La Riviera de Trump va-t-il faire le bonheur ou le malheur de Gaza ?
Depuis que le président américain Donald Trump a annoncé son projet de transformer la bande de Gaza en « Riviera du Moyen-Orient », cette idée a suscité une grande attention. Certains y voient une occasion de reconstruire le territoire dévasté, tandis que d’autres la considèrent comme irréaliste et potentiellement déstabilisatrice pour la région.
Après l’échec de la proposition de Trump de relocaliser les Palestiniens en Égypte ou en Jordanie, un nouveau concept est apparu à une échelle limitée : relocaliser temporairement les Palestiniens dans le désert du Néguev, en Israël. Cette alternative n’a pas été proposée par Trump lui-même, mais par les pays arabes qui ont refusé d’accueillir les réfugiés palestiniens. La question cruciale reste la suivante : cette solution offre-t-elle une option pratique ou va-t-elle compliquer davantage la situation ?
M. Trump a souligné la situation privilégiée de Gaza sur la mer Méditerranée. Lors d’une conférence de presse conjointe avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, M. Trump a déclaré : « Nous avons l’occasion de faire quelque chose de phénoménal, [de faire de Gaza] la Riviera du Moyen-Orient ».
La position côtière de Gaza offre non seulement une valeur esthétique, mais aussi un potentiel économique considérable. Avec une reconstruction adéquate, elle pourrait se transformer en un centre touristique international attirant les investisseurs et les visiteurs du monde entier. Jared Kushner, le gendre de Trump, a précédemment décrit le front de mer de Gaza comme « très précieux », notant son importance immobilière si le développement se concentre sur la création de moyens de subsistance durables.
Comment cette valeur théorique pourrait-elle se transformer en réalité concrète ? La proposition de M. Trump vise principalement à faire de la bande côtière de Gaza un centre commercial et touristique dynamique, notamment grâce à la construction d’un port maritime international. Un tel port relierait Gaza aux pays méditerranéens et revitaliserait le commerce et l’investissement, créant des milliers d’emplois pour les jeunes Palestiniens et réduisant le taux de chômage actuellement excessif de 50 %.
Avec un soutien global aux infrastructures, cette initiative pourrait transformer fondamentalement l’économie de Gaza en stimulant les secteurs de la logistique, du tourisme et de la fabrication, en particulier avec les entreprises des pays arabes et du Golfe désireuses de financer les efforts de reconstruction.
Le développement côtier pourrait compléter la reconstruction intérieure grâce au financement des pays arabes et du Golfe, en créant des hôpitaux, des écoles et des universités de classe mondiale, redonnant ainsi à Gaza sa prospérité d’antan.
Cette vision offre aux Palestiniens l’espoir d’un avenir prospère, potentiellement supérieur à la situation de divers pays arabes confrontés à des crises économiques chroniques sans possibilités de soutien comparables, tels que le Yémen, le Liban ou le Soudan. Les statistiques actuelles indiquent que 90 % de la population de Gaza dépend de l’aide humanitaire.
La prospérité économique pourrait rétablir la stabilité sociale et réduire les tensions, bien que cela nécessite des garanties internationales contre les activités terroristes, la politisation des projets de développement et le détournement de l’aide - des problèmes qui ont constamment entravé les efforts précédents. Le succès exige un partenariat palestino-arabe-international axé sur le développement durable au-delà des solutions temporaires.
Le défi va au-delà du potentiel et s’étend à la réalité actuelle. Un rapport des Nations unies datant de septembre 2024 indique qu’environ 70 % des bâtiments de Gaza ont été endommagés ou détruits au cours des 15 mois de conflit. Les coûts de reconstruction sont estimés à 53 milliards de dollars, dont 20 milliards au cours des trois premières années. Ce chiffre reflète la profonde crise humanitaire et économique de Gaza.
Selon les estimations des Nations unies, Gaza pourrait avoir besoin de trente ans pour retrouver sa situation d’avant le 7 octobre 2023, avant l’attaque terroriste du Hamas, soutenue par l’Iran, qui a déclenché la riposte militaire israélienne après le massacre de civils juifs non armés et de résidents arabes en Israël.
Les pays arabes, en particulier l’Égypte et la Jordanie, ont réagi très négativement à la proposition de M. Trump, rejetant fermement toute réinstallation de Palestiniens sur leurs territoires. Ils estiment que cette approche compliquerait la résolution de la question palestinienne et créerait une nouvelle réalité régionale indésirable. Les précédents historiques suggèrent que de tels mouvements de population pourraient déstabiliser les conditions économiques, sociales et sécuritaires des pays d’accueil. Les Palestiniens eux-mêmes ont condamné cette idée.
La « Riviera du Moyen-Orient » évoquée par Trump reflète son point de vue de « faiseur d’accords ». Cependant, les Palestiniens et les Arabes ont unanimement rejeté cette vision, la qualifiant de « nettoyage ethnique » et d’illégale au regard des cadres juridiques internationaux.
Malgré les obstacles politiques, sécuritaires et humanitaires, le projet de « Riviera de Gaza » est très prometteur sur le plan économique. Pour réussir, il faut une coopération régionale et internationale étendue, ainsi que des garanties fermes pour les droits des Palestiniens. Israël doit évaluer cette proposition sous l’angle non seulement économique, mais aussi humanitaire et politique.
La question fondamentale demeure : ce projet pourrait-il instaurer une paix véritable et une stabilité régionale durable ?