méda et Hélène Périvier|http://www.repid.com/spip.php?article483|fr], sont cruellement têtus.

Pour faire reculer les inégalités, ce ne sont pas telle ou telle loi qu’il faut faire, c’est une action combinée qu’il faut avoir, et une vision transversale qu’il faut adopter. Méda et Périvier montrent que l’équivalent nordique du "service public de la petite enfance" (proposé par Royal) a été efficace pour permettre un taux d’emploi des femmes le plus élevé d’Europe. Mais elles soulignent également que les femmes scandinaves sont encore plus cantonnées dans un petit nombre de métiers spécifiques que les Françaises. La question de l’orientation est donc cruciale, question plus aigue encore pour les femmes que pour les hommes (elles sont sur-représentées dans les filières sans débouchés). Proposer un service public de l’orientation, c’est permettre à l’Etat de jouer un rôle moteur, pour l’emploi en général, mais par conséquent pour l’emploi des femmes particulièrement.
L’emploi des femmes, c’est une question de justice, tout bonnement. Et c’est une condition essentielle de l’autonomie, enjeu de gauche s’il en est.

Le bon sens nous indique également qu’on ne peut pas résoudre d’un même coup le chômage, le niveau des retraites, et leur financement. A court terme, Royal rappelle que repousser l’âge de la retraite pose problème parce qu’en France le chômage des plus de 50 ans est déjà le plus élevé d’Europe. A moyen terme, moins de chômage c’est à la fois plus de cotisations et plus de retraites à taux plein. Ca ne veut pas dire qu’il ne faut pas poser la question des régimes spéciaux, mais c’est une approche rationnelle et qui se tient. Les femmes ont des retraites plus faibles, parce qu’elles ont souvent travaillé à temps partiel, eu des périodes sans emploi donc moins cotisé. L’emploi des femmes, c’est aussi la retraite des femmes. Dans un pays où elles vivent plus longtemps que les hommes, il est pertinent de le rappeler.



9 réactions


  • Smith (---.---.67.93) 9 mars 2007 14:53

    Le site de Voter à gauche :

    http://www.voteragauche.org


  • JohnKerry 9 mars 2007 15:25

    Excellent papier - comment est ce que Bayroy & Sarkozy peuvent vraiment répondre sur ce sujet qu’ils n’abordent pas, ou alors de façon très indirecte (confondre « violence faites aux femmes » et « violences conjugales »)...


    • l_eric_pax (---.---.79.143) 9 mars 2007 20:01

      Bonjour John Kerry navré de devoir le dire ms l’extrême gauche que vous soutenez à nouveau n’est pas représentative de l’Eglise dt vous servez peu la mission ainsi ms plus de votre loge(idem pr Georges W et Tony B vos frères initiés à Princeton chez skull’nd bones n’est-ce pas ?). respectueusement votre, Eric(qui se demande où vont vos démocraties athées ici comme ailleurs : ds le mur, la gde muraille, ou celui de la rue de NYC dt Michael est le digne représentant là aussi)


  • l_eric_pax (---.---.79.143) 9 mars 2007 19:35

    Bjr pas trop intégriste votre discours à la 1ère lecture. Néanmoins fémin-isthme est un terme à dépasser, un combat erroné voire, car une journée de l’humanité serait plus indiquée(égalité, pas renforcement des différences pr ghetto vite tendancieux, je pense à ces lesbiennes issues du mlf ds les années 70 ss exhaustivité). Je ne fais là que reprendre le mot de Simone Veil(celle du siècle en cours s’entend sur les isthmes qui reste incontournable et hélas tjs actuel à ce qu’on voit ici). Qt aux faits évoqués(violences, y compris conjugales certes, inégalités de traitement notamment salariale et / aux retraites)je suis tt à fait d’accord. Reste à douter que mmle royal soit la mieux placée pr y changer qq chose(couler la famille ne procure aucune expertise qt aux femmes j’estime bon de le rappeler !). L’idéologie internationaliste(encore !)est avt tt de saper les fondements de la société et détruire pr amener le chaos(libertaire ou liberticide c’est tt un)n’ajoute rien au progrès, honni par le Parti dès l’origine. Je termine ce bilan d’un ministère autrefois usurpé pr mlle royal en notant qu’il est heureux que nos lois actuelles soient peu appliquées(homosexuelles, matriarcales, elles nous ramèneraient à la préhistoire en qq années ss cp férir). Ms que fait dc la Polis ?? respectueusement votre, Eric amoureux de la Femme de la Révélation, pas selon Hardy Léon !


  • Calmos (---.---.220.33) 10 mars 2007 01:45

    Si les mouvements féministes avaient besoin de Madame Royale pour faire avancer leurs causes ; ce serait a douter de leurs pertinences....

    Que Madame Royale s’en revendique en leurs promettant la lune ; n’est que pure statégie électoraliste.

    Pour Madame Royale il est fait : toutes les Femmes de France se doivent de la « soutenir » au seul fait qu’Elle est une Femme....

    Ne serait-ce pas un peu machiste... ???


  • levoisin (---.---.0.137) 11 mars 2007 02:09

    Personnellement, je ne crois pas en une « discrimination systémique » mais bel et bien à un « servage systémique » pour ne pas dire esclavage.

    Combattre les discriminations en oubliant qu’elles ne sont que des conséquences de l’arbitraire du système lui-même : Ni Dieu, ni maître, oui ! Mais tous esclaves. Voilà ce qu’on a fait. Et le système pervertit toute réduction des discriminations par encore plus d’esclavage.

    Par exemple, le droit du travail aux femmes n’a pas abouti à un partage des charges mais à une quasi-obligation de double salaires pour vivre décemment. Résultat, une double journée pour la plupart des couples.


    • tovara (---.---.149.182) 12 mars 2007 10:43

      CERTES, mais aucune loi n’oblige les femmes (et les hommes) à se mettre en couple / pondre une ribambelle d’enfants ; à l’heure où la Terre étouffe de la surpopulation humaine (voir articles sur Natura Vox), cet élément devrait être pris en compte dans le combat féministe (pas seulement « un enfant quand je veux », amis aussi « un enfant si je veux »), or malheureusement à l’heure actuelle cette dimension -essentielle- reste taboue.


  • Cooly (---.---.42.157) 12 mars 2007 15:40

    Pour toutes les femmes du monde qui sont opprimées, l’exemple d’une Présidente d’un pays comme la France ne pourra que leur donner plus de force et un peu d’espoir pour elles qui en ont tant besoin. Je pense que c’est plus important que les petites guerres d’idées entre personnes vivant dans un pays riche.


  • alajuela (---.---.57.125) 12 mars 2007 22:48

    Merci pour cet article, la question du « féminisme » reste tabou en France et n’est abordée trop souvent que pour s’en moquer ou dire qu’il est dépassé (« les femmes ont tous les droits maintenant, que leur faut-il de plus ? »). Les seuls moments où les français se découvrent féministes c’est lorsqu’il s’agit de critiquer les musulmans par une pirouette raciste (et je ne suis pas musulmane, personnellement je suis athée, je précise). D’ailleurs, rappelons au passage que les femmes Turques ont eu le droit de vote 10 ans avant les françaises. Il n’y a pourtant vraiment pas de quoi se gargariser dans notre pays et pas de leçons à donner ailleurs : nous sommes les avant-derniers de l’Europe en termes de représentation féminine au parlement, les femmes sont toujours sous-payées (y compris à « travail égal ») malgré des diplômes plus importants, les femmes continuent de faire en France une « double journée » (travail rémunéré + travail à la maison) bien plus importante que les hommes, les violences conjugales restent très nombreuses et peu aidées, .... la liste est longue. Il paraitrait pourtant que ce sont les hommes qui se sentent mal dans notre société ! Mais dès qu’on dit cette réalité des faits, on est vite taxé de mal b....., au mieux d’un « il ne faut pas exagérer ». Le très petit nombre de votants(27) concernant cet article parle clairement : la question n’interesse pas ou bien, on ne veut pas en entendre parler (les histoires de bonnes femmes, allez !). En tous cas, quand on voit le machisme qui s’est déferlé sur la personne de Mme Royal depuis le début de la campagne dans les médias et dans les discours de M. ou Mme Toulemonde (que ce soit les « qui va garder les gosses ? » aux « quelles compétences avez-vous pour »oser« pretendre à la fonction présidentielle ? »), on se dit que visiblement les français(es) ne sont pas encore prêts à avoir une femme présidente (mais le seront-ils un jour ?). C’était un petit billet d’humeur d’une française vivant heureuse avec mon mari aimé et mes deux enfants...


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