mercredi 20 mars 2013 - par Piere CHALORY

La Civilisation du Bon Point

Souvenez vous de ces petits rectangles de carton jaunâtre que vous étiez si fiers de ramener à votre maman, ravie par votre exploit écologiquement positif. C'était l'assurance d'un moment de paix, un petit sésame obtenu grâce à votre collaboration enfantine. Oui, vous avez commencé bien tôt à fricoter avec l'autorité, pour en tirer quelque avantage.

 

 Voyez où cela vous et nous mène aujourd'hui.

Par votre bonne conduite, votre parfaite soumission accompagnée parfois de flatteries et de petits cadeaux à Monsieur le Professeur, vous dispersâtes mains dons calculateurs qui vous assurèrent naguère un statut particulier au sein de votre classe. Chouchou, tu es l'extrémité du bâton qui se retourne à présent contre toi.

Tu n'as pas semé le désordre ni le chaos, tu es le chaos. Car ta flagornerie a fait pousser des ailes aux margoulins qui écrivent le destin terrestre du commun des mortels. Ces gens ayant compris grâce à toi que tout est permis, du moment qu'on obtient l'accord tacite de la majorité de la population ; les tièdes, les bien rangés dans la cour, les enfants sages.

Mais voici que le contexte monstrueux que tu généras sans t'en apercevoir, sans fumer ni boire, sans jamais faire d'excès de vitesse, effectue une sortie de route, un tout droit dans un mur de béton. Crak !

Et tout çà c'est de ta faute.

En te garant dans les pointillés et traversant systématiquement dans les clous, en regardant un peu trop la télévision de 20 heures, en répétant autour de toi le discours moralisateur de gens amoraux, tu n'as fait qu'encourager le vice et la cupidité chez les organisateurs du système :

 

Action-Récompense / Action-Punition, moteur de notre civilisation primitive :

Il s'agit d'un dressage de notre esprit, le même que celui des animaux de cirque. Des otaries, des singes savants, des perroquets et même, Sissi, des poissons rouges. Aujourd'hui, des centres de dressage existent pour ces petits animaux vermillons.

Dans le cas du poisson rouge, c'est vrai que l'intérêt à dresser un animal somme toute peu dangereux est risible. Mais si vous avez du temps à perdre, c'est moins cher qu'un ours. Pour l'homme il en est autrement. Le dressage sera différent selon que vous soyez issu de la famille Rotschild ou Laguillier, mais le résultat identique.

Le tout est organisé par vos géniteurs dans le seul et unique but de perpétuer leur mode de vie, voire chez les pauvres, de l'améliorer en rêve, en se sacrifiant pour leur progéniture ; ethnie engendrée seulement en temps que prolongement d'eux mêmes, demi-clones.

Pareil pour les riches, qui feront tout pour pérenniser à travers leurs mômes dressés en pensions de luxe leur supériorité supposée. Inventer d'abord une ''dynastie'' ornée d'une particule identitaire, puis la préserver. Credo fiduciaire, sacrement commercial. Distinction d'apparence.

En général, le prisme mental de l'homme lui interdit tout simplement de penser librement, de penser autrement que ses parents. Eux mêmes n'étant que le prolongement de la génération antécédente.

Conditionné comme un rat de Pavlov, l'homo simplex est incapable de relativiser le schéma social, comportemental & vital qu'il a d'abord subi, puis fabriqué dans sa tête. Et enfin imprimé dans celle de ses enfants. Que ce soit dans la vulgarité ou l'élégance, la pauvreté ou la richesse.

Dans la culture ou l'acculture. Dans la bêtise ou l'intelligence. Dans la haine ou dans la bonté. Autre.

Le mimétisme humanoïde a fait, fait et fera le reste à vivre* de ces morts vivants à l'ombre de leurs illusions. Bloqués au stade de l'enfance, Monsieur et madame Quidam amasseront toute leur vie ces bons points puérils, qu'ils seront fiers d'exhiber à la vue d'autrui. Dans un jardin artificiel orné d'un bassin à poisson rouge à l'intérieur duquel le reflet d'eux mêmes brillera dans l'oeil éberlué du voisin par la pensée matérialisé.

*terme quantifiant la possibilité d'accorder pour un banquier un crédit au particulier

 

Panurge attitude forever.

Qui décide de la (dé) composition de l'état ? Qui perpétue le système ? Sinon les assujettis sociaux, les champions du Bon Point. Les imbéciles dociles, les avaleurs pattes en l'air du bout de sucre pour chien humain. Les caricatures existentielles. Les drones sans ailes.

 

Pauvres fous.

Certains de la vitale importance de s'intégrer, si possible avec les ''honneurs'' dans un groupe auquel ils estiment qu'une valeur quelconque est attachée. Prestige imaginaire, dont un éclat partiel et sale leur reviendra automatiquement en retour d'une soumission inconditionnelle. Paf !

Évidemment, dans chaque famille, il existe l'exception qui confirme la règle ; le fils prodigue ou le self made man, le parti de rien qui finit milliardaire, le fils d'ouvrier médecin. L'artiste. Le truand.

Mais ces cas particuliers revêtent assez peu d'importance, restent marginaux finalement, et en allant plus loin, sont informes. Abstraits. Dilués. Pour l'immense majorité de la planète, pour le terrien moyen, le but de sa vie est décidé par d'autres que lui.

 

Programmés en amont & en aval.

Une fois ce ''but'' planté à coup de marteau psychique, de baffes et de bons points et d'humiliations dans ce qui lui tient lieu de cerveau par ; papa maman, les ''profs'', les médias, l'entourage et les loisirs débiles ; la mécanique servile s'enclenche et dérobe la conscience de la majorité silencieuse.

Le cortex est grippé chez le larbin, la balance de l'intelligence penche toujours du même côté chez ce véritable cinglé. Paranoïaque mais convivial. Laid. Considéré et cité comme exemple de normalité aux yeux de la foule, prêt (e) à tout pour devenir ''quelqu'un''.

Encerclé dans un délire psychotique, le crétin basique croit qu'il doit préserver un savoir reptilien, une connaissance qui n'appartient qu'à lui x 7 milliards.

Selon qu'il s'intègre bien ou mal dans un créneau social prédéfini, il vivra dans le bonheur ou le malheur. Respecté, fier d'être reconnu par ses pères & pairs. Ou méprisé, moqué, insulté. Assujetti d'office, le terrien énucléé ne fait que suivre les diktats de son imagination cloisonnée. Cobaye compartimenté dans les illusions sociales correspondant à sa traçabilité familiale.

Même si ces pratiques se généralisent dans les tous les milieux professionnels où l'homme est ravalé au rang de matière première, générant suicides et immolations journalières, pas besoin de menaces, de pression, ni d'éventuel complot mondial pour pérenniser cet état d'esprit & de fait.

Or l'enfer sur terre pourrait bien y ressembler. Passée la courte rébellion adolescente, le moule de plâtre ancestral se cristallise autour de ces malencontreux. Le piège se referme.

Zombies. Plagiaires ataviques d'une tradition mortifère, innervés, déportés. Soumis à un comportement aggloméré. En temps qu'êtres ils ne font que paraître. Ils n'existent pas. Infantilisés, ils rampent toute leur vie de larves, de minables, avançant masqués pour dérober un Bon Point de plus au Maître. Encore, encore un petit sou Dugenou.

Ce Bon Point subjectif étant d'ailleurs considéré comme mauvais pour un autre. C'est le principe de la bêtise humaine. De la guerre.

''1991, la Guerre'', huile sur toile, 180 x 100 cms. © Piere Chalory

 

Le mode binaire, on / off.

Le Bon Point supplémentaire peut être concret ou posséder un réel avantage, tel la réalisation d'un projet ou l'accumulation d'une somme d'argent le permettant, la compréhension d'une Vérité. Ou totalement abstrait ; un genre d'avantage conceptuel.

Le plus souvent, le bon point est vide de sens. Autant qu'une carte d'identité. Sa perte ou son acquisition ne changera pas le cours de vos vies. Encore que. Une fois mort, y croirez vous encore ?

Les décorations et les médailles militaires civiles ou sociales font partie de ce conte sacrificiel qui vous endort debout. La '' Légion d'Honneur '' par exemple. Gadget déposé sur vous par des margoulins poursuivis en justice un peu plus tard, quel honneur ma soeur !

Songeons aux sacrifices des ouvriers de l'ère soviétique recevant en pleurant d'émotion une médaille pour leur stakanovisme, leur labeur insensé. Les mêmes pleurs accompagnant la confession publique, l'''autocritique'' des milliers d'intellectuels torturés par Staline, puis remis en forme juste le temps du jugement précédant leur exécution.

Que valent aujourd'hui ces pin's d'un ordre à jamais révolu ?

Points fidélité. Cadeaux commerciaux. 2 pour le prix d'un. Promotion partisane, canapé. Soldes.

 

Tout doit disparaître.

Le Bon Point reste important par ici, plus de point c'est plus de considération de soi même. Car moi, le benêt béat, j'existe si et seulement si des gens sont d'accord avec moi, et m'aiment*. Merci les filles, les gars, votre reconnaissance me touche. Déjà je songe au moyen subtil qui me permettrait d'augmenter encore vôtre et surtout mon estime.

*vraiment ?

Cette notion de récompense est basée sur le calcul ou le chantage ; Avilissement primal égale récompense finale. Si vous faites ceci vous aurez cela.

 

NON !

Pas du tout, vous n'aurez rien car vous n'êtes rien. Votre cadeau est empoisonné.

Il ne vaut RIEN, nothing, niente,

 

NADA

Aucune valeur réelle. Négative même. Celle ci étant répertoriée au catalogue de vos envies d'âne de cour de récréation hétérodoxe.

 

Si vous jouiez à la marelle ?

Redevenez enfant quelque instant, ça vous fera des vacances.

Muni d'un nombre de points accordé de manière proche pour tout le monde à la naissance ou presque, le veau humain doit s'il veut s'élever et impressionner ses frères*, accumuler ces preuves de veulerie, et accomplir pour cela des exploits véreux au prix d'un véritable massacre de sa propre identité au profit de conventions arbitraires. De rites à caractère obséquieux.

*la fratrie pouvant d'être d'ordre différent que sanguine

Même au sein d'une même famille, certains naissent plus égaux que d'autres ; si vous êtes plus beau, plus intelligent, plus en forme, en un mot plus fort, vous devriez en toute logique être avantagé sur votre frère laid, stupide et malade. J'exagère c'est pour imager. C'est comme ça, suivant son importance le handicap sera difficile à surmonter. Et,

Les clivages sociaux font, que même au sein d'un pays parlant la même langue, celle ci est modifiée sémantiquement, subtilement ou grossièrement. Pour bien vous différencier de la foule. L'incommunicabilité organisée, consciemment ou non. Générationnelle, familiale, ethnique, citadine, amicale, vestimentaire.

Des codes de reconnaissance sont donc immiscés dans les milieux* divers aux fins de cloisonner automatiquement par dogmes décohérents l'appartenance à une caste. Signes abscons formant l'ensemble de l'auto-ségrégation qui régit votre quotidien de troll. Quelle tristesse ! Obligés de vous déguiser ad vitam aeternam.

*nous n'avons pas les mêmes valeurs

 

Dualité du point individuel  : négatif positif en même temps, insignifiant autrement que par addition, soustraction ou division ou multiplication.

 

Comptabilité subjective :

Symbole mathématique.

Invention.

C'est aussi simple que çà.

Et pourtant, c'est tellement mieux de voir* les choses en face.

 

*N'oublions pas Régis Laspalès et son acuité légendaire ; ''c'est vous qui voyez''

 



8 réactions


  • gaijin gaijin 20 mars 2013 16:59

    belle envolée
    mon passage préféré :
    « Zombies. Plagiaires ataviques d’une tradition mortifère,....... »

    en résumé :
    ce que l’on appelle abusivement éducation n’est que du dressage bon points notes etc sont les sussucres pour le chienchien ........
    https://www.youtube.com/watch?v=SWxMxSkplr4


    • Piere CHALORY Piere Chalory 20 mars 2013 17:20

      Merci,


      Comment serait il possible dans un monde lucide une situation pareille à la nôtre ? Il parait qu’on est est à la recherche d’une vie intelligente ailleurs que sur la terre, parce qu’ici... 

    • gaijin gaijin 20 mars 2013 18:15

      dans un monde lucide ?
      mais tout est fait pour que ça n’arrive pas !
      il paraît que c’est une histoire de bergers et de troupeau ......
      mais je crois que les temps commencent à être mûrs et que de plus en plus de moutons ont envie de penser par eux même ......


  • Nico 20 mars 2013 19:14

    Encore un article stigmatisant un problème déjà constaté par beaucoup et n’apportant aucunes solutions.

    Un mouton (ou veau) jugeant des montons...


    • Piere CHALORY Piere Chalory 20 mars 2013 19:25

      Merci du compliment,


      ’’Nico’’, je vais te donner à titre unique un précieux conseil, puisque tu semble penser qu’une solution est envisageable ; avant de me comparer à un mouton ou à un veau, regardes toi dans la glace, tu m’en diras des nouvelles, ma bêle.

    • Nico 20 mars 2013 22:17

      Merci pour votre réponse car je fus, il est vrai, fort peu sympathique.

      Néanmoins, revenons-en à nos moutons.
      Contrairement à vous, je ne prétends pas être au-dessus des autres et fais donc partie du troupeau.
      Affirmer la rigidité de la situation (niant toutes solutions) est d’ailleurs, une des « qualités » du troupeau smiley


  • Piere CHALORY Piere Chalory 21 mars 2013 03:58

    je ne prétends pas être au dessus des autres, il n’y a pas cela dans le texte. Nier toute solution, c’est vous qui le dites, au contraire j’affirme que l’aliénation, érigée en mode de vie enviable par une tradition bovine ou moutonesque ou ce que vous voulez, doit être visualisée et réalisée.


    Je n’affirme pas du tout que la situation est rigide, c’est la vision de la situation qui l’est, vous devriez prendre un peu de recul. 


    • Nico 21 mars 2013 13:12

      C’est pourtant ce qui ressort (peut-être involontairement) de l’article (et du commentaire par la suite), d’où mon premier commentaire.

      Concernant les solutions, je ne fais que répondre à votre commentaire « puisque tu semble penser qu’une solution est envisageable ; », sous entendu, vous ne le penser pas. Ma remarque sur la rigidité de la situation vient de là. Mais c’est peut-être également, involontaire.

      Quand à la rigidité de la vision (j’espère que cette fois, c’est pas involontaire smiley), que voulez-vous dire ? Si la situation change (notamment par les solutions), la (votre) vision ne changera pas  ? C’est un petit peu obtus.

      Le recul est en effet nécessaire à tous les montons (dont nous faisons parti smiley


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