L’avancement des saisons
Je commente aujourd’hui un document que je trouve très réussi. Paru en clair sur le site de la Tribune de Genève il associe un visuel très clair et dynamique avec des éléments de texte. L’auteur, Mathieu Rudaz, joue avec liberté des couleurs et pavés sans jamais perdre de vue son objectif : informer.
Tendance
Le titre et le sous-titre donnent la direction de l’info : « Le développement de la végétation n’a jamais été aussi précoce que cette année. L’expression « y’a plus de saisons » est-elle devenue réalité ? »
Première remarque : il n’y a pas d’alarmiste. Le traitement de l’info est rationnel et non émotionnel. C’est assez rare pour le souligner. C’est comme un chant de flûte par-dessus un éboulement de grosses caisses : clair et descriptif. C’est une nouvelle forme de journalisme bien dans son époque et bien sur internet
L’article est basé sur les données de MétéoSuisse. L’agence fédérale étudie le développement des feuilles et fleurs, en particulier du marronnier, depuis 1950. On y découvre la tendance : le printemps de la nature se déclare de plus en plus tôt.
70 ans permettent de dégager une tendance, alors que les années exceptionnelles ne nous apprennent rien. Par exemple l’apparition la plus précoce des feuilles date de 2008 et la plus tardive de 2006. Cela n’a pas de signification particulière, car la tendance longue prime sur l’événement court.
La tendance montre quelques jours d’avance. Ce n’est pas énorme. Dans ce genre d’étude il manque toujours des éléments de comparaison. Sortis du Petit Âge de Glace il y a moins de 200 ans, l’atmosphère ne pouvait que se réchauffer, dans un rebond nécéssaire : nous étions au plus basses températures depuis 10’000 ans.
Avancement
Les archives du passé sont moins fournies mais on sait qu’il y a eu d’autres périodes chaudes où les saisons ont été différentes.
L’avancement du printemps est chose agréable pour qui a connu ceux des années 1960-70. C’était comme aujourd’hui. Ce matin, 13° à la fenêtre je regardais le ciel, un ciel de Belgique, où, petit, je suis allé plusieurs fois en vacances. Un ciel gris, bas, lourd, comme chanté par Brel dans Le plat pays. Cette mémoire m’est restée parce que répétée et très intime.
Cet avancement n’est pas un problème en soi. La météo varie, la nature aussi, elle est faite pour s’adapter. Par contre si les hivers devenaient trop doux il y aurait problème avec des feuillaisons et floraisons perturbées.
Mais l’hiver est froid par nature. D’une part le rayonnement solaire diminue et la chaleur accumulée se disperse, d’autre part la mise en route des courants froids remplace la douceur. Il y a à mon avis peu de risque d’avoir des hivers avec 10 ou 12 degrés de moyenne à Genève.
Les températures hivernales sont un peu plus chaudes, sans excès. C’est en partie dû à l’augmentation de l’ensoleillement et à la diminution du stratus qui maintenait une pellicule froide sur le plateau.
Poker
L’article termine sur le pari ou le coup de dés du climatologue James Hansen :
« Dans les années 80, James Hansen, un climatologue américain, suggéra de considérer le climat comme une paire de dés : chacune de leurs faces devrait avoir une chance égale d'apparaître après un lancer. Mais avec le réchauffement climatique, la probabilité de tomber sur les faces qui correspondent à des événements météorologiques extrêmes augmente. Selon le chercheur, à partir d’un certain nombre de jets, on devrait se rendre compte que les dés sont truqués. »
Je n’en suis pas convaincu. J’ai assez montré que les événements extrêmes ont toujours existé et que l’hypermédiatisation anxiogène actuelle n’apporte pas de preuve d’une péjoration dramatique. Je ne trouve aucune raison de croire que la Terre puisse devenir comme l’image 3.
De toutes façons il faudra au moins deux siècles de recul pour savoir si nos théories actuelles se vérifient dans les faits. C’est d’ailleurs ce qui m’inquiète : l’urgence climatique supposée (et contestée par beaucoup) risque de pousser à des prises de décision inadaptées et à des vagues de violence incontrôlable. C’est déjà en chemin.
On condamne la course au développement du passé, mais on fonce actuellement dans la course à la pureté. Rien ne dit qu’elle ne produira pas pire que les énergies fossiles.
- Un vrai ciel de Belgique.
- Oui, dit une voix près de moi.
C’est une infirmière. Je suis à l'hôpital.
- Comment, lui dis-je, vous connaissez le ciel deBelgique ?
- Je viens du Nord…
Cette petite complicité vient à point pour clore ma note. Et bravo au journaliste.