La première guerre hybride mondiale à un stade avancé requiert un changement doctrinal, humain, économique et stratégique fondamental
L’éducation des frissons n’est pas bien faite dans ce pays. Nous ignorons les vraies règles et quand l’événement apparaît, nous sommes pris(e)s au dépourvu.
Henri Michaux, “Je vous écris d’un pays lointain”. Plume, précédé de Lointain intérieur, 1938.
Ce n'est pas tant que nous ignorions les vraies règles mais plutôt que ceux qui devraient les connaître les trouvent gênantes ou n'en ont plus aucune idée, ou les ont toujours méconnues, au point de s'affranchir de celles qui existent et de préférer en édicter d'autres.
Comme l'analyse l'excellent magazine Strategika, « premier site consacré à la première guerre hybride mondiale à un stade avancé », dans un article intitulé "Réarmement allemand et opportunisme français, une équation contradictoire", que nous citons ici, l’Allemagne a dévoilé cette semaine des plans historiques d’investissement dans son armée et ses infrastructures militaires. Il s’agit sans le moindre doute de la plus grande relance économique du pays depuis la réunification allemande en 1990. Ce réarmement pourrait faire revenir la vocation première de l’Allemagne en tant que principale puissance militaire de l’Europe et …marquer le leadership politique et économique dont l’UE manque cruellement en 2025.
/On propose ci-après - c'est moi qui parle-, un panorama d'une situation dont tous les éléments, particulièrement instables, bougent et se recomposent en permanence comme le font les images d'un kaléidoscope, obligeant à une plasticité des points de vue, des faits et des analyses avec, en toile de fond, des invariants dont l'importance ne cesse de s'accentuer.
Si le réarmement de l’Allemagne entre 1918 et 1938 fut plus ou moins secret et mené en violation du Traité de Versailles, il n’en a pas été moins financé par des parties extérieures.
Le réarmement de l’Allemagne est un phénomène historique cyclique à intervalle variable mais régulier. Il s’inscrit dans un déterminisme historique en dépit de tous les efforts fournis par des pays tiers pour éviter cette éventualité. Cette relance allemande est désormais perçue comme une nécessité par de nombreux cercles allemands après un début de désindustrialisation, les pertes liées à la guerre en Ukraine mais par dessus tout pour contrer les velléités de la France de s’imposer comme le chef de file en Europe avec le soutien des écologistes et de la gauche allemande.
Or, cette velléité est fort mal perçue par la droite allemande, laquelle considère la France comme un pays ayant profité du rapport de force post-1945 et le désarmement de l’Allemagne pour piller les industries militaires allemandes puis bâtir une dissuasion nucléaire parce que l’Allemagne s’est retrouvée dans l’interdiction de le faire.
Dans ce contexte précis, la proposition du parapluie nucléaire français pour l’Europe ne passe pas du tout au sein de certains cercles allemands. Cette initiative est perçue à la fois comme un opportunisme et une imposture. Pour certains cercles allemands, l’Allemagne, l’un des premiers pays ayant failli avoir l’arme atomique dès les années 1936-1944, n’a nullement besoin d’un tel parapluie du moment où la décision d’avoir une dissuasion nucléaire ne repose que sur une simple volonté politique.
Après 1945, l’Allemagne en ruine fut encouragée à se réarmer dès les années 1950 par les États-Unis d’Amérique dans un contexte de guerre froide et plus particulièrement après la guerre de Corée pour contrer la menace soviétique et le Pacte de Varsovie.
Ce réarmement limité fut mal vu par certains pays européens. C’est encore une fois Washington qui encourage l’Allemagne à se réarmer en 2025 dans un contexte lié à la guerre en Ukraine et l’impossibilité d’infliger une défaite stratégique à la Russie en dépit des efforts colossaux et conjugués de l’ensemble de l’Alliance occidentale.
Le jeu de pouvoirs à l’intérieur des États-Unis a abouti à une configuration exigeant la fin du conflit en Ukraine via des négociations de paix. Une éventualité rejetée de manière obsessionnelle par certains régimes européens enlisés et ayant subi des pertes substantielles dans ce conflit. C’est dans ce contexte que les possédants réels des médias européens de propagande de masse ont construit la thèse du doute sur la fiabilité du protecteur américain, jugé coupable de collusion improbable avec la Russie.
La suggestion d’une alternative fut le moment clé de l’opportunisme affiché sans surprise par le régime français au nom d’une défense européenne autonome mais cachant à peine une vieille velléité de leadership européen que ni les Britanniques, ni les Allemands et encore moins les pays d’Europe de l’Est dont la puissance militaire ne cesse de croître ne sont prêts d’admettre.
Pour les États-Unis, l’équation est encore plus simple et plus stratégique : en permettant une montée en force d’une “nouvelle Prusse” en Europe, ils laisseront les choses se faire naturellement avant de voir s’il y a lieu de cibler celui qui sera le plus fort ou pas.
Cette approche darwinienne préconisée jusque là par de sombres théoriciens marginaux pourrait en effet être assez pragmatique pour Washington au cas où l’Eurocratie voudrait un jour secouer le joug de l’ordre mondial établi.
Le rétablissement risque d'être particulièrement difficile surtout si l'on s'en tient au constat actuel de forces armées qui sont littéralement « à l'os ».
On rajoutera à ce constat l'absence de doctrine militaire, un patriotisme qui pour toute une population n'est qu'une vague idée sans consistance, et, pour tout dire, une absence complète d'engagement, d'entraînement comme de culture diplomatique et militaire sérieux.
La première des actions à mener devrait se traduire par un changement et un renouvellement complet des personnels politiques, industriels, financiers et militaires.
Nous avons affaire en effet à des gens qui sont parfaitement ignorants de l'histoire, de l'économie et encore plus de l'histoire économique comme de la stratégie économique, surtout en temps de guerre.
Nous nous heurtons à des gens qui s'essayent à des concepts , des pratiques, des usages dont ils ignorent tout, notamment en matière de diplomatie, de guerre, de guerre économique et par-dessus tout d'économie de guerre.
Des concepts pourtant particulièrement précis, subtils et exigeants dans leur énonciation comme dans leur intelligence et leur mise en oeuvre, surtout lorsqu'ils forment la concaténation précitée.
Des gens qui découvrent que la réalisation de leur projet suppose un financement autrement plus intelligent que la mise en coupe (dé)réglée et brouillonne d'une population de près de 500 millions d'habitants invités, sinon fortement contraints, à participer très prochainement à une opération de mobilisation de leur épargne sous forme de pillage.
Une population qui s'est dotée de pseudo dirigeants politiques qui en sont encore mentalement restés à l'imagerie des affiches promouvant l'Epargne, l'Effort de guerre, sous forme d'injonctions matinées de « patriotisme » et de « On les aura ! ». Autant dire plus d'un siècle de retard.
Une population européenne de près de 500 millions d'habitants qui craint de ne plus pouvoir confier sa protection à un pays de 330 millions d'habitants que menacerait un autre pays de 140 millions d'habitants qui a du mal à en contraindre un autre de moins de 40 millions d'habitants dont la démographie est devenue critique.
Ce que Y. Yánis Varoufákis, économiste et ancien ministre des finance de la Grèce (Janvier à juillet 2015) désigne sous le nom de « keynésianisme militaire » est une erreur et constitue un choix de politique erroné. i
Nous voyons à l'oeuvre les artisans bellicistes d'un vrai désastre conceptuel et politique avant que de devenir pleinement un vrai désastre stratégique, économique, financier, industriel, géostratégique et pour tout dire...militaire.
Incapables qu'ils sont de définir une doctrine comme d'avoir la moindre intelligence des mots et des situations qu'ils qualifient de manière plus qu'imprudente en une rhétorique guerrière à laquelle ils ne comprennent rienii ces gens réunissent les tares jumelles de la nullité, de la médiocrité, en une véritable insulte à l'intelligence.iii
La conclusion immédiate s'impose d'elle-même :
Tout n'est pas à refaire. Tout est à faire.
Le retard est immense, comme on peut le réaliser en considérant les avances et percées technologiques partout ailleurs , dans tous les domaines qui révèlent la guerre moderne :
https://strategika510.com/2025/03/06/lia-joue-un-role-cle-dans-les-alternatives-au-gps/
https://strategika510.com/2025/03/10/starlink-grande-revelation-de-la-guerre-en-ukraine/
https://strategika510.com/2025/01/26/lere-des-guerres-ennuyeuses/
https://strategika510.com/2025/02/17/retour-aux-fondamentaux-les-etats-unis-vs-la-russie/
Toujours Strategika, dans un « Retour aux Fondamentaux »,
Indubitablement, les États-Unis ont les capacités d’arrêter sur le champ la guerre en Ukraine. Les européistes ont plongé tête la première dans une bataille par sectarisme idéologique tandis que Washington, infiniment plus pragmatique, manipulait un ensemble de pions pour faire avancer ses intérêts géostratégiques propres. Au passage, l’Europe se retrouve désormais dans le rôle très peu enviable de partisan de la guerre dans un contraste saisissant et “recherché” avec la posture d’un Trump partisan de l’arrêt de toutes les guerres. Les européistes ont beau critiquer Trump pour son manque de connaissances historiques ou pour son penchant pour la téléréalité. Cet homme vient de les balayer à droite et gauche, de haut en bas avant de les livrer en pâture à l’histoire.
Les temps changent : le complexe militaro-industriel US est devenu partisan de la paix et de la colombe blanche tandis que les européistes se découvrent les héritiers du National-Socialisme tel que rêvé par les idéologues d’un Reich qui devait perdurer 1000 ans et dont la posture est désormais celle des pires bellicistes de l’histoire contemporaine. Le coup de Trump est d’avoir réussi avec une économie de moyens remarquable à faire paraître les États-Unis d’Amérique comme une puissance du bien dans le monde en dépit d’un passif fort controversé en matière de conflits depuis 1945. Cela ressemble à la Pax Americana à l’ère du digital. Il ne manque plus qu’un Captain America adapté à la période 2025-2035 et le monde aura enfin de véritables super héros.
Fort heureusement l'actualité va vite et laisse paraître d'autres approches comme celle que donne l'excellent analyste Gordon M. Hahniv
La coalition transatlantique OTAN-Ukraine est en train de s'effondrer.
La principale force et soutien de l'OTAN, les États-Unis, ont abandonné la coalition.
Les États-Unis pourraient faire de même en ce qui concerne l'OTAN elle-même.
Ainsi, l'Europe s'oppose-t-elle à la nouvelle administration américaine du président Donald S. Trump qui souhaite un rapprochement avec la Russie et une fin de la guerre OTAN-Russie-Ukraine ; guerre qui a pour origine de l'expansion de l'OTAN et d'autres empiètements sur les intérêts de sécurité nationale russes en Ukraine et autour.
Pendant ce temps, le président ukrainien Volodomyr Zelensky cherche à militariser une Europe faible afin de remplacer le soutien américain en déclin.
La tendance est à la dissolution entre et au sein de toutes ou du moins de la plupart des forces impliquées dans la guerre OTAN-Russie-Ukraine, apportant le chaos, l'incertitude, les erreurs de calcul et le risque d'une guerre plus vaste, plus destructrice et plus dégradante.
Le niveau international du conflit ukrainien est en train de passer d'une confrontation bilatérale entre l'Occident et la Russie à une confrontation trilatérale impliquant la Russie, les États-Unis et un nouvel axe euro-ukrainien, chacun étant déchiré par les divisions générées par la guerre civile froide intra-atlantique.
Cela soulève la question suivante : l'Europe deviendra-t-elle un pôle distinct dans la nouvelle structure multipolaire du système international, s'ajoutant au pôle américain et au pôle sino russe ?
Le chaos au centre de gravité : Kiev
La querelle historique sans précédent entre les dirigeants de prétendus alliés – le président américain Donald Trump et son vice-président JD Vance et le président ukrainien V.Zelensky – du 28 février 2025, semble sonner le glas de ce dernier, si ce n’est biologiquement, du moins politiquement.
Les responsables américains ont appelé à sa démission, et D.Trump a refusé toute nouvelle rencontre avec lui jusqu’à ce qu’il soit prêt à faire la paix dans des conditions de faiblesse sur le champ de bataille face à la Russie de Poutine et ses forces armées en progression.
Après l’accrochage public du 28 février au Bureau ovale, Trump a suggéré que Zelensky ne serait pas « là très longtemps » s’il refusait de négocier avec Moscou et de mettre fin à la guerre.
Mais attention à ce que vous souhaitez. Malgré la position affaiblie de Zelensky sur le plan national et international, ce président partiellement illégitime pourrait bien être le dernier ou l’avant-dernier pilier survivant du régime de Maïdan et de l’État ukrainien. Malgré tout son narcissisme, son égoïsme, sa corruption et son autoritarisme croissant, Zelensky maintient actuellement l’élite ukrainienne unie et il est le visage de l’Ukraine à l’étranger, toujours apprécié en Europe. Il reste une figure qui satisfait au minimum toutes les différentes factions de la politique ukrainienne et est capable de contenir les éléments de l’opposition, dont il a émasculé la plupart en interdisant des partis et des médias et en forçant leurs dirigeants à l’exil ou en les arrêtant (par exemple, l’ancien président Petro Porochenko et Viktor Medvedchuk).
Pour ces raisons et peut-être pour d’autres, Vladimir Poutine lui-même a pris grand soin de ne pas chercher à destituer Zelensky ni de le rejeter fermement et définitivement comme partenaire potentiel de négociation.
Malgré la propagande ukrainienne selon laquelle Poutine a cherché à assassiner Zelensky, le fait est que s’il avait voulu éliminer Zelensky de la scène physiquement ou politiquement, il l’aurait déjà fait. Il suffit de se rappeler l’épisode de 2023 au cours duquel le cortège de Zelensky a été suivi par un drone russe lors d’un voyage à Odessa et aurait pu déclencher une attaque contre lui. Il y a eu de nombreuses occasions de se débarrasser de Zelensky, étant donné son penchant pour les démonstrations de bravoure, les visites au front et les événements médiatiques en plein air organisés à Kiev.
Bien que Poutine ait qualifié Zelensky de président illégitime, compte tenu de la fin du mandat présidentiel ukrainien l’année dernière, le président russe n’a jamais dit qu’il ne négocierait pas avec Zelensky. Il a récemment admis la possibilité d’une participation de Zelensky aux négociations de paix, remettant en question uniquement le statut juridique de la signature d’un traité de paix par un président dont le mandat a expiré.
Il y a des raisons de croire que Poutine a laissé Zelensky en vie et laissé ouverte la possibilité de sa participation aux négociations parce qu’il comprend intuitivement que le maintien au pouvoir de Zelensky est le moyen le plus simple et le plus fiable de garantir que l’Ukraine ne sombre pas dans le chaos alors que la Russie poursuit ses offensives, laissant à la Russie un désordre beaucoup plus grand et plus sale à nettoyer après la victoire probable de Moscou.
En bref, la Russie a besoin de la capitulation de l’Ukraine, pas de son effondrement dans le chaos.
Le seul autre personnage ukrainien, outre Zelensky, sur lequel il serait raisonnable de compter, ou dont on pourrait espérer qu’il soit capable, de maintenir le régime et l’État ukrainiens ensemble grâce à un processus de négociation largement capitulatif et à la fin de la guerre, est l’ambassadeur d’Ukraine à Londres et ancien commandant des forces armées ukrainiennes, le général Valeriy Zaluzhniy. Licencié par Zelensky, Zaluzhniy a été envoyé à Londres par Zelensky de peur que son commandant n’organise, ou ne devienne le point focal, d’un mouvement d’opposition contre le maintien de Zelensky à la présidence. La seule autre personnalité politique ukrainienne plus populaire que Zelensky est le directeur de l’administration du renseignement militaire (HUR), Kyryll Budanov, mais il est bien moins populaire que Zaluzhniy
Zaluzhniy est populaire non seulement dans le grand public mais aussi parmi les soldats ukrainiens et a des liens avec la puissante aile ultranationaliste et néofasciste de la politique ukrainienne. Les connexions de Zaluzhniy sont démontrées par le fait qu'il a embauché Dmitr(o)y Yarosh comme conseiller lorsqu'il était à la tête des forces armées ukrainiennes. Yarosh est le chef fondateur du célèbre « Pravyi Sektor » ou Secteur droit (RS). Zaluzhniy a posé avec Yarosh, diverses personnalités du Secteur droit, y compris le commandant de l'aile militaire de la RS, le Corps des volontaires ukrainiens (DUK), maintenant incorporé dans l'armée, avec des photos comprenant le drapeau rouge et noir de la RS sur le modèle de l'Organisation des nationalistes ukrainiens néofascistes de la Seconde Guerre mondiale (OUN) et de l'Armée des partisans ukrainiens (UPA),.
En termes de négociations de paix, Zaluzhniy serait peut-être plus contraint et moins enclin à engager des pourparlers avec Poutine.
Budanov, l'homme de la CIA en Ukraine, a également des liens avec les néofascistes ukrainiens, ayant travaillé avec eux par l'intermédiaire de la HUR et des néofascistes russes opposés au régime de Poutine. D'autres candidats sont donc recherchés, comme le montrent les récents rapports sur la rencontre des alliés de Trump avec Timochenko. Cependant, sa capacité à maintenir le cap est limitée. Elle n'est plus populaire, est compromise par un précédent accord gazier avec la Russie de Poutine, est corrompue et a de nombreux ennemis, y compris les néofascistes.
Trois faits témoignent de la possibilité d’une destitution de Volodymyr Zelensky, même par un coup d’État orchestré par Washington :
-la déclaration de Trump selon laquelle Volodymyr Zelensky doit partir s’il refuse les pourparlers de paix,
-le fait qu’il pousse Volodymyr Zelensky à organiser des élections présidentielles et
-les rapports selon lesquels des responsables de Trump ont rencontré des représentants de l’opposition ukrainienne, dont l’ancienne Première ministre Ioulia Timochenko et les dirigeants du parti Solidarité européenne de l’ancien président ukrainien Petro Porochenko
Malheureusement, Trump pourrait ne pas être mis au courant d' un coup d’État qui pourrait être encouragé par ceux qui dirigent des opérations secrètes. Non seulement la CIA pourrait mettre en œuvre n’importe quel ordre qu’il émettrait afin d’atteindre les objectifs alternatifs de l’État profond, mais la CIA pourrait devancer la Maison Blanche en organisant sa propre opération de coup d’État, peut-être dirigée par Boudanov et incluant les forces dont il dispose en tant que chef de la HUR, mais aussi les nombreuses unités militaires mécontentes de Zelensky et de son utilisation de la guerre à des fins politiques personnelles .
Si la CIA favorise un régime ukrainien véritablement néofasciste pour remplacer le régime partiellement néofasciste de Maïdan, alors la guerre pourrait être prolongée par ces éléments extrémistes pendant un certain temps, en particulier si l’Europe anti-Trump leur fournit des armes, sans parler des troupes.
Une telle évolution sèmerait également la méfiance entre Trump et Poutine, contribuant peut-être à faire échouer le rapprochement américano-russe. C’est précisément ce que souhaite la faction mondialiste-wokiste en Occident.
L'Ukraine se sépare des États-Unis et est divisée en elle-même. Le chaos qui en résulte a conduit l'Ukraine à tenter de se réaligner sous un parapluie européen, que Zelensky encourage à former, mais qui est aussi divisé que l'Ukraine en elle-même et dans ses relations avec Washington.
Schisme de l'Atlantique
Avec le retour de Trump à la Maison Blanche et ses politiques transformatrices qui sapent le mondialisme et le wokisme, la guerre civile froide américaine a explosé sur la scène européenne, engouffrant la communauté atlantique dans une guerre civile froide entre les mondialistes et les conservateurs nationaux.
Ainsi, l’opposition de l’UE au rapprochement de Trump avec Moscou et à la poursuite de la paix en Ukraine fait en réalité partie de cette lutte de pouvoir « domestique » ou interne à la communauté atlantique entre le wokisme mondial et le « populisme », c’est-à-dire la réaction patriotique du conservatisme populaire contre l’attaque contre la souveraineté et le républicanisme représentée par le wokisme mondial.
De même que la politique étrangère américaine a tendance à se transformer en un « ballon politique » intérieur américain ou en une sorte d’instrument politique plutôt qu’en un domaine distinct d’intérêt national à considérer en soi, les Européens et la faction mondiale éveillée de Kiev, représentée par Zelensky, utilisent leur opposition aux négociations avec Poutine pour saper toute la réputation politique de Trump et les aspects anti-mondialistes et anti-wokistes de son programme : anti-immigration illégale, tarifs douaniers contre le libre-échange, anti-Green Deal, anti-COVID et pro-liberté d’expression, entre autres.
Cette guerre civile froide fait rage au sein même de l'Europe.
En ce qui concerne le soutien de l'UE à la guerre OTAN-Russie en Ukraine et la prolongation de la guerre en Ukraine aussi longtemps qu'il le faudra pour assurer une défaite stratégique de Moscou, des pays comme la Hongrie, la Slovaquie, la Serbie et, plus récemment, la Croatie, ont adopté la position de dissidents.
Dans une certaine mesure, l'Allemagne et l'Italie ont exprimé et démontré des réserves.
D'autres pays, comme la Roumanie, connaissent leur propre guerre civile froide, comme en témoigne l'annulation des élections par crainte qu'un dissident (anti-UE) ne soit élu président de Bucarest, ce qui provoquerait une polarisation et des manifestations de masse.
De la même manière, le Premier ministre conservateur et anti-guerre de Slovaquie, Robert Fico, a affirmé que l'Occident cherchait à organiser une « révolution de couleur » contre lui (www.interpressnews.ge/en/article/137071-robert-fico-there-are-plans-aimed-at-overthrowing-the-government-there-is-a-group-of-experts-in-slovakia-who-were-involved-in-the-events-in-georgia-and-also-participated-in-ukraines-maidan/ ; https://t.me/stranaua/183655 ).
Fin janvier, les ONG à l'origine des manifestations antigouvernementales étaient liées à l'USAID et à George Soros, mais aussi à la Légion géorgienne, un bataillon de volontaires des forces armées ukrainiennes. Fico a même envoyé une lettre au président du DOGE, Elon Musk, demandant des informations sur les ONG du pays liées à l'USAID (www.hungarianconservative.com/articles/politics/serbian-parliament-chaos-color-revolution-aleksandar-vucic-viktor-orban-usaid/).
Désunion au sein de l'OTAN
Les dirigeants occidentaux, de Joe Biden aux secrétaires généraux de l’OTAN, ont affirmé que l’invasion « non provoquée » de l’Ukraine par la Russie avait eu l’effet inverse : au lieu d’arrêter l’expansion de l’OTAN comme le souhaitait Poutine, elle l’a étendue à la Suède et à la Finlande, voisine de la Russie. « La grave erreur de calcul de Poutine a renforcé l’OTAN comme jamais auparavant », ont-ils déclaré, tout comme son erreur de calcul sur l’Ukraine a conduit à la « victoire de l’Ukraine » et à la « défaite stratégique » de la Russie.
Nous savons maintenant que c’est l’OTAN qui est en train de s’affaiblir. Les divisions en Europe au sujet de la guerre mentionnée ci-dessus ne sont qu’une partie de ce tableau.
De nombreux publics occidentaux, et notamment américains, se sont retournés contre le soutien de leur pays au rejet par l’OTAN et l’Ukraine de l’accord de paix russo-ukrainien de mars 2022 et à la guerre avec la Russie en Ukraine.
Le vote anti-guerre a contribué à ramener l’ancien président Trump au Bureau ovale avec une majorité républicaine dans les deux chambres. Le rapprochement ultérieur de l’administration Trump avec la Russie et les initiatives de paix ukrainiennes ont ouvert un schisme au sein de l’OTAN qui se développait depuis le début de la guerre.
La Hongrie, la Slovaquie, la Serbie et la Croatie sont enhardies dans leur résistance à la poursuite de la guerre, tandis que le Royaume-Uni et la France s’opposent au rapprochement et aux politiques de paix de Trump en adoptant une posture militaire qui cherche à détourner des fonds massifs vers le développement de la défense et la production d’armes et à insérer les troupes des pays de l’OTAN comme « gardiens de la paix » d’une « coalition de volontaires » afin d’attirer l’OTAN dans la guerre directement avec des bottes sur le terrain.
Trump n’a pas succombé à cette dernière conspiration et a refusé de soutenir les forces européennes envoyées en Ukraine.
Les Européens de l’Ouest – le président français Emmanuel Macron, le Premier ministre britannique Kier Starmer et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen – se disputent le titre de leader de l’Europe et rivalisent avec Trump en tant que « leader du monde libre », le Churchill du XXIe siècle.
Leur coalition de volontaires prévoit d’envoyer des soldats de la paix en Ukraine immédiatement après la signature d’un accord de paix, mais les Russes n’accepteront pas de soldats de la paix européens, soupçonnant à juste titre qu’ils ne seront qu’un cheval de Troie pour le déploiement de troupes de l’OTAN en Ukraine pour combattre les Russes et ils les considéreront comme des combattants légalement ciblables.
De plus, aucun accord parrainé par les États-Unis entre la Russie et l’Ukraine ne contiendra un tel point.
L’intention est donc de fournir une couverture pour des livraisons massives d’armes, que l’Europe ne peut de toute façon pas rassembler, afin de permettre à Kiev de relancer la guerre dans le futur, peut-être dans quatre ans, lorsqu’un président américain plus conciliant occupera le Bureau ovale.
Avec des troupes européennes impliquées , l’OTAN et les États-Unis peuvent être contraints de se lancer dans la bataille.
Le seul réalisme en jeu ici est de comprendre que la seule façon de vaincre la Russie en Ukraine est que l’OTAN entre directement en guerre et que tous les pays de l’OTAN passent en position de guerre.
Cela nécessiterait un passage à une économie de guerre et à une conscription militaire que la culture européenne ne peut plus accepter, en particulier face à une menace russe clairement conjurée.
Le programme « ReArm » Europe annoncé par Von der Leyen à lui seul détournerait des centaines de milliards d’euros vers les dépenses de défense
(vidéo : https://x.com/Editorialz/status/1896942384610738408 ).
L’illusion est totale quand on considère le manque de base industrielle de l’Europe ( https://ctrana.one/news/475679-pistorius-sravnil-proizvodstvo-oruzhija-v-evrosojuze-i-rossii.html ).
Etant donné la culture européenne et le triste état de son économie, une telle politique militariste entraînerait d'une manière ou d'une autre la chute de tous les gouvernements d'Europe occidentale et de nombreux gouvernements d'Europe de l'Est et déclencherait un mouvement anti-OTAN qui condamnerait l'alliance.
Les nouveaux militaristes de la communauté transatlantique (sans les États-Unis de Trump) sont maintenant allés si loin dans leur opposition aux républicains nationaux de la communauté dirigés par Trump que la candidate au poste de premier ministre canadien, Chrystia Freeland, dont le grand-père était membre de l'Organisation des nationalistes ukrainiens pronazie, néofasciste et antisémite, a suggéré que le parapluie nucléaire britannique soit utilisé au Canada pour se défendre contre l'Amérique de Trump ! (www.telegraph.co.uk/us/politics/2025/03/03/british-nuclear-weapons-canada-trump-chrystia-freeland/)
Pendant ce temps, les parlementaires européens comparent Trump à Hitler et le qualifient de « traître » (vidéo : http://www.facebook.com/750725919/videos/a.10161022662500920/653726307185455 ).
La politique transatlantique interne, les ambitions éhontées, les illusions de grandeur et la russophobie européenne traditionnelle rendent impossible toute approche réaliste proposée par les petits États d’Europe de l’Est, du moins pour le moment.
Pendant ce temps, Zelensky a profité du nouveau militarisme mondialiste-wokiste de l’Europe pour contrer l’accent mis par Trump sur les pourparlers avec la Russie, menés apparemment sans tenir compte de l’Ukraine, en opposant la position pro-Kiev de plus en plus forte de l’Europe à la « politique d’apaisement » de Trump. Ainsi, il a déclaré au Forum économique mondial en janvier que les États-Unis « ne se soucient plus de savoir si l’Union européenne sera leur alliée à l’avenir » et a proposé que 200 000 soldats européens de « maintien de la paix » soient déployés en Ukraine ( https://t.me/stranaua/183651 et https://t.me/stranaua/183682 ).
En fait, Trump n’a montré aucun intérêt, et s’est même moqué de l’idée d’inclure l’Europe dans ses pourparlers avec Poutine, passant également par-dessus la tête de Bruxelles.
Ainsi, Zelensky a déclaré au Forum économique mondial, qui n’aime pas Trump, que l’Europe doit être incluse dans toutes les négociations concernant un accord de paix sur l’Ukraine (vidéo : http://www.facebook.com/ivan.katchanovski/posts/pfbid02NDRS19ryTKhdEQ8YaZTEP2bfPHAtQUzAKx9cKNuK2uQ99bdj3ozmcDCnvKX3FF1sl ).
La nouvelle autonomie stratégique et militaire européenne et toute coalition antirusse Europe-Ukraine qui en découlerait conduiraient finalement au dysfonctionnement complet de l’OTAN et à sa dissolution. C’est donc la grave erreur de calcul de l’Occident qui, en misant sur une victoire facile sur « la faible Russie de Poutine », détruit l’OTAN.
/On notera à ce propos l'abîme d'imbécillité ouvert par le personnel politique qui entoure M. E. Macron.v
Tout cela se produit alors que la même erreur de calcul unifie le « reste » sous le BRICS+ contre ce qui était autrefois un Occident unifié.
/Un Occident unifié et prospère, ce qui n'est plus le cas désormais.
En dehors d’une paix conquise par la Russie, il existe deux voies principales pour mettre fin aux combats : soit par un cessez-le-feu d’abord, puis par des pourparlers de paix, soit, au contraire, seulement après que les négociations aient abouti à un accord de paix totale.
Ce dernier processus impliquera un délai plus long avant la cessation des hostilités et davantage de territoire ukrainien occupé par les forces russes. Rien ne garantit que Poutine acceptera de restituer les territoires que ses troupes occupent déjà au-delà de la Crimée et des quatre régions de l’Est.
/Ne rêvons pas.
Moscou a déjà intégré dans la constitution russe les parties constitutives de la fédération. Les forces russes occupent déjà certains territoires en dehors des cinq régions annexées et auront bientôt pris la totalité du territoire de ces cinq régions. Après cela, l’Ukraine devra faire davantage de concessions aux exigences russes dans des domaines autres que les questions territoriales, comme la démilitarisation et la « dénazification » (changement de régime) sur lesquelles Poutine a insisté.
Mais l’Occident, en dehors de l’administration Trump et des quelques États déjà mentionnés, n’a pas encore pris conscience de la réalité.
La Russie a gagné la guerre et elle continuera de gagner tant que l’Occident ne déclenchera pas une guerre européenne à grande échelle.
/Une guerre déjà perdue – et c'est moi qui parle -, qui signera alors la troisième tentative de suicide de l'Europe. Une tentative dont tout porte à croire qu'elle sera alors parfaitement réussie puisque ce sera la dernière, chose que les bellicistes europtel éens M. E. Macron semblent ne pas comprendre.
En continuant à chercher à vaincre stratégiquement la Russie au nom du mondialisme, du wokisme et de leur bras armé, l’OTAN, les « occidentaux » creusent toujours plus profondément le grand trou dans lequel ils se sont eux-mêmes jetés et, en cas de troisième guerre mondiale, ils pourraient bien creuser nos tombes à tous par la même occasion.
Car plus la guerre OTAN-Russie en Ukraine se prolonge, plus les risques d’erreurs de calcul, de cygnes noirs et autres de ce genre augmentent et font exploser le conflit ukrainien en un conflit européen.
Plus l’Europe résiste au rapprochement américain avec la Russie et aux efforts de paix en Ukraine, plus elle condamne le républicanisme occidental, la communauté transatlantique et l’alliance de l’OTAN – sans parler de l’État ukrainien.
/Mais dans le fond, et c'est moi qui parle, pourquoi continuer de s'accrocher à l'OTAN, modèle stratégique périmé à ranger désormais au magasin des accessoires comme l'ex-Pacte de varsovie ?
Il existe désormais un risque réel que la communauté transatlantique soit brisée en même temps que l’OTAN, mais que les États-Unis et peut-être plusieurs États européens d’un côté, et la majeure partie de l’UE de l’autre, deviennent des pôles concurrents ou antagonistes, ajoutant un nouveau pilier européen aux piliers dirigés par les États-Unis et la Chine et la Russie, créant ainsi une structure multipolaire plutôt que bipolaire composée de l’« Occident collectif » et du reste.
/A cette nuance près – une nuance cardinale – que pour le pilier européen précité et Français en particulier, le « paysage politique » devra être préalablement et rapidement complètement rénové comme le montre la récente Lettre ouverte adressée à M. E. Macron par l'ancien ministre Pierre Lellouche.
Lisez plutôt : https://pierrelellouche.fr/2025/03/lettre-ouverte-monsieur-le-president.html
Notes et Sources :
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ihttps://brunobertez.com/2025/03/11/lexpansion-militaire-de-leurope-dissoudrait-le-tissu-social-sans-garantir-la-securite-varoufakis/
ii À partir de quand peut-on considérer qu’un État est « en guerre » contre un autre ?The Conversation,12 mars 2024, 17:07 CET, https://theconversation.com/a-partir-de-quand-peut-on-considerer-quun-etat-est-en-guerre-contre-un-autre-225207
iiiAdresse aux Français, mercredi 5 mars 2025, https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2025/03/05/adresse-aux-francais-6
iv Gordon Hahn, The World Order’s Restructuring Intensifies as the Ukrainian War Implodes the West and Kiev, March 9, 2025, Russian & Eurasian Politics, https://gordonhahn.com/2025/03/09/the-world-orders-restructuring-intensifies-as-the-ukrainian-war-implodes-the-west-and-kiev/
vhttps://www.aa.com.tr/fr/monde/france-russie-jean-no%C3%ABl-barrot-ne-prendrait-pas-sergue%C3%AF-lavrov-au-t%C3%A9l%C3%A9phone/3484763
Gordon M. Hahn, https://gordonhahn.com/publications/ Le Dr Hahn a enseigné aux universités de Boston, American, Stanford, San Jose State et San Francisco State et en tant que boursier Fulbright à l'université d'État de Saint-Pétersbourg, en Russie. Il a également été associé principal et chercheur invité au Center for Strategic and International Studies, au Kennan Institute de Washington DC, à la Hoover Institution de l'université de Stanford et au Center for Terrorism and Intelligence Studies (CETIS), Akribis Group.
Bibliographie :
Russian Tselostnost' : Wholeness in Russian Thought, Culture, History, and Politics (Europe Books, 2022).
The Russian Dilemma : Security, Vigilance, and Relations with the West from Ivan III to Putin (McFarland, 2021) ;
Ukraine Over the Edge : Russia, the West, and the “New Cold War” (McFarland, 2018) ;
The Caucasus Emirate Mujahedin : Global Jihadism in Russia's North Caucasus and Beyond (McFarland, 2014),
Russia's Islamic Threat (Yale University Press, 2007) et
Russia's Revolution From Above : Reform, Transition and Revolution in the Fall of the Soviet Communist Regime, 1985-2000 (Transaction, 2002).