jeudi 2 mai 2019 - par La marmotte

« La poudrière des Balkans » va éclater en Europe

Les participants aux négociations sur le Kosovo, qui se sont achevés lundi dernier à Berlin, ne semblent s'accorder que sur un point, « La conversation a été difficile » : Aucune solution n'a été trouvée et il est peu probable qu'une d’elles apparaisse dans un avenir proche. Lors de la conférence de presse, le président serbe Alexander Vucic a déclaré avec philosophie que "les miracles ne se produisent pas", bien que par politesse, il ait remercié les organisateurs, Angela Merkel et Emmanuel Macron, pour cette opportunité. Le chef de la république du Kosovo, Hashim Thaci, a critiqué le niveau européen autour des négociations : Selon lui, Pristina s'attend à une plus grande participation des États-Unis dans ce processus.

Ainsi, le résultat de la réunion a provoqué des réactions violentes dans la région : Au cœur de l’Europe, en Allemagne, il a été clairement démontré que le format actuel de la résolution du Kosovo était dépassé.

Le dialogue entre Belgrade et Pristina, s’il est encore possible de l’appeler ainsi, est gelé après une série de mesures provocatrices prises par les dirigeants du Kosovo. Mais les partisans occidentaux de l’indépendance du Kosovo sont en réalité toujours aveuglés par la rhétorique des années 90 selon laquelle les Serbes sont toujours à blâmer pour tous les problèmes des Balkans ou n’ont tout simplement pas la volonté politique de prendre de véritables mesures susceptibles d’influencer Pristina et de faire en sorte que les négociations reviennent.

L'imposition d'un droit de 100% sur les importations de marchandises de Serbie au Kosovo a été obtenu par Pristina. Cette mesure combine la pression sur la minorité serbe vivant dans la province (en les privant de leurs besoins habituels) et une réorientation brutale de l’économie : Le commerce serbe subit illégalement et de manière déficitaire des pertes de plusieurs millions de dollars, tout en profitant des importateurs d’Albanie et de Macédoine du Nord. Les dirigeants du Kosovo ont un intérêt financier et ethnique. Mais il n’y a pas un mot sur la menace de sanctions ou d’autres mesures qui démontrent l’attitude de l’Europe face à cette situation monstrueuse.

Belgrade et Pristina ne peuvent s'accorder sur un autre point important, à savoir la constitution récente de leur propre armée au Kosovo, ainsi que la création de l'Association des municipalités serbes prévue par l'accord de Bruxelles de 2013. Pendant plus de cinq ans, Pristina ne peut satisfaire une seule des points essentiels de l’accord international signé d’elle-même, mais prend quelques mois plus tard une décision sur l’armée, en violation de la résolution 1244 des Nations Unies (sur l’état d’après-guerre dans la province).

 Il serait naïf d’affirmer qu’après la proclamation et la reconnaissance partielle du Kosovo, le Kosovo soit devenu un État indépendant responsable de ses décisions et de sa politique étrangère. Selon la Constitution du Kosovo, le commandant en chef de la KFOR (le contingent de l'OTAN) dispose du pouvoir politique et juridique le plus élevé.

En guise de confirmation par les médias, nous pouvons rappeler la reconnaissance par le Premier ministre du Kosovo, Ramush Haradinaya, que Pristina "ne mène pas de politique étrangère, mais appartient à un club dirigé par les États-Unis". Ainsi, si l'OTAN s'inquiétait réellement de la formation de l'armée ou s'efforçait de respecter le traité de Pristina de Bruxelles, il ne serait pas difficile de faire pression sur cet État. Mais dans l’alliance, évidemment, comme dans l’UE, ils n’ont pas l’intention de résoudre les vrais problèmes de la région en litige, y compris les problèmes de sécurité. Un petit lambeau de territoire est gardé par toutes les forces de maintien de la paix et observateurs internationaux : l'ONU, l'OTAN, l'UE (mission EULEX), et cette terre est toujours, pardon, la « poudrière des Balkans ».

Il n'y a pas d'unité dans la communauté internationale sur le problème des Balkans, a reconnu l'ancien ambassadeur américain à Belgrade, William Montgomery, dans un commentaire à l'agence serbe Tanyug.

« Pendant des décennies, on a parlé de projets réussis en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo. Il est difficile pour l’Occident de reconnaître qu'ils ont échoué », a déclaré un diplomate américain.

Il est dangereux que son erreur ne soit pas simplement une expérience de laboratoire ratée pouvant être isolée ou jetée à la poubelle de l’histoire récente. La question du Kosovo est la pierre angulaire de la politique et de la sécurité au sein des Balkans. Ce sujet est essentiel pour les relations de la Serbie avec la communauté mondiale dans son ensemble et en matière d’intégration européenne en particulier, et les accords entre Belgrade et Pristina toucheront nécessairement les exigences du facteur politique influent albanais du nord de la Macédoine, du Monténégro, de la Serbie centrale et même de la Grèce, pays membre de l’Union européenne. Le Kosovo est l’une des voies de circulation des migrants à travers les Balkans et, selon des experts, au moins cinq camps d’entraînement des militants de l'État islamique se trouvent sur un territoire conflictuel, au statut juridique international peu clair ...
 

Par : Richard Morrison

Source : https://blogs.mediapart.fr/matberg-kate/blog/010519/balkans-powder-keg-will-crash-out-europe



8 réactions


  • MagicBuster 2 mai 2019 11:53

    La vraie question : Faut-il laisser de la place à l’islam hors des dictatures islamiques ?

    La réponse est 1000 fois NON.

    Question suivante ....


  • Rantanplan Chantecler 2 mai 2019 12:07

    L’incapacité de l’UE à agir est le reflet de sa polarisation interne. La montée en puissance des mouvements anti-immigration amène les principaux dirigeants à prendre position sur la question de l’élargissement. Ils craignent que ces mouvements d’opposition à leur politique ultralibérale ne profitent de l’adhésion de nouveaux membres des Balkans occidentaux plus pauvres pour attiser les craintes du public quant à une nouvelle vague de migration et leur permette de réaliser de nouveaux gains électoraux.

    Déjà, à la mi-avril, le parlement néerlandais a voté en faveur de l’abrogation du régime de circulation sans visa en Albanie, en place depuis 2010, une décision qui reflète l’attitude défensive qui paralyse la politique balkanique de Bruxelles. Le Kosovo en fournit une illustration flagrante. Bien que toutes les conditions techniques soient remplies, ses citoyens se voient toujours refuser l’accès sans visa dans les pays de l’espace Schengen, ce qui limite l’influence des institutions de l’UE sur le pays et rend méfiants les dirigeants politiciens kosovars.

    En fait, personne ne s’attend à ce que l’UE accueille prochainement les six états des Balkans occidentaux (Macédoine du Nord, Albanie, Kosovo, Bosnie-Herzégovine, Monténégro et Serbie).

    Si la Macédoine du Nord ou l’Albanie passaient à l’étape suivante, elles seraient encore davantage soumises à la pression de l’UE, entreprendraient les réformes nécessaires et les mettraient en œuvre avec succès.

    Paradoxalement, cela affecterait la cohésion interne de l’UE, ce qui préoccupe apparemment Macron et Merkel dans leurs calculs électoralistes.


    • baldis30 3 mai 2019 09:25

      @Chantecler

      bonjour,
       dès que l’Europe se mêle de quelque chose cela merde lamentablement et c’est encore aggravé lorsqu’en plus la merdekel et le macaron en rajoutent une couche !


  • filo... 2 mai 2019 23:35

    Votre président Macron a si ben « réussi » a créer en France un paradis sur terre. Les manifestations « d’approbation et de soutiens » les prouvent tous les samedi depuis pus de 6 mois.

    Et maintenant, soudain il a envie pressant de régler les problèmes entre serbes et les albanais de Kosovo. Ces mêmes problèmes que la France, l’Allemagne et les autres pays occidentaux les ont crées. Les pompier pyromanes, en somme.

    Pitoyable de voir les dirigeants français et certains de vos concitoyens n’arrivant pas a se débarrasser de leurs esprit colonial et qui continuent à cultiver néocolonialisme.

    Pauvre France qui n’a toujours pas compris qu’elle n’est même pas l’ombre de ce qu’elle a été. Et qui ne sera plus jamais.

    La roue tourne pour tout le monde. Ce qui a été en haut viendra en bas. Occident a détruit la Yougoslavie mais n’a pas réussi à éviter ce qui est inévitable ; sa chute. Il a tout au plus prolongé quelque peu les échéances.

    Mais les yougoslaves auront leur revanche. Ça c’est sûre et certain !


    • baldis30 3 mai 2019 09:38

      @filo...
      bonjour,
       totalement d’accord !
      L’occident a cru profiter de la faiblesse de l’URSS, ...
      Hélas l’URSS de Gorbatchev vécut, la Russie de Poutine parait bien vivante ...


  • J.MAY MAIBORODA 3 mai 2019 07:40

    Les Balkans ont fait l’objet, historiquement parlant, d’une compétition séculaire 

    entre 3 impérialismes : Angleterre, France, Russie des Tsars, cette dernière s’étant d’ailleurs toujours considérée comme la protectrice naturelle des Serbes (orthodoxes et Slaves). Rappelons à ce propos que le terme Yougoslavie signifie « Slaves du sud ».

    Les origines de la guerre 14-18 se situent en partie, rappelons le, dans le désir de la Russie de s’opposer à la main-mise de l’Empire Austro-hongrois sur la Serbie.

    Depuis la fin de la première guerre mondiale, qui a vu l’émergence de l’Empire américain sur la scène mondiale et européenne, et surtout depuis la dislocation de la Yougoslavie (organisée par l’OTAN), les États-Unis ont cherché à « contrôler » la zone des Balkans à la fois dans une perspective géostratégique et dans celle de s’assurer la maîtrise des voies d’acheminement du pétrole. C’est l’une des raisons qui les ont poussés (docilement suivis par leurs alliés Anglais et Français) à détacher le Kosovo de la Serbie.

    Quant à l’Allemagne, qui a supplanté dès la 1ère guerre mondiale l’empire Austro-Hongrois aujourd’hui défunt, elle a traditionnellement été l’alliée de la Turquie, elle-même protectrice naturelle des musulmans balkaniques.

    D’où l’imbroglio actuel.


    • Abou Antoun Abou Antoun 5 mai 2019 10:31

      @MAIBORODA
      Oui l’histoire explique tout, il faut la connaître et la rappeler à ceux qui l’ignorent comme la plupart des politiciens actuels. Ce sont bien les Slovènes, suivis des Croates qui ont déclenché la guerre de sécession de la Yougo, encouragés par l’Allemagne et l’OTAN. Or ce sont justement ces ’contrées’ converties au catholicisme qui étaient sous influence de l’empire austro-hongrois puis de l’Allemagne. Les Oustachis ne sont pas morts, pas plus que les milices nazies des pays baltes ou les Bandéristes de l’Ukraine, qui paradent aujourd’hui dans les rues.


    • J.MAY MAIBORODA 5 mai 2019 20:30

      @Abou Antoun

      Tout à fait d’accord avec votre complément d’info.

      Cordialement.


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