lundi 3 février - par Giuseppe di Bella di Santa Sofia

Le martyre d’une princesse : Mafalda de Savoie, victime oubliée de la barbarie nazie

La princesse Mafalda de Savoie, figure tragique de la Seconde Guerre mondiale, a connu un destin funeste. Fille du roi Victor-Emmanuel III d'Italie, son mariage avec un prince allemand proche du régime nazi l'a plongée au cœur des enjeux de son époque. Déportée et décédée dans des conditions atroces au camp de concentration de Buchenwald, son histoire témoigne de la barbarie nazie.

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Une enfance heureuse au sein de la famille royale

Mafalda de Savoie voit le jour le 19 novembre 1902 au Quirinal, le palais royal de Rome. Deuxième fille du roi Victor-Emmanuel III d'Italie et de son épouse la reine Hélène de Monténégro, elle grandit dans un environnement privilégié, entourée de ses quatre frères et sœurs : Yolande, Umberto, Giovanna et Maria.

 

Mafalda di Savoia, la tragica fine della principessa che non tradì | RDD

 

Dès son plus jeune âge, Mafalda se distingue par son intelligence vive, sa curiosité insatiable et sa forte personnalité. Elle reçoit une éducation soignée, alliant l'apprentissage des langues, de la musique et des arts à une solide formation humaniste. On la décrit comme une jeune fille charmante, dotée d'un grand cœur et d'une profonde compassion pour les autres.

 

Mafalda di Savoia principessa deportata a Buchenwald, esempio d'amor patrio  - itLatina

 

Son enfance et son adolescence se déroulent dans l'insouciance des années 1910, entre les palais royaux de Rome, de Florence et les villas familiales des lacs italiens. Mais l'Europe bascule bientôt dans la Première Guerre mondiale, et la jeune princesse découvre les réalités tragiques du conflit. Cet épisode marque profondément sa sensibilité et la conforte dans ses valeurs humanistes.

 

Un mariage avec un prince allemand 

Le 23 septembre 1925, Mafalda épouse Philippe de Hesse-Cassel, prince allemand descendant de plusieurs familles royales européennes. La cérémonie, célébrée en grande pompe à Racconigi, près de Turin, semble sceller l'union de deux mondes.

 

Mafalda di Savoia, la spiga di grano e il suo iconico diadema - MyWhere

 

Pourtant, derrière la façade glamour de ce mariage princier se cache une réalité plus complexe. Philippe, séduit par l'idéologie nazie, adhère au parti dès 1930 et devient un proche d'Hitler. Il occupe des fonctions importantes au sein du régime, notamment comme gouverneur de Hesse-Nassau.

 

 

Bien que profondément catholique et attachée aux valeurs démocratiques, la princesse Mafalda joue un rôle important dans le rapprochement entre l'Italie fasciste et l'Allemagne nazie. Néanmoins, elle s'inquiète des persécutions contre les Juifs et les opposants politiques, et désapprouve personnellement les folles ambitions expansionnistes d'Adof Hitler.

D'ailleurs, le Führer la considère comme "la charogne la plus noire de la maison royale italienne". Quant à Joseph Goebbels, le ministre de la Propagande, il l'appelle "la plus grosse garce de toute la maison royale italienne".

Mafalda et Philippe auront quatre enfants : Maurice, Henri, Othon et Élisabeth. La princesse s'efforce de préserver une vie familiale stable et équilibrée pour ses enfants, en les maintenant à distance avec le régime nazi. 

 

Une princesse prise au piège de la politique

En 1922, Benito Mussolini prend le pouvoir en Italie et instaure un régime fasciste. Le roi Victor-Emmanuel III, père de Mafalda, choisit de composer avec le dictateur. L'Italie se rapproche progressivement de l'Allemagne nazie, culminant avec la signature, le 22 mai 1939, du Pacte d'acier.

 

Briefmarke: Adolf Hitler (1889-1945), Benito Mussolini (1883-1945)  (Deutschland (Deutsches Reich)(Deutsch-italienische Waffenbrüderschaft)  Mi:DR 763,Sn:DE B189,Yt:DR 687,Sg:DR 751,AFA:DR 758,Un:DR 687 📮

 

Le 10 juin 1940, l'Italie entre en guerre aux côtés de l'Allemagne. Mafalda se retrouve alors dans une situation inextricable : son mari est un haut dignitaire nazi, son père est le roi d'un pays allié à l'Allemagne, et elle-même désormais opposée au régime hitlérien.

Déchirée entre sa loyauté familiale et ses convictions personnelles, elle choisit de rester en Italie auprès de son père et de son peuple. Elle continue de s'engager dans des actions humanitaires, aidant les blessés, les réfugiés et les persécutés. Son courage et son dévouement lui valent l'admiration et le respect de la population italienne.

 

L'arrestation et la déportation

En juillet 1943, les Alliés débarquent en Sicile. Le régime fasciste s'effondre et Mussolini est destitué. Le roi Victor-Emmanuel III signe un armistice avec les Alliés le 8 septembre 1943.

 

Furieux de la "trahison" italienne, Hitler ordonne l'arrestation de la famille royale. Mafalda, alors en voyage en Bulgarie, est convoquée d'urgence à Rome sous un faux prétexte. Elle se rend au rendez-vous sans se douter du piège qui lui est tendu.

Le 22 septembre 1943, à son arrivée à l'ambassade d'Allemagne à Rome, Mafalda est arrêtée par la Gestapo. Elle est longuement interrogée avec brutalité et déportée en Allemagne. Ses enfants sont recueillis et protégés par le Vatican, pays neutre. 

 

Buchenwald : l'enfer concentrationnaire

Après un bref séjour dans une prison de Munich, Mafalda est transférée au camp de concentration de Buchenwald en octobre 1943. Incarcérée sous le faux nom de "Frau von Weber" pour dissimuler sa véritable identité, elle est assignée au bloc n° 17, réservé aux prisonniers politiques et aux personnalités importantes.

 

Buchenwald - Buchenwald Boys

 

Malgré son statut de princesse et fille d'un souverain régnant, Mafalda subit les mêmes traitements inhumains que les autres détenus. Froid, faim, maladies, travail forcé, humiliations… Le quotidien du camp est une épreuve physique et morale constante.

Affaiblie par les privations et les mauvais traitements, Mafalda contracte le typhus au début de l'année 1944. Son état de santé se dégrade rapidement. Elle souffre de malnutrition, de dysenterie et de fièvre persistante. Isolée et privée de soins adéquats, elle est abandonnée à son sort par les autorités du camp.

 

Un destin brisé par les bombes alliées

Le 24 août 1944, un bombardement allié vise l'usine d'armement attenante au camp de Buchenwald. Plusieurs bombes tombent accidentellement sur le camp, causant plus de 400 victimes parmi les détenus.

Mafalda est grièvement blessée lors de ce raid aérien. Atteinte à un bras, elle est transportée à l'infirmerie du camp où les médecins, débordés par l'afflux de blessés, procèdent à l'amputation de son bras gauche. Malgré cette intervention, son état s'aggrave. Elle succombe à ses blessures trois jours plus tard, le 27 août 1944, à l'âge de 41 ans.

 

Dettaglio francobollo - catalogo completo dei francobolli italiani

 

Sa dépouille est inhumée dans le cimetière familial du château de Hesse, en Allemagne. Elle est commémorée dans la crypte royale de la basilique de Superga, près de Turin, par un mémorial-cénotaphe.
 



29 réactions


  • Jean J. MOUROT Jean J. MOUROT 3 février 10:31

    Comme quoi, tout n’est pas aussi simple qu’on le dit parfois...

    L’existence ne conditionne pas toujours l’essence !


  • Gégène Gégène 3 février 10:47

    J’ai l’impression d’avoir raté un épisode :

    je suis passé de « actions humanitaires » à « maltraitée par la Gestapo » . . .


    • @Gégène

      Qu’est-ce qui provoque cette impression chez vous ? Je me suis peut être mal exprimé. N’hésitez pas à me signaler le passage qui vous pose problème ;


    • Lonzine 3 février 11:04

      @Gégène
      il faut juste se rendre à la fin : elle a été tuée par des bombes « alliées »


    • @Lonzine

      Oui, elle est décédée suite à un bombardement allié qui a fait plus de 400 victimes dans le camp de concentration nazi de Buchenwald, situé en Allemagne. Son statut de princesse royale et fille d’un chef d’Etat ne lui ont pas valu un meilleur sort que celui les autres déportés. 


    • Gégène Gégène 3 février 11:13

      @Giuseppe di Bella di Santa Sofia

      Je l’ai explicité : on passe d’actions humanitaires à « rage folle » des nazis.
      C’est un peu court me semble-t-il . . .


    • Gégène Gégène 3 février 11:15

      En d’autres termes, les nazis ne se braquaient pas sur les « simples humanitaires » à ma connaissance, donc il y a eu autre chose !


    • Lonzine 3 février 11:19

      @Gégène
      les bombes ne savent pas reconnaitre leur victime.


    • Lonzine 3 février 11:22

      @Lonzine
      post pour Giuseppe


    • @Gégène

      Vous n’avez peut-être pas lu ce passage : « En juillet 1943, les Alliés débarquent en Sicile. Le régime fasciste s’effondre et Mussolini est destitué. Le roi Victor-Emmanuel III signe un armistice avec les Alliés le 8 septembre 1943. »

      C’est ce qui explique la rage folle d’Adolf Hitler. Et la princesse Mafalda était la fille du roi Victor-Emmanuel III, le responsable de la chute de Mussolini. Il s’est donc vengé sur elle, en l’envoyant dans le camp de concentration de Buchenwald. 


    • @Lonzine

      Oui, vous avez raison. D’alleurs, les Aliiés ont souveznt évité les bombardements près des camps de concentration et d’extermination pour cette raison. Cela leur a été souvent reproché. 


    • Gégène Gégène 3 février 13:04

      @Giuseppe di Bella di Santa Sofia

      Sur le Wikipedia italien, on trouve une réponse logique :

      « Arrêté après l’armistice du 8 septembre 1943, car Hitler le jugeait coupable d’avoir participé, avec son beau-père Vittorio Emanuele III, à la conspiration qui conduisit à la destitution de Mussolini, il fut interné au camp de Flossenburg . La princesse Mafalda fut déportée le 23 septembre »

      Le passage ci-avant concerne son mari, Philippe de Hesse.
      Il semble bien que son père et son mari aient « trahi » Mussolini (du point de vue nazi), ce qui explique bien le sort qui lui fut réservé . . .


    • @Gégène

      Oui, c’est exact. Son mari a surtout été arrêté car c’était l’époux de la princesse Mafalda, fille du roi Victor-Emmanuel III, qui avait porté Mussulini au pouvoir en 1922 et destitué en 1943. Hitler considérait qu’il s’agissait d’une trahison de la part du monarque italien, ce qui est factuellement vrai. 

      Mais sa fille Mafalda, bien qu’ayant des sympathies fascistes et nazies avant la Seconde Guerre mondiale, n’avait aucune responsabilité dans la décision de son père. D’ailleurs, Il n’avait pas le choix de signer l’armistice car les Alliés étaient déjà en Italie et gagnaient du terrain. C’est à partr de ce moment que les forces militaires italiennes, fidèles au roi, ont combattu aux côtés des Alliés. D’autres militaires, fidèles à Mussoluni, l’ont rejoint au sein de la République sociale italienne (RSI), dans la partie nord de l’Italie. La RSI était en réalité un Etat fantoche du IIIe Reich. 


    • Correction  : Bien entendu, il faut lire Mussolini et non pas « Mussulini » ou « Mussoluni »... 


    • Jean Keim Jean Keim 4 février 06:59

      @Lonzine

      Les bombes ne tombent pas uniquement sur leurs cibles.


    • Wladimir 9 février 16:48

      @Giuseppe di Bella di Santa Sofia
      ’Son statut de princesse royale et fille d’un chef d’Etat ne lui ont pas valu un meilleur sort que celui les autres déportés. ’
      Non , il y a les victimes uniquement dues à la barbarie nazie ... dont de nombreux déportés .... mais elle , elle meurt suite à ses blessures suite à un bombardement des alliés ... donc elle n’a pas le même sort que les autres ... 
      Les uns meurent à cause des nazis ... pas elle ... certes il y en a eu d’autres tués par les bombardements ... mais elle ne peut pas être assimilée à une véritable victime des atrocités nazies ... 
      Il ne faut pas accuser les nazis de sa mort ... ils sont coupables de l’avoir déportée ; de l’avoir maltraitée ... mais les autres ont bombardé et grièvement blessé d’où sa mort ....
      Autrement dit , la culpabilité de sa mort est partagée ...
      Quelle ironie , tuée par ceux de son vrai camp ...
      Et n’oublions pas que la barbarie sous des masques divers , était présente dans les 2 camps ... chez les alliés , le plus abominable fut les bombes atomiques ...


    • Wladimir 9 février 17:56

      @wladimir

      ’tuée par ceux de son vrai camp ...’

      Je corrige ...

      Elle était humaniste et a fait de l’humanitaire .... Son vrai camp est celui des humains et pas celui de ceux qui portent des armes ...

      Sa mort est une accusation contre les 2 camps belligérants ...


  • juluch juluch 3 février 12:50

    J ’ignorais tout de cette dame....merci pour le partage.


    • @juluch

      Bonjour. Merci pour votre commentaire. Ce fut la seule personnalité royale, fille d’un souverain régnant, déportée dans un camp de concentration nazi. Son rang ne l’a pas mise à l’abri de la barbarie nazi, bien au contraire.

      Son histoire tragique est méconnue en France. J’aime beaucoup cette personnalité italienne.


    • Le Gueux Le Gueux 9 février 11:57

      @Giuseppe di Bella di Santa Sofia
      Les princesses, les rois et princes sont comme les autres humains, ils n’échappent pas à leur destin.
      Charles 1er d’Angleterre, Louis XVI, Franz-Ferdinand d’Autriche, Famille Romanov
      Ils meurent tristement comme tous les autres humains
      La vita è bella, ma non per tutti !
      Bien d’autres, par leurs méfaits, auraient mérité pareille fin.
      Signé ;Fils d’autrichien, officier de la K.u.K, chassé de sa ville,Triest. !


  • Seth 3 février 19:20

    Devinez à qui me fait penser « Mafalda » ? smiley


  • Seth 3 février 19:42

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Mafalda

    Parce que sinon perso, le martyr de la princesse ne me fait ni chaud ni froid, je l’avoue aisément.


    • @Seth

      Oui, j’aImais beaucoup Mafalda quand j’étais gamin. Je pensais qu’elle était italienne et vous ne pouvez pas imaginer ma déception lorsque j’ai appris qu’elle était en réalité argentine...

      Le destin tragique de la princesse Malada me touche beaucoup, comme c’est le cas de nombreuses personnes qui ont des origines italiennes. Elle reste un symbole de la barbarie nazie qui pouvait s’abattre sur les puissants et les faibles, avec la même cruauté. 


    • La Bête du Gévaudan 3 février 21:24

      @Seth

      Parce que sinon perso, le martyr de la princesse ne me fait ni chaud ni froid, je l’avoue aisément.

      Alors ne faites plus de leçons de morale humaniste (à la sauce marxiste) à l’avenir...

    • Seth 4 février 14:42

      @La Bête du Gévaudan

      Feriez mieux de vous préoccuper du martyr des pauvres et des SDF de nos jours que de celui des princesses !


    • La Bête du Gévaudan 5 février 04:16

      @Seth

      vous opérez une selekzion entre les êtres humains ? ... vous créez une nouvelle aristocratie au sang-bleu « les pauvres » qui a droit à votre compassion ?...

      Beaucoup de post-chrétiens ont transféré le Corps du Christ sur « le pauvre »... ils déifient, en quelques sortes, ces humains... ils font exactement ce qu’ils prétendent dénoncer... et l’inconscient religieux est parfois d’autant plus dangereux qu’il n’est pas traité par la sphère consciente. Je pense qu’une grande part de la violence marxiste provient du refoulement quasi freudien de l’angoisse religieuse.

      Déjà à la racine il y a cette rhétorique génocidaire au sein du marxisme... le goulag concentrationnaire, les charniers et les déportations de masse, ne sont pas un « malencontreux accident de parcours » du marxisme... ils sont consubstantiels non seulement de la théorie marxiste mais même de son éthique...


    • Seth 5 février 16:24

      @La Bête du Gévaudan

      Vous faites une fixette sur le marxisme mais dites moi : avez vous seulement lu le Capital pout en parler si doctement ?

      Parce qu’à vous lire à part Bolloré vous ne semblez pas vous intéresser à grand chose et vos (nombreux) écrits sont à pleurer de principes simplistissimes.


    • Le Gueux Le Gueux 9 février 12:14

      @Seth
      Le marxisme dont le capital est la bible est un théorie économique et politique fumeuse.
      Partout ou des illuminés du bocal s’en sont seulement inspiré pour ’gouverner’, des désastres humains par centaines de millions en ont été le résultat !
      Cette élucubration devrait être mis au même rang d’interdiction que le nazisme.
      Mêmes résultats.


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