Le FN, un parti enfin normal !
Comment on gagne les lettres de noblesse de la normalisation républicaine ?
En se mettant au diapason des autres !

En quête de dédiabolisation les chevaliers blancs frontistes réussissent au-delà de toutes leurs espérances.
La Justice s'intéresse de près à leurs petits et grands arrangements avec la déontologie, bref ce que l'on nomme chez eux les magouilles quand cela concerne les autres, c'est l'accomplissement final, le point d'orgue, le moment paroxystique d'une longue route.
Les services de leurs assistants parlementaires au parlement européen seraient détournés à des fins illicites.
Cela ne dissuadera certes pas les grandes gueules frontistes de déverser leurs hennissements de haine pour accompagner le tord-boyau ingurgité de longue date par les beaufs dont les vapeurs alcooliques les accompagnent dans leurs dérapages calculés.
La vertu est une qualité rare mais s'en draper n'exige pas encore qu'on la partage.
Si l'on veut trouver une continuité, une constante dans la vie politique des démocraties bourgeoises, c'est bien celle-là : "faites ce que je dis mais ne suivez surtout pas mon exemple".
On se souvient assez de l'ineffable Cahuzac et de ses protestations d'innocence droit dans les yeux : on a encore eu confirmation que les plus fieffés coquins peuvent jouer la franchise avec aplomb et les comparses font semblant de les croire jusqu'à ce qu'on leur mette le nez dans leurs déjections…
On remarquera aussi que les époux Balkany ne se donnent même pas la peine de la dissimulation : pris la main dans le sac du péché d'omission, ils laissent l'opprobre glisser sur leur carapace comme l'eau sur les plumes du canard et, forts de leurs flétrissures, ils cultivent leur popularité.
Ou encore que Sarkozy préfère passer pour un imbécile qui ne sait rien de ce qu'il aurait dû savoir sur le financement de sa campagne plutôt que d'admettre sa connivence dans des comptes truqués... À imbécile, imbécile et demi, à qui fera-t-il encore croire qu'incapable de tenir les comptes domestiques, il pourrait encore ouverner les comptes de la nation ?
En tant que parti, le FN rejoint enfin le peloton des pourris qu'il fustige.
Avec tout de même cet avantage déterminant sur ses compagnons d'infortune qu'il peut compter sur le fanatisme d'un électorat dont la fonction neuronale est subordonnée à l'activité tripale et qui se dispense de réflexion pour associer ses aboiements aux vociférations de ses chefs.
En conséquence, le FN trouvera sûrement dans le mauvais parfum de ces enquêtes matière à alimenter un peu la martyrologie de pacotille qui sert de fil conducteur à ses avanies caliméresques.
Un peu mais point trop cependant, car on remarquera que les perquisitions engagées se limitent jusqu'à présent au domicile du patriarche - providentiellement débarqué il y a quelques mois - et négligent, semble-t-il et sauf erreur ou omission, le siège du parti comme si l'on voulait éviter le soupçon d'acharnement politique : je te tiens, tu me tiens par la barbichette… adopte profil bas et tout se passera bien…
JM Le Pen, relégué naguère comme un malpropre au rayon des utilités, retrouve maintenant un vrai statut de nécessité : il devient le paratonnerre appelé à focaliser les foudres justicières.
Aussi bien Hollande que l'éventuel candidat de la Droite ont d'ailleurs trop besoin de la voie royale vers la fonction suprême que représenterait pour eux une confrontation avec Marine Le Pen au second tour des Présidentielles.
A tous ces subtils estompements avec la norme et avec la morale républicaine, à toutes ces indélicatesses qui se multiplient et qui ne récoltent plus que très rarement des coups de sifflet coléreux et des huées résignées s'ajoute ce signe majeur de déliquescence de la cinquième république : le renoncement des citoyens à s'impliquer davantage dans la vie politique ; le parti des abstentionnistes ou celui de ceux qui ne jugent même plus utile une inscription sur les listes électorales vont encore pouvoir étoffer leurs rangs.
Au laminoir de l'indifférence, entre le cylindre de ceux qui savent et que ça indiffère et celui de ceux qui ne veulent pas voir ce qui est à voir, survit cette espèce de plus en plus mince de ceux qui continuent à croire à la politique au sens noble du terme et qui font un peu figure de Candide cultivant l'idéal de Pangloss dans son jardin de Constantinople.
La fin d'une époque ?