vendredi 5 avril 2013 - par tiptop

Indignons-nous ? Oui mais passons à l’action !

Ne nous laissons pas enfumer par ces journaleux qui déplacent le débat sur le « mensonge de Cahuzac ». Comme si c’était cela l’enjeu. Un homme politique qui ment ? La belle affaire ! L’étonnant en France, ce sont des aveux aussi rapides et l’acte de contrition qui, pour le coup, nous rendrait presque sympathique le fumeux personnage. Mais comme souvent, c’est l’arbre qui cache la forêt.

Je prône une triple révolution : constitutionnelle, fiscale et écologique. Utopie ? Oui, si on examine le rapport de force. Non, si on prend en compte la nécessité du changement et surtout la crédibilité des alternatives.

Cahuzac nous rappelle que la 5ème république a instauré la tradition de ne jamais rien lâcher de ses turpitudes devant les coups de butoir de la justice. Elle, qui malgré des moyens dérisoires n’en finit plus de gagner son indépendance et donc ses lettres de noblesse. De Pasqua à Sarkozy en passant par Woerth et DSK, il s’agit toujours pour les puissants de dresser un mur entre eux et la justice à coups de procédures savantes et de protestations médiatisés. C’est leur privilège. A t-on jamais vu un petit délinquant envoyer un avocat plaider sa cause au JT de Pujadas ? Regardez des gens comme Henri Guaino et d’autres qui tirent à boulets rouges sur la (vrai) presse d’investigation et les juges ! Rendez-vous compte : un ancien président s’aperçoit qu’il n’est pas au-dessus des lois ! Une vraie révolution dans un pays où l’impunité des puissants relève d’une tradition séculaire. Aussi je pose la question : à quand la VIème république ? Un faux débat ? Dois-je rappeler que le quasi coup d’état du général de Gaulle en 1958 est né des guerres de décolonisation ? La contractualisation des relations coloniales à travers les accords de coopération et les officines secrètes ont permis le financement de la vie politique française et ont alimenté une grande partie des scandales de la Vème république . Hier la république des malettes, aujourd’hui celle de l’évasion fiscale. Il faut repenser les contre-pouvoirs donc changer de constitution. La corruption des élites ne doit pas être vu comme une fatalité.

L’affaire Cahuzac ne doit pas nous détourner de l’essentiel. La libéralisation des flux financiers à l’échelle de la planète depuis une trentaine d’année a fait que la moitié du PIB Mondial se trouvent dans les paradis fiscaux. Des trillions de dollars. De quoi largement éponger toutes les dettes et entreprendre la révolution écologique que beaucoup appelle maintenant de leur vœux. Pour les gouvernements européens, ce n’est évidemment pas à l’ordre du jour, du moins tant que les populations de l’Europe du Sud plieront l’échine devant la violence des politiques d’austérité. Et tant que chez nous, les masses populaires penseront qu’il suffit de fermer les frontières, de désigner les plus faibles comme boucs-émissaires et croire que le retour à l’état nation nous mettra à l’abri des turbulences mondialisées.

Je prône la stratégie du judoka. Hier, les peuples colonisés ont fait plier les colonisateurs en retournant contre eux leurs propres armes : le droit et l’idéologie humaniste. Aujourd’hui, comme pour les printemps arabes, il nous faut utiliser les réseaux sociaux que les puissances de l’argent nous ont mis dans les mains pour faire de nous des consommateurs dociles. Il faut s’en servir au niveau européen pour faire levier et fédérer une vaste insurrection populaire qui n’aurait qu’un seul but : la révolution fiscale. Certes, ce n’est pas très sexi mais ça a le mérite de la clarté. Ce faisant, nous nous donnons les moyens de faire plus par la suite. La grosse faiblesse de l’alter-mondialisme, c’est son côté auberge espagnole ! Comment fédérer dans une telle cacophonie alors que quasiment tout le monde est d’accord pour dire que les puissances financières nous tuent !

Par révolution fiscale, j’entends par là taxer les capitaux et non plus le travail, comme le préconise de nombreux économistes. Donc fini les impôts directs sauf pour les boursicoteurs. L’idée intéressante est qu’on n’interdit pas la spéculation. On la régule et on la taxe. Abattre le capitalisme est hors de portée et surtout les alternatives se sont autodétruites. Puisqu’on ne mettra pas fin à la cupidité de l’homme, il faut dompter les forces de l’argent. Par la fiscalité, on les met au service du bien commun, de gré ou de force. Et on libère les forces du travail ! Amis chefs d’entreprise et entrepreneurs, les « vrais » , ceux qui emploient et participent à la production de vrais richesses, entendez ce message. Au lieu de geindre, de vous plaindre à tout va, de penser à tort que tout le monde vous déteste, prenez le flambeau de la révolution fiscale ! Portez le haut ! Vous aurez plus de poids pour vous faire entendre que les travailleurs, les petits ou même les intellectuels que le pouvoir méprise. Vous gagnerez respect et liquidités ! Ainsi que vos salariés. Un état fort, légitime et assaini, fut-il inséré dans une fédération européenne, est seul capable de soutenir l’activité économique. Il n’y a que les prévaricateurs de la haute finance qui devront sacrifier quelques pourcentages de leur énorme pactole. Et savez-vous combien rapporterait un taux d’imposition à un chiffre sur la globalité des transferts de capitaux ? Cela laisse rêveur ! C’est ce qu’on aurait dû exiger lors du renflouement des banques. Au lieu de ça les états ont préféré faire exploser la dette interne et faire porter l’effort sur ceux qui ne sont pour rien dans la crise financière : le peuple. C’est tout simplement insupportable !

 Si le principe est simple, en revanche, la bataille à mener est très rude. Le système à abattre est puissant, quasi intouchable du fait de sa complexité systémique. Nous y participons tous à notre niveau et c’est bien pour ça que nous n’osons pas y toucher. On a peur d’y perdre nos maigres privilèges. Nous sommes tous lâches ! Homme politiques, faiseurs d’opinions, consommateurs, agents économiques… Quand j’ai rencontré le philosophe Camerounais Kangue Ewane, il avait eu cette image saisissante : « l’homme occidental nage dans une mélasse que chacun de ses mouvements épaissit ». Il est temps de se dégager de la mélasse. Ne nous trompons pas d’ennemis. Je pense sincèrement que le nerf de la guerre est la fiscalité et les paradis fiscaux.



10 réactions


  • leypanou 5 avril 2013 09:24

    Vous prônez la stratégie du judoka, proposons plutôt la stratégie de l’aïkidoka (ou de l’aïkijujutsuka c’est encore mieux), i.e utiliser la force de l’adversaire chère à Gabriel et d’autres sur ce site.

    Et pour passer une bonne journée, la lecture des ouvrages ici, ici et ici (il y a d’autres auteurs intéressants) donnera plus de « tokui waza » intellectuel à l’artiste martial politique.

    Quant à la conclusion, avec ceci : "Et tant que chez nous, les masses populaires penseront qu’il suffit de fermer les frontières, de désigner les plus faibles comme boucs-émissaires et croire que le retour à l’état nation nous mettra à l’abri des turbulences mondialisées ", ces propos de simple bon sens, pour quelques-uns sur ce site, même avec un burin, vous ne pourrez pas leur faire rentrer cela dans la tête.

    Il ne faut pas semer sur de la terre aride.


    • tiptop 5 avril 2013 12:41

      Quant à la conclusion, avec ceci : "Et tant que chez nous, les masses populaires penseront qu’il suffit de fermer les frontières, de désigner les plus faibles comme boucs-émissaires et croire que le retour à l’état nation nous mettra à l’abri des turbulences mondialisées ", ces propos de simple bon sens, pour quelques-uns sur ce site, même avec un burin, vous ne pourrez pas leur faire rentrer cela dans la tête.

      Il ne faut pas semer sur de la terre aride.

      Allons soyez pas si pessimiste. Nos amis les identitaires , on les connait, ils pullulent par ici. On les débusque facilement (voir mes précédents posts). je pense que , à part une poignée de fous furieux, ils se rendront un jour à l’évidence. Le monde d’hier n’est plus et contrairement à eux, moi qui m’accorde une « petite » culture historique je ne vais pas forcément pleurer. De toute façon on doit toujours composer avec la réalité meme si elle plait pas.


    • Rensk Rensk 6 avril 2013 01:27

      C’est juste ce que je viens de voir ? J’ai rencontré Kafka ? (le posteur de l’article se fait sucrer par la « maison » ?) smiley


  • Le Yeti Le Yeti 5 avril 2013 09:53

    Nous sommes dans une période de profonde mutation civilisationnelle. D’une manière ou d’une autre, les choses vont changer ; ou plus exactement sont en train de changer (mais ce n’est pas fini).

    Après compte tenu de l’individualisme, de l’insouciance et du manque de recul des gens (Pour le mariage gay, il y a du monde, mais que la France abandonne sa souveraineté financière en adoptant le MES et personne ne bronche !) je doute qu’une prise en main populaire et responsable ait lieu.
    Quant à une insurrection, si elle est en effet tout à fait probable, je le redit, regardez la décénnie post 1789 ; cela n’a été ni glorieux ni réellement bénéfique. Alors certes cela à permis une nouvelle donne mais qu’à-t-elle véritablement changé ?

    Pour moi, le vrai changement commence par soi-même. Que chacun balaie devant sa porte, se remette en cause, fasse ses propres choix et les applique.
    Les financiers sont des pourris ? Alors sors ton argent de la banque et investis le dans du concret.
    Les industriels sont des pourris ? Alors cesse de bouffer McGro, de boire du Coca et bazardes ton iPhone.
    On bouffe de la merde ? Au lieu de jouer au tennis ou de sortir en boite (Je n’ai jamais compris cette expression !) , trouves-toi 50m² de terre et jardines.

    Perso, certes je ne fais pas tout ça mais d’une part je fais à peu près tout ce que je peux dans ce sens et d’autre part, je ne me pleurniche pas.


  • socrate&co 5 avril 2013 11:30

    Un aveu que personne ne demandait, un milliardaire qui investit pour une campagne électorale de gauche dans un « paradis du vice » et par hasard, un procureur qui blanchit un opposant ...la République est-elle en danger ?


  • reprendrelamain reprendrelamain 5 avril 2013 13:03

    Il est évident que la seule arme qui nous reste c’est l’argent, il faut retourner cette arme contre ceux qui s’en servent pour dominer et écraser les peuples. Il faut des actions qui génèrent des résultats pour que les gens qui y participent se rendent compte immédiatement du pouvoir d’influence qu’ils peuvent avoir sur l’économie, la politique et l’écologie.

    Le plus simple et le plus facile pour commencer c’est le boycott citoyen qui peut avoir pour cible des banques, des assurances, des grandes surfaces etc. Une utopie certes mais les peuples peuvent-ils se contenter encore longtemps de voter tous les 5 ans et attendre qu’on les tonde éternellement ?


    • tiptop 5 avril 2013 15:39

      "Le plus simple et le plus facile pour commencer c’est le boycott citoyen qui peut avoir pour cible des banques, des assurances"

      Le problème est que les gens ne se tireront pas une balle dans le pied. Même les plus modestes ont besoin des banques ! Il faut agir à un niveau qui restera indolore pour la masse.


    • Rensk Rensk 6 avril 2013 01:41

      Le plus « con » a faire... disons pendant 3 mois (c’est légal, tranquillisez-vous) c’est d’utiliser la banque pour toucher son salaire, payer ses « charges » et retirer tout ce qui reste en liquide...

      Attention en France ; avant vous aviez déjà une limite de 3’000 € pour payer vos achats en cash, Hollande a descendu votre droit a votre fric à 1’000 €... (c’est pas beaucoup pour un nouveau PC)


  • sisyphe sisyphe 5 avril 2013 17:52

    Entièrement d’accord avec l’article.
    Il y a des années que les économistes un tant soit peu objectifs, honnêtes et sérieux, demandent la nécessaire réforme monétaire, qui priverait les banques de la création d’argent, ce qui réduirait déjà considérablement les risques d’exil fiscal. Il s’agit désormais d’une urgence absolue.

    Egalement, ceci :

    « Offshore Leaks » : « Nous publierons une dizaine de noms français significatifs »

    Le Monde publie les révélations d’une vaste enquête sur les paradis fiscaux, menée conjointement par l’International Consortium of Investigative Journalists(ICIJ) et trente-six médias internationaux. Anne Michel, journaliste au Monde, explique dans un chat la méthode et les enjeux de l’« Offshore Leaks ».

    Lire l’interview, dont il ressort que la fraude fiscale coûte, chaque année, à la France 50 milliards d’€uros

    et à l’Europe 1.000 milliards !

    De quoi largement rembourser le trou de la sécu, payer les retraites, faire fonctioner l’économie (créer des emplois), réduire la dette...

    On va continuer à laisser se faire tondre jusqu’à quand ? Jusqu’aux os ? Sans rien faire ?

    Les dirigeants ont les dossiers en mains, et n’ont désormais plus aucune excuse pour ne pas prendre les mesures qui s’imposent vis à vis de cette fraude internationale massive, qui met les citoyens à genoux.

    Exigeons la fin des paradis fiscaux, et la fin de l’exil fiscal. 

    Stoppez l’évasion fiscale : pétition à signer

    Multiplions les pressions sur nos élus, sur les réseaux sociaux, autour de nous ; l’attentisme est devenu menace de mort. Résistance et révolte !


  • tiptop 7 avril 2013 16:37

    100% d’approbation ! Vous avez fumé ou quoi ??? Moi ça me fait flipper...
    Je ne renie rien de ce que j’ai écris mais effectivement c’est de loin mon article le plus « simpliste » !!


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