samedi 28 juin 2014 - par Robert Bibeau

L’austérité est une réalité, pas celle que vous croyez !

Je cite un auteur qui s’étonne que les mesures d’austérité annoncées par les différents gouvernements ne fassent pas s’effondrer les dépenses étatiques. L’auteur se désole et fulmine : « Quelle austérité ? Parce que les réductions de dépenses proposées par le gouvernement, mises en perspective, sont loin d’être aussi catastrophique que ça.

Je cite un auteur qui s’étonne que les mesures d’austérité annoncées par les différents gouvernements ne fassent pas s’effondrer les dépenses étatiques. L’auteur se désole et fulmine : « Quelle austérité ? Parce que les réductions de dépenses proposées par le gouvernement, mises en perspective, sont loin d’être aussi catastrophique que ça. En réalité, ce sont des peanuts » [les coupures proposées NDLR], et l’auteur de poursuivre : « le gouvernement dépense comme un matelot en permission depuis les années 60. On le voit très précisément sur le graphique. On a institué des tonnes de programmes sans vraiment se demander s’ils étaient efficaces et justifiés ». L’auteur conclu que : « Carlos Leitao (ministre des Finances du Québec), annonce la formation de deux commissions qui auront pour but de déterminer quelles dépenses peuvent être coupées et comment réformer la fiscalité » (1).

Cet auteur pense, comme bien des gens ordinaires, que l’État (celui du Québec, du Canada, des États-Unis, de France, d’Algérie, du Maroc, de Tunisie, de Belgique, etc.) est dirigé par le gouvernement du peuple, élu par le peuple et pour le peuple. Que cet État, au-dessus des luttes de classe et des contingences économiques peut faire ce qu’il désire à condition d’en avoir le courage et la détermination.

Aucun État, nulle part dans le monde, ne correspond à cette fricassée publicitaire que l’on enseigne dans les universités, dans les écoles et sur les parvis des églises et des mosquées.

L’État dans toute société de classes est l’État-major – le lieu du pouvoir de la classe dominante. C’est le Conseil d’administration des patrons – des milliardaires et des entreprises privées – et cet État est assujetti aux lois économiques générales dont il ne peut disconvenir sous peine de faillir, qu’il ne peut transgresser sans crainte de s’effondrer.

Tous auront remarqué que le système économique mondial subit les contrecoups de crises systémiques globalisées et mondialisées. L’État du Québec (8 millions d’individus) ne fait pas exception. La crise mondiale ne trouve pas son origine en Ungava ni sur la rue Saint-Jacques à Montréal où il se brasse trop peu d’affaires pour interférer sur la santé économique du monde entier. L’économie québécoise comme celle de chacun des autres pays est intégrée – globalisée – mondialisée et interdépendante.

Depuis Robert Bourassa (ex-premier ministre du Québec), chaque gouvernement québécois a annoncé qu’il mènerait des études, des révisions de programmes, des analyses fiscales, des commissions d’enquêtes (dont la commission de la libérale Forget) pour étudier les coupures à opérer, les programmes à abolir, le dégraissement de dépenses étatiques à exercer et les taxes et les impôts à augmenter (traduction libre de l’expression candide : « réformer la fiscalité »).

Le résultat est connu – péquistes ou libéraux – les dépenses gouvernementales ne cessent de croître – lentement mais sûrement ! Pourquoi le grand capital a-t-il tant de difficulté à disloquer l’État providence des années soixante et à imposer sa dictature austère à imposer l’État-policier ? C’est que dans les pays développés comme le Canada, la France, le Royaume-Uni, l’État fournit presque la moitié du très modeste revenu d’un prolétaire ordinaire et davantage pour un sous-prolétaire. Sans mot dire, dans l’ensemble des sociétés impérialistes nous assistons à la transformation de l’État libéral bourgeois en État impérialiste corporatiste (l’opération est quasi complétée). On constate ce processus par l’accélération de la tendance à la prise en charge par l’État de l’entretien et de la reproduction de la force de travail. L’État impérialiste assure une part grandissante du revenu des ouvriers, via les prestations de revenus indirects et même par le salaire direct (L’État étant le plus grand employeur dans tous ces pays). Bien entendu que l’État gruge ces revenus autant qu’il peut le faire tant par la dégradation des prestations sociales, la réduction des services de santé et d’éducation, qu’en augmentant les impôts que paient les travailleurs (2).

Pourtant, on est loin du soi-disant désengagement de l’État néo-libéral dont les gauches de toutes espèces nous rabattent les oreilles. C’est tout le contraire. On a vu l’ampleur de l’engagement de l’État des riches en ce qui concerne le sauvetage des banques et des institutions du secteur financier en 2008. On le voit maintenant dans la restructuration des rapports de production et dans la prise en charge d’une part croissante du revenu ouvrier et salarié, c’est-à-dire dans l’entretien et dans la reproduction de la force de travail.

Si demain l’État des riches, au Québec, au Canada, en France ou aux États-Unis, en Algérie, au Maroc, en Belgique, coupait ses dépenses de 50%, ce sont des dizaines et des centaines de milliers d’emplois qui seraient abolis, des centaines de milliers de travailleurs consommateurs qui n’auraient plus un sou pour acheter-consommer et des milliers d’emplois qui seraient ensuite abolis dans les magasins et dans les usines de production de marchandises. Des centaines de milliers de petits propriétaires hypothéqués qui rendraient les clés de leurs condos et de leurs propriétés et des dizaines de banques qui feraient faillite croulants sous les créances impayées. Cette catastrophe économique entraînerait l’effondrement des revenus (taxes et impôts) des États bien au-delà de la baisse de la moitié des dépenses planifiées, ce qui signifierait que même dégraissé de la moitié de ses dépenses, le budget de l’État, ramené à celui des années soixante, entraînerait tout de même un déficit budgétaire étatique. Il suffit de visiter la Grèce où de telles coupes budgétaires (moins drastiques toutefois) ont été imposées pour comprendre que de jeter 50% de la population d’un pays dans l’indigence ne constitue pas une solution à la crise économique et sociale capitaliste.

Je conviens facilement avec l’économiste en herbe, que je citais plus tôt, que de poursuivre les programmes de dépenses gouvernementales tels que nous les connaissons actuellement ne pourra mener qu’a l’effondrement – mais plus tard et plus catastrophique. Bref, présentement, les États capitalistes achètent du temps – un sursis – avec leurs politiques de ralentissement des dépenses de programmes. Mais ils ne peuvent absolument pas faire autrement, car si les ouvriers grecs n’ont pas détruit leur État des riches rien ne certifie que si tous les prolétaires d’Europe étaient soumis aux fourches caudines de l’oligarchie – il ne se produirait pas un grand soulèvement continental.

Le contrat social capitaliste a été rompu – l’ouvrier est disponible et disposé à travailler et à se laisser exproprier sa plus-value ; le capitaliste est disponible et disposé à investir son capital pour le valoriser et le reproduire, pourtant, les occasions d’affaires profitables sont inexistantes, et « l’argent-capital fantôme » erre sur le parquet des bourses du monde – insolvables et imbuvables attendant que de s’effondrer. Les rapports de production capitaliste entravent le développement des forces productives et la valorisation du capital disponible. Le système capitaliste et l’État capitaliste ont failli et doivent être remplacés par un nouveau mode de production globalisé, collectivisé et planifié.

(1) http://www.les7duquebec.com/7-de-ga... (2) Extrait P. 138, tiré du MANIFESTE DU PARTI OUVRIER http://www.publibook.com/librairie/...



5 réactions


  • mac 28 juin 2014 08:47

     Le système capitaliste et l’État capitaliste ont failli et doivent être remplacés par un nouveau mode de production globalisé, collectivisé et planifié.


    Remplacer la peste par le choléra quoi...

    Personnellement je préfère la nuance et la troisième voie que de Gaulle voulait mettre en place. Malheureusement il n’y parvint pas grâce aux efforts de l’establishment, de certains traîtres qui l’entouraient, des capitalistes anglo-saxons et d’une foule manipulée à souhait par des types (certains leaders de mai 68) qui n’ont pas tardé à venir manger dans la gamelle ultra-libérale.





  • Tzecoatl Claude Simon 28 juin 2014 10:37

    « Le système capitaliste et l’État capitaliste ont failli et doivent être remplacés par un nouveau mode de production globalisé, collectivisé et planifié. »


    Remplacé ?
    Les capitalistes n’ont jamais été que les meilleurs pour vendre des couches culottes performantes et autres gris-gris appleiens.

    Par contre, il est évident que certains gros projets d’infrastructures ou industriels, qui ne sont pas forcément rentables mais permettent de déboucler tout un tas d’opportunités pourraient être remis dans un cadre idéologique de nationalisation, de planification.

    Mais la connivence entre politiques et industriels priment, entre autres grâce aux lobbies, la prise de participation de l’état, en France, se limitant à gérer sa vassalité vis-à-vis de Murica (US).



  • lsga lsga 28 juin 2014 11:33

    100% d’accord avec l’article.

     Rappelons au passage que le nouveau projet dans la besace des libéraux, c’est le « Salaire Universel » imaginé par le roi des libéraux : Milton Friedman. Ce sont tous les gauchistes en chaleur, tous les « keynésiens » étatistes et les nationalistes qui vont apporter sur un plateau d’argent la réforme libérale par excellence, celle censée sauver le Capitalisme. 

    Nous arrivons en effet dans cette période très particulière du Capitalisme, où le Capitalisme n’est plus possible. Le niveau de développement technologique est tel que le système enchaîne crise systémique sur crise systémique, dans des convulsions de plus en plus violentes. 

    En même temps, le Socialisme véritable, scientifique, démocratique, devient lui possible pour la première fois dans l’histoire de l’Humanité. Le développement d’Internet permet l’instauration d’une démocratie mondiale directe, qui signe la mort de l’État bourgeois. L’apparition des énergies libres (Andasol, Ivanpah) et la capacité d’automatiser la production rend possible l’abolition de l’exploitation industrielle capitaliste. 

    Toutefois, nous le savons, le passage d’un système économico-politique à un autre ne se fait jamais tout seul, mais uniquement à travers les révolutions. Or, la conscience de Classe en Europe a été remplacée par une conscience de race, comme Marx lui-même le présentait. La stupidité et le crétinisme sans fin des prolétaires/consommateurs sont un obstacle immense à l’émergence d’une lutte de classe efficace. À l’inverse, si nous sommes capables de déclencher grèves et manifestations synchrones à l’échelle d’un continent (en Europe, ou en Amérique du Nord) quelque chose me dit qu’il entraînera le reste des continents. Le mouvement des indignés et des révolutions arabes ont été la prémisse de la grande révolte mondiale qui est devant nous. 



  • coinfinger 28 juin 2014 17:14

    L’article se tient a peu prés , jusqu’à la conclusion qui tombe comme un cheveu sur la soupe .
    Enfin ,quand méme , vous parlez à partir du Canada . Vous étes voisins des Etats Unis , des marchés de Chicagos , méme . Et puis flop ! Conclusion convenue . Vous allez mettre quoi ,sérieux , comme autre mode de production ?
    N’eut il pas été plus interessant , étant dans un pays gros producteur de matiéres premiéres , on peut inclure l’éléctricité là dedans , au Québec , de dénoncer le fonctionnement du marché de Chicago ? Et autres ...
    Au delà le systéme financier US trés ’particulier’ . ?
    Non , pourquoi ? Parce qu’il serait apparut qu’alors les pb ne viennent pas spécifiquement du capitalisme mais , on va dire , d’options politiques . Et là çà sort du catéchisme ...


  • Robert Bibeau Robert Bibeau 28 juin 2014 18:42

    @ coinfinger

    Cet article a la prétention simplement d’expliquer que le capitalisme dirigiste - interventionniste - keynésiens - État providence ou le capitalisme soi-disant néo-libéral - libertaire - libre concurrence -débonnaire - soi-disant ouvert c’est du pareil au même -

    Seuls changent une fraction des dépenses de l’État dirigeant « indirectement » le capital vers les entrepreneurs - créant un marché pour leurs marchandises - ou dirigeant « directement » le capital dans les poches des entrepreneurs sous forme de subventions directes ou de versement des intérêts sur la dette astronomique ou autres procédés.

    La conclusion ne tombe donc pas à plat mais s’inscrit dans la droite ligne du raisonnement précédent. On fout cette secte qui a faillit à la porte et on construit le socialisme.

    Bine entendu que les conditions objectives et subjectives ne sont pas réunies ici et maintenant mais ça viendra et quand ça viendra il faudra se méfier des vendeurs itinérants et des bonimenteurs comme Piketty sur lequel nous reviendrons prochainement On en a pas fini avec lui ( smiley)


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