lundi 27 mai 2019 - par Serge ULESKI

George Orwell : Keep the aspidistra flying


« Et vive l’aspidistra ! »

 

      Gordon Comstock, instruit et lettré, est un poète aux poèmes niais, puérils et creux. Quant à ses projets littéraires, ils n’avancent qu’à reculons : plus il écrit, plus il biffe, plus il jette.

La poésie est ce à quoi Gordon avait déjà commencé de gâcher sa vie à l’âge de trente ans ; très tôt, il n’aura qu’un seul ennemi : l’argent ainsi que la conscience que l’on perd sa vie à la gagner car, lucide, Gordon avait réalisé que tout est argent.

Même si "Pas d’argent pas de considération", pour autant, cela n'empêchera pas Gordon Comstock de poursuivre sa guerre : éviter l’argent à tout prix et le confort de vie qu’il apporte :

 « Déclarer la guerre à l’argent ; le rejeter puis sombrer… ou bien plutôt : couler. De plus en plus bas, dans un monde souterrain qu’il ne pouvait encore que vaguement imaginer. »

Et puis aussi : « « Le salaire de Gordon fut augmenté de dix shillings par semaine. C’est alors que Gordon prit peur. L’argent était en train de l’avoir. Il était en train de glisser de plus en plus bas dans la porcherie de l’argent. »

Ni une ni deux, Gordon quittera sans état d’âme un « bon emploi » ; un emploi convenablement rémunéré : « C’avait été le seul acte significatif de sa vie que d’avoir quitté cet emploi. C’était sa religion, pour ainsi dire, de rester en dehors de ce sale monde de l’argent. Pourtant à cet instant, il n’arrivait pas à se rappeler, même vaguement, pour quels motifs il avait quitté cet emploi. »

        "Perdre sa vie à la gagner" ? Comment un fait exprès, Gordon prendra délibérément le risque de perdre la sienne à ne pas la gagner : « Sous terre, sous terre ! Toujours plus bas dans le doux sein protecteur de la terre, où il n’y a pas d’emplois à obtenir, à perdre, pas de parents ou d’amis pour vous harceler, pas d’espoir, pas de peur, d’ambition, d’honneur, de devoir. C’était là qu’il souhaitait être. »

        Notons au passage que le personnage d'Orwell demeurera néanmoins incapable d’assumer les conséquences de ses choix de non-vie, de non-carrière puisqu’il n’aura de cesse de dénoncer les affres de la pauvreté. Sans argent, sans ami sinon un seul, Ravelston, riche socialiste à la tête d’une revue de poésie Antichrist, pour rien au monde Gordon Comstock acceptera de cet ami qu’il lui paie un repas ou bien qu’il lui prête de l’argent qu’il ne pourra pas rembourser.

        Anesthésié émotionnellement  « … cependant, au plus profond et au plus secret de lui-même, Gordon s’affectait de ne pas pouvoir s’affecter. Libéré de la conscience harcelante d’être un raté ; libre de se laisser couler, selon son expression, de plus en plus bas, dans des mondes calmes où n’existent ni argent, ni effort, ni obligation morale. » 

        C'est une femme, Rosemary Waterlow, la trentaine elle aussi et sans le sou, tout comme Gordon -, proche de lui mais de loin, par intermittence et par courrier, bien qu’habitant dans la même mégapole londonienne, qui sauvera notre poète d’un naufrage irrémissible : celui de la pauvreté puis de la misère.

        Tout est bien qui finit bien donc… puisque Gordon renoncera au renoncement, il mariera Rosemary qui porte son enfant et prendra un « bon emploi », celui qu’il occupait avant de tout quitter : "Il fit un retour sur ces abominables deux dernières années. Il s'était révolté contre l'argent et cela lui a ait apporté non seulement la misère mais aussi un effroyable néant, le sentiment inéluctable de l'inutilité. Adjurer l'argent, c'est adjurer la vie."

       Et l'auteur de faire le commentaire suivant à propos de son personnage : "Il avait trente ans et les cheveux grisonnants et pourtant , il avait la bizarre impression qu'il commençait seulement à être adulte."

Le croirez-vous : Gordon Comstock mettra un point d’honneur à faire l’acquisition d’un aspidistra destiné à trôner sur le rebord de la fenêtre de leur nouveau logement pour qu'il soit vu de tous.

 

***

 

        Nous sommes en 1936 lorsque l’ouvrage écrit entre 1934 et 1935 est publié…

Inspiré par les années « galères » de l’auteur, qui, à cette époque, vivait dans la précarité avec pour seul domicile les pensions des quartiers les plus déshérités de Londres (tout comme son personnage Gordon Comstock, Orwell sera un temps employé à mi-temps dans une librairie miteuse de livres d’occasion - 1934)…

Quand « Keep the aspidistra flying » est publié, Orwell a l’âge de son personnage : la trentaine. Il n’a pas encore écrit « Homage to Catalonia » - 1938 - ni « Animal farm » -1945 - ni « 1984* ». En revanche, l’ouvrage Down and Out in London and Paris (La vache enragée), récit parisien d'une mise en abîme, était disponible depuis 1933 ; à cette occasion que Orwell fera l’expérience de la pauvreté aux côtés des SDF de Paris.

         Dans Keep the aspidistra flying, Orwell a la dent dure ; mordant, caustique, méprisant, sans concession, grande est la tentation de se dire « Mais quelle mouche l’a piqué ! » ; l'auteur et le personnage de Gordon, confondus, seront sans nuance ; c'est au procès de toute la société auquel les lecteurs assistent. Personne ne trouvera grâce aux yeux d'Orwell.

En guerre contre la bêtise et la médiocrité d’une société qui s’annonce déjà moralement à genoux devant la publicité et la marchandise (même si les besoins primaires des classes populaires des années 30, à Londres comme en Europe, sont loin d’être satisfaits) Cyril Connolly, critique au Daily Telegraph, au moment de la sortir du roman, écrira : « Livre sauvage et amer, les vérités que l’auteur propose sont tellement déplaisantes qu’on finit par craindre leur mention ».

Faut bien dire que…. déjà en 1935, Orwell n’ignore rien de « …. la froideur, l’anonymie de ces sept millions de londoniens glissant esquivant le contact, n’ayant guère conscience de l’existence les uns des autres comme des poissons dans un aquarium. Les rues fourmillaient de jolies filles, froides. C’était étrange comme il y en avait beaucoup qui semblaient être seules. »

Et puis aussi, cette réflexion de l’auteur à propos de son personnage :

« Gordon songea au métro le matin ; les hordes noires d’employés de bureau s’engouffrant sous terre comme des fourmis dans un trou ; la peur d’être saqué comme un ver dans le cœur. Mieux vaut le loup solitaire que le chien servile ». 

On pensera bien évidemment à la fable Le loup et le chien de La Fontaine :

« Qu'est-ce là ? lui dit-il. - Rien. - Quoi ? rien ? - Peu de chose.

- Mais encor ? - Le collier dont je suis attaché
De ce que vous voyez est peut-être la cause.

- Attaché ? dit le Loup : vous ne courez donc pas
Où vous voulez ? - Pas toujours ; mais qu'importe ?

- Il importe si bien, que de tous vos repas
Je ne veux en aucune sorte,
Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor.
Cela dit, maître Loup s'enfuit, et court encor. »

 

Animals farm (1945 - fable animalière par excellence) aurait-il été influencé par l'oeuvre de notre fabuliste national ? 

 

        Keep the aspidistra flying, met en scène un personnage « piqué des vers » à trente ans : « Gordon avait lâché et renoncé aux « bons » emplois pour toujours. Il ne voulait pas revenir là-dessus. Mais à quoi bon prétendre que parce qu’il se l’était imposée à lui-même, sa pauvreté, il avait échappé aux maux qu’elle traîne à sa suite. C’est à l’esprit et à l’âme même que le manque d’argent porte atteinte. La torpeur mentale, la crasse spirituelle… »

L’argent est au centre du roman ; pas une seule page qui ne mentionne « shilling » ou « pence », le manque d’argent et cette plante verte, l’aspidistra (1), qui trône, pathétique, sur les rebords des fenêtres des pavillons de banlieue de la petite classe moyenne d'avant la Seconde guerre mondiale.

Keep the aspidistra flying est aussi une étude de la pauvreté… solitude, misère sexuelle ; même si, en ce qui concerne Gordon Comstock, cette pauvreté est consentie ; comme expliqué précédemment, Gordon refusera de se donner les moyens de gagner convenablement sa vie ; il s’agit donc là d’une pauvreté d’une nature particulière : une pauvreté recherchée, entretenue, chérie et choyée même si l’on peut questionner un instant les réelles motivations qui se cachent derrière ce vœu : manque de courage et d’ambition, lâcheté existentielle ?

Orwell a aucun moment ne laissera entendre que ce questionnement puisse être le sien en ce qui concerne son personnage. Et c'est peut-être là la faiblesse de l'oeuvre de l'auteur dans la construction de son personnage, son élaboration, son développement jusqu'au dénouement. 

 

***

 

       Down and out in Paris, Keep the aspidistra flying, Homage to Catalonia (3 oeuvres publiées de 1934 à 1938)… précarité, débine, la rue, le danger de la guerre civile, les armes, la mort, d’une santé pourtant très fragile (Orwell décédera en 1950 à l’âge de 47 ans de la tuberculose)...

Né le 25 juin 1903 à Motihari (Inde), un père fonctionnaire de l'administration des Indes, lui-même représentant des forces de l'ordre colonial en Birmanie (de 1922 à 1927), éduqué à Eton – une école privée -, avec cette attraction de l'auteur pour la précarité, voire la pauvreté, dans le contexte de cette oeuvre ténébreuse qu'est Keep the aspidistra flying, puis cette prise de risque physique maximale avec la guerre civile espagnole, Orwell a-t-il était tenté dans un premier temps par la non-existence, par le refus de « faire quelque chose de sa vie », et dans un second temps, par le désir de mettre sa vie en danger, avant un dernier engagement, littéraire celui-là, qui nous vaudra la publication de Animals farm et de 1984 ?

Une culpabilité de classe (la prospérité de la famille de l'auteur est étroitement liée à l'impérialisme britannique), le passé coloniale de ses ascendants, ont-ils été à l’origine de son engagement d'une grande constance et d'une infaillible rigueur ? 

 

              Keep the aspidistra flying aura pour conclusion plus qu'une confession, une véritable affirmation : "Notre civilisation est fondée sur la cupidité et sur la peur. Ces gens avec leur mobilier, leurs enfants, leurs aspidistra vivaient d'après le code de l'argent, bien sûr, et pourtant ils trouvaient moyen de maintenant en eux de la bienséance. Ils faisaient des enfants. Ils demeuraient des gens comme il faut battant pavillon aspidistral. Ils étaient vivants."

 

        Cette conclusion qui annonce Animals farm et 1984 - en d'autres termes.. ; le refus de faire le "bonheur" de l'humanité malgré elle - est autant celle de George Orwell que celle de son personnage : Gordon Comstock, sauvé des eaux d'une obstination qui se paie au prix fort, sans rémission.

Certes ! N'est pas Bartleby qui veut ! Ce personnage créé par Herman Melville en 1853 qui nous rappelle que l'on ne peut refuser d'habiter le monde volontairement ou bien comme contraint par un envoûtement aujourd'hui encore mystérieux, qu'au prix d'un énorme préjudice à soi-même.

 

 

1 - « L’aspidistra est une « plante verte » robuste particulièrement populaire durant l’ère victorienne parce qu’elle pouvait tolérer le manque de lumière et la pauvre qualité de l’air intérieur. Leur utilisation a été très répandue au sein de la classe moyenne. Dans le titre original en anglais (Keep the Aspidistra Flying), Orwell utilise l’aspidistra, symbole de l’esprit étroit de la société de la classe moyenne, en conjonction avec la locution “to keep the flag / colours flying” (“lever haut son drapeau”). Le titre peut ainsi être interprété comme une exhortation sarcastique dans le sens “Et vive la classe moyenne !” (d’où le titre en français). »Les archives de la douleur (Source : Wikipédia en langue anglaise)

 

2 - Si le roman à thèse « 1984 » a été amplement assimilé - Novlangue et Big Brother -, on oublie que ce roman est aussi l’exposition d’une autre thèse : l’amour, le véritable amour est impossible sous un régime totalitaire car, tôt ou tard, il faudra trahir l’autre, mentir à son sujet aussi, pour éviter la prison, la torture et la mort.

Avec Keep the aspidistra flying, Orwell présente cette thèse 15 ans plus, mais dans un tout autre contexte : celui de la pauvreté. 

 

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Pour prolonger, cliquez : Penser la dissidence aujourd'hui avec Bartleby



16 réactions


  • Taverne Taverne 27 mai 2019 17:11

    Merci d’avoir lu ce livre à notre place et d’en avoir tiré ce bon article et merci pour les citations.

    Il semble que George Orwell culpabilisait d’avoir « été l’exécutant d’un système d’exploitation et d’oppression » en Birmanie entre 1922 et 1927. Peut-être aussi de l’argent gagné par son père en Inde comme administrateur colonial du commerce d’opium. Si l’on remonte encore, on trouve un arrière-grand-père possesseur d’esclaves...

    Est-ce la culpabilité qui l’a conduit à changer son nom ? (qui était Eric Blair)


  • Taverne Taverne 27 mai 2019 17:51

    Je vais citer un contre-exemple de « cet argent qui pourrit tout » de ce livre avec le film "The Meyerowitz Stories, film dont Netflix a acheté les droits, et que j’ai regardé hier. Dans cette histoire, un sculpteur (incarné par Dustin Hoffman) s’en est toujours fichu de l’argent et il est resté dans l’ombre contrairement à son ami qui a fait de sa sculpture un objet de consommation de masse. Son fils a abandonné ses récitals de piano et la musique et vit de l’air du temps. Si le film est drôle en dénonçant l’argent, il montre toutefois aussi le ridicule de ces rebelles au système épris de l’art pour l’art. Mais je n’en dirai pas plus : à découvrir.

    Comme contre-exemple absolu et magnifié à l’univers décrit par Orwell dans ce livre, il y a évidemment les films de Capra : La vie est belle (It’s a Wonderful Life) et Vous ne l’emporterez pas avec vous (You Can’t Take It With You).


    • Serge ULESKI Serge ULESKI 28 mai 2019 10:55

      @Taverne

      Dans cet ouvrage tellement atypique d’Orwell sur le fond (fond misanthrope ; misogyne en particulier), on pourra se demander, si Orwell n’a pas craint de« rater sa vie »... et d’être condamné à une existence terne, privée de moyens, en faisant le choix de l’écriture ? A-t-il cherché à conjurer le pire en écrivant ce brûlot anti-social ? S’est-il très tôt mis en danger, côtoyant la pauvreté comme pour mieux en réchapper ?


  • velosolex velosolex 27 mai 2019 22:22

    Orwell est toutefois d’une origine bourgeoise très relative. S’il fait ses études à Eton, c’est en temps que boursier, avec le mépris que cela suppose chez les autres élèves. Ses articles et écrits édités chez Arvea en 3 tomes sont précieuse à lire, pour le comprendre... Il évoque d’ailleurs malicieusement ses fils de princes russe, qui dans les années 10 lui demandaient avec morgue combien de voitures son père avait ( Peut être sont ils devenus chauffeurs de taxi à Paris ?). C’est de ces expériences qui sont venus son indignation sociale, qui reste constante d’un livre à l’autre, le fil rouge de toute son œuvre. Orwell trimera toute sa vie, ne verra que la fortune et la célébrité lui arriver sur son lit de mort..C’est pas vraiment elle qu’il cherchait, mais quelque chose d’autre, mettant plusieurs fois sa vie en jeu( le trimard, la catalogne où il reçu une balle dans la gorge)...Il choppera la tuberculose dans les abris pour nécessiteux. Malade il vit seul dans une maison perdue sur une lle d’écosse, où il écrit 1984... Quand il meurt il laisse tout de même une belle lumière derrière lui. J’ai tout lu de lui...En dehors de ses classiques, j’aime particulièrement « un peu d’air frais », qui est une sorte de fable écologique désenchantée, quand un quadragénaire revient sur les lieux de son enfance, pour pêcher à la ligne dans un lac qui a disparu sous les immondices. 


    • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 27 mai 2019 22:54

      @velosolex

      Difficile de trouver une compilation de ses écrits journalistiques en français. Toujours pas trouvé.


    • velosolex velosolex 28 mai 2019 09:12

      @Aita Pea Pea, salut
      J’ai vérifié mon édition en trois tomes : c’est pas alrea, mais les éditions IVREA : Essais, articles, lettres, et en fait il y a quatre tomes, le dernier couvrant, l’époque 45-50. Beaucoup de choses intéressantes, son expérience au collège saint cyprien, ses souvenirs de Birmanie, quand il est amené en temps que policier à tuer un éléphant fou, ses souvenirs douloureux dce la guerre d’espagne, avec Le poum qui a été liquidé par les soviétiques, son expérience d’épicier,vendant du jambon, dans un petit village au sud de Londres, son isolement sur une ile d’Ecosse, avec une moto pour se déplacer,alors qu’il est bien malade, ses interventions lors des discours de Mosley, qui le font jeter dehors par les vigiles, la mort tragique de sa femme, l’adoption de son petit garçon, son expérience journalistique à Wigam, dans une pension de famille qui rappelle Dickens, c’est toute une traversée d’une vie atypique, d’un type inclassable, rouge pour les impérialistes, bourgeois pour les communistes


    • Serge ULESKI Serge ULESKI 28 mai 2019 10:45

      @velosolex

      Bien des années plus tard, embarrassé, Orwell portera un jugement sévère sur Keep the aspidistra flying, en particulier au sujet des passages en forme de réquisitoire anti-social et misanthrope en général, misogyne en particulier : on pensera à ses propos à l’emporte-pièce sur les femmes et l’argent ainsi qu’à l’emploi récurrent du mot « pédé ».

      Au sujet de l’écriture d’Orwell, on pourra se reporter à la thèse de doctorat de Bernard GENSANE : http://berlemon.net/ressources_gb/orwell1.htm


    • Serge ULESKI Serge ULESKI 28 mai 2019 11:06

      @velosolex

      J’ai lu tout Orwell il y a trente ans. Je compte revisiter « coming up for air » prochainement. Je verrai si je trouve quelque chose à dire à son sujet. J’en garde un souvenir très personnel. La majorité des lecteurs d’Orwell le découvre avec 1984 son dernier ouvrage : 1949. Aussi, quand on tombe sur l’aspidistra écrit en 1934, publié en 36, on est surpris par le jugement d’Orwell à propos de ses compatriotes ; jugement que l’on ne retrouvera pas dans ses écrits des années 40.


    • velosolex velosolex 28 mai 2019 12:50

      @Serge ULESKI
      Les articles d’Orwell sont intéressants, car ils permettent de voir son évolution, ses changements d’avis sur des auteurs entre autres, car il fit aussi chroniqueur littéraire. Je me souviens ainsi de son évolution sur Henry Miller, qu’il descend dans un premier temps. Swift, et son Gulliver, sa critique sociale et le relativisme de la supériorité d’une race sur l’autre, à travers par exemple les chevaux, qui dominent les hommes, sur une île où arrive Gulliver, l’influenceront beaucoup dans la genèse de 1984. 


    • velosolex velosolex 28 mai 2019 13:43

      @Serge ULESKI
      « Coming up for air » ou un peu d’air frais, est étonnamment moderne. L’action se passe dans les années 30, mais déjà tous les ingrédients de la critique de l’expansion pavillonnaire, et de bétonisation des paysages sont présents, dans ce petit retour en arrière ironique, d’un représentant de commerce s’offrant une journée de congé, loin de sa famille. Sans doute que l’industrialisation et la démographie dans une Angleterre bien plus petite que la France, ont amené les anglais plus rapidement que nous à dénoncer les méfaits de l’urbanisation. Déjà Thomas Hardy, au 19 ième, se faisait critique des excès, et de la perte d’une culture rurale, que beaucoup d’anglais vinrent retrouver en France. Je me souviens combien Huxley que j’ai lu il y a bien longtemps, m’avait impressionné, dans un roman comme « contrepoint », sur son avant gardisme sur les problèmes écologiques, qu’il présentait majeurs, dés les années 20. Les lecteurs sont souvent arrêtés aux œuvres essentielles de ces auteurs, et on oublie comment leurs vues sur le progrès, et les échanges étaient convergentes. 


  • njama njama 28 mai 2019 09:07

     Down and out in Paris, le titre français est Dans la dèche à Paris et à Londres

    Livre autobiographique. Orwell tombe dans la pauvreté en France, gage les quelques objets qui lui restent, se retrouve sans le sou, à la rue...

    Après quelques temps il arrive à rejoindre Londres où par déveine, le cauchemar se poursuit car l’ami anglais qui s’était engagé à le dépanner d’un peu d’argent ne peut plus le faire. Dès lors il se voit contraint de fréquenter les asiles de nuit où il n’est possible que d’y séjourner une seule nuit, et tous ces sdf londoniens compagnons d’infortune circulent d’une nuit à l’autre d’un asile à l’autre sans pouvoir sortir de cette noria infernale pour la plupart. A croire que tout était fait pour que les pauvres restent pauvres. Récit poignant, d’une grande actualité.


    • velosolex velosolex 28 mai 2019 09:21

      @njama
      Il fera mention des expériences de pauvreté, et de journalier, ramassant le houblon, par exemple, et cachant son accent trop marqué bourgeois. Ce qui devait ne pas être très convaincant. Mais enfin grâce à lui, parfois il suscitera de l’aide de voir un type venant de la bonne société tombé dans une déchéance supposée. Il y a chez Orwell toute sa vie, cette tentation de se mettre en danger, de s’exposer. Lors de la guerre d’Espagne, pour faire libérer des camarades du POUM embastillés par d’autres communistes, et voués au peloton, les témoins raconteront comment il s’est mis lui même en danger dans ses colères et ses interventions, frôlant l’arrestation. Autre facette moins connu d’Orwell, il fut speaker à la BBC, et aussi maitre d’école. 


    • Serge ULESKI Serge ULESKI 28 mai 2019 09:44

      @velosolex

      Sa démarche est très proche de cette autre « sainte » de l’engagement : Simone Weil, la philosophe, décédée à Londres de la tuberculose en 1943.


    • Serge ULESKI Serge ULESKI 28 mai 2019 11:08

      @njama

      Il est clair que Comstock est l’alter-ego de l’auteur. Auteur qui a du mal à ne taire sa propre voix chez son personnage.


    • njama njama 28 mai 2019 11:27

      @Serge ULESKI

      et l’âne Benjamin dans La Ferme des Animaux ?


    • velosolex velosolex 28 mai 2019 12:44

      @Serge ULESKI
      C’est vrai. Mais sans doute qu’Orwell a sans doute tout de même plus de rationalité en lui, et moins la vocation de devenir saint et martyr. Ceci dit en respectant énormément cette Simone, qui nous fait honte de nos pauvres engagements. En lisant la biographie de ces deux personnalités, on est saisit par cette urgence d’être sur la ligne de front, de ne faire aucune concession. 


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