Le moteur Macron a du plomb dans l’aile
On ne sait pas combien d’essence et quelle empreinte carbone « l’itinérance » du président de la République, Emmanuel Macron, ont marqué la semaine qui a précédé la célébration du 11 novembre, mais on est assuré que le carburant était plombé jusqu’à éclabousser le président lui-même. Le mécontentement des Français a jailli de toutes parts à chacune de ses étapes, et voilà qu’arrive la taxe sur les carburants : extraordinaire plombage du sans-plomb. Au milieu de ce tumulte, tellement mal maîtrisé par l’Élysée, apparaissait le « Peuple », la société des sans grade, celui-là même à l’origine du « populisme » tellement opposé au « progressisme » présidentiel.
Le président Macron aurait pu rappeler sa sentence : « les Français sont un peuple de Gaulois réfractaires au changement ». Que nenni, il était au contact des gens, de surcroît pour les écouter, disait-il. Dès lors deux remarques viennent à l’esprit : les gens, c’est quoi, des individus virtuels ou des femmes et des hommes de chair et de sang, de peur et de joie, d’espoirs et de déceptions. Ensuite écouter ce n’est pas entendre et ce n’est certainement pas comprendre. Or, il est de plus en plus manifeste qu’Emmanuel Macron, du haut de son orgueil plein de certitude, d’un narcissisme exacerbé, est incapable de comprendre les personnes qu’il a en face de lui ; d’ailleurs leur reconnaît-il la qualité de « personne ».
Deux psychologues, Lieury et Fenouillet, avaient classé les élèves en quatre catégories. Hormis les « nuls » et les dilettantes, ils décrivaient les bosseurs qui vont au fond de la question et qui cherchent à comprendre, et les bons élèves qui ont compris le système et qui apprennent pour réussir les examens et les concours sans forcément chercher à comprendre les questions et moins encore les articulations qu’elles ont entre elles ; d’autres appelleraient cette dernière catégorie celle des « bêtes à concours », leur intelligence et celle du modèle et de la répétition du modèle, ce ne sont ni des inventeurs ni même des créatifs. Ils récitent Platon et Virgile dans la langue antique mais n’en font rien au service de leurs concitoyens, ils brillent dans les salons mais sont incapables de comprendre la croissance des carottes ou des porcs. Ces bons élèves constituent l’humus les technocrates froids et sans beaucoup d’humanité. C’est ceux‑là que Robert Musil, déjà dans les années 1930, brocardait dans son roman « l’homme sans qualité » lorsqu’il parlait des mathématiciens. Macron c’est un modèle économique, une armada de formules mathématiques et un dictionnaire où n’existe aucun lien entre les choses, une pensée d’où est exclue toute possibilité de lien entre les choses et surtout de lien entre les choses et les personnes. Aussi, non seulement il ne peut pas comprendre que ses décisions impactent la vie intime des gens d’autant qu’il ne pense pas « les gens ». Macon c’est une pensée non humaine servie par une armada de députés identiques à lui ou stupides mais en tout cas tellement ravis d’être là qu’ils se sont mis dans une soumission intellectuelle totale, jusqu’à l’hébétude voire l'encéphalogramme « social » plat.
La réaction du gouvernement à la révolte des « gilets jaunes » du 17 novembre, et les propos des députés macroniens qui ont suivi pour défendre « le patron » montrent à quel point ils sont non seulement incapables d’entendre les gens, les personnes, parce qu’ils appartiennent à une autre humanité. Ce que nous vivons depuis le mois de mai 2017 c’est l’installation petite à petit, sournoisement, d’un Nouveau Monde qui ressemble terriblement au monde d’avant la révolution de 1789 et à celui décrit par un Aldous Huxley dans son roman « le meilleur des mondes ».