lundi 23 janvier 2006 - par Dominique Dutilloy

Le premier policier de France face à la presse : les voeux en question

En France, il existe une tradition bien ancrée dans les mœurs républicaines : chaque année, la presse reçoit les vœux du chef de l’Etat, du premier ministre et des membres du gouvernement !

« Permettez-moi d’abord d’adresser à chacun d’entre vous, ainsi qu’à vos familles et aux organes de presse que vous représentez, des vœux de bonne année 2006 » : c’est en ces termes qu’un ministre célèbre s’adressait à la presse, venue en masse assister à ses traditionnels vœux.

C’est dire si, vu la popularité de ce membre du gouvernement de Dominique de Villepin, l’évènement était d’importance ! Le choix du lieu, la salle Gaveau, était hautement stratégique, puisqu’il est voisin des deux lieux importants : le siège national de l’Union pour un mouvement populaire (U.M.P.) et le ministère de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire...

Quoi qu’il en soit, les trois étages de ce théâtre affichaient complet ! Le Tout-Paris des médias côtoyait les journalistes de la presse écrite pour cette générale d’un genre traditionnel.

En ce 12 janvier 2006, un seul acteur était sur la grande scène de la salle Gaveau : Nicolas Sarkozy, ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire et président de l’U.M.P. Pour son grand oral de « Nouvelle année 2006 », le premier policier de France était attendu au tournant des chiffres de la délinquance, sur la révolte des banlieues, sur l’augmentation de la précarité et du chômage, sur la morosité ambiante... Aucune trêve des confiseurs ne lui serait accordée ! Pendant près de deux heures, il allait devoir faire face à une presse attentive à ses moindres paroles, à ses moindres gestes !

Si tout le monde avait en tête les révoltes insurrectionnelles de novembre 2005, d’autres ne pouvaient s’empêcher de s’interroger sur les véritables ambitions affichées du Président de l’U.M.P. pour les élections présidentielles de 2007, ou sur le retour annoncé de Cécilia Sarkozy.

Pour Nicolas Sarkozy : « L’Année écoulée a constitué une année difficile pour la France [...] Le non au référendum a confirmé la profondeur de l’exaspération, des inquiétudes et du désarroi des Français ». Mais il omettait d’expliquer au passage que ce « non au référendum sur le projet de constitution européenne » était surtout dicté par la crainte de voir surgir une Europe ultra-libérale, évoluant sous la directive Bockestein. L’augmentation des prix à la consommation liée, pour beaucoup, à l’adoption de l’euro, comme monnaie unique par 12 des 25 Etats membres de l’Union européenne, l’augmentation du chômage et de la précarité, le rejet total d’une mondialisation libérale, le refus de voir la Turquie entrer dans l’Union européenne, allaient constituer autant de divorces sans consentement mutuel des Français face à cette Europe jugée « trop peu attentive à leurs aspirations nationales ». De là à nous demander s’il n’aurait pas fallu, dès le début, créer une Europe sociale, en harmonisant les lois sociales existantes ainsi que les salaires mensuels au niveau le plus avantageux, de manière à éviter que les trop nombreuses délocalisations d’entreprises à l’intérieur même de certains Etats de l’Union européenne ne présentent, comme c’est le cas actuellement, que des avantages indéniables ? De là à nous demander s’il n’aurait pas été également nécessaire de bloquer durablement tous les prix à la consommation, lors du passage à l’euro ? Il n’y a que deux pas que nous aimerions franchir allègrement...

« Les violences dans les banlieues ont pour leur part souligné l’étendue de l’échec de nos politiques publiques depuis trente ans », rappelait Nicolas Sarkozy, histoire de donner sa version des causes de ces révoltes insurrectionnelles de novembre 2005.

Malheureusement, nos responsables politiques oublient trop souvent qu’ils ont laissé trop longtemps ces cités livrées à elles-mêmes ! L’autorité est bafouée : les parents, l’école, les policiers se retrouvent face à une nouvelle forme de zone de « non droit »... N’y a-t-il pas eu, depuis trente ans, une politique généralisée d’abandon trop souvent liée à une politique de ghettoïsation ou de discrimination ? On se demande si des juges chargés de réprimer des infractions et des délits ne sont pas trop laxistes face à diverses bandes issues de banlieues défavorisées ? Pourtant, certains de ces magistrats, qui préfèrent instruire à charge, n’hésitent pas à embastiller à tort et à travers. C’est à croire que la leçon n’a pas suffi : à Outreau, treize personnes ont été incarcérées alors qu’elles sont totalement innocentes des faits qui leur étaient reprochés. Ne se trouve-t-on pas face à une justice à deux vitesses ?

« Aujourd’hui, les Français aspirent à un nouvel espoir... », scandait haut et fort Nicolas Sarkozy. Ce nouvel espoir, existe-il vraiment ? Pour que notre démocratie soit vivante et qu’elle le reste, n’est-il pas trop tard pour engranger, voire provoquer, ces débats politiques nombreux, approfondis, sans tabous, ardemment désirés par le ministre de l’Intérieur ? Cela aurait dû être fait depuis plus de trente ans...

Malheureusement, depuis 1981, nos élites politiques, qui n’ont eu de cesse d’inventer divers plans de rigueur qui se succèdent à eux-mêmes, ont préféré laisser nos pays s’enfoncer dans une crise économique majeure ! Face à des décisions très lourdes de conséquences, comme la décentralisation non maîtrisée de nos structures, comme la création d’impôts nouveaux, comme certaines privatisations d’entreprises publique, aucune concertation, aucun débat de fond ne sont envisagés : c’est à se demander si cette démocratie vivante, active et participative existe vraiment ?

Depuis 1981, hélas, il ne se passe pas un jour sans qu’on apprenne la mise en place de divers plans sociaux, les trop nombreuses délocalisations d’entreprises, les chiffres de l’augmentation du chômage, la perte de nos marchés à cause d’une mauvaise gestion de notre commerce extérieur... Des régions entières et d’importants bassins d’emplois se retrouvent, du jour au lendemain, ruinés et durablement sinistrés, parce que figurant dans le peloton de tête du plus fort taux de chômage, elles sont les malheureuses victimes d’une nouvelle race de patrons, forcenés du Cac40, « les bras cassés » ! Pendant ce temps, nos différents gouvernements essaient, et c’est louable, d’endiguer cette crise en créant de nouveaux plans destinés à financer l’installation de sociétés dans des régions, à exonérer de charges sociales toute nouvelle création massive d’activités ! C’est à se demander si nos élites politiques ne se retrouvent pas désarmées face à ces forcenés du Cac40 ? Ne faudrait-il pas taxer les entreprises qui délocalisent leurs activités vers l’étranger ? Ne faudrait-il pas les inviter à rembourser toutes les aides qu’elles auraient perçues de l’Etat ? Tant de pistes à explorer, qui mériteraient qu’on s’y arrête !!!

Dans notre prochain article, nous ne manquerons pas de vous dévoiler les mesures de Nicolas Sarkozy pour éradiquer les violences, la délinquance, les crimes et délits sur le territoire national.




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