mardi 3 avril 2018 - par

La grève au secours de la privatisation

Le paradigme du pouvoir a changé mais la majorité ne l'a pas encore compris et quand ce sera le cas, il sera trop tard....

 

En 1995 au moment des grandes grèves contre les lois Juppé il était encore en France, encore un petit peu national. Ce n'est plus le cas en 2018. En 2018, le vrai pouvoir est à Bruxelles et Luxembourg, sur les marchés financiers mais certainement plus aux mains des politiques. Le gouvernement d'Edouard Philippe et d'Emmanuel Macron derrière la comédie de l'Union Nationale n'est composé que de meilleurs employés du mois zélés et dociles aux injonctions européistes. Ce sont pour la plupart des cyniques, des opportunistes sachant très bien ce qu'il en est de leur rôle, de leur importance...

 

La logique voudrait que les manifestations et les conflits sociaux liés aux débrayages aient lieu dans un cadre plus large.

 

La grève donne des arguments à ceux qui veulent vendre ce qui reste de la SNCF déjà plus ou moins privatisée par petits bouts. Son pédégé Guillaume Pepy en dramatisant à outrance les grèves (voir à ce lien) prépare le terrain pour la suite. Et la gauche de la gauche en poussant à un affrontement dur ne fait que lui amener de l'eau à son moulin. ils sont les "idiots utiles" de l'ultralibéralisme bloqués dans des conceptions hors d'âge, complètement hors sol. L'image de la SNCF est déjà largement dégradée à cause de décisions d'une sottise sans nom, telle l'automatisation de tous les aiguillages en banlieue parisienne.

 

Qui la grève va-t-elle toucher le plus ? Les nantis ? Les riches ? Les décideurs ? La réponse va de soi même si elle n'est jamais réellement prononcée. Ce seront d'abord les précaires, tous ceux qui n'ont pas le choix, qui n'ont pas de "plan B", qui ne peuvent pas se permettre de rater une journée de travail. A cela les grévistes répondent qu'ils n'auraient pas le choix, qu'ils n'ont que cela pour se faire entendre.

 

Ce qui est faux.

 

Ils pourraient faire une grève de "la pince", une grève des contrôles, un mois de gratuité totale des transports. Non seulement leurs revendications seraient des plus populaires, les usagers n'ayant pas le choix ne seraient pas gênés, mais la direction serait là réellement mise au pied du mur. Alors pourquoi ne le font-ils pas ?

 

Parce que dans une société éclatée comme la nôtre, aussi atomisée, ils sont eux aussi dans le "moi d'abord", ne se souciant pas une seconde des conséquences pour les autres, ne se situant que dans des revendications très catégorielles voire corporatistes sous prétexte de défendre le Service Public dont ils n'ont que faire....

 

Certes me rétorquera-t-on pendant les grèves de 1995 les personnes bloquées dans les transports avaient recommencé à se parler. Du lien s'était -un peu- recréé une fois que tout était revenu à la normale. En 2018, cela n'arrivera pas, on le sait bien, chacun étant rivé à son écran, dans la terreur panique de croiser le regard du prochain, du voisin. Hier soir, revenant de Rambouillet, j'ai vu les voyageurs déjà fébriles, prêts à en découdre pour monter les premiers dans une rame surchargée alors que la grève n'avait pas encore commencé. Cela promet ! Cela en dit long sur nous.

 

"Salauds de pauvres tiens".

 

Sic Transit Gloria Mundi, Amen

Amaury - Grandgil

 

illustration prise ici




Réagir