La grande fumisterie
C’est assez extraordinaire pour ne pas dire inouï comment les médias « mainstream » instruisent les tentatives de dialogue initiées par le pouvoir, ce fameux grand débat dont l’on nous ressasse le déroulement à longueur de bulletins d’information.
J’hésiterai à les appeler désespérées ou pathétiques ces tentatives tant il est courant dans l’histoire qu’un pouvoir pourtant sévèrement malmené réussisse par une succession de tours de passe-passe à rétablir la situation à son avantage.
On savait déjà que c’est dans l‘ADN des organes d’information de trafiquer, d’amoindrir certaines infos importantes et de donner un éclairage démesuré de ce qui n’est qu’accessoire, la manipulation de l’information est une constante de toutes les époques mais elle prend en France un tour dramatique avec la concentration des pouvoirs en un nombre restreint de mains toutes agitées du tremblement frénétique de la puissance financière a l’affût des journalistes hésitants ou récalcitrants, de ceux qui méritent tout simplement d’être appelés journalistes.
Les gilets jaunes drainent encore la sympathie d’une petite majorité de Français mais sont-ils encore réellement soutenus.
On sent bien ici et là que les « oui mais » commencent à polluer l’atmosphère : les gilets jaunes devraient selon ces beaux esprits en recherche de quiétude faire le ménage dans leur rang, c’est-à-dire éjecter ceux qui ne sont pas capables d’encaisser avec bonhomie, sans énervement, les charges subites des forces de l’ordre dont le comportement laisse parfois pantois.
Débonnaires et presque complices pendant des heures puis subitement prises de frénésie punitive sans qu’il y ait réellement eu un changement marqué d’attitude dans les rangs des manifestants dont je ne m’aventurerais pas non plus à prétendre qu’ils sont tous bon enfant.
Néanmoins on ne me fera pas croire que ces mutations soudaines de comportement que rien ne laissait présager ne sont pas téléguidées par les autorités, en l’occurrence le Ministère de l’Intérieur puisque c’est lui qui est en définitive à la commande du service d’ordre.
Loin de moi l’idée qu’il n’y eût point eu de dérapages violents de gilets jaunes dans certains endroits, je veux même bien les admettre inadmissibles dans un état de droit.
Mais je les soutiens compréhensibles tant ils témoignent de la souffrance longtemps cachée d’une partie de la population, celle sur laquelle Hollande ironisait en les appelant des « sans dents » et où ne sont effectivement pas rares ces miséreux qui faute de moyens manquent de « tabourets dans la gargote »
Les gueux ont rarement des réactions d’aristocrates quand ils se sentent provoqués.
D’ailleurs même les aristos dans de telles occurrences perdent le contrôle de leurs nerfs.
Les meilleures gens du monde devraient être prises de colère devant l’injustice et par quel miracle ceux-là qui ont été habitués à subir sans réagir se retrouvent-ils ensemble autour des ronds points où ils prennent conscience de leur force collective ? On ne va pas non plus leur tenir excessive rigueur de parfois en mésuser, eux qui furent accoutumés à encaisser les pires avanies sans oser se plaindre.
Philosophiquement et juridiquement la violence n'est pas que physique, d'ailleurs cette dernière se surmonte plus ou moins facilement ( pour autant qu'elle ne tourne pas au dommage irréversible ) mais elle est aussi morale voire éthique comme quand on la subit forcé de se débrouiller avec quelques centaines d'Euros par mois pour survivre chichement et être souvent dans l'impossibilité de se chauffer.
Le sort indigne de ces millions d’infra-salariés ne suscite pas de longs développements dans les médias beaucoup moins en tout cas que les frasques des grands de ce monde.
On s’intéressera au menu gastronomique et à la gabegie alimentaire ou vestimentaire des grands évènements du « Gotha », on ne s’intéressera que fort peu ou alors de manière détournée à la maigre pitance de « Jojo » le gilet jaune auquel, selon Macron, les Médias accorderaient pourtant le même statut qu’un député ou un ministre, bref trop d’importance !
Toujours est-il que le pouvoir en organisant ces débats a réussi à enfoncer un coin dans le mouvement des Gilets Jaunes :
- d’aucuns participent sans illusions ;
- peut-être d’autres y vont-ils croyant à leur force de conviction pour vaincre les préjugés et surtout les dures lois économiques auxquelles nos dirigeants ont prêté allégeance ;
- certains refusent d‘entrer dans la danse ;
- d’autres encore s’intègrent au système et envisagent de se présenter aux Élections européennes, la tentative la plus aboutie jusqu’ici ( et c’est très relatif puisque des dix premiers candidats deux ont déjà quitté l’esquif ) est celle de Madame Levavasseur qui a l’avantage d’être jolie et de bien s’exprimer même si manifestement elle n’a pas grand chose à dire qui pourrait faire l’ossature d’un programme.
Je ne pense pas que ces tentatives aboutiront mais en admettant qu’elles fussent plus ou moins fructueuses, elles ne feraient que renforcer le président Macron qui voit d’ores et déjà sa courbe de popularité reprendre des couleurs en profitant sans vergogne de médias qui surfent et nourrissent l’exaspération d’une partie de l’opinion publique intoxiquée par de faux semblants et chez ils cultivent en fait l’indifférence à la vérité.