L’écologie, de Trump à Notre-Dame-des-Landes
DES QUESTIONS TRES SIMPLES
Les réponses à quelques questions simples mais bien placées apportent souvent la solution à des problèmes décisionnels apparemment inextricables.
Il en va ainsi du nucléaire :
Première question : la probabilité d’un accident dans une centrale nucléaire est-elle nulle ?
Seconde question : les conséquences d’un tel accident pourraient-elles être catastrophiques à l’extrême ?
Si les réponses sont respectivement "non" et "oui", alors il faut mettre fin au nucléaire toutes affaires cessantes (1).
Même chose quant à l’écologie : si la probabilité d’un désastre écologique apocalyptique n’est pas nulle, il faut prendre des mesures tambour battant pour tenter d’amener cette probabilité à zéro. Cependant, l’honnêteté intellectuelle oblige à rappeler qu’il n’est pas exclu que l’écologie politique ait souffert, dès sa naissance, de quelques virus idéologiques, généralement anticapitalistes ou antilibéraux, qui se sont largement propagés depuis le début des années 70. Il en résulte que l’objectivité n’est pas toujours le point fort des militants écologistes les plus virulents.
DONALD TRUMP
La décision de D. Trump de quitter la COP21 fait beaucoup de bruit pour rien, comme dirait Shakespeare. A première vue, elle est désastreuse puisque certains pays déjà peu enclins à se plier aux molles injonctions de la COP21 vont y trouver un prétexte supplémentaire pour renâcler plus encore à les suivre. Cependant, ce que la plupart de ces pays attendent impatiemment, voire sceptiquement, ce ne sont pas les états d’âme de Trump mais plutôt les dizaines de milliards de dollars qui leur ont été promis pour les aider à relever le défi climatique chez eux. La vérité reste que seules de nouvelles technologies à la fois économiquement profitables, massives et fiables parviendront, avec ou sans les Trump de la planète, à éteindre le feu dans la maison pour reprendre l’expression utilisée par Chirac à Joburg, il y a 15 ans, en compagnie de Nicolas Hulot. Bien évidemment, cela ne pourra se faire sans d’énormes levées de capitaux, contrairement à ce que semble rêver Jeremy Rifkin (2). Il nous reste donc à souhaiter ardemment que l’avènement desdites technologies balayent au plus vite les forfanteries électoralistes de Trump. Des états comme la Californie ou des hommes d’affaires comme Elon Musk (PDG de Tesla) y veillent. A surveiller de près : le développement de Net Power, une startup US qui promet des centrales à charbon et à gaz sans rejet de CO2 (3). Bon an, mal an, l’empreinte carbone des USA a diminué plus que celle de l’Europe au cours de la dernière décennie.
RETOUR SUR LA COP21
Je dois avouer que, comme beaucoup d’entre vous peut-être, j’avais déjà plus ou moins oublié les conclusions de la COP21 lorsque le Président US a ramené son tweet. Pour rafraîchir ma mémoire, j’ai voulu analyser sommairement deux documents relatifs à l’évènement (4). J’ai demandé à mon ordinateur d’y rechercher quelques mots que j’associe plus ou moins inconsciemment à l’écologie tels que " carburant, automobile, maritime, aérien, commerce, aviation, décroissance, ferroviaire, tourisme, routier, nucléaire ". A ma grande surprise, aucun de ces mots ne figure dans les 42 pages ainsi explorées.
Une seule explication : ma pensée, trop entachée de " société civile ", n’atteint pas la puissance des concepts qui caractérisent les diplomates en charge (comme disent les Anglophones) des grandes négociations internationales telles que la COP21. Ainsi, les questions qu’il m’arrive de me pose au sujet de l’écologie pêchent sans doute par manque d’abstraction, pour ne pas dire qu’elles restent au ras des pâquerettes. En voici quelques exemples :
Dans l’urgence, la première source virtuelle d’énergie durable n’est-elle pas l’économie d’énergie non renouvelable ?
Alors, pourquoi la CPO21 n’a-t-elle pas prévu de réduire drastiquement le commerce international (CETA et autres TAFTA) en attendant de disposer de carburants ou de technologies moins polluants ? (comme les agrocarburants, en supposant qu’on dispose de suffisamment de terres cultivables...)
Quel est le coût carbone global des grands rassemblements internationaux tels que les Jeux Olympiques ?
Les hommes d’affaires sont-ils en voie de remplacer la plupart de leurs voyages par des visioconférences ?
La COP21 envisage-t-elle, par exemple, d’interdire le transport d’eaux minérales entre continents ?
Ou de transporter des fruits, des légumes, des fleurs et des viandes par avion entre continents ?
La camelotte inutile et les loisirs superflus sont-ils sacrés au point de tabouiser le mot " décroissance " ?
SERAIT-ON LA POUR NE PAS CONSOMMER !
Bon, je cesse là de jouer les Cassandre. Dans la conjoncture actuelle, que sert à l’homo economicus de maîtriser l’univers, s’il n’y peut consommer tout son soûl. Le libre-échange mondialisé n’est-il pas devenu l’âme et le sang de notre planète ? Et puis, sommes-nous vraiment mûrs pour sacrifier notre mode de vie essentiellement consumériste sur l’autel de l’écologie ? Pour cela, il faudra sans doute attendre l’avènement d’une " singularité " (5), la fin de l’éon écologique actuel, qui surgira au sein du biotope terrestre et devant laquelle les COP passées voleront comme les feuilles d’un éphéméride périmé dans une décharge à ciel ouvert. En attendant, faisons le gros dos, à l’abri d’une « vulnérabilité cognitive qui masque les risques » (6).
Il est tellement agréable de rêver. Tenez, en mettant de l’ordre dans mon garage cet après-midi, je tombe sur le Fig mag du 28 mars 1998 avec son gros titre " Spécial tourisme, 60 pages, les nouveaux rêves". Mille paradis hédonistes accessibles pour quelques centaines de litres de kérosène, une broutille. Une étagère plus bas, je trouve Alternatives économiques de novembre 2000 dont la couverture nous apprend que " L’après-pétrole a commencé ". Tout à côté, Le courrier de l’Unesco de janvier 1998 interroge " La frugalité, un mode de vie ? ". On écrit et on cause beaucoup mais, au bout du compte, on tourne en rond. Chacun y trouve son compte et y conforte sa bonne conscience, espérant que les autres feront ce qu’il dit et non pas ce qu’il fait. Comme s’il suffisait de ne pas laisser le robinet du lavabo couler pendant le brossage des dents ou de débrancher ses chargeurs pour sauver la Terre. Chacun se débrouille hypocritement selon ses moyens tel ce prince saoudien qui a fait aménager un A 380 pour vingt personnes seulement. Il bénéficie d’une triple prime : avoir le pétrole, ramasser l’argent du pétrole et apporter le rêve dans les chaumières. Un vrai conte de fée moderne humaniste ! Et lorsqu’un djeune admire un footballeux prestigieux, rêve-t-il plus aux fameux coups du scorpion (7) du sportif qu’à sa Ferrari ? Bref, comme pensait Gandhi " La planète peut pourvoir aux besoins de tous, mais pas à la cupidité de certains ".
NOTRE-DAMES-DE-LANDES
Venons-en donc au fameux site de Notre-Dame-des-Landes. Fidèles à notre méthode, posons-nous deux questions :
Première question : est-il nécessaire de disposer de vols entre Nantes et les aéroports parisiens alors qu’il existe des TGV directs entre Nantes et Paris aussi bien qu’entre Nantes et Roissy ?
Seconde question : est-il souhaitable que le trafic aérien mondial croisse ? Qu’importe que la consommation des réacteurs actuels (8) soit divisée par 3 si le trafic se voit décuplé.
Je vous laisse y réfléchir.
Bien entendu, allumer le petit pétard d’un référendum local fut une erreur grossière : on ment au peuple en voulant lui faire accroire qu’une simple consultation locale répond à un problème écologique mondial.
Que va faire le gouvernement " En Marche " ? Se prépare-t-il à un glorieux franchissement de Pont d’Arcole ou, au contraire, à une traversée contrainte d’un pont aux ânes ?
Ce sera un épisode, intéressant car révélateur au cours des mois politiques à venir.
CONCLUSION
Pour que ce cas aéroportuaire se résolve élégamment, il faudrait que la Vierge des Landes fît un miracle. En ces temps de mécréance, ce devrait être du très lourd pour que les têtes voulussent bien se détourner. Tenez, il faudrait quelque chose d’ampleur comparable à ce qui se produisit à Fatima il y a 100 ans, le 13 octobre 1917. Un miracle cosmique où le soleil fit son cinéma devant des dizaines de milliers de personnes, croyants et matérialistes confondus (9).
Hélas, les seuls miracles auxquels l’humanité s’intéresse de nos jours sont moins d’ordre spirituel qu’économique. Et cela ne va sans doute pas s’arranger puisque les nouvelles technologies vont jusqu’à nous nous promettre l’immortalité. Comme il n’y en aura pas pour tous, ça coûtera un bras et la moitié de l’autre (10), disons, au pif, le prix de quelques douzaines de Lamborghi. Comme vous le comprenez, tout cela n’annonce rien de très bon sur le plan de l’écologie car l’écologie c’est le sacrifice quelque part ne croyez-vous pas ?
- Pour ce qui est du nucléaire militaire, je vous invite à lire mon article Sarkozy et Hollande ne furent pas de grands hommes (Agoravox, le 7 janvier 2017)
- Dans La nouvelle société du coût marginal zéro
- https://netpower.com/technology/
Anicet Mbida a mentionné cette startup, le 8 juin 2017, au cours de son émission Innovation dans la Matinale d’Europe 1, à 7 heures 10.
REUNION PARLEMENTAIRE A L'OCCASION DE LA CONFERENCE DES NATIONS UNIES SUR LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES Paris (France), 5 et 6 décembre 2015 Document final Adopté par consensus le 6 décembre 2015 (3 pages) Adoption de l’Accord de Paris Proposition du Président - Projet de décision - /CP.21 du 12 décembre 2015 ( 29 articles, 39 pages ).
- De l’ampleur de celle qu’attendent les transhumanistes .
- Expression empruntée à Annamaria Lammel (Notes de la FEP septembre 2015 ).
- Figure de style du football
- En attendant les avions solaires comme le Solar Impulse de Bertrand Piccard.
- Voir, entre autres, Miracle du soleil dans Wikipédia
- Qu’importe : si vous en avez les moyens, on vous greffera un bras cybernétique qu’aucun acide lactique ne viendra perturber !