jeudi 17 janvier 2019 - par Jean Beaumont

Gilets Jaunes contre capitalisme financier et fiscalisme

Il a existé dans le passé de nombreuses révoltes contre l’impôt : la dîme, la Gabelle, la révolte des Karls en Flandres… L’analyse a posteriori du surprenant mouvement né sur Facebook, dont on n’a pas fini de parler, requiert tout à la fois de faire de l’Economie et un peu d’Histoire. 

On remarque en préambule que nous avons affaire, avec les Gilets Jaunes, à des français de base, des quidams d'origine modeste. 

La France est le premier pays au monde en termes de prélèvements obligatoires. La pression fiscale au pays de Molière a bien entendu constitué le premier détonateur de l’explosion de Décembre dernier, via la nouvelle taxe sur les énergies fossiles. Un seul exemple de démence fiscale : le total des charges sociales salariales et patronales est égal à 62 % du salaire brut (ou 82 % du salaire net). Les charges sociales cumulées, pour un salaire net de 1000 euros, s'élèvent à 818 euros (772 euros depuis le CICE). Si nous prenons un salarié gagnant deux mille euros nets en 2019, il faut réaliser que, en sus de ses deux mille euros, son entreprise verse la somme incroyable de 1444 euros à l’Etat ! Ensuite, le salarié paiera environ 15 % d’impôts sur le revenu, puis 15 % à nouveau, via la TVA sur sa consommation. Si l’on additionne le pilonnage des taxes, on est pris de vertige : pour un versement de 3444 euros (ce que l’employeur paie au total), le salarié aura in finedans son escarcelle, après filtrage étatique, la somme réelle de 1400 euros, soit moins de 40 % de la somme initiale ! C’est la raison pour laquelle l’industrie Française a été totalement dévastée par la mondialisation, puisque sa compétitivité par rapport à des salaires de 300 euros est intenable. Il faut noter qu’aussitôt que l’on produit ces chiffres, les bénéficiaires stipendiés du système brandissent le fameux Service Public, déité qui autoriserait en soi toutes les folies. Cet argument ne résiste pas à l’examen : l’hôpital est devenu une pétaudière, le service des urgences est le plus souvent débordé, les médicaments sont de moins en moins remboursés, et sans mutuelles coûteuses, le malade français doit acquitter des compléments sur ses dépenses de santé. Quant à l’école gratuite, c’est un échec cuisant : premier poste de dépense publique par élève au monde, la France est classée 31ème en termes de résultats dans l’ensemble des matières enseignées. Du fait d’une bureaucratie lourde (la moitié du personnel de l’Education Nationale n’enseigne pas), d’un absentéisme sans équivalent – trois fois les normes du privé - et de la proportion non négligeable, dans certaines zones, d’élèves ne parlant pas français - ce qui n'est pas leur faute, bien entendu - les dépenses liées à ce mammouth relèvent du tonneau des Danaïdes. 

En réalité, les impôts et taxes constituent pour chaque français, classe moyenne supérieure ou pauvre, indépendant ou salarié, un fardeau qui ravage le budget des ménages.

La France laborieuse des Gilets Jaunes, groggy devant l’impôt comme une majorité des Gaulois, n’a pas supporté une nouvelle augmentation, fût-ce au nom d’un hypothétique réchauffement.

Le Déficit démocratique

Si la Jacquerie fiscale a été un des premiers motifs des mutins pacifiques, le bâillonage du peuple par les élites est le deuxième motif de ce mouvement, d’où sa revendication expresse de l’élargissement d’une pratique référendaire régulière, via le RIC. De quoi s’agit-il ? Du fait du vote majoritaire à deux tours, qui donne des majorités écrasantes au pouvoir en place, favorise les magouilles entre pantouflards, et minimise les scores des partis d’opposition, le Parlement croupion est techniquement aux ordres du Président. 

Toutes les évolutions sociétales de la Vème l’ont été dans le dos de l’opinion, avec l’apparence virginale de la démocratie. L’abolition de la peine de mort ( peu importe ici qu'on soit pour ou contre) fut votée quand les sondages d’opinion y était largement opposé. Imaginons un RIC sur le sujet…

Et le référendum de 2005 perdu par les européistes, contourné ensuite par Sarkozy le roué, ne serait-il pas temps de le rediscuter ? Voilà une autre cible possible du RIC.

Mais il faut prendre de la hauteur : le talon d'Achille du suffrage universel, c'est que son élection reine, la Présidentielle, est devenue à l’usage un carrousel aux promesses. Une fois aux affaires, et devant l’impossibilité évidente de financer son baratin, le gagnant de la course a recours à une seule solution : la course à l’échalote, soit l’emprunt et la dette. Macron, pour n'avoir entrepris aucune économie sur le train de vie de l'Etat, est fautif.

Et ici, on doit revenir en arrière, car la situation contemporaine a des racines très profondes. Les sociétés modernes sont fondées sur la dette et la financiarisation des activités. Il y eut pour ce faire l’abandon en 1973 de toute équivalence à la création de monnaies (congrès de la Jamaïque), ceci permettant d’imprimer des billets de banque en échange d’hypothétiques lettres de créance, puis le désengagement progressif des Etats comme créantiers de leur propres intérêts (les états empruntent désormais sur les marchés, c’est à dire à des entités privées). 

Les banquiers et financiers ont ensuite imposé au monde, dans les années 80, la financiarisation des activités humaines. Désormais toute labeur industriel ou même agricole est objet de spéculation. Les tarifs du pétrole, de l’aspirine, des véhicules, du lait, du riz, de l’orge et même de l’air (via la taxe carbone) sont décidés par des cours spéculatifs. 

Les Gilets Jaunes ont posé la question de la dette, maladroitement certes, mais avec raison. Le monde est fou, et court à sa propre perte.

Et ce rapide tour d’horizon serait incomplet si l’on évitait le tabou de l’immigration. 

Dès les années 70, la France importe par brassées des populations maghrébines et africaines, ceci sans que jamais une seule fois cette politique soit débattue au Parlement, ou approuvée par référendum. Comment blâmer les voyageurs au long cours ? Voilà que sans la moindre compensation un pays riche leur offrait soins gratuits, retraites, écoles, autoroutes, infrastructures de tous ordres…

L’immigration devint peu à peu forte, et ce changement de flux n’a jamais fait l’objet d’aucun vote ou de discussion publique. 

Imaginons à présent un référendum sur l’immigration, organisé bientôt, grâce aux Gilets Jaunes. Le résultat serait un probable tsunami, considérant les mouvements actuels de migrants dans toute l'Europe.

Concluons. Qui va tirer profit de ce mouvement spontané, unique dans notre Histoire récente ?

Ca se bouscule au portillon : la France Insoumise, le RN, le chanteur bêlant Lalanne, Dupont-Gnangnan, jusqu’aux improbables Patriotes, dont l’opportunistes Philippot a déposé la marque « Gilet Jaune » à l’INPI !

Demain est un autre jour....



4 réactions


  • zygzornifle zygzornifle 18 janvier 2019 14:08

    La France est le premier pays au monde en termes de prélèvements obligatoires

    On est bien aussi placé aussi pour le nombre de ministres, députés, sénateurs, élus de la république,fonctionnaires , voila ou passe une grande partie du pognon ....


    • Francis, agnotologue JL 18 janvier 2019 14:17

      @Jeans Beaumont, zygzornifle
       
       ’’La France est le premier pays au monde en termes de prélèvements obligatoires ’’
       
       Mensonge coupable.
       
      Les autres pays ne comptent ni la Sécu ni les retraites. Et de surcroit, dans l’UE, nous sommes seuls à avoir un si gros budget militaire.
       
      En retirant ces trois postes de ce qui est PO, et surtout, en mettant un bémol à cette vaine politique de soutien aux entreprises, nous serions largement parmi les pays les plus vertueux.


    • Trelawney 18 janvier 2019 15:47

      @JL
      Ce n’est malheureusement pas un mensonge.
      La France fait parti des pays ayant le plus faible impôt sur le revenu (17% des recettes fiscales). A titre d’exemple, les USA l’impôt sur le revenu représente 50% des recettes fiscales et n’essayez pas de vous y soustraire (même si vous habitez l’étranger) car c’est la taule direct
      La France est le premiers pays au monde pour son taux d’imposition. (63% des revenus)
      La France est le premiers pays au monde pour son niveau de taxations et prélèvements obligatoires (TVA, TIPP, CSG etc)
      La est le premier pays au monde pour son taux de cotisations sociales.

      En France 78% de l’impôt est payé sous forme de taxe, cotisations et prélèvements obligatoires, 17% sous forme d’impôt sur le revenu et 5% sous forme de taxe foncière (qui est un ISF déguisé et plus injuste)


    • Francis, agnotologue JL 19 janvier 2019 08:40

      @Trelawney
       
       le niveau des PO est une chose ; les statistiques en sont une autre : vous n’avez rien démontré.


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